le Lundi 10 novembre 2025

Le Forum des membres du RACCORD a eu lieu du 20 au 23 mars, à Ottawa, en marge du Festival international du film.

Marie-Claire Marcotte a reçu le Prix L’œil du RACCORD. Cette récompense vise à souligner la créativité et l’audace artistique d’un ou une cinéaste ainsi que de son apport aux arts médiatiques dans la francophonie canadienne.

Le jury, composé de Danielle Sturk (région Ouest et Nord), Nadine Valcin (région Ontario) et de Phil Comeau (région Acadie), a décidé d’honorer la Fransaskoise pour son adaptation de sa pièce de théâtre à l’écran : Rêver en néon, son premier long métrage en tant que réalisatrice.

Celui-ci raconte l’histoire de Billie (Maélya Boyd), 8 ans, qui vit avec son père (Corey Loranger) et sa grand-mère (Geneviève Langlois). Convaincue que sa mère est une ballerine célèbre, Billie ne recule devant rien pour la retrouver.

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Tourné à Sudbury

Les membres du jury ont tenu à souligner «l’ingéniosité de son réalisme magique à travers l’imaginaire d’un enfant», sa direction d’acteurs et d’actrices et sa «magnifique captation de l’hiver, mettant en valeur l’identité nordique de notre pays».

Le film a notamment été tourné dans la région de Sudbury, en Ontario.

Marie-Claire Marcotte est la première réalisatrice d’un long métrage de fiction français en Ontario, rapporte le RACCORD. Originaire de la Saskatchewan, l’artiste, également scénariste, productrice et actrice, est désormais établie à Toronto.

Ses premiers courts métrages lui ont notamment valu une invitation au Festival de Cannes dans le cadre de la sélection Talents tout court de Téléfilm Canada. Marie-Claire Marcotte a aussi été récompensée pour son travail de scénariste aux Los Angeles Film Awards et à l’International Academy of Web Television.

Ses pièces de théâtre Flush et Peau, publiées aux Éditions L’Interligne, ont aussi été primées au Canada et en France.

À noter que Rêver en néon était présenté en sélection officielle au Festival international du film d’Ottawa.

À l’occasion de ses 20 ans, le RACCORD revient sur ses défis et ses réalisations dans un magazine à paraitre prochainement. 

Photo : Courtoisie RACCORD

Un nouveau magazine

Le RACCORD, qui fête ses 20 ans, a aussi profité du Forum pour présenter un premier numéro du magazine RACCORD Image, qui présente, entre autres, plusieurs données sur le secteur de l’audiovisuel en situation minoritaire et revient sur l’histoire de l’organisme et son héritage.

Le statuquo s’est maintenu en Colombie-Britannique, où David Eby (Nouveau Parti démocratique) a été réélu, en Saskatchewan, avec la réélection de Scott Moe (Parti saskatchewanais) et en Nouvelle-Écosse, où Tim Houston (Parti progressiste-conservateur) a remporté un nouveau mandat.

De son côté, le Nouveau-Brunswick connait un revirement, passant du Parti progressiste-conservateur de Blaine Higgs – critiqué pour ses positions vis-à-vis de la francophonie – à Susan Holt (Parti libéral du Nouveau-Brunswick).

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De l’inertie…

Dans certaines de ces provinces, les enjeux francophones n’avancent qu’à très petits pas.

La ministre responsable des Affaires francophones de la Saskatchewan, Alana Ross. 

Photo : Courtoisie Gouvernement de la Saskatchewan

En Saskatchewan, la ministre responsable des Affaires francophones, Alana Ross, ne parle pas le français couramment. Si, d’après le directeur général de la Direction des affaires francophones (DAF), Charles-Henri Warren, elle a suivi un parcours d’immersion en français, elle n’a «pas eu l’occasion» d’exercer la langue.

Les francophones ont une nouvelle école à Régina et deux autres s’en viennent à Saskatoon et à Prince Albert. Cependant, les projets francophones piétinent, notamment du côté de l’immigration.

Le Programme Candidats immigrant pour la Saskatchewan (PCIS) a récemment vu son nombre de places réduit par le fédéral. Conséquence : la province a dû le suspendre, ce qui a une répercussion sur l’immigration francophone, selon une source proche du dossier.

Charles-Henri Warren souligne toutefois une «augmentation des places en garderie francophone».

… à l’attente

En Nouvelle-Écosse, les projets francophones se font aussi attendre. «Je ne pense pas que [le gouvernement provincial, NDLR] en fassent davantage en soi et, d’une certaine manière, ils ont l’impression que ce qu’ils ont fait jusqu’à présent est “réussi”, observe Mario Levesque, professeur agrégé au département de politique et de relations internationales à l’Université Mount Allison, au Nouveau-Brunswick.

Pour le politologue Mario Levesque, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse est davantage préoccupé par la guerre tarifaire avec les États-Unis que par les affaires francophones. 

Photo : Courtoisie

Selon lui, le gouvernement néoécossais ne se préoccupe pas pour l’instant des enjeux francophones, car en réponse aux tarifs douaniers des États-Unis, la province se concentre davantage sur la relance de l’exploitation des ressources naturelles.

Le politologue ne remarque pas non plus d’évolution majeure en Nouvelle-Écosse concernant les services de réinstallation des immigrants francophones, sauf en cas d’investissement conséquent de la part du gouvernement fédéral.

«La position du gouvernement de [Tim] Houston sur ce sujet est, je pense, étroite. Donc le mieux que l’on peut espérer est de détourner les fonds déjà alloués ailleurs vers les francophones [s’il n’y a pas de nouveaux financements fédéraux]», affirme Mario Levesque.

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Continuité à l’Ouest…

Pour la présidente de la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (FFCB), Marie-Nicole Dubois, le premier ministre réélu, David Eby, a «vraiment été là» pour appliquer la politique de services en français, rendue publique en avril 2024.

Avant cette date, la province n’avait ni politique ni loi qui encadraient les services en français. Toutefois, cette politique provinciale n’a pas force de loi, il s’agit d’une directive, mais la FFCB y voit tout de même «un bon pas».

C’est le ministre Adrian Dix, qui en a la responsabilité, est «un de nos alliés», affirme Marie-Nicole Dubois. «Il saisit la sensibilité, la vulnérabilité que la francophonie peut avoir dans une province majoritairement anglophone.»

L’application de cette nouvelle politique «va bien», estime-t-elle. L’exemple le plus récent étant que les Britannocolombiens peuvent désormais passer leur permis de conduire en français s’ils le souhaitent.

En outre, une clinique de santé francophone a ouvert ses portes à Vancouver en novembre dernier.

Concernant l’éducation toutefois, les organismes francophones restent prudents, car le Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique (CSF) est actuellement devant les tribunaux pour obtenir des terrains et des écoles.

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Le ministre des Affaires francophones de la Colombie-Britannique, Adrian Dix.

Photo : Courtoisie

Marie-Nicole Dubois, de la Fédération des francophones de Colombie-Britannique (FFCB).

Photo : Courtoisie FFCB

…et rupture à l’Est

À l’autre bout du Canada, la présidente de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB), Nicole Arseneault-Sluyter, affirme que passer du gouvernement de Blaine Higgs à celui de Susan Holt débouche sur des «francophones vraiment contents», notamment de voir la première ministre s’adresser à eux «partout où elle passe». «On se sent beaucoup plus respectés.»

Toutefois, les francophones attendent la première ministre au tournant, notamment concernant la demande de la SANB d’avoir un sous-ministre chargé d’appuyer la première ministre dans l’application de la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick (LLONB).

Si Susan Holt a créé un Comité permanent des langues officielles à l’Assemblée législative, elle a indiqué à l’Acadie Nouvelle ne pas être certaine de pouvoir tenir sa promesse de mettre en place toutes les recommandations du rapport Maclaughlin/Finn, publié en 2021.  

Ce dernier suggère, par exemple, que les foyers de soins de la province devraient être assujettis à la LLONB, les obligeant ainsi à communiquer dans la langue de choix des résidents. Mais la première ministre n’est pas certaine d’en avoir les moyens.

La création d’un poste de sous-ministre est aussi l’une de recommandations qu’elle pourrait laisser tomber.

Le changement souligné par la SANB réside surtout dans la possibilité qu’ont les fonctionnaires de choisir leur langue de travail, un dossier sur lequel Susan Holt et ses ministres «travaillent fort», témoigne Nicole Arseneault-Sluyter.

Ce qui n’était pas le cas sous le premier ministre précédent, Blaine Higgs.

La première ministre du Nouveau-Brunswick, Susan Holt, est également responsable de la francophonie. 

Photo : Alexandre Boudreau – Acadie Nouvelle

Nicole Arseneau-Sluyter, présidente de la SANB. 

Photo : Courtoisie SANB

Les Ontariens sont aussi allés aux urnes à la fin février. Le Parti conservateur de Doug Ford a été réélu et Caroline Mulroney a été reconfirmée dans son rôle de ministre des Affaires francophones. La réélection est cependant trop récente pour évaluer s’il y a changement, ou non, dans la gestion de la francophonie dans cette province.

Avec des informations de Marianne Dépelteau

FRANCOPHONIE

Rachel Bendayan, la nouvelle ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, a annoncé mercredi un financement de 9,3 millions $ pour 12 nouveaux projets soutenant le développement économique et la croissance démographique des communautés francophones en situation minoritaire.

Financés par le Programme d’appui à l’immigration francophone, issu du Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028, les investissements visent à faciliter le recrutement, la sélection et l’accompagnement des candidats francophones vers la résidence permanente.

Certains projets se concentrent sur la collecte de données pour réduire les barrières à l’immigration francophone.

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Rachel Bendayan assure que son rôle précédent au ministère des Langues officielles lui a «permis de rencontrer énormément de leadeurs des communautés francophones hors Québec, ce qui a beaucoup enrichi ma connaissance de la situation des francophones hors Québec». 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

L’ex-ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, a la responsabilité des Langues officielles sans que le titre apparaisse dans son ministère. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Le titre de «ministre des Langues officielles» a disparu lors de l’assermentation du nouveau premier ministre, Mark Carney, et de ses ministres, vendredi dernier.

La fonction a été confiée au Québécois Steven Guilbeault, ex-ministre de l’Environnement, qui devient ministre de la Culture et de l’Identité canadiennes, Parcs Canada et lieutenant du Québec.

Plusieurs organismes francophones ont remis en question cette décision. La fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF) a pour sa part déploré mardi l’absence d’un ministre de la Jeunesse au sein du Cabinet Carney.

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CANADA

La campagne électorale fédérale devrait être déclenchée cette fin de semaine par Mark Carney, selon plusieurs médias. Dès lundi, le Canada sera donc fort probablement en campagne électorale. Les promesses bourgeonnent déjà chez les libéraux et les conservateurs.

Côté conservateur

En conférence de presse lundi, le chef du Parti conservateur du Canada (PCC), Pierre Poilievre, a affirmé qu’il éliminera complètement la taxe carbone, aussi bien celle qui s’applique aux individus que celle pour les entreprises. Il assure que cela permettra à ces dernières de «réinvestir dans les emplois».

Le chef conservateur a expliqué que le document signé par Marc Carney, vendredi dernier, qui vise à éliminer la tarification du carbone pour les consommateurs, n’est pas la suppression de la taxe, mais une remise à 0 $ du cout pour la tarification aux particuliers seulement.

Il a également indiqué que son parti appuiera les «programmes de soutien aux familles pendant ces tarifs». «On va défendre vos emplois», a-t-il déclaré, en faisant référence à la guerre tarifaire en cours avec les États-Unis.

Mercredi, Pierre Poilievre était à Sudbury, dans le nord de l’Ontario, pour promettre qu’il accélèrerait le développement de la région du Cercle de feu – qui contient une grande quantité de minéraux critiques – et financerait la construction d’une route pour s’y rendre. 

Photo : Julien Cayouette – Francopresse

Interrogé mardi en conférence de presse à Sudbury sur l’appui au journalisme, Pierre Poilievre a précisé : «On fera en sorte que les médias locaux obtiennent leur juste part de publicités du gouvernement.»

Il a aussi mentionné que la gestion du programme de l’Initiative de journalisme local (IJL) par les libéraux «l’inquiétait» et que son parti appuiera davantage les médias «locaux et indépendants».

Pas de précision toutefois sur les médias locaux francophones.

Le chef du PCC a promis le retour d’un ministre des Langues officielles à part entière.

Côté libéral

Cette semaine, les analystes ont noté une remontée du Parti libéral du Canada (PLC) dans les sondages, avec une possibilité de 178 sièges pour les libéraux – qui franchiraient le seuil d’un gouvernement majoritaire de 172 sièges – et de 130 pour les conservateurs; ce qui serait quand même 11 sièges de plus qu’à la précédente législature.

Mark Carney a effectué une visite de courtoisie en Europe cette semaine, et non aux États-Unis comme c’est la coutume pour un premier ministre canadien tout juste assermenté. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Mercredi, le premier ministre Mark Carney a rencontré les membres du Conseil du premier ministre de la fédération canadienne pour discuter des relations canado-américaines et des tarifs douaniers américains imposés au Canada, y compris ceux qui devraient entrer en vigueur le 2 avril.

Les contretarifs, ainsi que les mesures de soutien aux personnes et aux entreprises canadiennes touchées, ont été abordés et viennent s’ajouter aux mesures supplémentaires prises par chaque province et territoire.

Mark Carney a aussi insisté sur l’urgence stratégique pour le Canada de renforcer la sécurité dans l’Arctique, d’établir des relations commerciales avec de nouveaux partenaires, comme l’Europe, où il a effectué ses premières visites officielles en début de semaine.

Par ce voyage en France et au Royaume-Uni, il a souhaité montrer aux États-Unis qu’il resserrait les liens commerciaux avec d’autres partenaires, en pleine guerre tarifaire.

Le ministre de l’Emploi, Steven MacKinnon, a fait plusieurs annonces facilitant l’accès aux emplois, notamment durables, au Canada cette semaine. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Mardi, le ministre de l’Emploi, Steven MacKinnon, a annoncé un investissement de 67 millions $ dans 10 projets pour aider 29 300 personnes à acquérir des compétences dans des industries écoresponsables.

Ce financement, qui devrait être en place de 2025 à 2030, provient du volet Emplois durables du Programme pour la formation et l’innovation en milieu syndical. Il vise à répondre aux besoins de main-d’œuvre spécialisée, soutenir la construction carbone et stimuler l’économie durable.

Le même jour, le ministre a annoncé le lancement d’un appel de propositions, ouvert depuis le mercredi 19 mars, pour financer l’achat d’équipement moderne afin d’améliorer la formation dans les métiers Sceau rouge, des métiers «régis par des règlements adoptés en vertu des lois sur l’apprentissage des provinces et des territoires».

Les syndicats, organismes de formation et établissements offrant des programmes reconnus pourront soumettre leur demande via le portail Services en ligne des subventions et contributions (SELSC).

L’ancienne cheffe de cabinet adjointe de Justin Trudeau, Marjorie Michel, sera la candidate du PLC dans la circonscription montréalaise de Papineau, jusque-là représentée par l’ancien premier ministre lui-même.

Francopresse a confirmé la nouvelle auprès de deux sources proches du parti. Le Globe and Mail et une journaliste de Radio-Canada sur X l’ont rapportée dans les derniers jours.

Justin Trudeau, qui est député de Papineau depuis 2008, a annoncé en janvier dernier qu’il ne se représentera pas aux prochaines élections.

Marjorie Michel est devenue cheffe de cabinet adjointe dans le bureau de l’ancien premier ministre du Canada Justin Trudeau en 2021. Elle est la première personne noire à occuper ce poste dans l’histoire du pays.

L’enjeu : Depuis 1957, Papineau a toujours élu un député rouge. L’exception se trouve en 2006-2008, quand le candidat du Bloc québécois Vivian Barbot a remporté le siège. Justin Trudeau l’avait récupéré en 2008.

Si élue, Marjorie Michel serait la deuxième femme d’origine haïtienne à siéger dans Papineau après Vivian Barbot.

Dans un plan déposé fin février, le Bureau de la traduction, qui est sous la responsabilité du ministère Services publics et Approvisionnements Canada, affirme que 339 postes de traduction seront supprimés par attrition, au cours des cinq prochaines années. Les membres du Bureau qui quittent pour la retraite ou un autre emploi, par exemple, ne seront pas remplacés.

Le Bureau de la traduction a bénéficié en 2024 d’une augmentation de son budget, avec un investissement de près de 32 millions de dollars sur cinq ans, suivis de 3 millions de dollars et de 200 000 dollars annuellement ajoutés au budget de façon permanente. 

La décision serait une manière «d’accroitre la capacité de traduction et d’interprétation au Parlement et de respecter les exigences de la Loi sur les langues officielles», peut-on lire dans le budget fédéral 2024

Nathan Prier assure que beaucoup de gestionnaires veulent «couper les coins ronds» pour éviter de financer et d’utiliser les services du Bureau de traduction pour «se diriger vers des logiciels». 

Photo : Courtoisie ACEP

Plus de 100 départements ministériels bénéficient du travail des traducteurs du Bureau.

«On a toujours des bons mots [de la part du Bureau de la traduction, NDLR]». Mais les raisons qu’il donne sont que ces coupes permettront de «survivre le prochain cycle [budgétaire]», cite le président de l’Association canadienne des employés professionnels (ACEP-CAPE), Nathan Prier, qui représente les traducteurs du Bureau. 

«Dans son plan quinquennal pour les années 2025 à 2030, le Bureau de la traduction tient compte des avancées technologiques et de la baisse de la demande en traduction pour orienter ses prévisions. Ces avancées serviront à soutenir le travail des traducteurs et à accroitre l’efficacité du Bureau», soutient le bureau du nouveau ministre de Services publics et Approvisionnements Canada, Ali Ehsassi.

«Le service d’interprétation du Parlement ne sera pas touché par les changements annoncés. Il n’est pas prévu de réduire le nombre d’interprètes au Parlement», ajoute-t-il.

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Perte d’accès à de l’information en français

«C’est une grave compression, ça va vraiment compromettre la qualité des traductions, en forçant les traductrices et traducteurs à travailler en sous-effectif.», craint Nathan Prier. Selon lui, la grande majorité des textes sont traduits de l’anglais vers le français. 

«Ce seront principalement les communautés francophones de chaque coin du Canada qui pâtiront de ces compressions et vont perdre l’accès à des informations et des services rigoureux», critique encore Nathan Prier. 

Il considère que préserver la qualité du français est essentiel pour défendre la Loi sur les langues officielles. 

Joël Godin, chef de file des conservateurs en matière de langues officielles, affirme quant à lui «tomber du haut de sa chaise». «Ça démontre encore que l’intention et la volonté de ce gouvernement ne sont pas là.» 

C’est encore une fois les francophones qui vont écoper. Parce qu’on comprend que la traduction et l’interprétation, c’est beaucoup plus la langue la plus vulnérable. Parce qu’à Ottawa, on le répète souvent, il y a deux langues : l’anglais et l’interprétation.

— Joël Godin

Selon lui, le gouvernement libéral profite du «brouillard provoqué par la situation politique» actuelle pour que ce genre d’information passe sous le radar.

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Vers l’intelligence artificielle?

Sans en faire la raison officielle dans son plan quinquennal, le Bureau de la traduction dispose d’un plan pour utiliser davantage d’outils d’intelligence artificielle, sur lesquels il compte miser pour augmenter ses capacités. 

Néanmoins, l’an dernier, le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, avait fait une mise en garde contre l’utilisation de l’IA au sein du Bureau.

Pour l’heure, Nathan Prier reste optimiste : «Ce sont des prévisions issues d’un plan. On va mettre la pression pour éviter [ces suppressions de postes].»

«Faire en sorte que toute la société puisse épouser une idée, je trouve cela très très dangereux. Et on l’entend souvent. Quand on parle par exemple des nouveaux arrivants, on a souvent entendu qu’ils doivent s’intégrer, qu’ils doivent apprendre à vivre comme ici. Mais c’est quoi “apprendre à vivre comme ici” quand on sait que la société évolue de jour en jour?»

La question, lancée par le directeur artistique du Festival Noir et fier, Wilgis Agossa, lors d’une discussion sur la diversité au sein de la francophonie tenue le 18 mars, a obtenu le consensus des quatre panélistes : la francophonie doit s’ouvrir à la diversité.

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«La diversité nous invite à sortir de notre cadre de référence personnelle, de notre système de croyances, et à se situer dans nos communautés en transformation», explique Elie Ndala, qui a habité au Nouveau-Brunswick. 

Photo : Courtoisie

«Célébrer» la diversité

Elie Ndala, doctorant en éducation à l’Université d’Ottawa, a récemment visité des écoles franco-ontariennes : «On va entendre parler du créole, du lingala, de l’anglais. Ça fait partie d’une diversité à laquelle on doit discuter, penser et, en toute humilité, redéfinir ensemble.»

Il faut éviter, dit-il, de faire de la langue et de la culture «un monument et une révérence» et accorder plus de place à «ceux qui font évoluer [le français]» ainsi qu’aux autres langues et cultures. «C’est important, je le reconnais, de défendre les acquis francophones, et il est tout à fait possible à mon humble avis de le faire en protégeant aussi ceux des minorités en son sein.»

Sa directrice de thèse, la professeure titulaire en éducation Phyllis Dalley, aimerait que les écoles «cessent de croire que l’identité linguistique est le nerf de la guerre».

Si les élèves ne sortent pas en portant autour du cou le drapeau franco-ontarien, ce n’est pas grave, estime-t-elle. Les militants et militantes comme moi, il ne faudrait pas en avoir trop. Il y a déjà du monde qui sent qu’on marche trop sur leurs pieds.

— Phyllis Dalley

Selon elle, la francophonie a besoin de plus de «personnes non binaires, de médecins [et] de musiciens». «Mais les “Francos-fous”? C’est peut-être le temps de se rendre à l’hôpital», a-t-elle lâché, avant de souligner que ce dernier commentaire n’était qu’une blague.

«Les familles francophones aujourd’hui n’ont pas toutes le français comme langue maternelle», fait remarquer Phyllis Dalley. Même dans les écoles de langue française, «il faut qu’on célèbre le fait qu’on a des enfants qui parlent d’autres langues que le français à la maison».

Avec la langue de Molière, la chercheuse prône «l’approche plurinormative», qui «accepte que la variation ait sa place dans l’apprentissage». Autrement dit, elle plaide pour le droit d’utiliser différents lexiques, syntaxes, expressions, le franglais, le créole, le chiac, etc., en apprenant.

À lire : Le français : langue économique ou culturelle?

Une question de survie

Megan Cotnam-Kappel, professeure agrégée en éducation à l’Université d’Ottawa, a aussi été la doctorante de Phyllis Dalley. Elle nuance les propos de son ancienne mentore : «C’est important pour moi qu’un finissant de l’école de langue française sorte avec le drapeau [franco-ontarien] autour de son cou, parce qu’une fois en relation avec l’autre, on a besoin d’être assez bien armé juste pour pouvoir survivre comme francophone.»

La grande majorité de ses amis vivent aujourd’hui en anglais. «Ils n’ont pas survécu la violence symbolique au sein de [l’Université d’Ottawa], raconte-t-elle. Nous sommes peut-être 40 % de la population étudiante, mais nos accents sont marginalisés. Nos identités sont mises de côté.»

Comme étudiante, on lui a déjà dit qu’elle obtiendrait de meilleures notes si elle faisait ses études en anglais, plutôt qu’en français.

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«Je ne veux pas qu’on me change»

«Apporter les différentes perspectives et différents points de vue ensemble pour coexister : je vois beaucoup de richesse là-dedans», témoigne Wilgis Agossa, qui habite au Manitoba. «Mais dans chaque culture, on peut faire le choix de prendre la richesse, de prendre ce qui me convient à moi.»

L’assimilation est, à son sens, «très dangereuse». «Moi, je ne veux pas être changé, je ne veux pas qu’on me change», insiste-t-il.

Dans ses 15 dernières années passées au Canada, il reconnait avoir épousé certaines facettes de la culture canadienne, «parce que je vois comment ça me rejoint dans mes valeurs, dans mon identité, comment ça peut m’apporter énormément de choses».

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«Faire partie de la gang»

Depuis son arrivée en francophonie canadienne, Elie Ndala tente de s’adapter : «Qu’est-ce que je dois faire pour faire partie de la gang? Est-ce qu’il faut que j’arrête d’amener la nourriture de mon pays, de ma grand-mère natale, pour me faire des amis à l’école?»

La diversité ici nous expose à un système de relations, à des dynamiques de pouvoir, à des modes d’adaptation, à de nouvelles idéologies dans lesquelles il faut, malheureusement, se placer. Il faut, parfois, s’assimiler. Ou il faut résister, avec les conséquences qui s’ensuivent.

— Elie Ndala

Née d’un père anglophone et d’une mère acadienne, Phyllis Dalley raconte avoir lutté pour avoir droit à l’identité acadienne. Elle met en garde contre l’idée selon laquelle l’identité est une question de sang.

«On n’arrête pas de raconter l’histoire de la déportation. C’est important, mais ce n’est pas ce qui nous définit aujourd’hui, ou du moins pas uniquement. Je pense que l’identité se bâtit dans la relation. Elle n’existe pas en moi. C’est quelque chose que je construis avec toi.»

Elie Ndala remarque deux «tensions» : «D’un côté, protéger les identités francophones historiquement moins représentées au sein de la francophonie. Ou prioriser le combat contre l’anglophonie institutionnellement dominante et la menace des droits qui ont été acquis.»

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D’après le professeur en relations internationales à l’Université de Moncton, Roromme Chantal, nous assistons aujourd’hui à une reconfiguration des rapports de force à l’échelle mondiale.

Selon Roromme Chantal, le Canada doit renforcer sa présence diplomatique en Afrique s’il veut augmenter ses relations commerciales. 

Photo : Courtoisie

«Nous sommes dans un contexte de guerre conventionnelle et non conventionnelle», explique-t-il, évoquant d’un côté la guerre en Ukraine et, de l’autre, la guerre économique entre les États-Unis et la Chine. Cette rivalité sino-américaine met une pression considérable sur les pays tiers, les poussant à revoir leurs alliances économiques.

Dans ce contexte, le Canada, qui exporte plus de 75 % de ses produits vers les États-Unis, tente de diversifier ses relations. Si un rapprochement avec la Chine avait été envisagé sous Justin Trudeau, cette option a été écartée en raison de tensions diplomatiques et de différends sur les droits de la personne.

L’Asie étant elle-même un terrain géopolitique complexe, l’Afrique devient alors comme un partenaire à privilégier.

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L’Afrique, un marché en pleine croissance

Selon Pierre-Marcel Desjardins, professeur d’économie à l’Université de Moncton, l’Afrique représente une «opportunité stratégique majeure» pour le Canada : «C’est une région où il y a une croissance démographique importante, une classe moyenne émergente et où les tendances de consommation évoluent rapidement.»

Pierre-Marcel Desjardins rappelle que l’Afrique sera le prochain marché émergent.

Photo : Courtoisie

Affaires mondiales Canada a justement dévoilé le 6 mars sa «première stratégie mondiale pour l’Afrique», un plan de développement des relations diplomatiques et d’investissement en préparation depuis deux ans.

Pierre-Marcel Desjardins explique que l’intérêt du Canada pour le continent africain repose sur plusieurs facteurs. Le continent offre un marché jeune et dynamique, avec une population qui devrait représenter un quart de la population mondiale d’ici 2050.

Ce dynamisme économique s’accompagne d’un besoin croissant en infrastructures, un domaine dans lequel le Canada possède une expertise reconnue, notamment en gestion des ressources naturelles, en technologies propres et en agriculture durable, détaille l’économiste.

Enfin, la francophonie constitue un atout de taille, facilitant les échanges avec plusieurs pays africains francophones.

Toutefois, ce marché présente aussi des défis. Roromme Chantal souligne que l’Afrique reste un continent économiquement fragmenté, avec des règlementations variées et des infrastructures inégales. Par ailleurs, la concurrence y est féroce. Des puissances comme la Chine, la Turquie et même les États-Unis ont déjà investi massivement sur le continent.

Retard à rattraper

Alors que d’autres nations ont multiplié leurs investissements et visites diplomatiques en Afrique, le Canada reste en retrait. Selon Roromme Chantal, la Chine, par exemple, a déjà effectué plus de 70 visites de haut niveau en Afrique ces dernières années, alors que le Canada n’a pas encore une présence diplomatique forte.

Affaires mondiales Canada a d’ailleurs reconnu cette faiblesse dans son communiqué du 6 mars. La Stratégie comprend de missions diplomatiques et l’établissement d’«une ambassade à part entière au Bénin».

Le Canada est à la recherche de nouvelles opportunités d’intégration dans des marchés émergents, notamment en Afrique, observe Roromme Chantal. L’émergence de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF) ouvre ainsi des perspectives d’investissement dans un marché en pleine expansion, une dynamique qu’il juge essentielle pour l’avenir des échanges canado-africains.

Le Canada compte augmenter ses échanges d’affaires et commerciaux avec plusieurs pays africains. Un besoin encore plus pressant en raison des actuelles relations avec les États-Unis. 

Photo : Oktay Köseoğlu – Pexels

Il ajoute que le gouvernement entend aussi mobiliser la diaspora africaine installée au Canada afin de renforcer les liens économiques et culturels.

En parallèle, le renforcement des échanges commerciaux et des investissements directs figure parmi les priorités affichées. Une initiative comme celle du Conseil économique du Nouveau-Brunswick (CENB), qui tisse des liens avec des pays comme le Togo depuis 2023, illustre bien le potentiel de collaborations à l’échelle provinciale.

Des opportunités sectorielles à exploiter

Plusieurs secteurs pourraient bénéficier de ce rapprochement entre le Canada et l’Afrique. Les services, l’éducation et la formation professionnelle sont identifiés comme des secteurs clés où le Canada pourrait jouer un rôle majeur, indique Pierre-Marcel Desjardins.

L’Afrique, riche en ressources naturelles, représente un levier stratégique pour le développement des échanges économiques entre le Canada et le continent. Cette abondance ouvre des perspectives de coopération, notamment dans le domaine de l’exploitation responsable des matières premières, un enjeu sur lequel Pierre-Marcel Desjardins attire particulièrement l’attention.

L’essor du secteur agroalimentaire constitue également un levier de croissance essentiel pour le Canada en Afrique, met de l’avant le professeur, avec des perspectives d’échanges commerciaux renforcés. Les exportations canadiennes, comme les fruits de mer, trouveraient un marché en expansion, tandis que l’Afrique, riche en ressources agricoles, pourrait voir sa production de café mieux valorisée au Canada, un marché encore largement tourné vers l’Amérique latine, analyse-t-il.

Il ne faut pas seulement penser à exporter, mais à construire un partenariat économique mutuellement bénéfique

— Pierre-Marcel Desjardins

L’idée est de ne pas répéter les erreurs du passé, où certains partenariats ont été déséquilibrés, plus profitables pour les pays du Nord que pour les pays africains.

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Une diversification économique nécessaire

La dépendance du Canada envers les États-Unis est maintenant perçue comme un risque, constate Pierre-Marcel Desjardins. Avec la montée du protectionnisme américain et les tensions commerciales récurrentes, le Canada doit se diversifier. L’Afrique, avec son marché en pleine expansion et ses ressources, représente une alternative crédible et stratégique.

Pourtant, le chemin reste long. Roromme Chantal et Pierre-Marcel Desjardins soulignent tous deux que le Canada devra structurer son approche, renforcer sa diplomatie économique et investir dans des projets de long terme. L’heure n’est plus aux simples déclarations d’intention : il est temps de passer à l’action.

La formation, axée sur la direction d’acteurs et d’actrices, est soutenue par l’Alliance des producteurs francophones du Canada (APFC), par l’entremise de son programme Élan, une initiative de perfectionnement professionnel appuyée par Netflix. Elle sera animée par Michel Poulette, scénariste, réalisateur et producteur québécois.

Une trentaine de cinéastes francophones viendront des quatre coins du Canada – Île-du-Prince-Édouard, Nouvelle-Écosse, Nouveau-Brunswick, Ontario, Manitoba, Saskatchewan, Colombie-Britannique et Yukon – pour prendre part à cette formation.

Le directeur général du RACCORD, Bruno Boëz, fait le point sur cet évènement destiné à faire rayonner les talents de la francophonie minoritaire.

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Pour Bruno Boëz, les œuvres des cinéastes francophones en situation minoritaire ne sont pas suffisamment distribuées. 

Photo : Marianne Duval

Francopresse : Comment cette formation va-t-elle s’organiser?

Bruno Boëz : Cette formation en réalisation de fiction s’inscrit dans le mandat de longue date du RACCORD, qui est de soutenir l’évolution de la carrière de ses différents membres, pour développer et renforcer leurs compétences, et surtout apporter un autre regard pour les membres issus de la relève.

Durant la matinée, il y aura une partie plutôt théorique, pour bien décrire le rôle du réalisateur en tant que leadeur créatif dans un projet audiovisuel, à travers toutes les étapes, du développement jusqu’à la livraison.

L’après-midi, il y aura des exercices pratiques avec la direction d’acteurs et d’actrices. On aura la chance d’avoir deux comédiens professionnels d’Ottawa : Anie Richer et Sébastien Lajoie. Les participants vont s’exercer à diriger, à placer la caméra, à faire ressortir des émotions.

En quoi cette formation est-elle importante pour les cinéastes francophones en situation minoritaire?

Il n’existe actuellement aucune école postsecondaire, aucune université francophone en dehors du Québec qui prépare au métier de réalisateur ou de réalisatrice.

— Bruno Boëz

Les artistes doivent soit se former dans une université anglophone – en espérant revenir dans l’écosystème francophone –, soit se former dans les grandes écoles et universités à Montréal, avec le risque de rester dans cet écosystème québécois et de ne pas faire profiter leur région d’origine de leur savoir-faire.

On pallie ce manque-là pour assurer la relève et faire en sorte que dans un monde compétitif comme celui de l’audiovisuel, les cinéastes de nos régions et de nos communautés puissent être en compétition avec d’autres pour raconter et réaliser leurs histoires.

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On parle beaucoup en ce moment de boycotter les produits américains, y compris au niveau culturel, pour se tourner vers les créations canadiennes. Est-ce un enjeu qui sera abordé lors du Forum?

Nous sommes encore une industrie en développement qui est sous-financée à l’extérieur du Québec. On est encore en situation – et on sera toujours en situation – minoritaire.

Le made in Canada, effectivement, il faut davantage le renforcer. On se bat pour faire rayonner les œuvres de nos membres, sauf que celles-ci – les longs-métrages, les courts-métrages, les séries – ne se retrouvent pas facilement sur les grandes plateformes ou sont difficilement découvrables en ligne.

Certaines, comme ICI TOU.TV ou TFO, mettent à l’honneur leurs productions, mais il y a tout un pan de créations qui n’est pas diffusé sur ces plateformes-là parce que les espaces de diffusion – y compris les nôtres, au Canada – n’achètent pas suffisamment de contenus, de courts-métrages par exemple. Pourtant, c’est la meilleure façon de soutenir les artistes et de connaitre nos communautés.

Il n’existe aucune association dans notre francophonie canadienne qui aide à la distribution, à la diffusion des œuvres. On a quelques distributeurs, mais la plupart du temps ils ne sont pas intéressés par nos œuvres parce qu’il y a peu de rentabilité économique et ce n’est pas un marché comme celui du Québec.

RACCORD prend en partie ce rôle-là pour appuyer les festivals, leur proposer de nouveaux contenus, appuyer des lieux culturels comme les Alliances françaises, comme des lieux communautaires

On souhaite leur dire «Eh, regardez notre catalogue de films», d’œuvres qui ont été récompensées, mais qui sont méconnues parce qu’il n’y a pas de travail actif de diffusion, de découvrabilité suffisamment soutenu par les bailleurs de fonds pour créer un lien et des collaborations avec des équipes d’acquisition ou de programmation.

Par ailleurs, on cherche toujours à recruter de nouveaux membres. On en a eu deux qui sont arrivées en début d’année de l’Île-du-Prince-Édouard, une province qui n’était pas encore représentée.

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Une nouvelle revue et un prix

À l’occasion du Forum des membres, RACCORD dévoilera un magazine créé pour les 20 ans de l’organisme et présentera de nouvelles données sur le secteur de l’audiovisuel en situation minoritaire.

Le prix Œil du RACCORD sera également remis à l’un ou l’une des membres du regroupement.

Les propos ont été réorganisés pour des raisons de longueur et de clarté.

Plusieurs études ont montré la force des drapeaux et d’autres symboles identitaires auprès des personnes qu’ils cherchent à représenter et regrouper. «Ils sont liés à une forte charge émotionnelle, et permettent aux membres du groupe de construire une identité nationale par un passé et un présent/futur communs», écrit une universitaire française.

Ce n’est donc pas étonnant de retrouver partout sur la planète des drapeaux comme symbole par excellence d’un pays, d’une province, d’une région, d’une population ou d’un groupe en particulier. On les arbore lors de fêtes populaires autant qu’à la guerre.

Dans la francophonie canadienne, l’Acadie a été la première communauté à adopter son drapeau – le tricolore étoilé – (ainsi que d’autres symboles identitaires) en 1884, lors de la deuxième Convention nationale acadienne.

Il s’agissait d’une volonté pour cette communauté minoritaire d’affirmer haut et fort que les efforts pour éliminer le peuple acadien lors de la Déportation avaient échoué.

Il faudra attendre à 1975 pour qu’une deuxième communauté de la francophonie canadienne, celle de l’Ontario, se dote d’un drapeau. 

Dans les deux cas, les populations visées ont embrassé ces drapeaux, qui sont devenus leur symbole par excellence.

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Drapeau fransaskois

Quelques années plus tard, c’était au tour des francophones de l’Ouest de choisir un étendard.

Le drapeau fransaskois arbore les couleurs des prairies. 

Photo : Daniel Paquet – CCA Share Alike 3.0

La Fransaskoisie a amorcé ce mouvement en 1979, sous l’impulsion de la jeunesse francophone. L’Association jeunesse fransaskoise a alors organisé un concours auprès de la communauté afin que les francophones de la province aient leur drapeau.

Parmi les plus de 200 personnes participantes, l’œuvre de Lionel Bonneville et deux de ses collègues de Radio-Canada a été choisie.

La symbolique du drapeau est parlante. Sur fond jaune, évoquant les champs de blé et l’agriculture, moteur économique de la Saskatchewan, une croix décentrée vers la gauche rappelle le rôle de l’Église catholique lorsque les francophones ont fait souche dans cette province. La couleur verte de la croix rappelle la forêt boréale du nord de la province.

Enfin, la fleur de lis rouge rend hommage au courage des Fransaskois et Fransaskoises dans la défense de leur culture et de leur langue, alors que sa forme est inspirée du lis du drapeau du gouvernement provisoire du chef des Métis, Louis Riel.

Le drapeau fransaskois a été dévoilé en grande pompe en 1979 devant près d’un millier de personnes lors du «Super Fransaskois Show», à Prince Albert, qui réunissait 125 artistes francophones, dont les Sœurs Boyer de Saint-Brieux et la famille Campagne de Willow Bunch.

En 2005, le gouvernement de la Saskatchewan a qualifié le drapeau fransaskois d’«emblème provincial», reconnaissant ainsi la contribution des francophones à l’essor de la province.

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Drapeau franco-manitobain

Comme en Saskatchewan, l’initiative au Manitoba est venue des jeunes. Le Conseil jeunesse provincial a su mobiliser la communauté francophone pour qu’elle se dote d’un étendard autour duquel elle pourrait se rallier.

Le drapeau franco-manitobain se démarque par ses couleurs vives. 

Photo : Société de la francophonie manitobaine

Le drapeau choisi a été présenté au public et hissé le 17 février 1980.

C’est un jeune âgé alors de 26 ans, Cyril Parent, qui a soumis la proposition retenue, soit un drapeau très coloré de vert, jaune et rouge. Le créateur a été inspiré par une publicité montrant une plante avec de longues racines sortant de la terre.

La plante sort de deux bandes horizontales jaune et rouge, tout en bas du drapeau. Elles symbolisent la rivière Rouge, élément central de l’histoire du Manitoba, et lieu d’arrivée des pionniers francophones et Métis, ainsi que le blé, source primordiale de l’agriculture dans la province.

Le vert de la plante évoque l’enracinement profond des Franco-Manitobains et Franco-Manitobaines dans le territoire et il représente la fierté envers ceux et celles qui ont apporté la culture et la langue toujours présente. On peut d’ailleurs y voir un «f» stylisé pour symboliser le mot «francophone».

Drapeau franco-albertain

C’est encore une fois à l’initiative des jeunes francophones de l’Alberta qu’un drapeau représentant la francophonie de cette province a été créé. C’est également par un concours que le drapeau a été choisi.

Le drapeau franco-albertain réunit le lis francophone et l’églantine (wild rose) albertaine. 

Photo : Arnaud Barbet – Le Franco

Le concepteur gagnant : Jean-Pierre Grenier.

Le drapeau se compose d’un triangle bleu recouvrant la partie supérieure gauche, sur laquelle un lis blanc, symbole de la francophonie, est placé. La deuxième moitié est un triangle blanc, sur lequel figure une églantine sauvage rose (wild rose), symbole de l’Alberta. 

Entre les deux triangles se trouvent deux bandes obliques en parallèle, l’une blanche, l’autre bleue, pour symboliser l’intégration de la communauté francophone dans la société albertaine.

Le drapeau a été dévoilé et adopté lors du congrès annuel de l’Association canadienne-française de l’Alberta le 6 mars 1982. En 2017, le gouvernement albertain a reconnu le drapeau des francophones de la province comme un symbole distinctif sous la Loi sur les emblèmes de l’Alberta.

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Drapeau franco-colombien

Les francophones de la Colombie-Britannique aussi doivent leur drapeau à un concours organisé en 1981 par les jeunes. Le concept adopté le 15 mai 1982 est l’œuvre de Raymond Lemoine, alors directeur de l’École des Pionniers-de-Maillardville à Port Coquitlam.

L’étendard franco-colombien représente la mer et les montagnes. 

Photo : Province de la Colombie-Britannique – CC BY-NC-ND 2.0

De forme rectangulaire traditionnelle, le drapeau est sur fond blanc traversé de deux lignes bleues horizontales, bifurquant vers le haut au milieu. Les lignes évoquent l’océan Pacifique, à gauche, et les montagnes Rocheuses, à droite.

Une fleur de lis stylisée à quatre pétales blancs et un bleu et un cœur jaune, symbolisant le soleil, représente la vie et l’espoir. La fleur de cornouiller, emblème floral de la province, jaillit du lis, afin d’exprimer la double identité des francophones de la Colombie-Britannique ainsi que leur contribution à celle-ci.

Les drapeaux des communautés francophones, dans l’Ouest et ailleurs au pays, jouent un rôle de premier plan. Même si parfois ils passent inaperçus ou si on ne les remarque plus à force de les voir, ils sont un rappel constant de l’identité et de la fierté d’un peuple qui refuse de mourir, malgré les statistiques.

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«Acheter canadien», «boycotter les produits américains»… encore faut-il que les produits canadiens trouvent aisément une place sur les étagères des magasins. Pendant des années, des barrières au commerce entre provinces et territoires ont représenté des manques à gagner de plusieurs millions de dollars à l’économie canadienne.

Lors d’une conférence de presse le 4 mars, Justin Trudeau a qualifié l’imposition de tarifs par le président américain Donald Trump de geste «stupide». Le premier ministre a demandé à la population canadienne de redoubler d’efforts pour soutenir l’économie canadienne. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Le 21 février, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il allait éliminer la moitié de ses exceptions au libre-échange canadien. L’ensemble des provinces et territoires se sont engagés à faire leur possible pour lever leurs restrictions.

Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a rencontré ses homologues des provinces et territoires le 5 mars. Ils ont réitéré le besoin de «libéraliser encore davantage [le commerce] et de soutenir le marché canadien pour garantir la libre circulation des biens, des services et des travailleurs», a écrit M. Trudeau dans une déclaration le même jour.

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Les barrières au commerce intérieur

Les barrières codifiées : Ces barrières sont des exceptions au commerce inscrites dans l’Accord de libre-échange canadien (ALEC), adopté en 2017. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont tous inclus des exceptions dans cet accord. Les restrictions en matière d’exportation de boissons alcoolisées sont un exemple classique.

Les barrières règlementaires : Elles ne sont pas inscrites dans l’ALEC, mais elles sont définies dans un règlement imposé par une province ou un territoire. Par exemple, les différentes compétences ont chacune une règlementation particulière portant sur la taille des emballages alimentaires.

Les tarifs : Il existe des taxes sur des produits venant d’autres provinces et territoires qui agissent comme des tarifs interprovinciaux. Des maires ont demandé la révision de ces tarifs dans les dernières semaines.

Protectionnisme provincial

«Nous sommes une fédération. Les provinces ont une grande latitude sur la façon dont elles gèrent leur économie», rappelle le professeur au Département d’agro-industrie et d’agroéconomie à l’Université du Manitoba, Jared Carlberg.

Celui-ci voit le commerce comme un jeu dans lequel les différents gouvernements doivent assurer une bonne exposition de leurs produits et éviter que les importations, même de la province voisine, fassent concurrence aux produits de chez eux.

Selon Yan Plante, la guerre tarifaire actuelle est une «occasion» pour la francophonie de développer son économie. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

«Les barrières interprovinciales ont sensiblement la même raison d’être que les barrières internationales : pour pratiquer le protectionnisme et pour développer des industries au sein des provinces», explique l’économiste.

Les premiers ministres des provinces ont tous abordé dans leurs discours des dernières semaines la nécessité de contribuer à une économie canadienne forte et unie alliée au besoin de protéger les entreprises de leur région.

Certaines barrières ont de bonnes raisons d’exister, nuance Jared Carlberg. Mais l’idée générale de les réduire est bonne. «Il n’y a surement pas de très bonnes raisons pour lesquelles un camion commercial autorisé à rouler dans une province ne l’est pas dans une autre.»

Certaines barrières ne tomberont toutefois pas. Par exemple, pour protéger la langue française, la mobilité de la main-d’œuvre demeurera limitée au Québec.

«Le Québec veut accélérer les échanges commerciaux entre les provinces, tout en respectant ses particularités, notamment en matière de langue française et de règlementation», a écrit le premier ministre québécois François Legault dans une publication sur X.

Dans sa déclaration du 5 mars, Justin Trudeau a annoncé qu’«un plan pour la reconnaissance pancanadienne des titres de compétence qui tiendrait compte des particularités provinciales et territoriales, notamment sur le plan linguistique», allait être établi d’ici le 1er juin.

La vente d’alcool sera aussi facilitée, mais toutes les provinces ne s’engagent pas toutes à le faire : l’Île-du-Prince-Édouard et Terre-Neuve veulent protéger leurs producteurs locaux.

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Tarifs interprovinciaux

La guerre tarifaire obligera probablement les provinces et territoires à venir en aide à leurs entreprises et leur population; cela se traduira par de nouvelles dépenses dans les budgets.

Ainsi, les budgets provinciaux et territoriaux risquent d’être encore plus déficitaires qu’avant la guerre tarifaire avec les États-Unis, comme l’annonce déjà Québec dans son cas.

Cela pourrait diminuer la volonté de baisser les tarifs entre provinces, car ils génèrent un certain revenu, explique Jared Carlberg. S’attaquer aux tarifs interprovinciaux serait davantage un objectif à moyen ou long terme.

Le président-directeur général du Réseau de développement économique et d’employabilité (RDÉE), Yan Plante, estime la valeur des tarifs interprovinciaux actuels de 7 à 20 %. «Il faut faire tomber ça», dit-il.

«Les entreprises ont le réflexe naturel et normal de faire leur commerce Nord-Sud quand il n’y a pas de tarifs.» La majorité de la population canadienne vit près de la frontière américaine. «C’est moins naturel ou instinctif de faire du commerce Est-Ouest si tu dois traverser trois provinces.»

Selon lui, ce trajet d’un océan à l’autre se fera plus naturellement s’il n’y a pas de barrières interprovinciales.

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Quelques chiffres

Des chiffres de Statistique Canada montrent qu’en 2023-2024, le cout du transport et la distance entre le point d’origine et la destination font partie des obstacles les plus fréquemment rencontrés par les entreprises canadiennes qui font des achats ou des ventes à l’extérieur de leur région.

Un faible pourcentage d’entreprises a déclaré que les lois linguistiques provinciales et territoriales constituaient un frein. C’est le cas notamment au Québec, mais pas seulement, selon des données obtenues par Francopresse.  En Ontario par exemple, 8,4 % des entreprises de «commerce de gros» qui ont fait des achats dans d’autres provinces ont été confrontées à cet obstacle.

Parmi les raisons pour lesquelles les entreprises canadiennes n’ont pas vendu de biens ou de services à une clientèle de l’extérieur de leur province ou territoire, le manque d’intérêt ou de nécessité arrive au premier rang. De 70,9 à 97,7 % des entreprises, selon la filière, ont évoqué ce motif.

«Il faut parler de la construction de pipelines»

D’après Jared Carlberg, faciliter le commerce interprovincial n’est pas suffisant face aux tarifs américains. «Retirer quelques millions de dollars de bouteilles de vin des étagères ne suffira pas. […] Il faut parler de la construction de pipelines et cultiver de nouveaux marchés.»

«On s’est trop longtemps fiés à un partenaire économique, c’était facile de le faire, estime Jared Carlberg. On est devenus paresseux.» 

Photo : Courtoisie

Le Canada «doit tirer parti de sa position avantageuse en tant que vendeur de gaz, de pétrole, d’uranium», avance Jared Carlberg. «On ne peut pas avoir des provinces qui refusent les pipelines à cause d’un électorat qui n’en veut pas. C’est un suicide économique.»

Il n’est pas seul à le penser : le chef du Parti conservateur du Canada, Pierre Poilievre, a réitéré sa position favorable aux pipelines le 4 mars en conférence de presse. Des premiers ministres provinciaux, comme Danielle Smith de l’Alberta et Scott Moe de la Saskatchewan, appuient aussi la construction de gazoduc ou d’oléoduc.

Le tout nouveau chef du Parti libéral du Canada, Mark Carney, s’est montré favorable à la construction d’infrastructures énergétiques. En entrevue avec CBC, il a appuyé la construction de pipelines pour de l’énergie conventionnelle. Il a également assuré lors d’un entretien avec Radio-Canada, il y a quelques semaines, qu’il n’imposerait «jamais» de pipeline aux provinces.

Les ministres fédéraux Mélanie Joly et Jonathan Wilkinson ont affirmé qu’Ottawa devrait reconsidérer le projet d’oléoduc Énergie Est.

D’autres acteurs, tels que de nombreux groupes autochtones ou environnementaux et certains partis politiques, sont bien moins à l’aise d’appuyer la construction de pipelines.