le Lundi 10 novembre 2025

Steven Guilbeault a assuré qu’il rentrera en contact avec les organismes francophones déçus par l’absence de ministre des Langues officielles. Il aura tout de même la charge de ce dossier sous le parapluie d’un autre ministère, celui de la Culture et de l’Identité canadiennes. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Le portefeuille des Langues officielles a fait place à celui de la Culture et de l’Identité canadiennes.

«C’est un renforcement de notre identité. La langue française est au cœur de notre identité canadienne», a justifié le nouveau premier ministre du Canada, Mark Carney, en conférence de presse vendredi. 

Il a ensuite apporté son soutien à Radio-Canada, marquant ainsi son opposition aux propos de son rival conservateur Pierre Poilievre, qui menace de fermer CBC s’il devient premier ministre. Une décision qui ne serait pas sans conséquence pour son pendant francophone.

«Le fait de vouloir un cabinet de petite taille n’est pas une excuse pour faire disparaitre le portefeuille des langues officielles, surtout pas au moment où l’identité canadienne et la souveraineté nationale du pays sont au centre des préoccupations», a critiqué la présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA), Liane Roy, par communiqué après l’annonce du nouveau gouvernement.

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Sous le feu des critiques conservatrices et des organismes

Pour l’organisme de défense du fait français au Canada hors Québec, la disparition du portefeuille des Langues officielles «dilue énormément l’importance du dossier à un moment où on doit mettre l’accent sur tout ce qui fait la souveraineté nationale du Canada.»

Ça lance le message qu’en termes d’identité canadienne, les langues officielles, ça n’existe pas

— Liane Roy

Liane Roy a déploré l’absence de ministre des Langues officielles, vendredi.

Photo : Chantallya Louis – Francopresse

Le ministre Steven Guilbeault, qui sera responsable des Langues officielles sous le parapluie de la Culture et de l’Identité canadiennes, Parcs Canada, a assuré en mêlée de presse vendredi qu’il «discutera» avec les organisations francophones mécontentes «au cours des prochaines semaines». 

«L’identité canadienne repose sur nos deux langues officielles, sur nos arts, sur la culture et, moi j’adore le concept d’intégrer également tout notre environnement et le milieu naturel canadien qui définit notre identité dans le cadre de ce nouveau mandat-là», a-t-il assuré.

«C’est certain que les langues officielles sont au cœur de ce qu’on va faire au cours des prochains mois et des prochaines années», a-t-il insisté. 

Joël Godin est ministre fantôme des Langues officielles au Parti conservateur du Canada (PCC). 

Photo : Courtoisie

De son côté, le député conservateur Joël Godin, chef de file de son parti en matière de Langues officielles, estime que pour les libéraux du gouvernement Carney, les Langues officielles et stopper le déclin du français, «ce n’est plus une priorité». 

«Qui va pousser au Conseil du Trésor pour faire déposer les décrets concernant les pouvoirs au commissaire [aux langues officielles] et la partie 2 de la Loi?» interroge-t-il.

Il est «convaincu» que l’élection fédérale, qui devrait être déclenchée avant la fin du mois de mars, va retarder l’adoption des décrets pour appliquer plusieurs parties de la Loi sur les langues officielles.

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Ginette Petitpas Taylor, Acadienne et ancienne ministre des Langues officielles, n’a pas fait de commentaires spécifiques sur l’absence de titre ministériel. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Les actions plus importantes que les titres?

L’ancienne ministre des Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor, qui reste présidente du Conseil du Trésor au sein du gouvernement de Mark Carney, ne s’est pas offusquée de l’absence de la mention des langues officielles vendredi.

«Les langues officielles, c’est un dossier que le gouvernement tient à cœur. M. Guilbeault a la responsabilité des langues officielles. Moi, en tant que la présidente du Conseil du Trésor, la mise en œuvre de la Loi m’appartient aussi. Ça fait que j’ai bien hâte à travailler en étroite collaboration avec lui.»

La nouvelle venue franco-ontarienne du cabinet, Arielle Kayabaga, assure ne pas être d’accord «qu’il n’y a plus un ministre des langues officielles». «On a présentement un ministre qui est aussi le lieutenant du Québec, un Québécois qui occupe le ministère des langues officielles. Il n’y a pas une meilleure personne qui peut faire ça que ce ministre-là.»

Arielle Kayabaga, députée franco-ontarienne présente lors des débats houleux au Comité permanent des Langues officielles au moment d’adopter la nouvelle Loi, a assuré qu’il y avait toujours un ministre des Langues officielles. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Sur les décrets, elle affirme être «sure que le ministre aura le temps de parler de tout ça». 

De son côté, son ancien collègue libéral du Comité permanent des langues officielles, Francis Drouin, assure qu’il attache moins d’importance aux titres des portefeuilles ministériels, mais plutôt «par les actions» faites en matière de langues officielles.

Le député franco-ontarien comprend toutefois le fait que des critiques sont émises par rapport au fait qu’il n’y ait «aucun ministre avec un titre spécifique aux Langues officielles».

Mais il se veut rassurant. «C’est toujours Patrimoine Canada qui a eu la responsabilité dans le passé avec la Loi sur les Langues officielles et je suis certain que le ministre Guilbeault va être capable de remplir ce fonctionnement.»

À lire : Course libérale : un débat en français qui parle peu du français

Pour lire les articles complets :

Mark Carney a été assermenté comme 24e premier ministre du Canada ce vendredi 14 mars, succédant ainsi à Justin Trudeau.

Au moment de publier, Francopresse n’avait pas pu confirmer officiellement que Steven Guilbeault serait responsable des langues officielles.

«Pragmatisme»

Il a dévoilé son nouveau Cabinet, qui compte désormais de 23 ministres, dont sept francophones et trois en dehors du Québec. Seuls deux députés de l’Ouest ont été nommés ministres : Terry Duguid, député de Winnipeg Sud au Manitoba, et Jonathan Wilkinson, député du Grand-Vancouver.

Ce gouvernement devrait avoir une courte durée de vie, avec un déclenchement d’une élection fédérale rapidement.

Gary Anandasangaree, Rachel Bendayan, François-Philippe Champagne et Kody Blois. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

D’après le professeur de sciences politiques du Campus St-Jean de l’Université de l’Alberta, Frédéric Boily, Mark Carney fait ici preuve de «pragmatisme» en se concentrant avant tout sur la réponse canadienne aux menaces des États-Unis.

«C’est la priorité et donc, dans ce contexte-là, les langues officielles sont reléguées au second rang», affirme-t-il.

Il affirme que cette priorité fait aussi que le nouveau premier ministre a nommé un plus petit Cabinet, comme celui de Trudeau, qui en comptait 36.

«Si les libéraux sont réélus, ils devraient songer sérieusement à nommer quelqu’un de l’Alberta et de francophone, si jamais il y avait un élu libéral. C’est plutôt là où ça va changer, mais ça, il pourrait tout simplement faire des permutations et pas forcément augmenter le nombre de ministres», prédit-il.

L’ancien ministre libéral Jean Chrétien a fait une apparition à l’assermentation de Mark Carney, assurant qu’il fallait qu’il fasse «de son mieux» dans la guerre tarifaire avec les États-Unis, notamment. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Les ministres francophones

Parmi les portefeuilles importants, notamment pour la guerre tarifaire entre le Canada et les États-Unis, Mélanie Joly conserve les Affaires étrangères, en pleine préparation du G7 à Charlevoix. Elle hérite aussi du Développement international.

Dominic LeBlanc, ex-ministre des Finances sous Trudeau ces derniers mois, devient ministre du Commerce international et des Affaires intergouvernementales et président du Conseil privé du Roi pour le Canada.

François-Philippe Champagne devient ministre des Finances.

Steven Guilbeault, ex-ministre de l’Environnement et du Changement climatique sous Justin Trudeau, sera responsable de la Culture et de l’Identité canadiennes, Parcs Canada et lieutenant du Québec. À droite, Arielle Kayabaga, qui devient leadeure du gouvernement en chambre. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Arielle Kayabaga, nouvelle venue au Cabinet, est bien connue dans la francophonie canadienne, car elle a siégé au Comité permanent des Langues officielles pendant le processus d’adoption de la Loi sur les Langues officielles, adoptée en 2023.

L’Acadienne Ginette Petitpas-Taylor reste présidente du Conseil du Trésor.

Nate Erskine-Smith conserve son portefeuille du Logement, de l’Infrastructure et des Collectivités.

Rachel Bendayan devient ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté canadienne. Marc Miller, ancien ministre proche de Trudeau, est exclu du Cabinet.

Élisabeth Brière devient ministre des Anciens Combattants et ministre responsable de l’Agence du revenu du Canada.

Ceux qui restent

Chrystia Freeland, ancienne ministre des Finances et numéro deux du gouvernement Trudeau ces dernières années, a été l’adversaire de Mark Carney dans la course à la direction du Parti libéral du Canada (PLC). Elle devient ministre des Transports et du Commerce intérieur.

L’ex-ministre des Finances et numéro deux du gouvernement Trudeau, Chrystia Freeland (à gauche), accompagnée de Nate Erskine-Smith et Anita Anand. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Steven MacKinnon conserve le ministère l’Emploi, avec en plus celui des Familles.

Jonathan Wilkinson reste ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles.

Bill Blair devient ministre de la Défense nationale.

Patty Hajdu devient ministre des Services aux Autochtones.

Kamal Khera devient ministre de la Santé.

Gary Anandasangaree est ministre de la Justice et procureur général du Canada. Il conserve les Relations Couronne-Autochtones et les Affaires du Nord.

Rechie Valdez devient whip en chef du gouvernement.

David J. McGuinty devient ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.

Terry Duguid devient ministre de l’Environnement et du Changement climatique.

Joanne Thompson devient ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, à la place de la Québécoise Diane Lebouthillier.

Terry Duguid, Ginette Petitpas-Taylor, Élisabeth Brière et Bill Blair. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Les nouveaux venus

Ali Ehsassi devient ministre de la Transformation du gouvernement, des Services publics et de l’Approvisionnement.

Kody Blois devient ministre de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire et du Développement économique rural.

FRANCOPHONIE

La Saskatchewan et le gouvernement fédéral ont signé une entente bilatérale relative à l’enseignement dans la langue de la minorité et à celui de la seconde langue officielle jusqu’à 2027-2028.

Les deux parties investissent chacune 43 millions de dollars pour renforcer l’apprentissage du français dans la communauté fransaskoise.

À lire aussi : Éducation dans la langue de la minorité : les choix des provinces déterminant dans la distribution des fonds

Différence entre la langue de la minorité et la langue seconde

L’enseignement dans langue de la minorité est destiné aux étudiants dont la langue maternelle est le français ou l’anglais, mais qui vivent dans une province où leur langue est minoritaire.

La langue seconde est définie comme «toute langue apprise suite à l’acquisition de la langue première», rapporte l’Encyclopédie canadienne. Dans le cas d’anglophones en dehors du Québec, ce serait le français, explique Patrimoine canadien.

CANADA

Mark Carney deviendra le 24e premier ministre du Canada ce 14 mars. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

L’ex-gouverneur de la Banque du Canada et conseiller économique de Justin Trudeau a succédé à ce dernier à la tête du Parti libéral du Canada (PLC), dimanche soir.

Large avance : Sa victoire n’est pas une surprise, contrairement au résultat du vote : Mark Carney a remporté la course avec une victoire écrasante de près de 86 % des voix, soit plus de 151 000 libéraux au pays.

Il sera assermenté ce vendredi dans la matinée. Les Canadiens connaitront dans la foulée les noms du Cabinet du nouveau premier ministre.

Vendredi marque aussi la dernière journée de Justin Trudeau comme premier ministre, après presque 10 ans au pouvoir.

À lire aussi : Mark Carney couronné chef du Parti libéral du Canada : et maintenant?

Une liste de produits américains soumis à des tarifs d’importation a été publiée mercredi par le gouvernement canadien, à la suite de l’application des droits de douane de 25 % voulus par Donald Trump sur l’acier et l’aluminium importés aux États-Unis. Cette taxe à l’importation s’applique à tous les pays.

Doug Ford a rencontré l’équipe de Donald Trump jeudi, avec le ministère fédéral des Finances, Dominic LeBlanc, pour tenter d’apaiser l’escalade des tarifs. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Ces tarifs s’appliqueront sur une liste de produits importés d’une valeur de près de 30 milliards de dollars à compter du 13 mars, qui s’ajoutent aux 30 milliards de dollars de produits américains déjà soumis à des tarifs douaniers depuis le 7 mars.

Contre-attaques : Mardi matin, le président Trump a annoncé qu’il allait doubler les droits de douane qu’il avait fixés à 25 %, à la suite de la contre-attaque du premier ministre de l’Ontario, Doug Ford. Ce dernier avait menacé d’imposer une surtaxe de 25 % sur l’électricité de la province exportée vers les États du nord.

Mardi après-midi, Doug Ford a suspendu sa décision après avoir discuté avec le secrétaire américain au Commerce, Howard Lutnick. De son côté, Donald Trump a finalement renoncé à doubler les tarifs sur l’acier et l’aluminium, les maintenant à 25 %.

Le ministre fédéral de Finances, Dominic LeBlanc, et Doug Ford ont rencontré jeudi l’équipe de Donald Trump pour tenter d’apaiser la guerre tarifaire.

Le premier ministre de l’Ontario a assuré cette semaine qu’il ne se positionnerait pas lors des prochaines élections fédérales, refusant en quelque sorte d’appuyer Pierre Poilievre et le Parti conservateur du Canada.

Plus proche des libéraux : Le premier ministre conservateur de l’Ontario, réélu cette année à la tête de la province, s’est affiché aux côtés de l’actuel ministre des Finances, Dominic LeBlanc, pour une visite à Washington.

Il a également rendu hommage à Justin Trudeau et a félicité Mark Carney pour sa victoire de dimanche à la tête du PLC. Il l’a rencontré plus tôt cette semaine et a affirmé sur X qu’ils resteront, ensemble, «fermes et forts face aux menaces du président Trump».

Mercredi, la Banque du Canada a baissé son taux directeur de 0,25 point de base, le ramenant à 2,75 %. C’est la septième baisse consécutive depuis juin 2024. Cette décision vise à protéger l’économie du pays face aux tarifs imposés par les États-Unis.

Mise en garde : Dans un communiqué, l’institution financière affirme que «les tensions commerciales accrues et les droits de douane imposés par les États-Unis vont probablement ralentir la progression de l’activité économique et faire augmenter les pressions inflationnistes au Canada». La Banque souligne des perspectives économiques entourées «d’une incertitude plus élevée que d’habitude».

Francopresse rapportait début mars qu’une soixantaine de médecins, de membres du corps professoral et du personnel ainsi que de partenaires francophones de la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa avaient envoyé des lettres aux hautes instances de l’institution afin de dénoncer un «démantèlement» des Affaires francophones et un «climat hostile» envers les francophones.

Un anglophone aurait notamment lancé «Speak white» à un de ses collègues francophones. Des étudiants ont également envoyé une lettre au doyen de la Faculté, mais Francopresse n’y a pas eu accès.

En réponse par écrit à nos questions, l’établissement postsecondaire a évoqué des «défis de recrutement».

À lire aussi : Université d’Ottawa : Des lettres dénoncent un «démantèlement» de la francophonie à la Faculté de médecine

Le RÉFO exigera des réponses

«On va contacter l’Université d’Ottawa pour savoir ce qui se passe et quel est leur plan de match», assure en entrevue avec Francopresse le directeur général du Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO), François Hastir.

«On va aussi essayer de prendre contact avec des étudiants qui sont en médecine pour voir ce qui peut être fait. Ça peut passer soit par de la mobilisation, soit par de la reddition de comptes.» 

«Les coupes se font de façon plus disproportionnée [dans la communauté francophone] que dans la communauté anglophone, ça aussi, c’est dur à acheter», dit François Hastir. 

Photo : Courtoisie

Il qualifie la situation d’inquiétante, mais non surprenante. «On a vu des coupes dans plusieurs services francophones à l’Université d’Ottawa depuis les deux-trois dernières années.»

Le directeur rappelle le message du recteur de l’Université d’Ottawa, Jacques Frémont, qui avait été envoyé à l’interne et dans lequel il annonçait des coupures à prévoir, obligées par des enjeux financiers.

Dans cette note, obtenue par plusieurs médias dont Francopresse, le recteur rappelait le «sous-financement chronique de notre mission francophone». Depuis, M. Frémont a réitéré l’importance du mandat bilingue; «un bel exercice de relations publiques», estime François Hastir.

Ce dernier n’est pas non plus surpris par le «climat hostile» réservé aux francophones au sein de la Faculté de médecine : «C’est malheureusement d’actualité». À la lumière de ses récentes conversations avec des francophones de l’Université d’Ottawa, François Hastir constate que «le climat se dégrade en matière de bilinguisme».

À lire aussi : Un «climat hostile» envers les francophones à la Faculté de médecine de l’Université d’Ottawa

Les libéraux demeurent confiants

Questionnée sur les reportages de Francopresse lors d’une conférence de presse le 5 mars, la députée libérale Mona Fortier répond : «L’Université d’Ottawa, c’est une université qui est fière de pouvoir offrir des programmes en français et en anglais. Ils vont continuer à le faire.»

«S’ils ont besoin de réorganiser des choses, ils le feront, ajoute la Franco-Ontarienne. Il y a une volonté d’avoir une Faculté de médecine qui permet d’avoir des étudiants francophones qui puissent graduer. […] Ils vont surement trouver la bonne approche pour s’assurer qu’il y ait des programmes en français qui sont forts.»

Le ministre fédéral de l’Emploi, Steven MacKinnon, également présent à la conférence de presse, a simplement ajouté que sa fille possède un diplôme en Sciences de la santé de l’Université d’Ottawa, une formation qu’elle a suivie en français.

En entrevue avec Francopresse, Mona Fortier affirme ne pas avoir été mise au courant de la situation avant la parution des articles. Ce qui se passe à l’interne de l’Université d’Ottawa se passe à l’interne, dit-elle.

Interrogée sur une possible intervention du gouvernement fédéral, elle estime que ce dernier peut surtout faire jouer son influence. «Il n’y a pas de façon de dire “on va vous pénaliser” ou quoique ce soit».

Plutôt que de «s’ingérer dans l’administration de l’Université», Mme Fortier préfère lancer le message «qu’il y a un besoin et des opportunités» : «Les partenaires devraient travailler ensemble pour s’assurer de livrer les professionnels en santé diplômés qui peuvent offrir les services en français.»

«Ce n’est pas de mes affaires ce qui se passe dans l’administration de l’Université d’Ottawa», insiste-t-elle. Ce qui lui importe, c’est la force de programmes en français à travers le pays. «La bisbille à l’administration interne, ça change, ça va se régler j’imagine.»

La ministre des Langues officielles, Rachel Bendayan, a quant à elle refusé de commenter les informations rapportées par Francopresse et par Le Droit, citant dans un courriel que l’éducation est un domaine de compétence exclusif aux provinces et territoires.

Pourtant, l’Université d’Ottawa reçoit du financement de la part du gouvernement fédéral pour appuyer la formation dans la langue de la minorité.

À lire aussi : Des établissements postsecondaires francophones n’écartent pas les formations en anglais

Mona Fortier a confiance que l’Université d’Ottawa va «continuer» de promouvoir le français et l’anglais. À sa gauche, le ministre de l’Emploi fédéral, Steven MacKinnon. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Une question de volonté et d’intention, selon un député conservateur

«Comme observateur externe, ça m’inquiète. Et ça m’insécurise comme défenseur du français», commente de son côté le député conservateur et ministre fantôme des Langues officielles, Joël Godin, en entrevue avec Francopresse.

Selon lui, c’est un problème qui se «corrige rapidement», si la «volonté» et l’«intention» sont présents.

L’Université d’Ottawa est une instance provinciale, mais le gouvernement fédéral a la responsabilité générale de faire respecter la promotion des deux langues officielles, rappelle-t-il. «Est-ce qu’il est assez outillé pour ça? Pas sûr. […] On a accouché de la [modernisation de la Loi sur les langues officielles] avec peu d’outils.»

Joël Godin reconnait le pouvoir limité que possède le gouvernement fédéral dans cette histoire. 

Photo : Courtoisie

Ottawa peut notamment intervenir sur le financement des établissements postsecondaires, ajoute le député. En comité parlementaire l’année dernière, le recteur de l’Université d’Ottawa avait dénoncé un manque à gagner de 50 à 80 millions de dollars.

Sans savoir si les problèmes à la Faculté de médecine sont liés au financement de l’Université, Joël Godin défend tout de même que «Patrimoine canadien doit donner une prévisibilité dans son financement».

L’élu conservateur s’est aussi dit déçu de la réponse de Mona Fortier en conférence de presse. Il a eu l’impression qu’elle s’en «lavait les mains», démontrant ainsi une certaine «hypocrisie libérale».

«Plus ça change, plus c’est pareil! Le français est facultatif au Canada!! Pire, il dérange!», s’est insurgé sur X le député du Bloc québécois, Denis Trudel, commentant l’un des deux reportages publiés par Francopresse sur le sujet.

L’organisme Médecins francophones du Canada a refusé de commenter, évoquant son statut «apolitique».

Pierre Poilievre avait été élu à la tête du Parti conservateur du Canada avec l’appui de 68 % des membres. Justin Trudeau, lui, avait obtenu 80 % des votes de son parti. Dans les deux cas, il s’agissait de résultats plus qu’honorables.

Dès le début de la course à la chefferie libérale, plusieurs signes montraient que Mark Carney était le favori. Certains sondages auprès des membres du Parti libéral laissaient entendre qu’il était en avance sur ses adversaires. Cependant, la marge d’erreur de ces sondages est généralement élevée, il faut donc les analyser avec prudence.

D’autres sondages menés, eux, auprès de l’ensemble de la population, montraient une augmentation des appuis au Parti libéral si Mark Carney était à sa tête. De quoi faire très certainement réfléchir plus d’un militant libéral.

Puis il y a eu les contributions financières. Chaque candidat et candidate devait verser 350 000 $ au Parti pour s’inscrire dans la course.

Après un mois de campagne, Mark Carney avait déjà récolté 1,9 million de dollars auprès de plus de 11 000 donateurs et donatrices. Il devançait ainsi largement ses adversaires. Karina Gould, Chrystia Freeland et Frank Baylis. Les trois avaient récolté moins de 700 000 $ auprès d’environ 1900 personnes à la même date.

Il y a donc eu un effet Carney dès les débuts de la campagne.

À lire : Mark Carney couronné chef du Parti libéral du Canada : et maintenant?

Photo : Julien Cayouette – Francopresse

Les deux hommes derrière la victoire de Carney

Il existe au moins deux raisons qui peuvent expliquer le succès obtenu par Mark Carney. La première est qu’il n’a pas fait partie du gouvernement Trudeau.

Si le premier ministre Justin Trudeau a été forcé de démissionner, c’est en raison de son impopularité grandissante, tant dans la population qu’au sein des troupes libérales.

Mark Carney est synonyme de nouveauté, de changement. C’est ce que la base libérale, et aussi une partie de l’électorat canadien, recherche.

La seconde raison est bien entendu le retour de Donald Trump à la présidence américaine. Un retour accompagné par des relations commerciales sous très haute tension entre le Canada et les États-Unis.

Mark Carney est vite devenu la personne que l’on considère comme ayant le meilleur savoir-faire pour gérer cette crise que plusieurs jugent existentielle pour le Canada.

En fait, les menaces constantes de guerre commerciale canado-américaine ont provoqué une situation exceptionnelle. Rarement a-t-on vu un élan de patriotisme aussi fort dans toutes les régions du pays. On sent que pour beaucoup de personnes dans la population canadienne, il y a urgence d’agir. Il faut se montrer ferme face aux États-Unis.

Mark Carney profite ainsi de circonstances inédites. Il arrive en politique avec une expertise et des réalisations passées qui semblent rassurer la population canadienne au moment où une crise sans précédent survient.

Il n’est pas certain qu’il aurait eu de tels appuis sans la présence de Donald Trump et de ses menaces de tarifs douaniers.

À lire : Tarifs américains : le Canada peut se passer de Parlement, estime un expert

La lune de miel va-t-elle se poursuivre?

Est-ce que les circonstances exceptionnelles actuelles lui permettront de remporter la prochaine élection fédérale? Plusieurs estiment que la partie ne sera pas facile à gagner. Mark Carney n’a aucune expérience politique.

Pour être plus précis, il a l’habitude de travailler avec des figures politiques, une expérience qu’il a notamment acquise lorsqu’il a dirigé la Banque du Canada puis la Banque d’Angleterre, mais pas celle d’agir comme un politicien. La différence est importante.

Mark Carney n’est pas non plus très charismatique. On l’a bien vu dimanche lors de son élection à Ottawa. Prenant la parole après Justin Trudeau et Jean Chrétien, il a été facile de constater qu’il n’a pas la même aisance, le même charme, ni même une petite pointe d’arrogance qu’on aime bien voir chez nos politiciens.

Même s’il possède un certain sens de l’humour, Mark Carney se présente avant tout comme une personne posée, réfléchie, qui tente d’expliquer les choses plutôt que de convaincre les gens de la justesse de ses arguments.

Il n’a pas eu le temps non plus d’élaborer une véritable plateforme électorale. Il a certainement des idées. On sait qu’il veut mieux gérer les finances publiques, aider l’économie canadienne, maintenir les programmes sociaux et, surtout, diminuer notre dépendance à l’égard des États-Unis. Toutefois, les propositions concrètes pour y arriver manquent encore.

Mark Carney pourra cependant compter sur l’aide d’un parti politique qui a de l’expérience et des ressources.

Par contre, il lui reste beaucoup de travail à accomplir avant de se lancer en campagne électorale : s’assurer d’avoir des candidats et des candidates dans toutes les circonscriptions, mettre en place une équipe de terrain, recruter des bénévoles, poursuivre les activités de financement, etc. Le temps pourrait bien manquer.

Une tâche quasi insurmontable?

Pour toutes ces raisons, plusieurs pourraient croire qu’il sera très difficile pour le nouveau chef libéral de remporter la prochaine élection fédérale.

Toutefois, sans vouloir minimiser l’importance des facteurs énumérés ci-dessus, il faut aussi prendre en considération un autre élément. Au risque de se répéter, nous vivons une période exceptionnelle. La population pourrait donc vouloir obtenir des réponses elles aussi exceptionnelles.

Est-il nécessaire d’avoir un premier ministre charismatique, issu de la classe politique, qui a un plan détaillé et des ressources?

La réponse pourrait bien être non.

C’est une des leçons qu’il faudrait sans doute tirer de l’écrasante victoire de Mark Carney. L’incertitude actuelle provoquée par Donald Trump a mené les membres du Parti libéral à s’unir derrière un seul homme et à lui donner un très large appui.

Il se pourrait bien que cette volonté d’unité existe aussi pour l’ensemble de la population canadienne. Pour le moment, seul Mark Carney semble avoir la réponse pour rassurer l’électorat et pour l’unifier.

C’est à cet aspect que devraient réfléchir les autres chefs de parti en vue de la prochaine élection… qui viendra certainement plus tôt que tard.

À lire : Course libérale : un débat en français qui parle peu du français

Geneviève Tellier est professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les politiques budgétaires des gouvernements canadiens. Elle commente régulièrement l’actualité politique et les enjeux liés à la francophonie dans les médias de tout le pays.

La francophonie canadienne manque de données sur de nombreux aspects.

Alors que Mark Carney est devenu le chef du Parti libéral du Canada (PLC) le 9 mars et qu’il s’apprête à devenir premier ministre, le déclenchement d’une campagne électorale fédérale est attendu avant la fin du mois.

L’équipe de Francopresse souhaite connaitre les intentions de vote des francophones qui vivent en contexte linguistique minoritaire partout au Canada.

L’objectif est de recueillir et d’analyser les résultats du sondage pour dresser le portrait d’un moment particulier de l’histoire politique canadienne, avec une lentille francophone. Voici le lien pour participer au sondage. N’hésitez pas à le partager.

Simon Forgues observe le milieu de la radio communautaire dans les francophonies canadiennes depuis plus de 30 ans. Pour lui, cela ne fait pas de doute : lorsque les mesures sanitaires sont venues transformer la vie sociale de la population canadienne, «les bingos à la radio ont connu un immense boum», remarque ce conseiller en stratégie et communication à l’Alliance des radios communautaires du Canada depuis 2007.

Certaines personnes cherchaient à se divertir, d’autres à joindre l’utile à l’agréable en remportant des lots intéressants. Le bingo radio a été une activité sociale essentielle pendant la COVID-19 et est resté une tradition bien ancrée dans de nombreuses collectivités, même si le niveau de fréquentation est parfois revenu aux niveaux d’avant la pandémie.

À lire aussi : La promotion du radio bingo depuis le blocage de Meta (Le Courrier de la Nouvelle-Écosse)

«Une institution»

Le phénomène a été observé à Hearst, dans le Nord de l’Ontario, où le bingo se joue hebdomadairement depuis 1995. Au plus fort de la pandémie, les recettes provenant du bingo ont grimpé de 30 à 35 %, ce qui peut représenter 250 joueurs de plus par semaine, dans cette petite ville où le bingo est devenu une tradition.

Pour Simon Forgues, les bingos à la radio ont connu «un immense boum» lors de la pandémie de COVID-19. 

Photo : Courtoisie

Dans plusieurs communautés de l’Ontario et de l’Atlantique, le modèle du bingo à la radio est connu et éprouvé. Hearst, Kapuskasing, l’Est ontarien, Pokemouche au Nouveau-Brunswick et Clare en Nouvelle-Écosse y jouent abondamment. «C’est le genre de place où le monde se fait des réunions pour jouer au bingo ensemble», illustre Simon Forgues.

Nicholas Monette, originaire de l’Est ontarien et directeur des opérations chez Unique FM, à Ottawa, acquiesce : «C’est une institution, pratiquement.»

À Hearst, le taux de participation et les recettes sont revenus à leurs niveaux pré-pandémiques, mais le bingo a sauvé les emplois du personnel des Médias de l’épinette noire, estime son directeur général, Steve McInnis. Les publicités gouvernementales et le bingo ont permis de garder l’organisme à flot, soutient-il.

Aujourd’hui, environ 850 cartes se vendent par semaine (1200 lorsque les lots sont plus élevés). Le bingo représente environ le tiers des revenus de l’organisme, soit entre 250 000 et 300 000 $ par année.

Nicholas Monette y voit un phénomène social : «Je ne sais pas, peut-être que le bingo vient jouer un certain rôle communautaire. Ça devient une façon d’aller rencontrer tout le monde une fois par semaine», même si c’est par les ondes.

À lire aussi : Radiodiffusion : vers une consultation accrue des francophones?

Une source de revenu «essentiel»

Devant un tel succès et l’engouement décuplé en temps de pandémie, d’autres radios ont aussi voulu tenter l’expérience du bingo, comme Nord-Ouest FM à Falher, dans le nord de l’Alberta, et Unique FM.

Natalie Aloessode-Bernardin a remarqué que certains de ses amis et amies originaires de pays étrangers ne connaissaient pas le bingo radio. 

Photo : Courtoisie

«J’ai l’impression que la radio, notre radio en tout cas, cherchait à “ride the wave”», commente la directrice générale de la radio ottavienne, Natalie Aloessode-Bernardin.

Unique FM a cependant coupé court à l’aventure en septembre 2024. Cette radio urbaine a eu du mal à s’imposer dans un marché où l’offre culturelle et récréative abonde. Même si elle a réussi à présenter un bingo qui n’était plus déficitaire, les recettes ne justifiaient pas l’énergie qu’il fallait y mettre, indique la directrice.

L’équipe de direction lance l’hypothèse suivante : les changements démographiques ont peut-être été un frein au bingo de la radio. Natalie Aloessode-Bernardin a constaté que, pour ses amis et amies du Bénin et du Mali, ce jeu leur était complètement inconnu.

«Nous, on joue au bingo à la maternelle. C’est comme si ça faisait partie de nos mœurs canadiennes-françaises. Mais eux, ils ont zéro cette référence-là.»

À Falher, le bingo en est aujourd’hui à sa deuxième année d’existence. Il s’agit de l’un des deux organisés dans la province, l’autre étant animé par une radio communautaire autochtone.

En janvier, Nord-Ouest FM a vendu environ 300 cartes, apportant des revenus autonomes essentiels, estime l’adjointe administrative de la radio, Marianne L. Houle. Les subventions n’étant jamais garanties, «la radio bingo, c’est notre propre argent», souligne-t-elle.

À Hearst, grâce à la diffusion en ligne et l’accès à Internet haute vitesse, CINN FM vend maintenant des cartes de bingo à Hornepayne et à Greenstone, des communautés situées à 125 et à 250 km du studio. Avec peu de promotion, les ventes ont déjà augmenté de 10 %.

Le défi Meta

Néanmoins, la communauté, même fidèle, est plus difficile à engager depuis aout 2023, rappelle Simon Forgues. L’entreprise américaine Meta, en bloquant l’accès aux contenus des médias canadiens sur Facebook et Instagram, a sabré le plus grand canal de promotion des radios.

Celles-ci ont dû repenser leurs stratégies de communication et faire preuve de créativité pour rejoindre les gens, leur page Facebook comptant souvent des milliers d’abonnés et d’abonnées «gagnés tranquillement au fil des années», témoigne le conseiller. «Ç’a frappé fort pour plusieurs radios», se souvient-il.

Certaines radios ont créé une nouvelle page, identifiée autrement et qui n’est pas bloquée, utilisent des pages communautaires, les pages des membres de leur personnel ou de leurs bénévoles, mais «c’est sûr que ça demande beaucoup d’effort de se reconstruire un noyau de fidèles abonnés avec une nouvelle page Facebook».

«De nouveaux joueurs à toutes les semaines»

En Alberta, l’équipe de Nord-Ouest FM demeure optimiste et patiente : la croissance est lente, mais constante. Marianne Houle souhaite d’ailleurs élargir la zone où il est possible de se procurer des cartes de bingo, un défi compte tenu de l’immensité du territoire couvert par la radio. «Mais c’est pas mal populaire. Le mot se passe. On a toujours de nouveaux joueurs à toutes les semaines.»

En majorité, les personnes qui jouent ont moins de 40 ans et jouent avec leurs parents ou leurs grands-parents. C’est aussi le cas à Hearst, où des groupes de personnes ainées se rassemblent aussi pour jouer ensemble. «C’est rare qu’il y ait un qui joue tout seul», ajoute Marianne L. Houle.

Le président-directeur général de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), Martin Normand, a insisté sur l’apport des étudiants étrangers sur le plan académique.

Martin Normand souligne l’importance des étudiants étrangers francophones au sein de l’écosystème postsecondaire canadien.

Photo : Courtoisie

«Leur présence permet d’élargir l’offre de programmes, en compensant le faible nombre d’inscriptions locales qui, à lui seul, ne suffirait pas à justifier la création de nouveaux cursus. Cet apport contribue à renforcer un écosystème universitaire dynamique et compétitif, tant sur le plan national qu’international», a-t-il expliqué lors d’un des trois panel du symposium Dynamiques institutionnelles et population étudiante en changement.

«C’est pourquoi les établissements francophones cherchent à se démarquer face aux changements de politique fédérale. Ils saisissent ces opportunités pour renforcer leur positionnement en mettant en place des stratégies de proximité et d’accompagnement sur le terrain à l’étranger.»

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Une source essentielle de financement des universités

Le symposium a également mis en lumière la contribution des étudiants étrangers au rayonnement des universités canadiennes. Selon le Bureau canadien de l’éducation internationale (BCEI), le Canada en comptait 1 041 000 à la fin de l’année 2023.

La même année, les dépenses de ces étudiants, ainsi que celles de leurs familles et amis en visite, ont contribué à hauteur de 37 milliards de dollars à l’activité économique du Canada, se traduisant par une contribution de 40 milliards de dollars (soit 1,2 %) au Produit intérieur brut canadien, rapporte Affaires mondiales Canada.

«Rapport qualité-prix»

De leur côté, ces étudiants et étudiantes choisissent le Canada pour des raisons très personnelles. Deux ont participé à la discussion coorganisée par l’Observatoire sur l’éducation en contexte linguistique minoritaire (OÉCLM), le Centre interdisciplinaire de recherche sur la citoyenneté et les minorités (CIRCEM) et le Collège des chaires de recherche sur le monde francophone (CCRMF).

Adjmal Younoussa, étudiant en informatique à l’Université d’Ottawa, partage son expérience des défis rencontrés par les étudiants étrangers francophones. 

Photo : Jean Marie Takouleu

Étudiant au baccalauréat en informatique à l’Université d’Ottawa, Adjmal Younoussa a choisi le Canada pour son «rapport qualité-prix», surtout comparé à son voisin américain. Le bilinguisme français-anglais est également un atout majeur pour cet étudiant originaire des Comores.

Pour sa part, Clémence Gnintedem, candidate au doctorat en littérature française, souligne la disponibilité des moyens didactiques qui permettent aux étudiants de s’épanouir dans leurs recherches.

Barrières linguistiques, contraintes administratives, difficultés d’accès au marché du travail : la communauté étudiante internationale francophone doit surmonter plusieurs défis, notamment l’adaptation au système éducatif, «qui diffère grandement de celui des Comores», explique Adjmal Younoussa. «Le système financier est également très différent de ce que l’on retrouve dans d’autres pays.»

Celui qui assure la présidence de l’Association des étudiants internationaux de l’université d’Ottawa (UO-ISA) souligne également la difficulté d’accès à l’information. «Il y a une période d’adaptation qui est nécessaire. Je connais un étudiant qui a raté un devoir parce qu’il ne savait pas où aller chercher l’information sur le campus virtuel (Brightspace)», explique-t-il.

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Barrières linguistiques et crise du logement

Clémence Gnintedem souligne la barrière linguistique liée à la proximité entre le français et l’anglais, qui entraine parfois un glissement de certains mots et expressions, pouvant prêter à confusion pour les étudiants.

Christine Rwayongwe évoque les défis d’intégration rencontrés par les étudiants, comme la maitrise de l’anglais. 

Photo : Jean Marie Takouleu

Ne pas maitriser l’anglais entraine aussi son lot de complications. «Les étudiants doivent souvent travailler pour subvenir à leurs besoins, mais, à Ottawa, la plupart des employeurs exigent le bilinguisme», explique Christine Rwayongwe, coordonnatrice des services d’établissement au Centre d’établissement, de soutien et d’orientation communautaire (CÉSOC). «Nous les orientons donc vers des employeurs à Gatineau.»

La situation est encore plus complexe pour les étudiants établis dans d’autres provinces canadiennes. «Par exemple, un étudiant international au Campus Saint-Jean en Alberta, dont la formation exige un stage en entreprise, risque de compromettre sa réussite s’il ne parvient pas à trouver un milieu de pratique», avertit Martin Normand.

La crise du logement affecte particulièrement les étudiants étrangers, qui rencontrent des difficultés à accéder aux logements. «À Ottawa, nous les orientons également vers des prestataires privés», précise Christine Rwayongwe.

Certains se retrouvent également en perte de statut d’immigration en raison de la lenteur du traitement de leurs demandes de résidence permanente. «Ils ne peuvent même pas quitter le Canada faute de lettre de refus. Certains ont essayé, sans succès, de faire une demande de permis de travail, car ils doivent continuer à vivre en attendant une réponse d’IRCC [Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada]», déplore la coordinatrice.

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Le chemin vers une meilleure intégration

Pour améliorer la situation de la population étudiante internationale francophone, Martin Normand recommande à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) de clarifier la politique d’immigration et de mieux informer les personnes intéressées, «afin d’éviter que des étudiants arrivent au Canada avec de faux permis d’études», souligne-t-il.

Christine Rwayongwe prône pour sa part une synergie entre les établissements d’enseignement supérieur, les organismes communautaires et les autorités responsables de l’immigration pour mieux orienter les étudiants francophones qui choisissent le Canada.

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