le Dimanche 14 septembre 2025

Une âme qui passe l’épreuve du temps

Pour ses vingt ans de carrière solo, Joseph Edgar nous propose un 15e opus éponyme. Au cours de ces deux dernières décennies, l’auteur-compositeur-interprète acadien n’a cessé de nous séduire à chaque album, avec une plume personnelle et un accent chaleureux.

Pochette de l’album Joseph Edgar. Photo : josephedgar.ca 

Pochette de l’album Joseph Edgar. Photo : josephedgar.ca

Cette fois, il nous présente un album aux accents folks modernes, coréalisé avec Benoit Bouchard. Le duo nous offre des orchestrations solides et profondes tout au long du disque.

Les prestations vocales de Joseph Edgar sont justes et attendrissantes, créant parfois des moments d’intimité très touchants.

Certaines chansons me rappellent l’univers d’un certain Chris Isaak. «Année après année», un crescendo qui nous berce tendrement, est suivi de «Hang On (Rester là)», un folk pop accrocheur accompagné de l’un des plus beaux textes de l’album. «Les Golden Hours» est un autre succès potentiel.

Un autre extrait radio à surveiller est «Le Heavy Side of Love». Le texte de l’album nous est livré dans les deux langues officielles du pays. C’est le genre de chanson que l’on écoute en boucle. «Juste comme ça» est une autre pièce qui se démarque bien, avec un excellent texte et une voix en plein contrôle.

Joseph Edgar revient avec des textes magnifiques, chantés d’une voix intense. L’artiste acadien a su prendre le temps nécessaire pour livrer un produit magnifique, qui rend justice à son talent.

«Le Heavy Side Of Love»
Album : Joseph Edgar

Un album plus personnel pour Reney Ray

À la fin du mois d’avril, Reney Ray, autrice-compositrice-interprète de Kapuskasing en Ontario, nous présentait Temporaire, son 4e opus. Cet album, dont elle signe la réalisation, est un effort plus personnel que ses premiers disques.

Pochette de l’album Temporaire

Photo : reneyray.ca

Dès les premières notes d’«Adam», elle nous propose une trame blues, qui trace la ligne narratrice de cette création. L’artiste franco-ontarienne nous livre ses blessures les plus profondes et sa quête de spiritualité et de paix intérieure. Avec «Cobaye» et «J’t’aime pareil», elle nous dévoile son besoin de tendresse et son mal d’amour.

Elle nous surprend également avec la pièce «Backstab», un duo au style inattendu avec l’artiste David Jalbert. La prière «Oh My Lord» est un autre duo surprenant avec Day Vee. Dans la même veine, on trouve également «Powerful».

Reney Ray termine ce 4e album avec la chanson la plus profonde de toute sa carrière. Dans «T’as grandi», l’artiste se livre dans toute sa vulnérabilité et sa fierté. La trame piano-voix rend cette pièce extrêmement intense et saura venir toucher le cœur des parents.

Ce nouvel opus offre des trames profondes et une certaine recherche de spiritualité au niveau des textes. La Franco-Ontarienne réussit à nous interpeler tout au long du disque avec sa voix un peu rauque et réconfortante.

«Cobaye»
Album : Temporaire

Cette voix que l’on n’oublie pas

À l’automne 2019, une belle voix chaude du passé nous revenait, comme celle d’un bon vieux chum. Une voix chaleureuse qui avait bercé notre jeunesse et qui, encore une fois, venait nous séduire avec des mélodies captivantes. Avec Comme un engin, Michel Lalonde, ex-Garolou, revenait nous partager le fruit de ses dernières créations.

Pochette de l’album Comme un engin

Photo : michellalonde.ca

Dès les deux premières pièces, on y retrouve cette chaleur humaine, cette tendresse qui nous berce avec «J’suis fait comme ça» et «Tout ce qu’on avait». Cette dernière est une adaptation francophone d’une chanson de John Prine, qui met en scène la voix de Patricia Richard au niveau des chœurs.

«Marilou» est une autre excellente pièce country folk où la charmante voix de Caroline Bernard vient appuyer celle de Michel Lalonde.

Deux de mes titres préférés me rappellent des univers folks americana classique. «Cap sur l’amour», sur une trame à la Gordon Lightfoot, est le plus beau texte de l’album. Une partition de violon nous dresse une toile de fond nostalgique, alors que le texte respire la tendresse.

«C’est toujours toi» est une autre belle mélodie folk à la Eagles, avec une touche de nostalgie qui vient doucement nous bercer.

Sur cet opus, Michel Lalonde nous offre aussi un p’tit clin d’œil à son époque Garolou avec une belle version de «Joli cœur de rosier».

Je termine par une mention spéciale pour la pièce-titre, «Comme un engin», une road song au texte engagé, très puissante et actuelle.

«Comme un engin»
Album : Comme un engin

Marc Lalonde, dit Lalonde des ondes, est chroniqueur musical depuis plus de 25 ans au sein de la francophonie musicale canadienne et animateur de l’émission radiophonique Can-Rock. Il se fait un malin plaisir de partager cette richesse dans 16 stations de radio à travers le pays chaque semaine.

Plus sur la francophonie

La Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) a dévoilé mardi un mémoire sur la règlementation de la partie VII de la Loi sur les langues officielles (modernisée en juin 2023), qui touche notamment les responsabilités des institutions fédérales.

L’organisme de représentation suggère 14 principes afin de guider le travail du Secrétariat du Conseil du Trésor, propose des outils et appelle à de meilleures définitions de certains concepts inclus dans la Loi.

La FCFA demande aussi la clarification des responsabilités : «La loi demeure floue sur certaines responsabilités qui incombent au Conseil du Trésor et sur le partage des responsabilités avec le ministère du Patrimoine canadien.»

Raymond Théberge demande au gouvernement d’accélérer la règlementation de la nouvelle Loi sur les langues officielles. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

D’ailleurs, la FCFA demande «que ce soit une agence centrale, soit le Conseil du Trésor, qui se voit pleinement confier le mandat de la mise en œuvre de la LLO».

Dans son rapport annuel et lors d’une réunion au Comité permanent des langues officielles lundi, le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, a rappelé que la règlementation se faisait attendre.

En Comité, le député libéral Marc Serré a donné un échéancier plutôt vague à cet égard, mais il a assuré que les consultations des communautés se termineraient à l’automne 2024.

À lire aussi : La fonction publique réticente au bilinguisme, selon le rapport du commissaire

Le Canada, Israël et Gaza

Des frappes israéliennes ont fait des dizaines de morts et des centaines de blessés dimanche et mardi, à Rafah. Vendredi dernier, la Cour pénale internationale ordonnait à Israël de cesser immédiatement ses opérations dans cette ville du sud de la bande de Gaza.

«Même en temps de guerre, il y a des règles. Les images provenant de Rafah sont horribles et déchirantes. Notre position sur Rafah est claire et on la répète depuis des semaines», a déclaré lundi la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, dans la Chambre des communes.

Sur X, elle a rappelé que le Canada ne soutenait pas une opération militaire israélienne à Rafah.

Le Nouveau Parti démocratique (NPD) demeure toutefois insatisfait de cette réponse. Le député néodémocrate Alexandre Boulerice a notamment commenté la publication de Mélanie Joly, demandant quelle action elle allait entreprendre.

À lire aussi : Sans justice, il ne peut y avoir de paix (Chronique)

Des manifestants propalestiniens se sont réunis mercredi devant le Parlement, à Ottawa. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Lundi, le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, Marc Miller, a annoncé que le plafond des demandes de visa de résident temporaire pour les proches de Canadiens à Gaza qui pourront être traitées passait de 1000 à 5000 requêtes.

Marc Miller souhaite accueillir au Canada plus de personnes provenant de Gaza. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Le 29 avril, 179 visas avaient été octroyés dans le cadre de ce programme de visa.

Témoignant devant le Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration, le ministre Miller a dit ne pas savoir si les détenteurs de ces visas étaient arrivés au Canada ou non.

«Nous avons conçu cette politique en partant du principe qu’il y aurait une coopération pour assurer [aux Palestiniens] une sortie structurée par le point de passage de Rafah avec la coopération du COGAT [l’organisme du ministère israélien de la Défense chargé des affaires civiles dans les territoires palestiniens, NDLR]», a expliqué le ministre.

Mais cet espoir s’est dissipé en raison de l’escalade du conflit et de la fermeture des frontières, qui rend la logistique du programme difficile, a rapporté Marc Miller en comité.

«Bien qu’il ne soit actuellement pas possible de quitter Gaza, la situation peut changer à tout moment. Grâce à cette augmentation du plafond, nous serons prêts à aider davantage de personnes en fonction de l’évolution de la situation», a-t-il ajouté dans un communiqué de presse, lundi.

À lire aussi : Le destin complexe de Gaza

Un projet de loi adopté, un projet de loi déposé

Le projet de loi antibriseurs de grève a été déposé en novembre dernier par le ministre fédéral du Travail, Seamus O’Regan. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Ce projet de loi C-58, adopté à l’unanimité lundi, interdira le recours aux travailleurs de remplacement durant une grève ou un lockout dans les entreprises de compétence fédérale.

En troisième lecture à la Chambre des communes, les 317 députés ont voté en faveur de l’adoption du projet de loi. Il peut désormais passer dans les mains des sénateurs.

Un délai d’un an est prévu avant son entrée en vigueur. Le projet de loi prévoit aussi le maintien des activités dans l’entreprise en question, même durant un conflit, si un arrêt de travail peut entrainer des risques pour la santé ou la sécurité de la population, pour l’environnement ou pour l’état de l’équipement.

Le Bloc québécois a déposé jeudi un projet de loi visant à codifier le fait qu’un accusé a droit à un procès dans un délai maximal de 18 mois pour les causes entendues en cour provinciale et 30 mois pour les causes criminelles.

L’idée est d’empêcher des criminels d’obtenir un arrêt des procédures en invoquant l’arrêt Jordan, qui garantit le droit d’être jugé dans un délai raisonnable. Le projet de loi propose aussi d’utiliser la disposition de dérogation à la constitution afin d’encadrer son objectif.

«On a encore des procès qui, de façon absurde, sont abandonnés. Les procédures sont arrêtées, parce qu’on n’a pas réussi à juger les gens dans un délai raisonnable», déplore le porte-parole bloquiste en matière de justice, le député Rhéal Fortin.

«C’est un projet de loi qui tente de colmater une brèche dans notre système de justice pour s’assurer que l’accès à la justice soit respecté face aux crimes graves et violents», a expliqué le député du Bloc québécois, Denis Trudel, en point de presse jeudi.

Selon les députés, en s’attaquant à cet enjeu, ce projet de loi contribuera à rétablir la confiance du public envers le système de justice.

Le manque de services en français ne permet pas aux personnes de mettre des mots sur leurs maux, surtout lorsqu’il s’agit de santé mentale.

«Il faut être capable de bien s’exprimer. Si on s’exprime en anglais, ce n’est pas tout qui va sortir», a souligné la psychiatre à l’hôpital Monfort à Ottawa, Valérie Giroux, lors du colloque portant sur la santé des populations noires francophones en situation minoritaire, à l’occasion du 91e Congrès de l’Acfas.

À lire aussi : 91e Congrès de l’Acfas : «Nourrir la vitalité de la recherche en français»

Pouvoir s’exprimer en français

«Lorsque je suis en douleur, la langue des émotions c’est le français», a témoigné Bernadeth Betchi, doctorante en philosophie, Études féministes et de genre.

Mwali Murray et Saredo M Bouraleh expliquent qu’il ne suffit pas d’avoir un professionnel de la santé qui parle en français, il faut aussi une personne qui est familière avec les différentes cultures des communautés. 

Photo : Eya Ben Nejm – Francopresse

Pendant ses différentes grossesses, la chercheuse raconte que son premier réflexe était de demander aux sagefemmes si celles-ci parlaient et comprenaient le français «de façon confortable».

Ne pas pouvoir s’exprimer dans la langue de son choix ou ne pas obtenir un service de santé adéquat peut avoir des répercussions sur la santé du patient. On peut passer à côté d’un problème sous-jacent ou faire un mauvais diagnostic, informe la professeure adjointe à l’École des sciences infirmières de l’Université d’Ottawa, Mwali Muray.

Lorsqu’une personne n’arrive pas à parler de son état mental ou émotionnel, si elle doit le camoufler, des symptômes physiques peuvent se manifester, a ajouté la spécialiste.

Sensibilité culturelle

Pour l’étudiante en épidémiologie à l’Université d’Ottawa, Saredo M Bouraleh, pouvoir échanger avec un professionnel de la santé francophone n’est pas suffisant; le personnel médical doit aussi avoir une «sensibilité culturelle».

Un avis que partage Bernadeth Betchi, qui a fait une présentation sur la dépression postpartum et les défis des femmes noires francophones durant cette période.

Dans le cas de la dépression postpartum, le manque de sensibilité culturelle pousse les femmes noires à ressentir «le poids du monde sur [leurs] épaules», explique-t-elle, puisqu’elles ne savent pas à qui en parler et si elles seront comprises.

Qu’est-ce que la dépression postpartum?

La dépression postpartum, ou dépression postnatale, survient après l’accouchement et peut être grave. Les femmes peuvent éprouver un trouble du sommeil, de la fatigue, de l’anxiété, de la culpabilité et bien d’autres symptômes.

La dépression postpartum peut aussi être invisible et diffère d’une femme à une autre.

Il ne faut pas la confondre avec le baby blues, qui reste une déprime passagère et qui ne dure que quelques jours à quelques semaines.

Source : Le manuel Merck

La doctorante rappelle ainsi qu’il existe des différences culturelles entre les populations noires africaines, caribéennes et antillaises. Selon elle, il faut intégrer des profils diversifiés au sein du personnel de santé.

Quelques maladies peuvent être perçues différemment et restent taboues au sein de certaines communautés noires, détaille Mwali Muray.

Il peut s’agir de maladies en lien avec la santé mentale ou de pathologies physiques, comme le cancer du sein, complète la cofondatrice du Réseau des femmes congolaises, Anifa Kalay.

Anifa Kalay encourage les services de santé et les chercheurs à engager la conversation avec des organismes ou des personnes de la communauté pour offrir un service adéquat aux personnes noires francophones. 

Photo : Eya Ben Nejm – Francopresse

Saredo M Bouraleh ajoute que les professionnels de la santé doivent comprendre et connaitre ces aspects pour savoir «comment traiter et donner les soins nécessaires [adaptés]».

Pour y arriver, Anifa Kalay encourage les services de santé à approcher des organismes communautaires ou une personne de la communauté «qui peut venir avec des explications plus claires sur la façon dont cette maladie est perçue».

Lors du colloque, de nombreuses intervenantes ont également rappelé l’importance qu’accordent les populations noires à l’esprit de communauté.

Pour essayer d’aider les femmes noires francophones qui souffrent de dépression postpartum, Valérie Giroux leur conseille de demander à leur médecin, si elles le désirent, d’inviter une personne de confiance pour se sentir plus à l’aise.

Intégration et inclusion

Il y a aussi peu de recherches ou d’études sur les Noires francophones en milieu minoritaire, ont souligné les intervenantes.

Bernadeth Betchi a présenté les défis des femmes qui souffrent de dépression postpartum. 

Photo : Eya Ben Nejm – Francopresse

Pour les intégrer dans les recherches, il faut aussi trouver du personnel de recherche qui a une sensibilité culturelle afin d’assurer la représentation des communautés noires dans la recherche, appuie Anifa Kalay. «Parce qu’on a tendance à être plus rassuré quand on voit quelqu’un qui nous ressemble, on se dit que cette personne nous comprend.»

Pour elle, il faut aussi engager la conversation avec les organismes communautaires qui peuvent organiser des évènements pour sensibiliser.

«Nous avons commencé ce qu’on appelle des petites tables rondes avec les membres de la communauté. L’objectif principal n’est pas [de parler de la] recherche, mais nous essayons de greffer [le sujet] dans la discussion.»

Pendant ces rendez-vous, Anifa Kalay constate que les personnes veulent donner leurs avis. Il suffit d’être transparent sur les intentions de la recherche et ensuite de développer une stratégie pour savoir comment aborder les maladies considérées comme taboues.

Les organismes communautaires peuvent aussi approcher des personnes d’influence, comme un leadeur religieux, ajoute la cofondatrice du Réseau des femmes congolaises. «Souvent d’ailleurs, on descend dans les Églises pour pouvoir parler aux personnes avec l’appui du leadeur de cette église-là.»

Les électeurs touchés par les inégalités intergénérationnelles sont très courtisés à la fois par les libéraux et par leurs adversaires. Si les libéraux n’ont pas la faveur des électeurs âgés de 30 ans et plus, quelques électeurs âgés de 18-29 ans semblent ouverts à leur message. 

Justin Trudeau tente notamment de rebâtir son image pour regagner les appuis des plus jeunes électeurs de plus en plus nombreux – surtout les locataires âgés de 18-29 ans. Il est trop tôt pour savoir si ses efforts porteront fruit.  

Les Canadiens sont plutôt divisés sur l’augmentation du taux d’imposition sur le gain en capital – une mesure phare du budget fédéral de 2024. D’un côté, des sondages de la firme Abacus suggèrent que les libéraux regagnent des appuis chez les jeunes de moins de 30 ans, et un autre souligne que plus de jeunes – comparé aux autres groupes d’âge – disent que le budget a amélioré leur perception du gouvernement. D’un autre côté, un sondage réalisé par la firme Léger suggère que les libéraux sont au troisième rang avec seulement 14 % des intentions de vote chez les électeurs de 18-34 ans. 

Chez les électeurs dans la trentaine et la quarantaine, les conservateurs de Pierre Poilievre conservent tout de même une longueur d’avance encore très importante selon ces mêmes sondages.

Comme solution à la crise du logement et à la question de l’abordabilité du cout de la vie, le premier ministre tente de taxer davantage ceux qu’il considère être «les riches» pour financer (indirectement) la construction de logements abordables pour les jeunes et les familles de la classe moyenne.

La crise du logement au Canada n’a pas été causé par un seul évènement ou un seul facteur.

Photo : Rivage - Unsplash

Rappelons que la crise du logement au Canada est causée par plusieurs facteurs. Il y a entre autres la planification urbaine, les taux d’intérêt à leur plus bas jusqu’en 2022, la pénurie de main-d’œuvre spécialisée dans la construction, et les politiques de Justin Trudeau, telles que l’augmentation des niveaux d’immigration permanente et temporaire. 

Cette dernière politique a rapidement fait augmenter le nombre de nouveaux arrivants, rendant ainsi la vie peu abordable pour bon nombre d’immigrants eux-mêmes ainsi que pour bien d’autres Canadiens.

Une portée difficile à cerner

Justin Trudeau propose de faire passer le taux d’inclusion de l’impôt sur les gains en capital de 50 % à 66,67 % pour des gains de plus de 250 000 $ réalisés par un particulier dans une même année. 

Pour les entreprises, l’augmentation touchera en principe tous les gains en capital, même ceux qui permettraient de réinvestir dans la création d’emplois. Il va falloir attendre le texte du projet de loi du Parti libéral pour voir s’il y aura des exceptions. 

Justin Trudeau prétend que seulement les contribuables les plus riches seront touchés par la mesure annoncée dans le budget. Il passe sous silence que l’augmentation aura des répercussions sur beaucoup d’ainés qui misaient sur la vente d’un édifice à revenus ou d’actions achetées il y a 30 ans pour financer leur retraite.

Les chiffres qu’il utilise pour faire valoir que peu de contribuables seront affectés sont réfutés par des économistes. Les données du gouvernement soulignent aussi que 300 000 entreprises qui déclarent des gains en capital qui seront touchées par cette nouvelle mesure. Les entrepreneurs auront moins intérêt à investir dans de nouveaux projets et moins de capitaux pour le faire.

Le gouvernement offre un «nouvel incitatif aux entrepreneurs canadiens» pour limiter l’incidence sur les plus petits entrepreneurs. Cependant, les statistiques citées par le gouvernement sont celles des impôts d’une seule année. Ils ne prennent pas en compte les gains en capital qui n’ont pas encore été réalisés par les particuliers et les entreprises et qui seraient assujettis au taux d’inclusion supérieur quand les actifs imposables seront éventuellement vendus.

À lire : Budget 2024 : les riches paieront les nouvelles dépenses d’Ottawa

Les conservateurs coincés?

Plusieurs regroupements de gens d’affaires et des analystes économiques critiquent l’augmentation du taux d’imposition du gain en capital.

En temps normal, on pourrait croire que les conservateurs se porteraient plus à la défense des ainés et des créateurs de richesse. En 1999, nul autre que Pierre Poilievre disait favoriser l’abolition de l’impôt sur les gains en capital. Cependant, en tant que chef du parti, il fait appel aux travailleurs et aux jeunes dans ses messages politiques, plus qu’aux investisseurs dans un contexte où les inégalités de richesse augmentent.

Pierre Poilievre tente de maintenir une image de «Robin des Bois», qui est peu compatible avec la défense des «riches» investisseurs. Il s’abstient de commenter définitivement la mesure, mais il devra se prononcer quand le projet de loi sera déposé, si ce n’est pas avant.

Les conservateurs attendent probablement un changement de narratif ou d’opinion dans le débat public avant de s’avancer. Ou encore l’émergence d’autres détails concernant la portée et l’incidence des mesures, le texte du projet de loi ou même les résultats de sondages.

Comme tous les autres partis politiques, ils tentent d’éviter tout ce qui pourrait contredire ce qui est au cœur de l’image de leur chef. L’intégrité de l’image, voire sa simplicité, est valorisée en communication politique.

Prendre position contre la mesure risquerait d’être difficile à expliquer sans ternir l’image des nouveaux conservateurs, qui favorisent les jeunes travailleurs, et rappeler une image moins flatteuse, même mythique, des vieux riches conservateurs d’antan.

La ministre des Finances, Chrystia Freeland, n’a pas inclus le nouveau taux d’inclusion de l’impôt sur les gains en capital dans le projet de loi budgétaire. 

Photo : Julien Cayouette - Francopresse

La ministre des Finances, Chrystia Freeland, n’a pas inclus le nouveau taux d’inclusion de l’impôt sur les gains en capital dans le projet de loi budgétaire. Il fera plutôt l’objet d’un autre projet de loi séparé qui sera présenté avant l’été. Cette stratégie protègera les autres mesures budgétaires et assurera leur adoption plus rapide. 

La tactique permet aussi au gouvernement d’attirer plus d’attention sur la difficile prise de position de M. Poilievre. Si sa réponse semble nuire à son image, les libéraux n’hésiteront pas à prolonger le débat public. 

Est-ce qu’un éventuel gouvernement conservateur renverserait la mesure? Il est assez difficile pour les gouvernements de se priver de revenus qu’ils ont l’habitude de recevoir. La dépendance à ces revenus peut se développer assez rapidement.

Le gouvernement libéral du premier ministre Jean Chrétien a maintenu la TPS du gouvernement progressiste-conservateur précédent, malgré la promesse de l’abolir. 

Chez les conservateurs actuels, plusieurs favorisent une simplification des lois concernant les impôts et les taxes. Dans l’éventualité d’un gouvernement majoritaire, ils pourraient aborder la question dans ce contexte, si la volonté ainsi que les conditions politiques et économiques sont réunies. 

Au cours des prochaines semaines, on verra si la tendance permet aux libéraux de confirmer la sagesse de leur mesure – et à Pierre Poilievre de se prononcer davantage sur le sujet.

Carl Dholandas est conseiller en politiques publiques et en communication stratégique. Avocat-conseil en droit public et en droit des affaires, il a occupé des postes exécutifs aux ministères des Finances, de l’Industrie, de la Justice, de l’Immigration et des Affaires mondiales.

La ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, veut revoir le mandat de CBC/Radio-Canada. 

Photo : Courtoisie

La ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, a annoncé en décembre dernier qu’elle entreprendrait cette réflexion avant les prochaines élections en prévision d’un potentiel gouvernement conservateur qui promet de ne plus financer CBC, mais de conserver Radio-Canada.

À l’époque, elle avait expliqué le besoin de revoir les lacunes en information régionale et de moderniser le mandat de la société d’État.

Pour ce faire, elle s’est entourée de sept experts du milieu médiatique.

Les sept experts

«Il y a des gens compétents hors de tout doute, mais il manque certainement une représentation des francophones en milieu minoritaire au Canada», regrette la professeure titulaire en information-communication à l’Université de Moncton, Marie-Linda Lord.

«On voit qu’il y a d’autres minorités qui sont représentées au sein du comité. Bravo, c’est tant mieux, c’est important, nuance-t-elle. Mais encore une fois, quand vient le temps de parler de Radio-Canada, la minorité francophone est absente.»

D’après Marie-Linda Lord, les francophones en situation minoritaire sont parfois oubliés par Radio-Canada dans leurs productions nationales. 

Photo : Courtoisie

Ce n’est pas la première fois que les francophones hors Québec se sentent oubliés par la société d’État, avance la professeure. Elle donne l’exemple de la programmation nationale, à la télévision ou à la radio, qu’elle trouve très centrée sur le Québec.

«On est des exceptions à l’occasion lorsqu’on parle de nous», dit-elle.

Parmi les sept experts du comité, Loc Dao parle français et habite en Colombie-Britannique depuis plus de dix ans. Marie-Philippe Bouchard et Catalina Briceno, basées à Montréal, sont francophones. Ces dernières ont toutes les deux redirigé nos demandes d’entrevue au bureau de la ministre.

«Le Comité consultatif sur l’avenir de CBC/Radio-Canada est une ressource importante pour moi et notre gouvernement dans l’évaluation des nombreuses idées proposées au fil des ans. Nous sommes ravis de renforcer le radiodiffuseur public parce que les Canadiens ont besoin de nouvelles, d’informations et d’histoires canadiennes qui nous unissent d’un océan à l’autre», a répondu le Cabinet de la ministre par courriel.

Radio-Canada, «un poumon»

La présidente de la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF), Nancy Juneau, n’est pas certaine des connaissances dont disposent les sept experts de la réalité francophone en situation minoritaire, mais elle s’inquiète de ne pas voir un représentant officiel de cette francophonie.

Selon Nancy Juneau, la réflexion du comité d’experts doit servir à «solidifier ce qu’on a». 

Photo : Courtoisie

«On sait que ce sont des enjeux et des contextes qui sont vraiment spécifiques, donc j’espère que ce comité-là fera appel ponctuellement à des gens qui peuvent éclairer leur lanterne à ce niveau-là.»

Cette spécificité est due au fait que dans certaines régions, Radio-Canada est le seul diffuseur francophone présent. «Radio-Canada pour nous, c’est comme un poumon, explique-t-elle. C’est un poumon qui nous permet d’avoir des nouvelles et une programmation en français.»

À lire aussi : Les compressions à CBC/Radio-Canada devraient tenir compte des francophones

Selon Nancy Juneau, le «discours» général de la ministre inclut les communautés linguistiques en situation minoritaire. «On sent qu’il y a une sensibilité. Mais jusqu’à présent, il n’y a pas eu d’occasion de vérifier dans les actions comment cela se traduit. On en a une avec ce comité.»

«C’est un manque de connaissance et possiblement de sensibilité, corrobore Marie-Linda Lord. Il n’y a pas de malveillance de la part de ces gens-là, mais parfois, on ne peut pas connaitre ce qu’on ne connait pas.»

«Mieux servis par soi-même»

«Si les membres du comité sentent qu’ils n’ont pas toute l’information ou la connaissance dont ils ont besoin pour bien comprendre le rôle primordial du radiodiffuseur public en milieu minoritaire, on les invite à aller consulter les organisations», indique Nancy Juneau.

Liane Roy craint que la francophonie en situation minoritaire devienne un angle mort dans la réflexion de Patrimoine canadien. 

Photo : Chantallya Louis – Francopresse

Mais encore faudra-t-il que les experts aient le réflexe de consulter. La présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), Liane Roy, n’a pas assez de détails sur les experts choisis ni leur mandat exact afin de juger leur capacité à représenter les francophones en situation minoritaire.

Elle n’est pas pour autant rassurée. Si des membres du comité parlent français, ils ne sont pas là à titre de représentants des communautés francophones en situation minoritaire.

«Je pense que l’histoire démontre que quand on n’est pas là, on est absent, émet-elle. Quand on est là, on est plus capable de se représenter. Je ne dis pas que c’est toujours comme ça, mais souvent, on est mieux servi par soi-même.»

À lire aussi : L’indépendance de Radio-Canada (Chronique)

La loi à la rescousse?

Patrimoine canadien et Radio-Canada sont tous deux, à leur façon, soumis à la Loi sur les langues officielles (LLO).

Le ministère peut prendre des mesures de toutes sortes pour favoriser la progression vers l’égalité des deux langues officielles, notamment «pour appuyer le développement et la promotion de la culture francophone au Canada», dit la loi.

Radio-Canada, quant à elle, contribue «par ses activités à l’épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et à la protection et la promotion des deux langues officielles».

C’est quand même un diffuseur public et le mandat touche l’ensemble du Canada.

— Liane Roy

Un mandat qui dépasse l’information et permet la découvrabilité des contenus francophones produits à l’extérieur du Québec, affirme-t-elle, citant au passage le spectacle du Congrès mondial acadien, qui sera diffusé par Radio-Canada.

À lire aussi : Le Congrès mondial acadien est-il le plus grand évènement de la francophonie?

Marie-Linda Lord rappelle qu’il ne faut pas se fier uniquement à la LLO : «Être sujet à la Loi c’est une chose, mais Radio-Canada, c’est plus que ça. C’est aussi la vie communautaire, culturelle et politique […]. C’est beaucoup plus que la langue. C’est une question de visibilité des communautés dans toute leur diversité.»

L’intelligence artificielle (IA) peut-elle voler au secours du climat? Depuis quelques années, des études laissent entrevoir tout son potentiel pour mieux comprendre et lutter contre le dérèglement climatique. 

Un article scientifique a particulièrement marqué les esprits dans le domaine. Intitulé «Lutter contre le changement climatique avec l’apprentissage automatique», il a été publié en 2022 dans ACM Computing Surveys

Selon David Rolnik, l’impact de l’IA sur l’environnement dépend de la manière dont elle est utilisée : «Nous devons faire des choix en tant que société quant à l’utilisation de cette technologie, encourager les applications les plus bénéfiques pour la planète.» 

Photo : Courtoisie

David Rolnick, professeur à l’université McGill à Montréal, et une quinzaine d’autres auteurs y recensent les promesses de l’IA dans 13 secteurs, comme l’agriculture, le bâtiment ou encore l’urbanisme. 

Pour ces deux derniers secteurs, les promesses sont réunies sous le nom de smart city, pour ville intelligente et connectée. Ainsi, des systèmes automatisés peuvent détecter des fuites plus rapidement, optimiser les transports en commun ou encore adapter en temps réel chauffage et lumière selon la présence ou non de personnes dans les pièces. 

L’IA peut également réduire les émissions de carbone d’un bâtiment «en modélisant les données sur la consommation d’énergie et en optimisant l’utilisation de l’énergie», insistent les auteurs. 

À lire aussi : L’intelligence artificielle, une odyssée vers l’inconnu

Mieux anticiper la météo du lendemain 

Dans les champs, le nouveau terme employé est l’agriculture de précision. Autrement dit, une ferme équipée d’une multitude de capteurs et nourrie d’images satellites pour décider quand épandre ou quand planter, mais aussi détecter l’arrivée de maladies. 

Le but de ce déploiement technique peut servir à maintenir les rendements tout en limitant l’usage de produits chimiques, d’eau et les rejets de gaz à effet de serre. 

L’intelligence artificielle peut être un outil permettant de lutter contre le réchauffement climatique. Mais ces nouvelles technologies ont également un cout environnemental à ne pas sous-estimer. 

Photo : Mike MacKenzie – Flickr

«L’agriculture de précision pourrait réduire les émissions de carbone du sol et améliorer le rendement des cultures, ce qui pourrait réduire le besoin de déforestation», écrivent David Rolnick et ses collègues.

L’IA pourrait être aussi capable, un jour, de mieux anticiper la météo du lendemain que les modèles actuels. 

«Nous développons déjà des modèles de prédiction des inondations sur la rivière Ottawa, observe le professeur de génie civil à l’Université d’Ottawa, Hossein Bonakdari. L’IA va permettre de mieux prédire les évènements météorologiques liés au réchauffement.»

De son côté, Google promet depuis mai 2023 de mieux prévoir les inondations en les anticipant sept jours à l’avance dans 80 pays grâce à son outil Flood Hub

Mais ce développement ne se fait pas sans cout environnemental. Toute virtuelle qu’elle soit, l’IA repose sur des infrastructures bien physiques. Elle a par exemple besoin de capteurs pour s’alimenter, de serveurs pour fonctionner et même de satellites dans le cas de l’agriculture de précision.

«Les algorithmes avec lesquels nous travaillons pour aider le climat sont comme des souris; ils ne consomment pratiquement pas d’énergie, défend David Rolnick en entrevue avec Francopresse. Ce sont les grands modèles de langage comme ChatGPT qui sont l’équivalent d’éléphants très gourmands en énergie.»

Le professeur Hossein Bonakdari de l’Université d’Ottawa insiste sur le besoin d’une règlementation claire et détaillée pour encadrer l’IA. 

Photo : Courtoisie

Connaissances lacunaires 

De fait, les IA ultramédiatisées, comme le générateur de textes ChatGPT ou les générateurs d’images Dall-e ou Midjourney, impliquent des millions d’heures de calculs informatiques, donc la consommation d’une grande quantité d’électricité.

Cette électricité, encore rarement renouvelable, est synonyme d’autant d’émissions de gaz à effet de serre, que ce soit pour chaque ordinateur ou pour les plus de 8 millions de centres de données dans le monde.

En 2019, une équipe de l’université du Massachusetts avait ainsi calculé que le simple entrainement d’une IA équivaut  à 205 aller-retour Paris New York en avion en termes d’émissions de CO2

L’année dernière, une autre étude de l’université américaine du Colorado avait calculé que poser 25 questions à ChatGPT coutait un demi-litre d’eau douce; de quoi atteindre des millions de litres si l’on multiplie cela par les 200 millions d’utilisateurs de cet outil. 

Ces IA dites génératives ont un cout écologique colossal et leur utilisation va être amenée à exploser dans les années à venir. Plus il y aura d’utilisateurs, plus on devra stocker des milliards d’octets de données pour entrainer les algorithmes derrière.

— Hossein Bonakdari

Les générateurs de textes, comme ChatGPT, impliquent des millions d’heures de calculs informatiques, donc la consommation d’une grande quantité d’énergie.

Photo : Matheus Bertelli – Pexels

Ces chiffres donnent le tournis.Pourtant, ce ne sont que des estimations. Selon les chercheurs, il est impossible de calculer l’empreinte environnementale réelle, et ce, faute de données. 

«Les grandes entreprises du numérique ne partagent pas leurs chiffres sur la consommation en énergie, en eau et en matériaux de leurs IA, regrette Hossein Bonakdari. On ne dispose pas d’informations détaillées sur le cycle complet d’une IA, de sa conception à son utilisation.»

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Risque d’«accélérer les entreprises polluantes»

Le spécialiste s’inquiète également des grandes quantités d’eau nécessaires pour refroidir les serveurs informatiques : «À l’échelle de la planète, on estime que l’IA aura besoin de quatre à six-milliards de mètres cubes d’eau en 2027, ce qui représente 10 à 15 % de la consommation annuelle d’eau au Canada.»

Pour que les avantages de l’IA appliquée à l’environnement prennent le pas sur les inconvénients, les chercheurs s’accordent sur le besoin d’en encadrer les usages.

«Il faut avoir une règlementation claire et détaillée pour mieux contrôler le secteur, pour obliger les entreprises à utiliser des énergies renouvelables, à optimiser leurs algorithmes afin qu’ils soient moins énergivores», défend Hossein Bonakdari. 

L’IA peut contribuer à l’épanouissement de villes intelligentes et connectées. 

Photo : Gerd Altmann – Pixabay

«Quand un industriel veut mettre un produit sur le marché, il devrait être obligé de démontrer qu’il n’a pas un impact négatif sur le climat», ajoute-t-il. 

Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) écrit d’ailleurs à ce propos : «Les technologies numériques contribuent à la décarbonation seulement si elles sont gouvernées correctement». 

David Rolnick n’est pas non plus naïf et prévient : «Si elle n’est pas utilisée correctement, l’IA peut aussi accélérer les entreprises polluantes, la production de pétrole et de gaz a déjà augmenté de 5 % à cause d’elle.»

L’informaticien appelle à faire des choix de société «clairs» quant à l’usage de cette nouvelle technologie, en encourageant des utilisations qui s’alignent sur l’action climatique. 

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Aux dernières élections fédérales, en 2021, 46,7 % des personnes de 18 à 24 ans ont exercé leur droit de vote, selon Élections Canada, soit une baisse de 7,2 % par rapport à 2019.

Le manque d’intérêt ne peut expliquer à lui seul ce déclin significatif de la participation déjà faible des jeunes adultes aux élections.

Simon Thériault, président de la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF), pense au contraire que «les jeunes sont préoccupés par de nombreux sujets, comme l’éducation postsecondaire, les changements climatiques, l’avenir de notre planète, l’employabilité, les droits humains, la justice».

Le manque d’intérêt se trouve souvent de l’autre côté de l’équation.

Selon Simon Thériault, les cours en éducation à la citoyenneté, un intérêt porté par les partis politiques aux besoins des jeunes et le droit vote à 16 ans pourraient encourager les jeunes électeurs à aller voter. 

Photo : Courtoisie

Manque de proximité

Pour le président, les plateformes des partis politiques ne s’adressent cependant pas assez aux jeunes. À son avis, les promesses des candidats et leurs actions ne se concentrent pas suffisamment sur ce qui interpelle et inquiète la jeune génération d’électeurs.

«Généralement, les jeunes sont souvent moins contactés, mobilisés par les partis politiques lors des élections. Les partis politiques ont tendance à aller vers les citoyens plus âgés qui sont réputés voter» en plus grand nombre, confirme Valérie-Anne Mahéo, professeure adjointe au Département de science politique de l’Université Laval.

Même si, lors des élections de 2021, ce sont les personnes de 65 à 74 ans qui ont enregistré le plus haut taux de vote, soit 74,9 %, les candidats ne doivent pas oublier la jeunesse et ils doivent «avoir un dialogue franc et authentique pour comprendre leurs besoins», insiste Simon Thériault.

La professeure Mahéo rappelle que le travail des élus consiste à représenter tous les citoyens à la Chambre des communes ainsi qu’à informer et à rejoindre la population.

Selon elle, quand des politiciens ne s’intéressent pas à une partie des électeurs, comme les jeunes, il n’est pas étonnant de les voir se désintéresser de la politique.

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Selon la professeure Valérie-Anne Mahéo, pour comprendre l’absence des jeunes aux urnes, il faut d’abord voir cette tranche d’électeurs comme un groupe hétérogène. 

Photo : François Beauregard

Besoin de sensibilisation

La population aujourd’hui ne s’informe plus de la même manière qu’autrefois, ce qui se reflète sur l’action de voter, avance aussi Valérie-Anne Mahéo.

Les générations plus âgées ont tendance à consommer l’information par l’intermédiaire des médias traditionnels et des journaux imprimés, tandis que la première source d’information des jeunes aujourd’hui est plutôt les médias sociaux, ajoute-t-elle.

En plus, «le contenu médiatique qui est disponible sur les réseaux sociaux n’est pas forcément de qualité, véridique et vérifié», déplore la professeure.

Paul Howe, professeur de science politique à l’Université du Nouveau-Brunswick, est plus nuancé. Pour lui, l’arrivée d’Internet a permis aux personnes qui s’intéressaient déjà à la politique d’aller chercher encore davantage d’information.

Et pour les personnes déconnectées au départ de la réalité politique, il croit que le monde virtuel a simplement offert un autre moyen de se distraire de ce qui se passe sur la scène politique.

Donner l’exemple

Simon Thériault suggère que, pour aider les jeunes à s’intéresser au système politique et à savoir reconnaitre les fausses informations sur Internet, il faudrait davantage de cours d’éducation à la citoyenneté.

Il ajoute qu’une population bien informée permettra de maintenir en santé la démocratie canadienne.

Paul Howe abonde dans le même sens. Selon lui, de tels cours permettraient d’expliquer «à quel point il est important de protéger la démocratie, et qu’une partie [de la réponse] réside dans l’importance de la participation».

Pour contrer l’absentéisme dans l’isoloir, Valérie-Anne Mahéo tient à rappeler que l’intérêt porté par les parents à la participation politique a une incidence sur les futurs électeurs.

Le droit de vote à 16 ans?

Un autre facteur qui peut expliquer le faible de taux de participation des jeunes aux élections pourrait être leur manque de temps, théorise Valérie-Anne Mahéo.

Le professeur Paul Howe encourage les écoles à faire des activités sur l’importance de la participation politique pour protéger la démocratie.

Photo : Courtoisie

Après tout, au début de l’âge adulte, les jeunes vivent beaucoup de changements dans leur vie, que ce soit les études, un déménagement, un nouvel emploi et bien d’autres choses, énumère la professeure.

Pour initier les jeunes à l’exercice de leur droit de vote, Simon Thériault voit d’un bon œil l’idée d’abaisser l’âge du vote à 16 ans.

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Selon le président, le premier vote est le plus difficile, car il faut s’inscrire sur la liste électorale et comprendre le fonctionnement d’une élection. Vu que la plupart des jeunes de 16 ans habitent encore chez leurs parents, ils ne seront pas seuls dans cette nouvelle démarche.

Paul Howe estime aussi que le vote à 16 ans permettrait aux parents d’aborder le sujet avec leur enfant, mais aussi aux écoles de faire des activités autour du devoir démocratique.

Le professeur rappelle par ailleurs qu’il est maintenant plus facile de s’inscrire sur la liste électorale. Il est possible de le faire dès l’âge de 18 ans sur le site d’Élections Canada.

Quant aux jeunes de 14 à 17 ans, ils peuvent s’inscrire au registre des futurs électeurs.

Plus sur la francophonie

Le Comité permanent des langues officielles s’est réuni lundi pour débattre d’une motion demandant le retrait du député franco-ontarien Francis Drouin du comité et sa démission de la présidence de la section canadienne de l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF).

Francis Drouin demeure président de la section de l’APF, au grand regret du Bloc québécois. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Le député de Glengarry–Prescott–Russell a fait les manchettes après avoir traité deux témoins de «plein de marde» lors d’une réunion du Comité permanent des langues officielles, le 6 mai dernier.

Les libéraux ont été les seuls à ne pas appuyer cette motion, qui avait déjà été proposée au comité la semaine dernière. Comme la première fois, le président du comité, René Arsenault, a jugé la motion non recevable et a mis fin à la réunion.

Une version amendée de la motion a été proposée par les libéraux, mais la réunion étant terminée, aucun vote n’a eu lieu.

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Une assemblée générale extraordinaire de la section canadienne de l’APF, convoquée en réponse à une motion du Bloc québécois afin de discuter de sa démission comme président, s’est tenue jeudi.

Francis Drouin conserve son poste de président, malgré la volonté des bloquistes et des conservateurs.

La semaine dernière, le Journal de Montréal rapportait que les députés libéraux s’étaient empressés de s’inscrire comme membres de l’APF afin de soutenir leur collègue face à ce vote. 

En moins d’une semaine, le nombre de libéraux inscrits est passé de 26 à plus d’une centaine. Certains nouveaux membres sont unilingues anglophones.

Un nouveau projet de loi, un président dans l’embarras, une élection partielle et pas assez pour le logement

Le ministre Marc Miller souhaite rendre la citoyenneté plus inclusive. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, Marc Miller, a déposé le projet de loi C-71 qui modifierait la Loi sur la citoyenneté.

Si adoptée, cette loi donnerait automatiquement la citoyenneté aux personnes nées à l’étranger d’un parent canadien également né à l’étranger, et ce, avant l’entrée en vigueur du projet de loi.

La citoyenneté serait également accordée aux enfants nés à l’étranger adoptés par un parent canadien né à l’étranger.

La loi rétablirait la citoyenneté aux Canadiens qui en ont été dépossédés «en raison de dispositions désuètes de la législation antérieure sur la citoyenneté», rapporte le ministère dans un communiqué de presse

Cette mesure concernerait notamment les personnes ayant perdu la citoyenneté à l’âge de 28 ans, à cause d’un ancien article de la Loi sur la citoyenneté.

Les descendants de ces personnes se verraient aussi attribuer la citoyenneté avec cette nouvelle loi.

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Les conservateurs reprochent au président de la Chambre des communes, aussi député de Hull–Aylmer, d’avoir organisé un évènement partisan. Ils demandent, encore une fois, sa démission.

L’invitation à cet évènement, une soirée libérale à Gatineau en juin où on annonçait la présence de Greg Fergus, contenait initialement des attaques envers les conservateurs et leur chef, Pierre Poilievre. 

On pouvait y lire que «Pierre Poilievre et les conservateurs proposent des politiques irréfléchies qui pourraient nuire à votre santé, à votre sécurité et à votre portefeuille».

L’histoire est sortie dans les médias mardi. Depuis, l’invitation a été modifiée et le Parti libéral du Canada (PLC) s’est excusé auprès de Greg Fergus. Lui et son équipe n’avaient apparemment pas approuvé le texte de l’invitation.

«Le Parti libéral du Canada vous présente toutes ses excuses pour cette erreur et en assume l’entière responsabilité», lit-on dans une lettre signée par le directeur national du PLC, adressée au député et publiée sur X.

L’évènement en tant que tel, destiné à activer l’équipe de circonscription de M. Fergus en vue des prochaines élections, n’avait suscité aucune inquiétude chez le greffier de la Chambre.

Déclenchée dimanche, une élection partielle aura lieu le 24 juin dans la circonscription de Toronto–St. Paul. Le nouvel ou la nouvelle élu·e succèdera à la libérale Carolyn Bennett, qui a pris sa retraite de la vie parlementaire en décembre 2023.

Celle-ci a été députée de la circonscription ontarienne pendant 26 ans et ministre fédérale pendant plus de 10 ans. Son dernier portefeuille était celui de la Santé mentale et des Dépendances. Elle a été exclue du cabinet lors du dernier remaniement ministériel après avoir annoncé ne pas chercher à être réélue.

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Carolyn Bennett et Justin Trudeau à l’Assemblée générale annuelle de l’Assemblée des Premières Nations, en 2013. 

Photo : Justin Trudeau (Flickr)

Aux dernières élections, en 2021, Carolyn Bennett avait obtenu environ 49 % des votes. Son adversaire conservatrice en avait récolté 25,3 % et le candidat néodémocrate 16,8 %.

Leslie Church portera la bannière des libéraux dans Toronto–St. Paul. Mme Church est une ancienne cheffe de cabinet de la vice-première ministre et ministre des Finances, Chrystia Freeland.

Elle affrontera le candidat conservateur Don Stewart, un financier professionnel, et la candidate néodémocrate Amrit Parhar, directrice d’un organisme sans but lucratif.

La Stratégie nationale sur le logement du gouvernement fédéral vise à réduire l’itinérance chronique de 50 %. Les fonds prévus sont presque entièrement attribués au programme «Vers un chez-soi», qui finance les communautés.

Selon Sean Fraser, il ne faut pas négliger la construction de logements. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Mais selon le directeur parlementaire du budget, Yves Giroux, «il faudrait 3,5 milliards de dollars de plus par année pour atteindre cet objectif», soit sept fois plus que la moyenne du financement prévu dans la Stratégie.

Dans un rapport où il en arrive à cette conclusion, Yves Giroux rappelle que le nombre d’itinérants a augmenté de 20 % depuis 2018.

En mêlée de presse mercredi, le ministre du Logement, Sean Fraser, a rappelé que du financement autre que celui de «Vers un chez-soi» existe pour les communautés.

«La vérité est que nous ne pouvons pas nous contenter de soutenir les initiatives de lutte contre le sans-abrisme au niveau communautaire si nous voulons réellement mettre fin au sans-abrisme, a-t-il ajouté. Nous devons construire du logement abordable pour que les gens aient un endroit où aller, et pas seulement pour recevoir des aides temporaires.»

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«Comment pouvons-nous le moderniser et ne pas continuer à suivre ce qui était vrai en 1973?», s’est interrogée la sénatrice Flordeliz «Gigi» Osler, en conférence de presse le 21 mai.

La question de la modernisation est le point focal du nouveau rapport du Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie sur la main-d’œuvre temporaire et migrante du Canada.

De gauche à droite, les sénateurs Flordeliz «Gigi» Osle, Ratna Omidvar et René Cormier. 

Photo : Capture d’écran – Francopresse

Le Programme de travailleurs étrangers temporaires (PTET) a été créé en 1973 comme solution de dernier recours pour combler des besoins de main-d’œuvre. Comme l’a noté la sénatrice, il est devenu essentiel au marché du travail canadien.

Mais «le marché a changé, les emplois ont changé, les secteurs ont changé», a-t-elle déclaré.

«Le programme a été modifié dans les 50 dernières années. Des programmes ajoutés, des ajustements ici et là, mais il n’y a pas eu d’examen global du programme en lien avec le marché du travail et l’immigration [actuels].»

Le comité sénatorial recommande notamment la création d’une Commission tripartite sur le travail des migrants chargée de mener les réformes nécessaires.

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Une source d’immigration francophone

Dans le cadre de cette étude, les sénateurs du comité ont visité des communautés francophones en situation minoritaire au Nouveau-Brunswick. Dans leur rapport, ils reconnaissent leur «revitalisation», notamment grâce à la contribution de travailleurs étrangers temporaires.

«One size fits all ne fonctionne plus, on en est conscient», a lancé René Cormier en conférence de presse. 

Photo : Ericka Muzzo – Francopresse

«Nous avons appris que la première génération d’enfants d’anciens travailleurs étrangers temporaires brille maintenant dans les écoles de langue française et contribue à la langue et à la culture», s’est réjoui le sénateur René Cormier en conférence de presse.

«Ils sont fort bienvenus dans les communautés. Et nous avons encore besoin d’eux», a-t-il ajouté.

«Cependant, bon nombre des nouveaux arrivants dans cette région ne sont pas originaires de pays francophones», peut-on lire dans le rapport du comité.

Interrogé dans le cadre de cette étude, le ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et des Langues officielles, Randy Boissonnault, a déclaré le besoin de déterminer «qui vient des pays francophones parmi les bassins que nous comptons déjà».

Il s’est aussi montré ouvert à «examiner d’autres sources de travailleurs francophones» au besoin.

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De manière générale, la langue est identifiée comme une barrière à l’accès à des soins de santé, à la syndicalisation, à la représentation et à l’accès à la résidence permanente des travailleurs étrangers temporaires.

Dans cet esprit, les sénateurs recommandent la révision des critères d’éligibilité en matière de langue et d’éducation exigés pour présenter une demande de résidence permanente, ainsi qu’une formation linguistique ciblée.

En plus d’être un obstacle à l’obtention de la résidence permanente, le manque de compétences linguistiques en anglais ou en français entraine un risque réel pour la sécurité et une vulnérabilité accrue.

— Rapport du comité sénatorial

Les sénateurs précisent que les «agresseurs», des employeurs ou d’autres employés malfaisants, se servent parfois de la langue pour exploiter davantage les travailleurs migrants.

Vers l’abolition du permis de travail fermé?

Le rapport porte en grande partie sur les droits des migrants temporaires. Dans cet ordre d’idées, il ajoute sa voix au débat plus large pour l’abolition des permis de travail fermés.

Dans leur rapport, les sénateurs recommandent que le gouvernement «établisse et mette en œuvre un plan afin d’éliminer progressivement le permis de travail lié à un employeur donné au cours des trois prochaines années».

Selon le Conseil canadien pour les réfugiés, le permis fermé, qui lie l’employé à un seul employeur, vulnérabilise les travailleurs migrants. «Si les employeurs en question ne les traitent pas bien, ils sont quand même pris, je dirais, avec ces employeurs-là», a observé René Cormier en conférence de presse.

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La recommandation du comité sénatorial fait écho à la demande de plusieurs organismes et à celle du rapporteur spécial des Nations Unies sur les formes contemporaines d’esclavage, Tomoya Obokata, qui était revenu «profondément troublé» de ses deux semaines au Canada.

«Les programmes de travailleurs étrangers temporaires du Canada sont un terrain propice aux formes contemporaines d’esclavage», alertait-il dans une déclaration de septembre 2023, dans laquelle il réclamait la fin des permis de travail fermés.

Dans leur rapport, les sénateurs recommandent que la Commission tripartite sur le travail des migrants comprenne un commissaire aux travailleurs migrants habilité «à défendre les droits des travailleurs migrants au Canada et à servir de point de contact et de réponse unique pour recevoir les signalements d’abus et de mauvais traitements».

Ils demandent aussi des inspections plus rigoureuses et non annoncées des lieux de travail. «Nous avons entendu que les inspections sont souvent annoncées à l’avance aux employeurs, ce qui leur donne une opportunité de préparation», a souligné la sénatrice Ratna Omidvar en conférence de presse.

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Le droit de se syndiquer

«La plupart des conclusions du Comité concordent avec les recommandations politiques du Centre contre la traite de personnes publiées l’année dernière», déclare Julia Drydyk, directrice générale du Centre, dans un communiqué.

«Même si le rapport met en avant des réformes cruciales, il reste nécessaire de garantir que tous les travailleur·euses migrants aient le droit de se syndiquer», dit-elle.

Dans certains cas, les travailleurs migrants ne sont pas autorisés à se syndiquer, reconnait le comité sénatorial dans son rapport.

Le rapport cite une avocate sur cette question : «[…] si l’on apportait des modifications législatives pour permettre aux travailleurs de se syndiquer là où ils n’ont pas actuellement le droit de le faire, il faudrait “garantir que les travailleurs sont même en mesure de faire valoir les droits dont ils disposent”».

Un manque de données

Des «lacunes persistantes» en termes de données sur les travailleurs migrants ont été rapportées au comité sénatorial qui recommande une stratégie d’échange d’information entre les ministères fédéraux et provinciaux et l’appui des organismes communautaires et d’aide à l’établissement pour obtenir des données locales.

On parle aussi de permettre à la Commission de recueillir, d’analyser et de diffuser des données sur l’expérience des travailleurs migrants au Canada et leur rôle sur le marché du travail.

Les sénateurs proposent enfin que le gouvernement «recueille et diffuse entre les ministères plus de données sur l’identité, notamment la race, les langues parlées et la scolarité».

Le projet de loi sur le Programme de contestation judiciaire (projet de loi C-316) vise à pérenniser ce programme, qui fournit un soutien financier aux Canadiens et Canadiennes se présentant devant les tribunaux pour faire valoir certains droits constitutionnels et quasi constitutionnels.

Le programme a toujours été «vulnérable au vent politique», lance François Côté, avocat chez Droits collectifs Québec, lors de la réunion du Comité permanent du patrimoine canadien du 9 mai.

«[Ce programme] a été aboli, rétabli, réaboli et rétabli depuis les années 1990 à plusieurs occasions, explique-t-il. Certains pourraient dire que [C-316] est une manière d’éviter que [le PCJ] ne soit laissé au seul vent politique du prochain gouvernement au pouvoir».

François Larocque souligne que le rôle du Programme de contestation judiciaire est inscrit dans la nouvelle Loi sur les langues officielles. 

Photo : Valérie Charbonneau

C–13, un premier pas

«On a déjà enchâssé, dans une certaine mesure, le PCJ» dans la modernisation de la Loi sur les langues officielles (C-13), avance François Larocque, professeur de droit à l’Université d’Ottawa, en entrevue avec Francopresse.

La loi modernisée stipule que la personne ministre du Patrimoine canadien peut prendre des mesures telles que «fournir du financement à un organisme indépendant du gouvernement fédéral chargé d’administrer un programme dont l’objectif est de fournir du financement en vue de la présentation devant les tribunaux de causes types d’importance nationale qui visent à clarifier et à faire valoir des droits constitutionnels et quasi constitutionnels en matière de langues officielles».

«Si le Parlement a pris la peine de mettre [le PCJ] dans une loi, c’est beaucoup plus difficile pour un gouvernement de venir le couper complètement ou de couper son financement», assure François Larocque.

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Une bête élitiste?

Josh Dehaas, conseiller juridique à la Canadian Constitution Foundation, a lui aussi témoigné devant le Comité permanent du patrimoine canadien, mais pour demander l’abolition de ce programme.

«Le programme risque de modifier la Constitution à travers les biais idéologiques du ministre responsable du programme et de ceux qui décident quels cas sont financés», dit-il.

Selon Josh Dehaas, de la Canadian Constitution Foundation, il faudrait abolir le Programme de contestation judiciaire. 

Photo : Capture d’écran

À ce propos, Josh Dehaas fait référence au fait que l’Université d’Ottawa a été choisie par le ministère du Patrimoine canadien comme organisme indépendant responsable de la mise en œuvre et de l’administration générale du programme.

Selon lui, le groupe d’universitaires et d’administrateurs «travaillant à l’intérieur de la bulle d’Ottawa» et «issus d’un groupe d’élite d’universitaires juristes» ne représente pas les points de vue généraux de la population canadienne sur le droit ou sur les questions d’importance nationale.

En vérité, nuance François Larocque, le choix des causes financées n’appartient pas aux employés de l’Université d’Ottawa. Cette dernière est plutôt responsable de «l’administration bureaucratique» du PCJ.

Pour le choix des causes financées, «il y a deux comités d’experts, un du côté droits linguistiques et un du côté droits de la personne, […] constitués de professeurs d’autres universités et d’experts de la société civile», précise François Larocque.

«Je pense que c’est un commentaire qui se veut antiexpertise, estime le professeur à l’égard du témoignage de Josh Dehaas. Lui-même, en tant que juriste, il vit au jour le jour de son expertise. Il veut qu’on l’écoute parce qu’il est un expert en droit. Et donc pourquoi son expertise serait meilleure que celle des autres?»

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En comité, Josh Deehas suggérait qu’en abolissant le PCJ, les citoyens pourraient décider de dépenser leur argent dans d’autres instances, telles que la Canadian Constitution Foundation, qui est en fait son employeur.

Il croit aussi que l’élimination du PCJ permettrait aux débats juridiques de se faire au Parlement plutôt que devant les tribunaux, une ambition que François Larocque ne partage pas.

[On a] créé une Charte des droits et libertés qui serait contenue aux tribunaux pour justement sortir de l’arène politique ces questions fondamentales des droits des citoyens.

— François Larocque

Un projet démocratique

Selon François Larocque, le PCJ «a une vision assez noble, avancée et sophistiquée sur le plan démocratique».

Le gouvernement finance «les recours judiciaires constitutionnels contre le gouvernement lui-même, fait-il remarquer. Pourquoi? Pour faire avancer la jurisprudence en matière linguistique et en matière de droit de la personne.»

Il ajoute que ce programme permet d’interpréter la Charte des droits et libertés et ainsi de créer une «boussole pour la société canadienne».

Mais comme rien n’est parfait, François Larocque reconnait qu’il y a moyen de renforcer la transparence du PCJ, notamment en faisant connaitre davantage ses activités.

Selon l’avocat François Côté, deux éléments du projet de loi méritent d’être améliorés.

Photo : Capture d’écran – Francopresse 

Transparence et compétences

Bien que l’organisme Droits collectifs Québec approuve ce projet de loi, il propose deux améliorations. La première serait d’ajouter un mécanisme de reddition des comptes. 

«Le projet de loi mentionne dans son préambule l’objectif d’obliger le gouvernement à rendre des comptes, rappelle François Côté. Cela ne devrait-il pas, en toute et première logique, s’appliquer à l’administration des fonds […] eux-mêmes?»

«Une contestation constitutionnelle, poursuit-il, c’est le fait de remettre en cause la validité des lois de l’État fédéral ou d’une province. C’est l’utilisation des fonds publics pour changer les lois et politiques de l’État. Il y a un intérêt public à savoir ce qui est fait de cet argent et quelles causes il finance, tout en respectant la confidentialité des parties.»

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La seconde amélioration proposée porte sur les champs de compétences. Selon François Côté, le programme ne devrait pas financer la contestation de lois provinciales.

Si le PCJ peut effectivement servir à remettre en cause une loi provinciale, François Larocque rappelle que «les provinces ont le dernier mot, grâce à l’article 33 de la Charte» qui concerne la clause dérogatoire à laquelle peuvent avoir recours les provinces afin de contourner certains droits de la Charte. 

Le projet de loi C-316 est actuellement en troisième lecture à la Chambre des communes.