le Samedi 13 septembre 2025

Les unions entre Autochtones et colons européens sont survenues très tôt dans l’histoire de la Nouvelle-France. Le premier enfant connu d’un couple mixte est André Lasnier, né vers 1619 à Port Latour, en Acadie, fils de Louis Lasnier et d’une «Canadienne». 

La naissance d’une véritable communauté métisse dans ce qui est aujourd’hui le Canada se déroule cependant bien plus tard et bien plus loin des côtes de l’océan Atlantique. La traite des fourrures en sera la genèse.

Au cours du XVIIe siècle, coureurs des bois, trappeurs et négociants français, puis ceux nés en Nouvelle-France, prennent d’assaut la région des Grands Lacs. Plusieurs de ces aventuriers s’unissent avec des femmes autochtones. Mais ce n’est qu’au siècle suivant que de petits groupes familiaux mixtes s’établissent un peu à l’écart des Autochtones et des Blancs. 

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La Terre de Rupert octroyée à la Compagnie de la Baie d’Hudson équivalait au tiers du Canada actuel. 

Photo : Wikimedia Commons, Attribution – Partage dans les Mêmes Conditions 3.0

La Compagnie de la Baie d’Hudson

En 1670, la Compagnie de la Baie d’Hudson (CBH) voit le jour. Elle obtient une charte royale britannique qui lui donne le monopole du commerce de la fourrure dans la «Terre de Rupert», un immense territoire allant du nord du Labrador jusqu’aux Rocheuses. 

Bon nombre d’officiers et autres employés de la Baie d’Hudson fondent des familles avec des Autochtones. 

En 1811, la CBH accorde à l’un de ses actionnaires, l’Écossais Thomas Douglas, comte de Selkirk, un vaste territoire qui couvrait cinq fois la superficie de l’Écosse et qui s’étendait de la Saskatchewan actuelle jusqu’au nord-ouest de l’Ontario d’aujourd’hui, débordant même dans des parties des états américains actuels du Minnesota et du Dakota du Nord.

Lord Selkirk y fonde une colonie au confluant des rivières Rouge et Assiniboine, dans le Manitoba actuel. Il attire des Écossais et des Irlandais pour peupler le nouvel établissement, qui devient la première colonie agricole du Canada.

Les conflits prennent fin lorsque les deux compagnies fusionnent en 1821. La nouvelle Compagnie de la Baie d’Hudson se retrouve alors avec un surplus d’employés. 

«Wigwam», un Métis saulteaux, communauté autochtone du nord-ouest de l’Ontario, 1858. 

Photo : Bibliothèque et Archives Canada / Fonds Humphrey Lloyd Hime / c016447

Mais la naissance de cette colonie est perçue comme une menace par la grande rivale de la CBH, la Compagnie du Nord-Ouest (CNO), et par les Métis qui l’approvisionnent ou qui y travaillent, dont Cuthbert Grant. Celui-ci prend la tête d’un groupe de Métis qui décide d’expulser les colons de la rivière Rouge. Lors d’un combat, le gouverneur de la colonie, Robert Semple, et plusieurs habitants trouvent la mort.

En conséquence, plusieurs agents métis décident de partir pour aller s’installer à la rivière Rouge avec leur famille. C’est à cet endroit que prendra naissance la communauté métisse du Manitoba.

Mais d’autres conflits surviennent. En 1835, la CBH prend directement le contrôle de la colonie de la rivière Rouge et forme le Conseil d’Assiniboine, qui devient un véritable gouvernement local au sein duquel les habitants métis et canadiens-français y sont représentés aux côtés des Écossais et des Irlandais.

D’une colonie à une province

Au cours des prochaines décennies, les Métis deviennent de plus en plus nombreux au sein de la colonie et s’opposent avec plus de vigueur au Conseil d’Assiniboine. 

Les membres du gouvernement provisoire, avec Louis Riel au centre. 

Photo : Bibliothèque et Archives Canada / Fonds Topley Studio / a012854

En 1867, c’est la Confédération; deux ans plus tard, la CBH vend la Terre de Rupert au gouvernement du Canada. Les Métis sont offusqués que tout se soit passé sans qu’ils aient un mot à dire.

Ottawa pousse la provocation en dépêchant des arpenteurs pour cartographier la région, sans égard aux Métis qui y habitent. 

Craignant l’arrivée massive de colons anglo-protestants de l’Ontario, les Métis, menés par un jeune membre instruit de leur communauté du nom de Louis Riel, chassent les arpenteurs et s’emparent d’un poste de traite. C’est la «Rébellion de la rivière Rouge».

Quelques mois plus tard, un gouvernement provisoire, dont Louis Riel devient le président, est chargé de négocier l’annexion de la colonie au Canada comme cinquième province.

Des conseillers de Louis Riel emprisonnés, ici devant le palais de justice de Regina, aout 1885. 

Photo : Bibliothèque et Archives Canada / O.B. Buell / Fonds Ernest Brown / c006688b

La pendaison du chef des Métis, Louis Riel, est un évènement majeur dans l’histoire du Canada. Photographié ici entre 1870 et 1873. 

Photo : Bibliothèque et Archives Canada / Fonds Jean Riel / e011156648

Les pourparlers mènent à la création du Manitoba en juillet 1870, avec certaines garanties et certains privilèges pour les Métis, dont la promesse d’une réserve de 1,4 million d’acres de terre.

Mais entretemps, un certain Thomas Scott, qui avait tenté de renverser le gouvernement provisoire, est condamné à mort par une cour martiale, quelques mois avant la création de la province. En aout, un détachement militaire envoyé par Ottawa pour maintenir la paix cherche à venger Scott. Riel fuit aux États-Unis.

Malgré les promesses de la Loi sur le Manitoba, des centaines de Métis sont chassés de leurs terres par des colons, principalement ontariens, et trouvent refuge plus à l’ouest. Les Métis de cette région entreprendront à leur tour une résistance, la «Rébellion du Nord-Ouest», en convainquant Louis Riel de revenir de son exil et d’en prendre la tête. 

Après la défaite à Batoche, Riel se rend et est pendu le 16 novembre 1885.

La lutte se poursuit 

Au Manitoba, les Métis ne constituent alors plus que 7 % de la population. Au cours des décennies suivantes, les Métis de l’Ouest seront confrontés à la pauvreté, au racisme et au dénigrement. De nouvelles organisations prennent forme pour défendre leurs droits et font quelques gains.

Wab Kinew (né Wabanakwut) a marqué l’histoire en octobre 2023 en devenant le premier Autochtone à être élu premier ministre d’une province canadienne. 

Photo : Wikimédia, domaine public.

Les revendications et les pourparlers des années 1960 et 1970 aboutissent à l’adoption de la Charte des droits et libertés en 1982, dans le cadre du rapatriement de la Constitution canadienne. Les Métis sont reconnus en tant que peuple autochtone au même titre que les «Indiens» (nom alors utilisé pour désigner les Premières Nations) et les Inuits.

En 2013, la Cour suprême du Canada reconnait que le fédéral a failli à son obligation de distribuer aux Métis les terres promises lors de la création du Manitoba. Des négociations s’ensuivent et aboutissent à une entente en 2016 entre la Fédération métisse du Manitoba et Ottawa.

Puis, en 2021, les deux parties signent un accord reconnaissant l’autodétermination et l’autonomie gouvernementales de la communauté métisse. En 2023, le fédéral reconnait certains gouvernements métis de l’Ontario, de la Saskatchewan et de l’Alberta.

En octobre 2023, Wab Kinew est élu premier ministre du Manitoba. Il est le premier autochtone à réaliser cet exploit dans une province canadienne. Comme il l’avait promis en campagne électorale, la première loi qu’il fait adopter par l’Assemblée législative est la reconnaissance de Louis Riel comme premier premier ministre du Manitoba.

Une longue, très longue boucle de bouclée.

La faculté d’éducation et celle des sciences fournissent des informations sur les formations en français, tandis que la French Cohorte en affaires publiques et relations internationales, un programme phare du BAFF avec 65 % des cours en français, est également représentée.

Donner un sens à la pratique du français

Assis à une table pour déjeuner, Elliot 18 ans et Clara 17 ans, entament leurs premières années à l’université. Nés et élevés à Vancouver, ils ont tous les deux ajouté une mineure de français à leur formation. «J’étudie la physique mais j’adorerais enseigner les sciences en français», explique le jeune homme qui a été scolarisé dans une école secondaire en français. Aucun des deux n’utilisent la langue avec leur entourage familial, alors ils cherchent à s’associer à la communauté pour pratiquer. «C’est génial de pouvoir m’agripper à ces événements en français parce qu’en dehors de l’université, je n’y vais pas», ajoute-t-il. Même si de plus en plus de programmes proposent une mineure en français, des obstacles récurrents subsistent dans la poursuite d’études en français en Colombie-Britannique.

Si le cœur de la mission du BAFF est de permettre à des jeunes adultes de poursuivre des études postsecondaires en français, en milieu minoritaire, il ne s’arrête pas là. Et le directeur Gino LeBlanc tient à le souligner : «Notre deuxième mandat, tout aussi important, est de faire rayonner les cultures francophones», pose-t-il. Ses propos sont parfaitement illustrés dans le discours d’Anika Clark, une étudiante en quatrième année de la French Cohorte qui témoigne de ses doutes et de ses succès. «C’est lors d’un voyage à Winnipeg que j’ai pu enfin parler le français dans un contexte autre qu’académique et c’était incroyable» s’émerveille-t-elle au micro.

Le Printemps de la francophonie comme outil 

Pour le directeur, il est difficile de s’attacher à une langue si on ne l’utilise pas dans la vie quotidienne. Et pour « donner un sens de pratiquer le français », le BAFF organise chaque année depuis 14 ans, soit presque aussi longtemps que sa propre existence, le Printemps de la francophonie. Prévu au mois de mars, il rassemble divers arts comme la littérature, la musique et le théâtre. L’an passé, une conférence avait reçu la célèbre écrivaine québécoise d’origine vietnamienne Kim Thuy. 

Après vingt ans d’existence du BAFF, Gino LeBlanc attribue cette réussite au lien étroit et fort avec la communauté francophone de la Colombie-Britannique. «C’est la communauté qui a eu l’idée de créer le BAFF en 2004, rappelle-t-il en préambule de son discours. Le BAFF, c’est le projet de la charte des libertés et celui des langues officielles». Et ce maillage avec la communauté se retrouve aussi dans le mode de gouvernance du bureau. Le comité consultatif est convoqué deux fois par an pour avoir des retours sur les décisions importantes. «Je porte le flambeau de deux directions avant moi, précise Gino LeBlanc. Je pense que la clé c’est qu’on s’est développé étapes par étapes», pointe-t-il. Avec huit étudiants au départ, il compte aujourd’hui 30 programmes différents et plus de 5 000 étudiants formés en français en milieu minoritaire.

À l’ère des réseaux sociaux et des plateformes numériques aux offres surabondantes venant d’ailleurs, les jeunes regardent de moins en moins la télévision traditionnelle au Canada.

Une majorité des 18 à 34 ans (62 %) regardent la télé par Internet, contre 42 % chez les 35 à 54 ans et seulement 18 % chez les 55 ans et plus, observe le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) dans un récent rapport.

Dans ce nouveau paysage audiovisuel, les chaines et les maisons de production tentent de s’adapter.

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«En contexte francophone minoritaire, les conseils scolaires, les enseignants, les écoles deviennent nos alliés», témoigne Fabienne L’Abbé. 

Photo : Courtoisie Slalom

S’adapter pour ne pas être zappé

«On regarde beaucoup ce qui se fait ailleurs, sur le Web, et c’est toujours du montage très rapide, beaucoup de graphismes, une présentation très informelle», remarque la directrice des coproductions et des acquisitions chez TFO, Marianne Lambert.

«On s’inspire de ce que les jeunes connaissent déjà. On sait que les ados aiment bien se filmer pour partager des mouvements de danse ou partager une opinion sur quelque chose», observe la productrice de Slalom, Fabienne L’Abbé, comme les vidéos sur Snapchat ou TikTok.

La maison de production ottavienne alimente d’ailleurs ses propres réseaux sociaux pour rester connectée avec son public, en montrant par exemple les coulisses de ses tournages.

«La chose la plus importante, c’est de passer du temps avec les jeunes, être curieux, qu’est-ce qui les intéresse, qu’est-ce qui les interpelle», poursuit la productrice.

Néanmoins, bien que pédagogiques, les émissions doivent rester divertissantes et visuellement attrayantes pour capter l’intérêt des jeunes, indique-t-elle, surtout quand ils grandissent et que le facteur «cool» devient important.

«La famille, c’est un facteur important pour que les jeunes puissent regarder la télé aussi […] si les parents eux-mêmes ne regardent pas beaucoup la télé, c’est sûr que les jeunes ne seront pas nécessairement des consommateurs de ce médium-là», remarque Stéphane Villeneuve. 

Photo : Courtoisie

Stéphane Villeneuve, professeur au Département de didactique à l’Université de Québec à Montréal (UQÀM), estime que la télévision a un gros travail de markéting à faire pour attirer les jeunes, étant donné que la vie sociale de la nouvelle génération se passe maintenant essentiellement en ligne.

«Les réseaux sociaux tentent de nous rendre accros au contenu par l’utilisation de leur plateforme tandis que la télé n’a pas été construite pour ça. Les gens ne peuvent pas interagir avec l’écran de télé», constate le spécialiste.

Pour être plus compétitif, le médium devra peut-être intégrer des éléments interactifs, imagine-t-il, évoquant au passage l’intelligence artificielle.

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Temps d’écran et santé publique

Dans un monde où tout est «très, très rapide, le contenu est consommé en moins de 15-20 secondes sur Instagram», commente Stéphane Villeneuve. «C’est pas facile d’assoir un jeune et de dire “OK, regarde ça pendant une heure”.»

Pour Andréanne Gagné, la télévision a encore un rôle à jouer auprès des jeunes, mais a-t-elle les moyens financiers de le faire? «De moins en moins», tranche la chercheuse. 

Photo : Courtoisie

«La télévision confinait l’usage de l’écran de l’enfant à un lieu, un moment, un contenu […] Alors que maintenant, avec notre cellulaire, on traine ça dans notre poche», illustre de son côté la professeure titulaire à la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval, Andréanne Gagné.

«En termes de santé publique, la télévision représente encore cet avantage-là.»

Selon elle, restreindre l’usage des écrans favoriserait un développement plus équilibré chez les jeunes. Elle évoque, par exemple, l’interdiction des cellulaires dans les écoles de certaines provinces.

La télévision offre en outre un cadre plus structuré. La publicité destinée aux enfants est règlementée par le CRTC, rappelle-t-elle.

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Intelligence émotionnelle et écoanxiété

Les thèmes des émissions ont aussi changé, ou du moins évolué. «Cette année, on parle beaucoup d’intelligence émotionnelle […] apprendre à identifier les émotions, les écouter, les réguler», décrit Marianne Lambert. Même chez les tout-petits.

«On observe et on entend parler du niveau d’anxiété qu’ils ont déjà. Si je compare à mon enfance – je suis dans la mi-quarantaine – je ne savais même pas c’était quoi l’anxiété», confie la directrice du développement et productrice exécutive, enfance et jeunesse chez TFO, Renée Paradis.

«On a vraiment fait très, très, très visuel pour aller chercher les jeunes», témoigne Simon D’Amours, réalisateur et producteur, évoquant Va jouer dehors, une série qui encourage les jeunes à sortir au grand air. 

Photo : Courtoisie

«Notre approche dans la série Effet Domino, c’est de toujours regarder le positif et de dire, oui ça, c’est le fait, mais il y a toujours de l’espoir et c’est comme ça qu’on rencontre les jeunes», appuie Renée Paradis. 

Photo : Courtoisie

La productrice Geneviève Cousineau rappelle que ce sont les parents qui ont le contrôle sur la manette, pour les plus petits téléspectateurs. 

Photo : Courtoisie Slalom

Selon le réalisateur dans l’Ouest canadien Simon D’Amours, l’intelligence émotionnelle reste trop souvent négligée, tant dans les contenus pour les jeunes que dans la société en général, alors que «c’est la base», estime-t-il.

Certaines productions abordent également l’écoanxiété, tout en évitant d’ajouter à l’inquiétude ambiante. «On essaie d’avoir un angle positif, d’outiller les jeunes, de ne pas être défaitistes, de donner des solutions. On veut leur montrer que chaque petit geste compte», explique Marianne Lambert. Elle prend l’exemple de la série Effets dominos, qui met en lumière des initiatives pour protéger la planète.

Pour inspirer les jeunes, SLALOM propose des contenus qui évoquent la citoyenneté numérique, les métiers spécialisés ou encore l’entrepreneuriat. «On vient répondre à un besoin, mais on vient aussi piquer la curiosité», témoigne la productrice Geneviève Cousineau.

Sans oublier de mettre à l’écran «des jeunes qui leur ressemblent, qui parlent avec tous les accents de la francophonie canadienne», souligne-t-elle.

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La série Cirkus s’adresse aux enfants de 6 à 8 ans. «C’est sûr que de rejoindre notre public à cet âge-là, c’est un peu plus difficile. On doit passer par les parents en premier pour pouvoir les intéresser», avoue Geneviève Cousineau. 

Photo : Antoine Simard-Legault

Identités francophones

Les émissions jeunesse mettent également en lumière la diversité culturelle et linguistique, un sujet essentiel dans les communautés francophones en situation minoritaire, insiste Marianne Lambert.

«Il y a beaucoup de gens qui sont issus de l’immigration, donc c’est important de montrer ça dans tous nos contenus.»

Marianne Lambert souligne l’importance pour les diffuseurs éducatifs de proposer des contenus divertissants tout en restant pédagogiques et de créer un environnement sûr pour les jeunes téléspectateurs, sans publicité. 

Photo : Courtoisie

La série Hôtel Beyrouth suit notamment la trajectoire d’une famille qui a fui la guerre au Liban à la fin des années 1980 pour s’installer à Ottawa. «L’histoire est racontée à travers les yeux de deux enfants de cette famille», précise la directrice.

«On célèbre la diversité des accents, on aime qu’il y ait différents accents, d’Afrique, d’Acadie, du Manitoba», ajoute-t-elle.

Les chaines en français jouent un rôle important dans la préservation et la promotion de la culture francophone, dans un contexte où l’accès au contenu anglophone est omniprésent, appuie Stéphane Villeneuve.

Pour Geneviève Cousineau, cela contribue à renforcer la fierté francophone des jeunes sur le long terme. «Si on ne produit plus de séries jeunesse en français, ça va être difficile de garder ces gens-là attachés à la culture et à vouloir consommer de la télévision francophone en tant qu’adulte.»

Pour Mario Levesque, professeur agrégé au département de politique et de relations internationales de l’Université Mount Allison, à Sackville, dans le sud-est de la province, le Nouveau-Brunswick n’a pas de poids en politique fédérale.

S’il s’agissait «du Québec, de l’Ontario ou de l’Alberta, oui, ça peut envoyer un gros message certain, mais au Nouveau-Brunswick, non. La province n’est pas assez grosse», observe-t-il.

Selon le politologue Mario Levesque, le regard que portent les francophones sur un parti provincial n’influence pas réellement leur vote sur le même parti au fédéral. 

Photo : Daniel St. Louis Photographie

Une nuance entre en compte toutefois. Le professeur agrégé de sciences politiques à l’Université Simon Fraser en Colombie-Britannique, Rémi Léger, note que la particularité de la campagne électorale actuelle au Nouveau-Brunswick est que Blaine Higgs, au pouvoir depuis deux mandats, se présente comme l’agent de changement. «Et il joue sur l’impopularité de Justin Trudeau», glisse-t-il.

Par ailleurs, sans influencer la politique fédérale, le scrutin provincial peut être «un indicateur pour Justin Trudeau», remarque Mario Levesque.

«Si les conservateurs remportent la victoire, c’est un message que les choses pour M. Trudeau [dans la prochaine élection fédérale, NDLR] vont être un petit peu plus difficiles.»

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«L’argent mène à de l’influence politique»

Rémi Léger rappelle que le Nouveau-Brunswick est une province «pauvre» et de fait une «province mineure dans la fédération canadienne». «C’est l’argent qui mène à de l’influence politique normalement.»

«Lorsque le gouvernement fédéral débarque [avec] un fonds de centaines de millions de dollars pour les langues officielles, y compris l’éducation française langue première et l’immersion française, la province écoute parce qu’[elle] a besoin de ces fonds pour financer ses écoles et ses programmes d’éducation», illustre-t-il.

C’est ce qu’il s’est passé entre 2022 et 2023 : le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs, avait remis en question l’immersion en français dans la province. Le gouvernement fédéral avait déclaré en réaction qu’il repenserait son transfert de fonds pour les programmes d’immersion.

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Le fédéral influence les votes provinciaux

Cette semaine, la cheffe du Parti vert au fédéral, Elizabeth May, est venue soutenir les candidats verts au Nouveau-Brunswick.

«Il ne faut pas que M. Trudeau vienne ici pour faire la campagne comme Mme May. Il faut que [la cheffe du Parti libéral du Nouveau-Brunswick, NDLR] Susan Holt mette un peu de distance entre elle et Justin Trudeau, parce que M. Trudeau n’est pas populaire», commente Mario Lévesque.

Pour Rémi Léger le premier ministre d’une petite province n’est pas un facteur important lorsque les électeurs de cette province votent aux élections fédérales.  

Photo : Courtoisie

Selon lui, la politique fédérale peut «faire du dommage» au Parti libéral du Nouveau-Brunswick.

«Plus le Parti conservateur du Nouveau-Brunswick mentionne Justin Trudeau et l’associe à Susan Holt, plus ça va faire mal au Parti libéral pour essayer de faire élire des députés et former un gouvernement majoritaire», analyse le politologue.

Susan Holt avait tenté de se distinguer de Justin Trudeau en mars, en mentionnant une «solution de rechange» à la taxe carbone, selon l’Acadie Nouvelle.

Elle assurait encore récemment qu’elle et son parti n’avaient pas «de lien officiel», rapporte Radio-Canada.

FRANCOPHONIE

Marie-Philippe Bouchard, actuelle PDG de TV5 Québec Canada, prendra les rênes de la société d’État en janvier, à la fin du mandat de Catherine Tait. L’information, dévoilée mardi par Le Devoir, n’a toutefois pas encore été confirmée par Patrimoine canadien.

La prochaine PDG de CBC/Radio-Canada serait Marie-Philippe Bouchard, actuelle PDG de TV5 Québec Canada. 

Photos : Courtoisie TV5 Québec Canada

Pourquoi ça compte : Une francophone originaire du Québec à la tête de CBC/Radio-Canada et l’expérience de Marie-Philippe Bouchard laisse espérer que la voix et les préoccupations de la minorité linguistique seront entendues et prises en compte. Aussi, dans un contexte préélectoral, elle devra défendre la société d’État face à la promesse de Pierre Poilievre, qui assure depuis plusieurs années qu’il «définancera» la CBC s’il devient premier ministre.

Ce qu’ils disent : Pierre Poilievre a cependant mentionné dans le passé qu’il maintiendrait Radio-Canada, pour «préserver une petite partie pour les minorités de langue française, les minorités linguistiques, parce que, franchement, elles n’obtiendront pas de services d’information sur le marché».

À lire : «Presque impossible» de sabrer le financement de CBC sans nuire à Radio-Canada en milieu minoritaire

CANADA

Le premier ministre a affirmé mercredi, devant la commission d’enquête sur l’ingérence étrangère, qu’il détenait des noms de candidats et de députés conservateurs canadiens qui seraient impliqués dans l’ingérence étrangère ou qui risque de l’être».  Il a aussi indiqué que des parlementaires et candidats d’autres partis ont également été visés.

Le chef conservateur refuse d’obtenir les codes de sécurité nécessaires pour obtenir les renseignements sur les parlementaires conservateurs concernés par les révélations de Justin Trudeau. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

À la base : La juge Marie-Josée Hogue mène la commission chargée d’examiner «l’ingérence de la Chine, de la Russie et d’autres acteurs» étrangers dans les processus électoraux canadiens. Le premier ministre a témoigné lors de la dernière journée d’audience. Le rapport final est attendu avant le 31 décembre 2024. 

Qui est concerné : Justin Trudeau a chargé le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) d’avertir Pierre Poilievre pour que ce dernier ait accès à ces informations et prenne des dispositions pour protéger son parti. Mais pour avoir ces informations, le chef conservateur doit obtenir la cote de sécurité nécessaire, ce qu’il refuse depuis plusieurs mois.

Ce qu’ils disent : Le premier ministre considère que c’est un «manque de gros bon sens» de la part de son adversaire. Pierre Poilievre a qualifié de «mensonges» les déclarations de Justin Trudeau sur le réseau social X. 

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Sean Casey, député de Charlottetown, à l’Île-du-Prince-Édouard, a exprimé publiquement son souhait que Justin Trudeau quitte son poste de chef du Parti libéral du Canada (PLC).

Pourquoi est-ce important : Cette sortie, faite mardi lors de l’émission Power & Politics, sur les ondes de CBC News, ajoute à la démarche d’une partie du PLC. Une lettre endossée par une vingtaine de députés, dont les noms sont toujours inconnus à l’heure d’écrire ces lignes, circulerait pour demander au chef de penser à quitter son poste, selon des informations rapportées par des médias samedi dernier.

En outre, Radio-Canada révélait jeudi matin que quatre ministres du gouvernement Trudeau ne se représenteraient pas aux prochaines élections : le Franco-Manitobain Dan Vandal (Affaires du Nord), Marie-Claude Bibeau (Revenu national), Carla Qualtrough (Sports) et Filomena Tassi (Développement économique pour le Sud de l’Ontario).

L’article assure aussi que ces quatre noms seront écartés du Cabinet lors d’un remaniement qui s’annonce très prochainement.

Ce qu’ils disent : Sean Casey a assuré à CBC que «le message que je reçois très clairement et de plus en plus fortement [de mes électeurs], c’est qu’il est temps qu’il parte, et je suis d’accord».

L’indice des prix à la consommation (IPC) a connu une hausse de 1,6 % depuis septembre 2023, a annoncé Statistique Canada mardi. L’augmentation du cout des aliments est la principale source de l’augmentation tandis que le cout de l’énergie a reculé en un an.

En détails : Si l’inflation est en baisse par rapport à la hausse de 2,0 % observée en aout, «il s’agit de la plus faible progression annuelle enregistrée depuis février 2021 (+1,1 %)».

Même si certains secteurs, comme les biens durables, ont vu leurs prix se stabiliser ou diminuer, la pression demeure forte pour les ménages canadiens. Depuis septembre 2021, l’IPC a grimpé de 12,7 %.

Qui est affecté : Cette hausse a un impact significatif. Selon l’agence fédérale, elle peut accroitre le stress financier, particulièrement pour les ménages à revenu fixe ou ceux déjà en difficulté économique.

Les Mères Mohawks devant la Cour suprême du Canada pour lui demander d’intervenir dans la réintégration d’un panel d’experts chargé de rechercher les sépultures anonymes de victimes d’expérimentations médicales à l’ancien hôpital Royal-Victoria de Montréal. «Nous n’arrêterons jamais de chercher nos enfants», a lancé l’une d’entre elles. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Les Mères mohawks et leurs alliées étaient devant la Cour suprême du Canada mardi pour lui demander d’intervenir dans la protection des sépultures anonymes d’enfants autochtones et allochtones enterrées clandestinement sur les terres kanien’kehà:ka/ rotiononhsión:ni, aujourd’hui occupées par l’Université McGill.

Ce groupe se heurte au refus de l’établissement et de la Sûreté du Québec d’accéder à ces terres.

L’enjeu : Une requête a été déposée mardi devant la Cour suprême du Canada pour garantir que la recherche des sépultures anonymes des enfants autochtones et allochtones victimes d’expérimentations médicales à l’ancien hôpital Royal-Victoria de Montréal soit effectuée sous la supervision d’un panel d’experts en archéologie, sélectionné en partenariat avec McGill et la Société québécoise des infrastructures (SQI) en avril 2023.

Ce panel, qui avait été licencié par l’Université et la SQI durant l’été 2023, a vu sa réintégration ordonnée par la Cour supérieure du Québec, mais cette décision a ensuite été annulée par la Cour d’appel du Québec. Les Mères mohawks se tournent vers la Cour suprême dans l’espoir d’infirmer la dernière décision.

INTERNATIONAL

Lundi, Affaires mondiales Canada a expulsé six diplomates indiens, le temps d’enquêter sur leur rôle dans le transfert d’informations visant des Canadiens, conduisant notamment à l’assassinat d’un leadeur sikh  en Colombie-Britannique l’été dernier, Hardeep Singh Nijjar.

Justin Trudeau a affirmé en point presse lundi que l’Inde est une «démocratie importante». «Aucun de nous ne souhaite être dans cette situation. Ce n’est pas un choix du gouvernement canadien de créer un froid dans les relations entre le Canada et l’Inde.» 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Le gouvernement indien affirme qu’il n’a pas reçu de preuves concernant les accusations portées par le Canada sur le rôle de l’Inde.

Pourquoi c’est important : Cette situation fait croitre les tensions existantes entre les deux pays, avec des conséquences sur les relations diplomatiques et commerciales.

Ce qu’ils disent : En conférence de presse lundi, le premier ministre, Justin Trudeau, a paru particulièrement déstabilisé sur le sujet. «Je crois que l’Inde a fait une erreur monumentale en choisissant d’utiliser leurs diplomates et le crime organisé pour attaquer les Canadiens, pour venir faire sentir les Canadiens pas en sécurité ici chez eux. C’est inacceptable.»

«L’Inde est une démocratie importante. C’est un pays avec lequel nous entretenons des liens historiques profonds entre les peuples et les entreprises, à une époque où l’instabilité géopolitique oblige les démocraties à se serrer les coudes», a-t-il ajouté.

Avec des informations de Marianne Dépelteau, Marine Ernoult et Camille Langlade.

Autre qu’une promesse de «réparer le budget», aucune prise de position officielle n’a été prise par des députés du Parti conservateur du Canada afin de rassurer les organismes francophones du pays sur leurs finances.

Les ébauches de réponses se font attendre du côté du parti en tête dans les sondages [lors de la production de ce reportage, NDLR]. Le député Joël Godin reste évasif : «Je ne comprends pas les inquiétudes, mais [les organismes] peuvent dormir sur leurs deux oreilles», affirme-t-il en entrevue avec Francopresse.

Malgré les sommes annoncées par les libéraux dans le Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028, des organismes se demandent déjà comment se projeter dans leur prochaine année financière alors que le versement des fonds du Plan accuse déjà d’un retard «de plus d’un an», comme l’a observé le commissaire aux langues officielles dans son dernier rapport.

Les libéraux n’ont jamais répondu à la demande de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) d’entreprendre un examen indépendant de l’allocation des fonds fédéraux pour les langues officielles.

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Des «incertitudes»

«C’est un peu fort de parler d’inquiétudes, mais c’est sûr qu’il y a des incertitudes», commente pour sa part la présidente de la FCFA, Liane Roy.

Pour Nathalie Lachance, «il est clair que nous continuons à revendiquer pour plus de financement pour les organismes francophones. Ça n’a pas changé par rapport à l’automne dernier». 

Photo : Courtoisie

La prudence est de mise pour l’organisme, qui se souvient que les conservateurs, dans le passé, «ont fait des coupures» dans l’éducation et les services aux francophones et considère «que l’équilibre budgétaire, c’est une priorité pour les conservateurs».

Après une conversation avec Pierre Poilievre lors du Congrès mondial acadien, Liane Roy a cependant constaté que la «réception est assez bonne, ils veulent comprendre d’où on vient».

Pour la présidente de l’Association canadienne-française de l’Alberta (AFCA), Nathalie Lachance, parler dès aujourd’hui de nouveau gouvernement et de sa composition reste «très spéculatif». Évoquer une possible baisse de financement l’est tout autant.

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Faire connaitre les francophones

Comme la FCFA, Nathalie Lachance rappelle que l’ACFA collabore avec tous les partis politiques, sans distinction. «Il y a beaucoup de travail qui se fait pour s’assurer que nos besoins soient identifiés, peu importe le parti politique élu.»

Tous les partis politiques fédéraux ont voté en faveur de la loi sur les langues officielles modernisées […] Ils avaient repris plusieurs de nos revendications justement pour la modernisation de la loi dans [leurs] plateformes électorales.

— Nathalie Lachance

Selon Fabien Hébert, «ce qu’on doit retenir, c’est que la communauté francophone est déjà sous-financée. [Cette dernière] serait plus grandement affectée par des changements au niveau du financement». 

Photo : Courtoisie

«Nous avons rencontré depuis le printemps dernier un grand nombre de députés fédéraux […]. Nous avons besoin que les élus fédéraux et provinciaux soient bien au courant de nos enjeux, de nos défis, de nos forces», insiste-t-elle.

La FCFA, qui représente plus de 20 organismes de la francophonie canadienne, a aussi mis en place «une stratégie pour mieux se faire connaitre parce qu’il y a beaucoup de députés [conservateurs, NDLR] qui ne nous connaissent pas».

Au moment de modifier la loi sur les services de garde, l’organisme a fait une campagne de lettres auprès de députés en faveur des francophones.

«C’est un exemple où on s’est bien fait connaitre parce que là, les autres députés qui ne savaient pas qu’ils avaient des francophones dans leur région ont commencé à poser des questions. Ça a amené pas mal de visibilité», souligne Liane Roy.

Côté Atlantique, la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB), attend la fin des élections provinciales à la fin octobre pour commencer à rencontrer l’équipe de Pierre Poilievre, affirme la présidente Nicole Arseneau-Sluyter.

En Ontario, Fabien Hébert, président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), affirme que son organisme remet au candidat «une ébauche de plateforme francophone pour les guider dans leur prise de décision et leur faire part de quels sont les besoins de la communauté francophone».

Le but : que les futurs députés répondent aux besoins de la communauté.

«Je ne crois pas que la plateforme est clairement définie pour eux. Ils sont encore à prendre, à ramasser l’information et à découvrir les besoins sur le terrain. Il y a une ouverture d’écouter nos messages», soulève Fabien Hébert.

Nicole Arseneau-Sluyter affirme qu’en tant qu’organisme francophone, «il faut arriver à financer tout ce qu’on veut faire avec probablement moins d’argent parce qu’on sait tous que ça coute plus cher». 

Photo : Courtoisie Devin Ashton-Beaucage – Acadie Nouvelle

Les gouvernements changent, les besoins restent

Nathalie Lachance souligne d’ailleurs que même en cas de changement de gouvernement, les actions en faveur de la francophonie restent en grande partie les mêmes.

«En Alberta, la politique en matière de francophonie avait été mise en place par le gouvernement [conservateur] précédent et nous continuons d’avoir des gains. Nous sommes maintenant au troisième plan d’action, 75 % des actions identifiées dans le plan d’action actuel sont les mêmes que dans notre plan d’action.»

Au Nouveau-Brunswick, Nicole Arseneau-Sluyter affirme que le financement est «toujours une inquiétude».

«Nous, à la SANB, on ne peut pas être partout et mener tous les dossiers à cause du financement. Il va falloir qu’on travaille ensemble partout à travers le Canada afin d’avoir le financement nécessaire. C’est toujours inquiétant parce que ce n’est jamais pérenne à long terme.»

Des chiffres alarmants

Selon l’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM), un Canadien sur cinq éprouvera des problèmes de santé mentale au cours de sa vie et 70 % des troubles se déclarent durant l’enfance et l’adolescence.

Consultez le site : On a le choix

Des statistiques qui démontrent l’importance de sensibiliser les jeunes à cette problématique car, comme le rappelle l’ACSM : « La santé mentale est partie intégrale de l’état de santé général de l’individu et est essentielle à sa survie, puisqu’elle détermine le comportement, la perception, la façon de penser, de communiquer et de comprendre. »

« En Ontario, les personnes affectées par la maladie mentale, c’est 1,5 fois plus haut que tous les cancers réunis », rapporte Angele D’Alessio, représentante de ACSM et organisatrice de l’évènement du 9 octobre à Cornwall.

Le but de l’activité était de sensibiliser les jeunes à cette réalité, de les encourager à s’exprimer et à chercher de l’aide s’ils en ont besoin, mais aussi de mettre en évidence l’importance d’améliorer l’accès à ces ressources.

Malgré le fait qu’on a toutes sortes de services ici, il y a encore dans certaines régions une liste d’attente d’au-delà de 2 ans. On est ici pour dire que ce n’est pas acceptable, il faut vraiment en parler et mettre la pression sur notre gouvernement.

— Angele D’Alessio

L’intervenante souligne la nécessité d’accroître les subventions pour les services en santé mentale, en particulier pour les jeunes.

Le rôle des associations locales

L’ACSM Champlain Est, dont le siège social est situé à Cornwall, offre plusieurs services, comme du soutien au logement, des actions de sensibilisation communautaire et des services intensifs de gestion de cas, pour aider les personnes souffrant de problèmes de santé mentale sévères.

« On sait que la connexion fait partie d’une bonne santé mentale et peut réduire les risques », explique Angèle D’Alessio.

Parmi les exposants présents lors de l’évènement se trouvait notamment le Boys and Girls Club de Cornwall, ainsi que le Carrefour bien-être pour les jeunes de Cornwall SDG, qui constitue une ressource utile pour les jeunes de 12 à 25 ans et leur famille.

Dans ses deux centres de services de Cornwall et Alexandria, il est possible d’obtenir l’aide d’infirmières et d’intervenants pour des problèmes de santé mentale, de dépendance, ou encore d’emploi et de logement.

« Il y a à peu près 15 agences représentées aujourd’hui pour démontrer qu’il y a de l’aide et qu’on est ici ensemble dans la collectivité », indique Angèle D’Alessio.

Témoignages et marche dans les rues de la ville

Après la visite des différentes échoppes et une présentation des organisateurs, le public a pu écouter des témoignages, comme celui de Tom Hickey, bénévole pour l’ACSM Champlain Est.

« Je vis avec des problèmes de santé mentale depuis mes 12 ans. Avant ça, je n’avais aucune idée de ce que c’était. J’étais un enfant intelligent, je faisais du sport et toutes les choses qu’un jeune normal fait, j’avais des amis. »

La maladie l’a ensuite empêché de poursuivre sa vie normalement et il a développé de l’anxiété sociale.

« J’ai accepté de recevoir de l’aide. Est-ce que ça a été une trajectoire directe ? Est-ce que j’ai été subitement guéri ? Non. Ça a été un processus long et difficile. Ça prend du temps et des efforts dont je ne me croyais pas capable, mais chaque fois que j’ai fait quelque chose de nouveau, ça m’a donné plus de motivation pour essayer encore », confie le jeune homme.

Expliquant que l’échec n’était pas « la fin, mais un autre chemin », le jeune homme a finalement obtenu son diplôme de secondaire, passé son permis et décroché un emploi.

Le maire de Cornwall, Justin Towndale, était aussi présent. Il a fait un discours devant la jeunesse, précisant que lui-même était passé par un état de mal-être émotionnel à la suite de la pandémie et qu’il était conscient des défis que les jeunes avaient dû traverser eux aussi.

Il a ensuite insisté sur l’importance de reconnaitre les problèmes de santé mentale. « Quand j’avais votre âge, ce n’était pas quelque chose dont on parlait et c’est vraiment malheureux. »

Un point de vue que partage Stephen Douris, un résident de Cornwall d’une cinquantaine d’années. Ce dernier est venu témoigner de son parcours, qui l’a mené à vouloir attenter à sa vie à un certain point.

Ajoutant que les jeunes ne devraient jamais être amenés à voir le suicide comme une issue, le quinquagénaire a précisé à l’intention du public qu’il n’y avait rien d’indigne à être malade ou à avoir besoin d’aide.

Après l’écoute des témoignages, les participants se sont rendus dehors pour former un cortège et défiler dans les rues de Cornwall, avec des pancartes et en arborant le ruban vert, symbole de la sensibilisation aux maladies mentales, le tout, en musique.

Pour tous les jeunes trentenaires qui ont découvert le tennis au milieu des années 2000 – je fais partie de ce groupe –, c’est tout un chapitre de leur enfance qui s’est refermé la semaine dernière.

Roger Federer était un joueur de tennis extrêmement populaire auprès des spectateurs. 

Photo : Peter Meyer –  Wikimedia Commons

Deux ans après Roger Federer, Rafael Nadal a annoncé le jeudi 10 octobre qu’il prenait sa retraite en fin d’année. La veille, c’est le Français Richard Gasquet qui avait déclaré qu’il allait mettre un terme à sa carrière, après le tournoi de Roland-Garros 2025.

Il est toujours difficile de voir les idoles de son enfance quitter le devant de la scène. Immédiatement, une vague de nostalgie vous submerge. C’est ce qui m’est arrivé jeudi dernier. Et pourtant : je n’ai jamais considéré Nadal comme une idole, bien au contraire.

Pour moi, le Majorquin était un briseur de rêve, qui a trop souvent battu le joueur que j’admirais par-dessus tout, Roger Federer. Je peux même dire que, dans ma jeunesse, je le haïssais. Peut-être aussi parce que c’était le joueur préféré de mon petit frère.

Alors, pourquoi ce petit pincement au cœur au moment de l’annonce de sa retraite? Je me suis rendu compte que la perception de mes héros et de mes antagonistes de jeunesse a grandement évolué. Ce qui m’a conduit à m’interroger sur l’importance donnée à ces idoles pendant notre l’adolescence.

Plus jeune, j’ai pratiqué le tennis pendant une petite dizaine d’années. Mon niveau très modeste ne m’empêchait pas de rêver. Je me rappelle que, quand j’avais 11 ans, lors d’une rentrée scolaire, nous devions mettre sur une fiche quel métier nous voulions faire plus tard. J’avais alors répondu : «joueur de tennis».

L’influence de mes idoles expliquait forcément cette réponse fantasmée. J’étais admiratif de la classe de Federer, de l’impression de facilité qu’il dégageait. Le tennis paraissait si simple quand il jouait.

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De simples mortels

Je me disais qu’il y avait un certain mérite à ce que ce joueur soit si bon. Ce n’était pas simplement le talent qui était récompensé, mais aussi une forme de perfection morale. Toute sa vie semblait parfaitement orchestrée autour de sa passion et elle paraissait être celle dont on devait tous rêver.

Et puis les années ont passé. Au fur et à mesure que notre esprit critique s’affine, notre regard change.

Ce qui nous intéresse n’est plus seulement ce qui se passe entre les lignes d’un court de tennis, mais aussi l’homme ou la femme derrière l’athlète. Quelles valeurs renvoie-t-il? Utilise-t-elle sa notoriété à bon escient? Et, surtout, son image publique est-elle conforme à ses actions?

Je me souviens encore de ce moment où nous avons appris qu’Oscar Pistorius était accusé du meurtre de sa compagne. Le coureur sud-africain était un modèle à suivre pour ceux qui repoussent les limites imposées aux personnes ayant un handicap. Lui, l’amputé des deux jambes, rivalisait avec les meilleurs valides sur le tour de piste. Un modèle d’abnégation, de refus d’accepter la différence.

Depuis la funeste nuit du 13 au 14 février 2013, la figure du héros a laissé place à celle du paria.

Rafael Nadal a fait le cheminement inverse dans mon esprit. De «l’ennemi» dont on souhaite la défaite, il est devenu un exemple. Non pas pour son jeu – bien qu’on ne puisse pas nier sa bravoure et sa pugnacité – mais pour le respect qu’il témoigne à ceux qu’il côtoie. Les témoignages sont multiples, du chauffeur de taxi à l’hôtesse d’accueil, en passant par le ramasseur de balles.

Bottes aux pieds et balai à la main, il n’avait pas non plus hésité à donner de sa personne pour aider des sinistrés après d’importantes inondations sur l’ile de Majorque, dans la Méditerranée, où il est né et où il réside toujours.

Statue indéboulonnable

Qu’elles le veuillent ou non, les vedettes ont une responsabilité morale envers leurs admirateurs et le public. C’est bien ainsi, étant donné que leur influence ne cesse de grandir avec l’avènement des réseaux sociaux.

Après des mois à tenter de retrouver son meilleur niveau, Rafael Nadal a finalement annoncé mettre un terme à sa carrière à la fin de la saison. 

Photo : Mikelokok – Wikimedia Commons

Le documentaire du youtubeur français Inoxtag sur sa récente ascension de l’Everest, intitulé Kaizen et vu des millions de fois, en est l’illustration parfaite.

Si la performance du jeune influenceur a été saluée par beaucoup, à juste titre, d’autres n’ont pas manqué de faire des critiques, pour la plupart constructives, de son initiative : cout financier et environnemental, participation à un tourisme de masse, placements de produits peu évidents…

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«Il faut savoir séparer l’homme de l’artiste.» Cette affirmation n’a jamais semblé aussi anachronique qu’aujourd’hui.

À l’heure où les statues d’illustres personnages historiques sont retirées de leur piédestal et où le mouvement #MoiAussi rappelle à l’ordre certaines vedettes masculines qui se croyaient intouchables, les célébrités ne peuvent plus mystifier leurs admirateurs par leur simple talent.

Gageons néanmoins qu’en raison des accomplissements de l’homme qu’elle représente, la statue de Rafael Nadal, inaugurée en 2021 à Roland-Garros, ne devrait pas, elle, être déboulonnée de sitôt.

Timothée Loubière est journaliste pupitreur au quotidien Le Devoir. Avant de poser ses valises au Québec en 2022, il était journaliste sportif en France, notamment au journal L’Équipe.

Le 8 octobre dernier, deux témoins de la Commission nationale des parents francophones (CNPF) ont rappelé au Comité permanent des langues officielles que l’absence de clauses linguistiques dans les ententes de financement entre les provinces et le fédéral nuit au développement des services de garde en français. Pourtant, la demande ne cesse de croitre.

Selon une étude de 2023 publiée par la Fédération des parents francophones de l’Alberta (FPFA) et le Conseil de développement économique de l’Alberta (CDÉA), Edmonton et les autres régions de la province où il y a suffisamment d’enfants francophones pour justifier la présence de garderies sont des «déserts» où il n’existe pas de place.

«On a dévoilé que pour six enfants francophones en Alberta, il y a moins d’une place en service de garde. On est extrêmement mal desservis», alertait déjà en mars 2023 la directrice générale de la FPFA, Mireille Péloquin.

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Au-delà du financement

Le directeur général de la CNPF, Jean-Luc Racine, l’a martelé en comité : il y a un «manque de financement structurel pour la petite enfance. On gère des garderies sans aucun financement fédéral depuis bientôt deux ans».

Plus précisément depuis le dévoilement en mars 2023 du Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028, qui a débloqué 64,2 millions de dollars «afin d’appuyer deux initiatives d’apprentissage et de garde des jeunes enfants dans les communautés francophones en situation minoritaire partout au pays (sauf au Québec)», rappelle le service communication d’Emploi et développement social Canada (EDSC), par courriel à Francopresse.

Mais ce financement ne suffit pas, expliquent ces témoins. Il faut aussi des clauses linguistiques spécifiques aux besoins de chaque province et territoire.

Le critique des conservateurs en matière de langues officielles, Joël Godin, a demandé s’il s’agissait d’un manque de volonté des gouvernements. «Absolument», a répondu Jean-Luc Racine, qui souhaite que les provinces soient plus claires dans leurs plans d’action.

La responsabilité est entièrement remise aux provinces : «Toute exigence qu’une province ou un territoire peut mettre en place concernant l’octroi de fonds aux exploitants [francophones] est laissée à sa discrétion», a appuyé Jean-Luc Racine.

Aucun mécanisme de reddition de compte ou de garanties linguistiques n’est prévu par le fédéral. Et ce, même si la nouvelle Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada protège le financement à long terme pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire.

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Gillian Anderson et Jean-Luc Racine ont témoigné mardi en comité parlementaire pour rappeler le manque de places en garderie pour les francophones, en raison notamment de l’absence de clauses linguistiques et de consultations.

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

«Nous ne savons pas d’où vient l’argent»

Le 10 octobre, en marge du Comité des langues officielles, le directeur des services administratifs et financiers de la Commission scolaire de langue française de l’Île-du-Prince-Édouard, Brad Samson, a confirmé à Francopresse avoir eu des «défis» avec la demande du président du comité, René Arseneault, qui souhaitait que les témoins précisent à quel palier de gouvernement ils faisaient référence lorsqu’ils s’exprimaient devant les députés.

«Nous ne savons pas d’où vient l’argent», se désole-t-il.

Il entend par là que les commissions scolaires ou les organismes responsables de la petite enfance, rarement consultés lors de l’élaboration des ententes intergouvernementales pour créer des infrastructures pour les francophones, ont du mal à démêler qui fournit le financement opérationnel.

«Notre défi, pour les centres de la petite enfance par exemple, c’est que si la province ne construit pas, c’est le fédéral qui paie pour la construction des espaces au prix scolaire, [donc] on ne peut pas rajouter des espaces à la petite enfance», résume-t-il.

Devant le comité, Jean-Luc Racine assurait que c’est «bien la province qui détermine où vont les fonds, mais souvent les parents ne sont pas consultés […] dans le secteur de la petite enfance».

«Si la province décide que les fonds du Programme des langues officielles dans l’enseignement (PLOE) vont au secondaire, il n’y aura rien pour la petite-enfance.»

La présidente de la CNPF, Gillian Anderson, indique que si l’Alberta est l’un des pires exemples, car «aucun financement n’a été accordé aux francophones» depuis «un bon cinq, six ans», la «majorité [des provinces] ont des défis».

On revient au fédéral pour s’assurer que ces attentes et ces plans d’action sont garantis pour les francophones, parce que les gouvernements changent fréquemment. Donc sans les clauses, il n’y a rien qui protège.

— Gillian Anderson

«Manque de volonté» des gouvernements

Les témoins appellent aussi à une consultation des communautés en situation minoritaire lors des négociations pour les ententes entre le fédéral et les provinces ou territoires qui peuvent concerner les francophones en milieu minoritaire.

À l’Île-du-Prince-Édouard, par exemple, il y a 150 jeunes qui attendent pour un service de garde en français.

Pour Jean-Luc Racine, la solution serait de mettre en place des services en milieu familial. Il déplore toutefois que sans une demande des anglophones pour plus de places, celle des francophones n’est pas réalisable.

À tout cela s’ajoute la pénurie de personnel francophone qualifié dans les garderies. Les récentes restrictions annoncées par le ministère Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, sont «une terrible nouvelle», estime la présidente de la CNPF, Gillian Anderson.

«Parce qu’on ne peut pas aller recruter des éducatrices à l’étranger. L’éducation est exemptée [de ces restrictions], mais la petite enfance n’est pas reconnue dans l’éducation, même si elle fait partie du continuum [de l’éducation]».

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