Le 14 aout, le ministre d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), Marc Miller, a annoncé que le Programme pilote pour les étudiants dans les communautés francophones en situation minoritaire (PPECFSM) sera lancé le 26 aout 2024.
En partenariat avec des établissements d’enseignement désignés (EED) postsecondaires de langue française et bilingues, ce programme est une mesure phare de la Politique en matière d’immigration francophone, elle-même inscrite dans la nouvelle Loi sur les langues officielles.
Les étudiants étrangers admis dans le cadre de ce programme bénéficieront de certaines exemptions.
Assouplissement des critères
Depuis longtemps, certains d’entre eux, notamment ceux d’origine africaine, font face à un bas taux d’approbation. Selon IRCC, plusieurs raisons expliquent le phénomène, dont l’incapacité de convaincre IRCC que l’étudiant quittera le Canada au moment de l’expiration de son permis d’études et l’insuffisance de fonds.
«Pour améliorer le taux d’approbation», lit-on dans le communiqué de l’annonce, les étudiants et leurs familles seront dispensés de démontrer qu’ils quitteront le pays une fois leur permis expiré.
Et en plus de services d’établissements, «le seuil financier requis sera ajusté pour refléter 75 % du seuil de faible revenu associé à la municipalité où se trouve le campus principal de l’établissement».
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Une voie directe vers la résidence permanente
Après l’obtention de leur diplôme, ils bénéficieront d’une voie d’accès direct pour passer d’un statut temporaire à un statut permanent.
Comme expliqué dans le communiqué, «les époux ou conjoints de fait et les enfants à charge des demandeurs principaux peuvent également venir au Canada dans le cadre du programme pilote et éventuellement demander la résidence permanente».
Les étudiants étrangers admis dans le cadre de ce programme ne seront pas comptés dans le plafond de demandes de permis d’études établi en janvier dernier. Chaque EED pourra alors délivrer un nombre limité de lettres d’admission. IRCC acceptera ensuite un maximum de 2 300 demandes de permis d’études dans le cadre du programme, la limite pour un projet pilote.
Le plafond sera révisé pour la deuxième année et fixé d’ici aout 2025.
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L’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC) estime qu’en septembre 2023, environ 12 000 étudiants étrangers fréquentaient ses établissements membres.
Exigences pour obtenir un permis d’études :
À l’extérieur du Québec, l’étudiant étranger doit prouver qu’il dispose d’au moins 10 000 dollars par année d’étude, excluant les frais des droits de scolarité.
- Être inscrit dans un établissement d’enseignement désigné (EED).
- Le demandeur doit fournir la preuve qu’il a les moyens de payer :
- ses frais de scolarité;
- ses frais de subsistance, pour lui et les membres de sa famille qui l’accompagnent au Canada;
- les couts de transport de retour pour lui et les membres de sa famille qui l’accompagnent au Canada.
- Être respectueux des lois, n’avoir aucun casier judiciaire et obtenir un certificat de police (si demandé).
- Être en bonne santé et subir un examen médical (si demandé).
- Le demandeur doit convaincre un agent d’immigration qu’il quittera le Canada au moment de l’expiration de son permis d’études.
Source : Gouvernement du Canada
La francophonie aux aguets
«Bien que l’annonce d’aujourd’hui se fasse alors que l’ACUFC ne dispose pas de tous les détails concernant la forme finale du projet pilote, ce dernier reprend certaines idées qu’elle a proposées au fil des derniers mois», assure le président-directeur général par intérim de l’ACUFC, Martin Normand, dans une déclaration.
Celui-ci croit que le PPECFSM pourrait avoir des «effets locaux concrets dans les communautés où se situent les établissements qui participeront au projet».
«C’est un bon programme qui va nous permettre, aux minorités francophones venant de l’international, d’avoir des permis d’étude, parce qu’actuellement, ça a été restreint», se réjouit Hans Edoh Daye, étudiant en administration des affaires à l’Université de Hearst, en Ontario, et coprésident du Programme pour étudiantes et étudiants réfugiés de l’établissement.
«Quand je suis arrivé en Ontario, je suis resté presque deux mois à l’hôtel avant de pouvoir trouver un logement», raconte-t-il. Le défi malheureusement typique du logement pourrait être allégé par les services d’établissements, en fonction de leur nature.
La possibilité de rester dans la communauté après les études intrigue aussi l’étudiant : «Tu t’es familiarisé avec [les gens de la communauté], et là, tu peux immigrer ici au lieu d’aller dans une autre province et essayer encore de s’adapter ailleurs.»
D’un autre côté, il espère que ce programme ne limitera pas la possibilité de découvrir les autres communautés francophones du pays. «S’ils trouvent des opportunités ailleurs, pourront-ils déménager?», demande-t-il.
Miser sur la rétention et atteindre la cible
Le programme devrait aider le gouvernement à atteindre sa cible d’immigration francophone hors Québec, a déclaré le ministre d’IRCC, Marc Miller, en conférence de presse le 14 aout.
La cible de 4,4 % établie en 2003 a finalement été atteinte l’année dernière. Depuis, elle a été fixée à 6 % et devrait atteindre 8 % d’ici deux ans.
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«4,4 %, c’est bien beau, mais cette cible n’est pas suffisante pour atteindre le poids démographique», a rappelé le député libéral acadien Darrell Samson, aussi en conférence de presse.
«Le processus d’assimilation est réel, vrai», a statué Marc Miller. «J’ai un devoir primordial, comme ministre de l’Immigration, d’assurer la pérennité des communautés francophones, surtout en dehors du Québec.»
Un devoir qu’il tente de remplir, en partie en octroyant aux étudiants de ce programme un accès accéléré à la résidence permanente. «Ce sont des gens qui, évidemment, parlent un français impeccable, qui étudient dans des institutions postsecondaires [francophones] et qui vont avoir 2 à 4 ans de début d’intégration», justifie le ministre.
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