le Samedi 12 octobre 2024
le Lundi 6 février 2023 7:30 Société

Combien coute votre pâté chinois?

Pourquoi faire confiance à Francopresse.
Francopresse a recueilli le prix des ingrédients nécessaires à la fabrication d'un pâté chinois partout au pays, entre le jeudi 12 janvier et le mercredi 18 janvier 2023. — Photo : Chantal Lalonde
Francopresse a recueilli le prix des ingrédients nécessaires à la fabrication d'un pâté chinois partout au pays, entre le jeudi 12 janvier et le mercredi 18 janvier 2023.
Photo : Chantal Lalonde
FRANCOPRESSE – «Steak, blé d’Inde, patates.» Vous connaissez le refrain, et probablement la recette de ce classique culinaire canadien. Mais combien coute la confection d’un pâté chinois? Francopresse a mené une petite enquête pour recueillir et analyser le prix des ingrédients dans chaque province et territoire du pays.
Combien coute votre pâté chinois?
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Avec des informations des journalistes des journaux membres de Réseau.Presse

Si vous trouvez que votre facture d’épicerie atteint de nouveaux sommets depuis plusieurs mois, sachez que vous n’avez pas la berlue. Statistique Canada rapporte qu’en 2022 le prix des aliments a connu la plus forte augmentation depuis 1981, soit 9,8 %. Et les experts prédisent que la tendance ne se renversera sans doute pas en 2023.

À lire aussi : Léger ralentissement de l’inflation en décembre

Photo : Chantal Lalonde

Armée de cette information, l’équipe de Francopresse a voulu savoir combien il en coute pour acheter les aliments de base nécessaires à la préparation d’un pâté chinois de quatre portions.

Le pâté chinois est un plat traditionnel de la cuisine canadienne-française, mais il a pourtant des origines qui soulèvent encore des questions (et les passions).

Serait-il né des travailleurs chinois qui ont construit le chemin de fer canadien, d’un pâté semblable à l’échine de porc ou encore du China Pie servi dans la ville de South China dans le Maine où avaient émigré de nombreux Canadiens français?

Les théories sont légion et n’enlèvent rien à la popularité de ce plat qui fait partie des traditions culinaires de plusieurs générations du Canada français.

Pour déterminer avec objectivité le cout d’un pâté chinois maison, l’équipe de Francopresse a choisi de mener son exercice à partir de la recette qui se trouve dans La Nouvelle Encyclopédie de la cuisine de Jehane Benoît, édition de 1978. Cette recette a servi à dresser la liste des ingrédients retenus pour effectuer les comparaisons de prix.

Combien coûte votre pâté chinois?

Analyse du cout des ingrédients dans un contexte inflationniste.

Tabler sur le meilleur rapport quantité-prix

Tous les calculs sont effectués sur la base d’un pâté chinois pour quatre personnes. Dans une volonté d’obtenir le meilleur rapport quantité-prix, nous avons opté pour des aliments dans des emballages de taille standard plutôt qu’à l’unité.

Selon cette logique, nous avons choisi le sac de pommes de terre de 5 lb (qui s’est trouvé à être le plus souvent de type Russet) et le sac d’ognons* de 2 ou 3 lb, afin de profiter des couts à l’unité les plus avantageux.

Nous avons aussi ciblé le bœuf haché mi-maigre en raison de son prix généralement inférieur. Cependant, selon l’offre en magasin, nous avons dû parfois nous replier sur le bœuf haché maigre, dont le prix est légèrement plus élevé.

Enfin, à notre panier d’épicerie s’ajoutent du maïs en crème de marque Géant vert, Delmonte ou maison, selon ce qui était le moins cher, et du ketchup de marque French’s ou Heinz (750 ml ou 1 L ; nous nous en sommes tenus à ces deux marques par souci d’uniformité).

Une semaine test

L’analyse du prix de ces produits a eu lieu entre le jeudi 12 janvier et le mercredi 18 janvier 2023, dans 20 commerces appartenant à 8 enseignes dans les 10 provinces et les 3 territoires, l’objectif étant de pouvoir comparer le cout de confection d’un pâté chinois dans toutes les régions du Canada.

Les données ont été recueillies à partir du site Web de ces commerces ou directement en magasin. Pour chaque région, les prix ont été relevés dans au moins deux enseignes différentes, sauf aux Territoires du Nord-Ouest, où il a été possible d’obtenir des prix dans seulement une seule épicerie.

Chaque fois, nous avons choisi les produits les moins chers dans leur catégorie, en tenant compte des options offertes en magasin et des soldes du moment.

À noter que pendant cette semaine test, les Compagnies Loblaw avaient gelé le prix des produits de la marque Sans Nom. Gel qui a pris fin le 31 janvier 2023.

À qui revient la facture la moins salée?

Résultats des courses : le Québec ressort comme la province la moins chère, avec un prix moyen de 19,09 $ pour notre pâté chinois, suivi d’assez près par Terre-Neuve-et-Labrador (20,26 $), le Nouveau-Brunswick (20,69 $) et l’Ontario (20,84 $).

Sylvain Charlebois est directeur scientifique du Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire à l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse.

Photo : Courtoisie

«Il y a quand même une richesse agricole au Québec. On produit de tout. […] Dans le centre du Canada, il y a de l’abondance, il y a du choix, donc je ne suis pas tellement surpris», commente Sylvain Charlebois, directeur scientifique du Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire à l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse.

La différence entre les régions pour la facture la moins élevée se joue notamment sur le prix des ognons. Une mention spéciale revient néanmoins à l’Île-du-Prince-Édouard, où il est possible de trouver un sac de pommes de terre de 10 lb pour la modique somme de… 3,96 $, par rapport à une moyenne de 5,76 $ dans l’ensemble du pays.

De manière générale, il y a une démarcation entre l’Ouest et l’Est du Canada. «La majorité de ces produits-là ne sont pas importés […] Les distances font en sorte que certains marchés sont pénalisés et doivent payer plus cher», observe Sylvain Charlebois.

À lire aussi : Le cout du panier d’épicerie ne cesse d’augmenter dans l’Ouest et le Nord

Quand nos aliments ont voyagé plus que nous

«On a vraiment une concentration dans l’industrie dans le secteur des épiceries, et on sait qu’il y a souvent des enjeux de redondance de voyage des aliments», note Sarah Berger Richardson, professeure adjointe à la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa et présidente de l’Association canadienne de droit et politiques agroalimentaires.

Elle explique qu’il va y «avoir des centres de distribution, et ensuite des aliments envoyés et renvoyés à des épiceries. Plus on est dans des endroits en périphérie, plus on va parfois avoir des prix plus élevés.»

Sarah Berger Richardson est professeure adjointe à la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa.

Photo : Courtoisie Université d'Ottawa

La distance et le transport peuvent en effet peser dans la balance, «surtout quand l’essence est plus chère», renchérit Sylvain Charlebois.

Pourtant, il serait logique de croire qu’en Alberta, où se concentre une grande partie des élevages bovins au pays, le bœuf serait moins cher. Or, il n’en est rien. «Ce n’est pas parce qu’on a un produit local que c’est cela qu’on mange», clarifie Sarah Berger Richardson.

L’experte prend l’exemple de la viande et des fermes d’élevage. «Il y a très peu d’abattoirs […] pour l’abattage et la transformation. Ce qui arrive, c’est que les animaux vont faire des longues distances pour se retrouver dans un abattoir dans une autre province.»

«L’abattoir va mélanger beaucoup de choses ensemble. Donc la viande hachée, on ne sait plus si c’est de la viande qui vient de vaches du Manitoba ou du Québec ou d’ailleurs», poursuit-elle. Cette viande est ensuite envoyée dans un centre de distribution, avant d’arriver à l’épicerie.

Sarah Berger Richardson soulève la question du rôle que peut jouer la concentration dans l’industrie sur l’écart des prix. «On a vraiment une absence de concurrence pour les semences, pour les engrais, pour l’abattage, pour le secteur de l’épicerie. Dans tous ces secteurs, on parle de trois, quatre acteurs.»

Et la professeure de conclure : «Ce n’est pas surprenant qu’on se retrouve avec des prix qui augmentent, en plus avec les pressions objectives comme la réalité actuelle : COVID, climat, guerre en Ukraine, etc.»

Le cas unique du Nunavut

Arctic Ventures à Iqaluit.

Photo : Ivo Vigouroux

À l’extrémité la moins avantageuse de l’échelle des prix du pâté chinois se trouve le Nunavut, où ce plat coute en moyenne 37,98 $ à préparer. «C’est un écosystème qui est très vulnérable, qui est très loin des centres», précise Sylvain Charlebois.

Pour les produits non périssables, les résidents du territoire ont aussi recours à d’autres moyens afin de s’approvisionner à moindres couts, notamment via la plateforme Amazon. Ils ont également la possibilité de se les faire livrer par transport maritime grâce au service sealifts.

*Ognon : Épellation conforme à l’orthographe rectifiée que Francopresse applique.

Note de remerciements

Francopresse tient à remercier les journalistes des journaux membres de Réseau.Presse qui ont participé à la collecte des données.

Pourquoi nous avons choisi d’en parler

Statistique Canada rapporte qu’en 2022 le prix des aliments a connu la plus forte augmentation depuis 1981, soit 9,8 %. Afin d’illustrer l’augmentation du prix des aliments, l’équipe de Francopresse a choisi de compiler les prix d’un plat commun qui fait partie du répertoire culinaire franco-canadien : le pâté chinois.

Équipe

Mélanie Tremblay : Rédactrice en chef
Camille Langlade : Journaliste
Martine Leroux : Révision et vérification des faits
Graphisme : Chantal Lalonde
Dix journalistes des journaux membres de Réseau.Presse.

Renvois et références:

Sources :

Experts

Sylvain Charlebois : directeur scientifique du Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire à l’Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse.

Sarah Berger Richardson : professeure adjointe à la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa et présidente de l’Association canadienne de droit et politiques agroalimentaires.

Résultats des calculs

Moyenne canadienne Médiane canadienne Pourcentage moyen Pourcentage médian
Bœuf 7,05 7,15 31,30% 32,78%
Maïs 1,61 1,49 7,14% 6,83%
Pommes de terre 5,76 5,50 25,57% 25,22%
Ognons 3,17 2,99 14,07% 13,71%
Ketchup 4,94 3,99 21,93% 18,29%
Total 22,53 21,81 100,00% 100,00%

 

Classement Province Prix moyen
1 Québec 19,09
2 Terre-Neuve-et-Labrador 20,26
3 Nouveau-Brunswick 20,69
4 Ontario 20,84
5 Île-du-Prince-Édouard 20,95
6 Territoires du Nord-Ouest 21,16
7 Yukon 21,66
8 Saskatchewan 21,69
9 Colombie-Britannique 21,79
10 Manitoba 22,11
11 Alberta 23,42
12 Nouvelle-Écosse 24,02
13 Nunavut 37,98

  

Liste des commerces visités ou consultés en ligne

Terre-Neuve-et-Labrador

Colemans
Dominion

Nouvelle-Écosse

Atlantic Superstore
Freshmart
Foodland

Île-du-Prince-Édouard

Sobeys
Atlantic Superstore

Nouveau-Brunswick

Atlantic Superstore
Sobeys

Québec

Super C
Métro
IGA

Ontario

No Frills
Independent
Loblaws
Food Basics
Freshco
Metro

Manitoba

Safeway
Real Canadian Superstore
Save-On-Foods

Saskatchewan

Save-On-Foods
No Frills
Safeway

Alberta

Co-op
Save-on-Food
Safeway

Colombie-Britannique

Save-on-Foods
Real Canadian Superstore

Yukon

Save-On-Foods
Real Canadian Superstore
Independent

Territoires du Nord-Ouest

Independent
Co-op

Nunavut

Arctic Ventures
Northmart

Données de parution:

Ottawa

Camille Langlade

Cheffe de pupitre

Adresse électronique: