Quand on parle de réfugiés climatiques, on pense rarement au Canada. Pourtant, ici aussi, des milliers de personnes sont contraintes de fuir leur maison à cause des incendies, des inondations, des tempêtes ou de phénomènes plus longs, comme l’érosion et la montée des eaux.
Si l’appellation «réfugié climatique» n’existe pas au sens juridique du terme, l’Office québécois de la langue française (OQLF) parle aussi de «migrant climatique» pour désigner «une personne ayant quitté son lieu d’habitation, de façon temporaire ou permanente, à cause d’une dégradation environnementale spécifiquement liée aux changements climatiques et bouleversant gravement ses conditions de vie».
«À l’Ouest, il y a beaucoup de communautés dans les montagnes qui sont exposées à des risques multiples, comme les incendies de forêt, les inondations, les glissements de terrain», amorce Robert McLeman, professeur au Département de géographie et d’études environnementales à l’Université Wilfrid-Laurier à Waterloo, en Ontario.
S’il s’agit généralement de petites villes isolées, toutes les provinces et tous les territoires sont touchés par ce type d’évènements extrêmes, précise-t-il.
«Ces évènements se produisent régulièrement. L’Ouest canadien a connu de nombreux incendies terribles ces dernières années.»
À lire aussi : Contre les incendies de forêt, les villes s’activent
«Ça s’est fait très précipitamment. On a été mis sur un pied d’alerte vers 5 h le soir, puis peut-être une heure après, tout le monde a été évacué», se souvient Julie Cayouette, résidente francophone de Labrador City, à Terre-Neuve-et-Labrador.
L’été dernier, face à la progression rapide d’un incendie de forêt, toute la population de la ville a dû être évacuée en urgence. Près de 10 000 personnes ont dû se rendre à Happy Valley-Goose Bay, 530 km plus loin.
Pour cette native de la région, c’était une première : «On a toujours eu des feux, mais on n’avait pas d’opportunité d’évacuation. On était ici, tout était contrôlé.»
Cette fois, les vents violents et la sècheresse ont rendu la situation incontrôlable : «Le feu se rapprochait rapidement. Il ventait énormément», raconte-t-elle.
L’évacuation vers Happy Valley-Goose Bay a duré près de 11 heures pour certains, en raison notamment des longues files d’attente dans les stations-service : «Il y avait tellement de monde… c’était malade.»
Puis la population a été prise en charge par la municipalité et la Croix-Rouge. «Il y avait des lits, des draps, une cantine mobile. Ils nous ont vraiment très bien accueillis.» Le retour à Labrador City n’a pu se faire qu’au bout de dix jours.
En tant que francophone, Julie Cayouette souligne l’importance dans ces moments de crise «de faire passer l’information en français». Elle prévoit siéger au comité d’urgence pour faire avancer cette cause.
Si, dans la plupart des cas, ces déplacements sont temporaires et les gens peuvent regagner leur domicile rapidement, certaines communautés subissent plus durement les effets de ces désastres naturels.
Les inondations posent de très graves problèmes pour les communautés autochtones du centre et du nord du Manitoba. Les personnes peuvent être déplacées pendant de très longues périodes, parfois des années, parce que leur communauté a été inondée et que le gouvernement a été très lent à reconstruire.
Donald Jardine souligne que les résidents des Îles-de-la-Madeleine, au Québec, sont également touchés par les changements climatiques.
L’est du pays n’est pas en reste. «L’intensité des tempêtes s’est accrue avec le changement climatique», remarque Donald Jardine, chercheur au sein du laboratoire sur le climat de l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard, faisant notamment référence au cyclone posttropical Fiona qui a ravagé les provinces de l’Atlantique en 2022.
«Et comme nous sommes une ile et que notre substrat rocheux est sédimentaire, composé de grès et de sable, nous n’avons pas de fondations très solides. Nous sommes donc très sensibles aux ravages des tempêtes qui frappent notre littoral.»
La Première Nation de Lennox Island, à l’Île-du-Prince-Édouard, est particulièrement à risque. Ces dernières années, le quai a fait l’objet d’importants travaux de modernisation, car il a été plusieurs fois inondé, rendant l’ile inaccessible en cas de tempête, explique le chercheur.
À lire aussi : La biodiversité, victime collatérale des catastrophes naturelles
Selon Services aux Autochtones Canada, entre 2009 et 2013, les Premières Nations vivant en réserve ont été touchées par en moyenne 28 incendies de forêt par an. Entre 2018 et 2023, ce nombre a augmenté de 127 %, atteignant en moyenne 63 incendies par année.
Les Premières Nations sont affectées de manière disproportionnée par les situations d’urgence et les évacuations. Entre 2009 et 2023, plus de 177 000 membres vivant dans une réserve ont dû être évacués en raison d’un danger naturel.
«Pour l’instant, les réfugiés climatiques au Canada sont presque uniquement les peuples autochtones», confirme la chercheuse Isabelle Côté.
Les solutions proposées aux populations déplacées se font souvent «au cas par cas», constate Robert McLeman.
Il prend l’exemple de la Première Nation du lac Saint-Martin, au Manitoba. «Elle a été inondée et il a été décidé que l’endroit était trop dangereux et que les gens ne devaient pas reconstruire là.»
Pendant près de deux ans, les membres de cette communauté ont vécu dans des hôtels à Winnipeg et ailleurs, en attendant que le gouvernement tente de trouver une solution.
«Dans les montagnes de la Colombie-Britannique, nous voyons des gens construire de grandes maisons et des complexes touristiques dans des zones exposées aux incendies, aux inondations et aux glissements de terrain», déplore Robert McLeman.
«Le problème avec les communautés des Premières Nations, c’est qu’il y a plusieurs niveaux de gouvernement impliqués : le national, le fédéral, le provincial et celui des communautés.»
«Il y a un certain nombre de petites communautés des Premières Nations au Canada qui vont devoir déménager», ajoute Robert McLeman, citant Tuktoyaktuk, un village Inuvialuit situé aux Territoires du Nord-Ouest, menacé par les tempêtes, la montée des eaux et l’érosion.
«Le gouvernement commence déjà à planifier l’endroit où il va déplacer la communauté. Il s’agira probablement d’un endroit situé plus à l’intérieur des terres, sur un terrain plus élevé, et il faudra reconstruire une grande partie des infrastructures.»
D’autres communautés dans le Nord du pays seront dans la même situation dans les 20 à 30 prochaines années, prévient le professeur.
À lire aussi : Élection fédérale : les Autochtones attendent plus de mesures concrètes
«Les Autochtones ont des liens de longue date avec la terre, l’eau, la chasse, la pêche, la spiritualité. C’est donc un véritable défi pour eux s’ils doivent être déplacés», rappelle le professeur Robert McLeman.
La plupart d’entre eux ont déjà été contraints de quitter leur territoire par le passé. Le chercheur cite le cas des habitants de Tuktoyaktuk, qui ont été déplacés dans ce village des Territoires du Nord-Ouest par le gouvernement canadien dans les années 1950.
«Les personnes réinstallées ont subi beaucoup de traumatismes et de difficultés. Aujourd’hui, leurs descendants, leurs petits-enfants, se retrouvent dans une situation où ils devront à nouveau déménager.»
«Les membres de la communauté doivent être activement impliqués dans le processus, alerte-t-il. Le gouvernement ne peut pas se contenter de dire : “OK, vous devez tous déménager. Maintenant, allez ici.” Cela ne peut plus fonctionner de cette manière.»
Certaines régions commencent à envisager de mettre en œuvre des politiques de relocalisation pour les communautés exposées.
Selon la chercheuse Isabelle Côté, les relogements liés aux changements climatiques soulèvent des questions profondes sur notre lien au passé.
Ce phénomène n’est pas nouveau à Terre-Neuve-et-Labrador, rapporte Isabelle Côté, professeure agrégée au Département de Science Politique à l’Université Memorial, à Terre-Neuve.
Pour des raisons économiques et de centralisation des ressources, le gouvernement de la province a déjà procédé à plusieurs programmes de réinstallation depuis les années 1950.
Elle prend l’exemple récent du petit village insulaire de Little Bay Islands, dont les habitants ont été relocalisés en 2019. Les résidents permanents ont accepté de quitter leur ile en échange d’une compensation financière de 250 000 dollars. L’objectif était double pour la province : réduire les couts de services – comme le traversier – et permettre aux habitants de se réinstaller ailleurs.
Avec l’érosion côtière grandissante, la question des relocalisations refait surface dans l’actualité dans les Maritimes, cette fois pour des raisons climatiques. «Il y a de plus en plus de communautés dont les maisons sont vraiment sur les façades et peuvent être emportées par les marées», souligne Isabelle Côté.
«Il est important de renforcer la coordination entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux pour s’assurer de la planification des urgences, car nous connaissons les risques […] Ces évènements se multiplieront à l’avenir», avance Robert McLeman.
Ce qui se passe souvent à l’heure actuelle, c’est que nous nous en rendons compte au fur et à mesure. Nous devons être plus proactifs dans notre planification. Les autorités locales doivent essayer de décourager le développement d’infrastructures dans des endroits exposés à des risques.
Le chercheur rappelle aussi que toute personne a la responsabilité de se préparer aux urgences.
«D’après mon expérience, plus il s’écoule de temps entre la dernière tempête et la suivante, plus la mémoire des gens s’effrite», soulève Donald Jardine. Cependant, la hausse des primes d’assurance les ramène à la réalité.
Le premier ministre canadien aurait réussi sa mission, selon plusieurs analystes politiques, lors de sa visite avec le président des États-Unis, Donald Trump.
Point de départ : Alors que Mark Carney avait brisé la tradition en allant avant tout voir les chefs d’État européens et non son homologue américain, il a fini par aller à la Maison-Blanche, mardi.
Le premier ministre avait limité les attentes avant de se rendre à Washington. Il ressort de sa rencontre sans avoir convaincu Donald Trump de mettre fin aux tarifs douaniers sur des produits canadiens ou d’arrêter de parler de 51e État.
Mais il a tenu tête au président sur certains points tout en évitant de le confronter sur d’autres. Il a notamment rappelé que «le Canada n’est pas à vendre, il ne le sera jamais».
Un pari réussi pour les premiers ministres des provinces réunis dès le lendemain. Ils se sont aussi mis d’accord sur une approche «un projet, un examen», rapporte le bureau du premier ministre Carney, pour accélérer les projets provinciaux.
Le premier ministre du Québec, François Legault, a rappelé de son côté qu’il comptait sur une aide fédérale pour l’extraction des minerais québécois ou le projet d’un pipeline.
À lire aussi : Énergie Est : le projet d’oléoduc controversé pourrait-il ressortir de terre?
Pierre Poilievre brigue la circonscription albertaine de Battle River–Crowfoot.
Les députés conservateurs ont choisi Andrew Scheer comme leadeur parlementaire pour la reprise des travaux à la Chambre des Communes. Chef du parti en 2017 et 2020, il s’était fait montrer la porte en 2020 par son caucus.
Réchauffer la chaise : Ce proche de l’actuel chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, mènera la période de questions face à Mark Carney en attendant que ce dernier retrouve, s’il est élu lors d’une élection partielle, son siège aux Communes. Ayant été défait dans sa circonscription lors de la dernière élection fédérale, Pierre Poilievre briguera celle de Battle River–Crowfoot, que le député conservateur Damien Kurek lui a cédée.
Le caucus a également voté à la majorité une disposition leur permettant de montrer la porte à Pierre Poilievre, en vertu de la Loi sur la réforme des partis, adoptée en 2014.
À lire aussi : Malgré la défaite, Pierre Poilievre «tient toujours son parti»
Don Davies a pris l’intérim de la direction du Nouveau Parti démocratique (NPD) après la défaite et la démission de Jagmeet Singh.
Le député de Vancouver Kingsway Don Davies, réélu à la Chambre des Communes sous la bannière du Nouveau Parti démocratique (NPD), est devenu chef intérimaire du parti, après la démission de Jagmeet Singh.
Ce dernier a perdu sa circonscription de Burnaby Sud, en périphérie de Vancouver, face aux libéraux.
I’m honoured to serve as the interim leader for the New Democratic Party. Please see my statement below or click here: https://t.co/65U8zFleKW pic.twitter.com/on2k8CCAov
— Don Davies (@DonDavies) May 7, 2025
La semaine dernière, le Collectif canadien de journalisme (CCJ) a confirmé que 108 médias écrits ont reçu leur premier paiement venant des 100 millions de dollars versés par Google. Le géant du Web remet en raison de son accord de dérogation à la Loi sur les nouvelles en ligne, adoptée en 2023.
L’enjeu : La Loi contraint les géants du Web à compenser les médias canadiens pour la redistribution de leurs contenus sur leurs plateformes.
«Aujourd’hui, nous démontrons que notre modèle de référence mondial est en action, garantissant que les géants du Web rémunèrent les médias d’information de manière équitable et juste dans tout l’écosystème de l’information du Canada», a déclaré la directrice générale du Collectif canadien de journalisme, Sarah Spring, par communiqué.
À lire aussi : Entente Google : la distribution des 100 millions peut commencer
Une marche pro-vie a réuni plus de 1000 personnes sur la Colline du Parlement, à Ottawa, le 8 mai.
En conférence de presse sur la Colline mardi – et à l’origine de la Marche pour la vie –, la Coalition nationale pour la vie (CNV) a demandé à Mark Carney de cesser «de laisser mourir des bébés qui ont survécu à l’avortement», selon George Buscemi, le porte-parole de la branche québécoise du groupe d’influence. Il demande la «protection de toute vie humaine dès la conception».
Un autre responsable de la CNV a affirmé en conférence de presse plus tôt que son mouvement avait soutenu des candidats de tous les partis, mais «aucun n’a été élu». Il a ajouté que si Pierre Poilievre a perdu, c’est parce qu’il a laissé du «ressentiment» s’enraciner parmi ses députés et la population pro-vie.
La directrice mondiale d’Amnistie internationale, Agnès Callamard, a tenu une conférence de presse lundi, Journée de la robe rouge au Canada (en hommage aux femmes, aux filles et aux personnes 2LGBTQI+ autochtones disparues et assassinées) et la veille de la rencontre de Mark Carney et de Donald Trump à la Maison-Blanche, pour lancer son «alerte maximale sur l’état des droits de la personne» dans le monde.
L’appel : «Nous appelons le monde à se réveiller sur la réalité, sans quoi ce moment historique se transformera en une dévastation historique», a-t-elle lancé, d’emblée.
Agnès Callamard fait état de la dégradation continue des droits de la personne, qui sont en chute libre, notamment au Soudan et à Gaza au premier rang.
À lire aussi : Revenir aux droits de la personne (Chronique)
Le coup de canon a retenti le 23 mars. L’élection canadienne a été lancée et les efforts des partis fédéraux pour rejoindre l’électorat canadien ont commencé. Un projet qui est largement passé par les plateformes de Meta, comme Facebook et Instagram.
Lors des quatre dernières semaines de la campagne électorale, entre le 30 mars et le 28 avril, le Parti conservateur du Canada (PCC) a dépensé 2,7 millions de dollars en publicité auprès du géant du numérique. La facture du Parti libéral du Canada (PLC) était semblable, s’élevant à 2,6 millions.
À lire aussi : Dépenses publicitaires sur Meta : Freeland commence, Carney dépasse les 130 000 $
Si le PCC est le parti qui a le plus dépensé, parmi les chefs, c’est le libéral qui l’emporte. Mark Carney a déboursé 1,4 million de dollars entre le 30 mars et le 28 avril, loin devant son principal adversaire, le conservateur Pierre Poilievre, qui a dépensé 8 200 dollars.
Toutes ces données sont toutes disponibles sur le site Web de Meta.
Il a malheureusement été difficile d’obtenir des données pour la première semaine de campagne, c’est-à-dire du 23 au 29 mars. Toutefois, les informations recueillies par Who Targets Me permettent de brosser le portrait suivant pour cette période :
Par courriel, le Bloc québécois confirme avoir dépensé au total 116 000 dollars sur les plateformes de Meta durant la campagne électorale.
Le parti s’était fixé l’objectif de doubler ce montant pour l’investir dans des médias imprimés, numériques, télévisuels et radiophoniques québécois. «Dans les faits, nous avons quasiment triplé nos investissements faits au cours de cette campagne dans ces médias», écrit un porte-parole du parti.
L’achat de publicités auprès de Meta est un sujet controversé et politisé, notamment depuis que le géant bloque les médias d’information sur ses plateformes au Canada.
La Presse canadienne a recensé plus de 900 000 dollars de publicités achetées dans la semaine qui a précédé le déclenchement de l’élection. Ces dépenses ont été durement critiquées par la présidente de Réseau.Presse – l’éditeur de Francopresse et qui regroupe une vingtaine de médias francophones en milieu minoritaire –, Maryne Dumaine.
Ce n’était pas la première fois qu’elle se désolait de voir la classe politique canadienne privilégier Meta par rapport aux médias d’information, qui eux, souffrent d’un manque de revenus publicitaires.
En début d’année, lorsque le gouvernement fédéral a recommencé à acheter de la publicité chez Meta pour la première fois depuis le début du blocage des nouvelles sur ses plateformes, Mme Dumaine a relevé une «contradiction» de la part d’Ottawa. Car si Meta bloque les médias, c’est parce qu’elle refuse de se soumettre à la Loi canadienne sur les nouvelles en ligne.
À lire aussi : Achat de publicité à Meta : un «pied de nez» par Ottawa aux médias locaux
Les radios communautaires ont aussi dénoncé les 900 000 dollars dépensés avant la campagne. Dans un communiqué, l’Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec (ARCQ), l’Alliance des radios communautaires du Canada (ARCC) et l’Association des radios régionales francophones (ARRF) parlent d’une «incohérence des partis politiques fédéraux».
Elles estiment que les médias locaux auraient pu se partager la somme et rappellent que tous les partis soutiennent l’achat local, «un sentiment de patriotisme qui ne semble pas atteindre les politiciens dans leurs achats de publicités», peut-on lire dans leur déclaration.
Quebec Community Groups Network (QCGN) n’a pas souhaité commenter, mais dit par courriel qu’il comprend «que les campagnes politiques se déroulent de plus en plus sur les médias sociaux et que les partis intelligents doivent aller là où se trouvent les gens», faisant référence aux réseaux sociaux.
À lire aussi : Les journaux francophones après un an de blocage de Meta
«Nous avons délibérément investi beaucoup plus (des millions de dollars, NDLR) dans la télévision numérique, les services de diffusion en continu et la vidéo en ligne plutôt que sur les plateformes de Meta», assure de son côté un porte-parole du Nouveau Parti démocratique (NPD) dans une réponse par courriel. Selon lui, en comparaison, les dépenses du parti sur Meta ne représentent «rien de significatif».
Les partis conservateur, libéral et vert n’avaient pas répondu à nos questions au moment d’écrire ces lignes.
Selon ses rapports préliminaires, Élections Canada a dépensé environ 1,4 million de dollars en publicité auprès de Meta pendant la campagne. Grâce aux données disponibles sur le site du géant américain, il est possible de constater que la page en français d’Élections Canada affiche des dépenses bien moins importantes que la page en anglais, «Elections Canada», qui fait état de plus d’un million de dollars.
«Le ratio de l’investissement des publicités dans les 2 langues officielles est représentatif de la population canadienne», explique l’institution dans une réponse par courriel.
Parmi les plateformes numériques étrangères où Élections Canada investit en publicité pour «s’assurer que tous les Canadiens disposent de l’information dont ils ont besoin pour s’inscrire et voter», Meta capte 9 % du budget, tandis que YouTube détient 5 % des parts.
Ces géants américains permettent de «joindre des clientèles moins exposées aux médias traditionnels et/ou médias canadiens», des clientèles spécifiques et de livrer beaucoup d’information (notamment dans une vidéo YouTube), justifie Élections Canada.
«Élections Canada privilégie les médias canadiens», écrit Élections Canada. 74 % des dépenses publicitaires prévues leur sont destinées.
Les gains du Parti libéral du Canada à l’élection fédérale de 2025, en comparaison avec celle de 2021, proviennent avant tout d’un vote stratégique et d’une absence de fidélité des électeurs et électrices de centre-gauche.
Le taux de participation est passé de 62,6 % en 2021 à 68,65 % en 2025, une augmentation normale pour une élection qui n’est pas jouée à l’avance. Ce n’est toutefois pas en convainquant davantage de personnes à voter que les libéraux et les conservateurs ont augmenté leur part du vote qui est passée respectivement de 32,6 % à 43,7 % et de 33,7 % à 41,3 %.
La plus grande part des nouveaux votes pour le Parti libéral viendraient des voix qui se seraient autrement exprimées pour le Nouveau Parti démocratique (NPD), dont la part des suffrages est passée de 17,8 % en 2021 à 6,3 %.
Notons aussi une chute moins dramatique pour le Parti vert (de 2,3 % à 1,2 %) et pour le Bloc québécois (de 7,6 % à 6,3 %). Ces pourcentages suggèrent un déplacement de ces votes vers les libéraux. Pris ensemble, ces trois partis ont perdu un peu plus de 2 millions de votes, tandis que le parti mené par Mark Carney en a gagné un peu plus de 3 millions.
Or, seulement 2 373 202 personnes de plus ont voté lors de cette élection fédérale. Les conservateurs ont gagné un nombre de votes très proche de cette augmentation.
Un mouvement conservateur à son apogée?
On a mentionné que Pierre Poilievre a donné aux conservateurs le plus haut pourcentage du vote depuis l’époque de Brian Mulroney, qui avait atteint 50 % en 1984. En comparaison, en 2011, Stephen Harper avait pu former une majorité avec 39,6 % du vote populaire.
Le Parti conservateur a réussi à reprendre une grande partie des voix qui s’étaient tournées vers le Parti populaire du Canada; qui est lui passé de 5 % à 1,7 % des votes. Pierre Poilievre y est arrivé en canalisant le mécontentement contre les libéraux, certes, mais aussi en reprenant plusieurs de ses politiques et en se radicalisant encore plus à droite.
Or, tandis que les libéraux ont plus ou moins maintenu le cap en matière de politiques depuis des décennies, on ne peut comparer le Parti conservateur d’aujourd’hui et le Parti progressiste-conservateur de Brian Mulroney.
Les échecs constitutionnels de ce dernier ont mené à la création du Bloc Québécois. C’est aussi contre ce Parti progressiste-conservateur que s’est dressé le Parti réformiste. Celui-ci a pu grandir suffisamment pour avaler l’ancien parti, l’intégrer et le digérer.
Tandis que Stephen Harper cherchait à courtiser le centre-droit – il aurait sans doute conquis bon nombre des personnes qui ont voté pour Mark Carney – le Parti conservateur ne tente plus de faire taire l’extrême-droite en son sein. Même le chef conservateur Erin O’Toole avait expulsé un membre important du parti pour avoir proféré des propos haineux.
Sous le leadeurship de Pierre Poilievre, les proches du «Convoi de la liberté» trouvent ainsi leur place au sein du parti. La campagne électorale conservatrice s’est rapprochée, dans une certaine mesure, des slogans et de la vision des groupes suprémacistes blancs.
Le parti s’est rapproché des réseaux qui propagent des théories du complot, dont certains réseaux religieux, et a bénéficié de leurs attaques contre Mark Carney. Si bien que la victoire libérale est déjà remise en cause par certaines personnes… par le biais de fabulations.
Entre le travail fait par les théories du complot, une forte organisation bien éprouvée pendant le «Convoi de la liberté», des réseaux de communication et des organes de désinformation comme Rebel News, le Parti conservateur a tous les atouts de son côté. Il ne cherche plus à prendre ses distances de ce mouvement qui l’a presque porté au pouvoir.
Le Nouveau Parti démocratique, principal parti politique de gauche au Canada, n’a pas fait élire assez de députés pour être reconnu comme un parti officiel lors de l’élection. Le chef Jagmeet Singh, qui n’a pas été élu dans sa circonscription, a démissionné de son poste le soir même.
Une gauche en fin de déclin?
À moins qu’une autre situation tout aussi opportune n’émerge lors du prochain scrutin, les libéraux ne pourront pas répéter leur victoire à l’arraché. Ils devront créer un soutien qui ira plus loin que la peur de Trump et d’un trumpisme canadien.
Le parti devra choisir entre une orientation vers la droite – et ce groupe instable que forment les «torys rouges» et les «libéraux bleus» – ou vers la gauche, qui l’a porté au pouvoir pour bloquer le mouvement conservateur.
Le vote stratégique pourrait avoir des conséquences à long terme pour les politiques sociales et environnementales. Après tout, les libéraux ont pu se faire élire malgré leur silence sur certaines questions, une diminution de la place des femmes et du genre au sein du gouvernement, ainsi qu’une position hostile aux politiques environnementales.
Malgré un appui somme toute considérable pour ses positions politiques, le NPD n’arrive pas à convaincre les mouvements sociaux. Il a perdu le soutien des syndicats et du monde ouvrier. Sans un appui ferme de ces électeurs, le vote stratégique pour le choix «le moins pire» est plus tentant.
La gauche citoyenne qui se préoccupe peu de la politique se trouve devant un dilemme en matière électorale, aux côtés de ses activités au sein de la société civile. Doit-elle travailler au renouvèlement du NPD et risquer une prochaine victoire conservatrice si les libéraux n’arrivent pas à former le gouvernement?
Ou pourrait-elle plutôt militer pour tirer le Parti libéral vers la gauche et enfoncer le clou dans le cercueil d’un parti qui semble parfois moribond et qui a, jusqu’à présent, évité toute perspective de renouvèlement?
Jérôme Melançon est professeur titulaire en philosophie à l’Université de Regina. Ses recherches portent généralement sur les questions liées à la coexistence, et notamment sur les pensionnats pour enfants autochtones, le colonialisme au Canada et la réconciliation, ainsi que sur l’action et la participation politiques. Il est l’auteur et le directeur de nombreux travaux sur le philosophe Maurice Merleau-Ponty, dont La politique dans l’adversité. Merleau-Ponty aux marges de la philosophie (MétisPresses, 2018).
Au lendemain de la défaite de Pierre Poilievre dans sa circonscription de Carleton, près d’Ottawa, des députés conservateurs ont commencé à accorder des entrevues à des plateaux télé boudés jusqu’ici par les membres du parti.
Chris d’Entremont, député conservateur réélu dans la circonscription néoécossaise d’Acadie–Annapolis, s’est montré ouvert à travailler avec les autres partis de la Chambre pour faire face à l’administration Trump.
C’est le cas de Chris d’Entremont, réélu dans Acadie–Annapolis, en Nouvelle-Écosse, qui affirme à CBC que son parti devra travailler avec les autres partis pour faire face à l’administration Trump.
Idem pour son collègue réélu dans le Grand Toronto, Jamil Jivani, qui déclare sur CBC être prêt à discuter avec son ami J.D. Vance, vice-président des États-Unis, afin d’appuyer le gouvernement libéral dans ses négociations.
«Un changement de dynamique est toutefois nécessaire entre nos deux pays», a-t-il ajouté, évoquant de «forts désaccords politiques» avec J.D. Vance.
Les deux députés se sont exprimés sur CBC, un média dont Pierre Poilievre promettait de couper le financement.
Ces ouvertures du côté conservateur, peu communes lorsque le Parlement siège, seraient renforcées par des manœuvres des libéraux en coulisses qui, à trois sièges seulement de la majorité, tenteraient de recruter des conservateurs de l’autre côté de la Chambre, rapporte Radio-Canada.
Selon Yan Plante, le leadeur parlementaire qui sera choisi cette semaine «va devenir un peu comme un leadeur adjoint» de Pierre Poilievre.
Le président-directeur général du Réseau de développement économique et d’employabilité (RDÉE) Canada, Yan Plante, n’exclut pas qu’il y ait des «frustrations» chez les députés conservateurs, par rapport à la défaite de leur chef.
Selon lui, s’ils restaient auparavant silencieux, c’est «parce qu’ils avaient l’impression qu’ils se dirigeaient vers une victoire». «Au lendemain d’une défaite, certaines personnes mécontentes pourraient avoir le choix de s’exprimer davantage», commente l’ancien stratège politique.
En attendant, malgré la vingtaine de sièges gagnés par les conservateurs par rapport à l’élection fédérale de 2021, Pierre Poilievre «porte à lui seul le poids de la défaite», analyse François Rocher, professeur agrégé de science politique à l’Université d’Ottawa.
«Ce n’est pas quelque chose qui peut être partagé avec d’autres acteurs conservateurs […] puisqu’ils ont été absents du débat.»
Des députés de premier rang comme Pierre Paul-Hus, lieutenant des conservateurs au Québec, ou Melissa Lantsman, bras droit de Pierre Poilievre, étaient assurés d’avoir des postes de ministres. «Là [certains] se voient finalement de nouveau dans l’opposition», observe François Rocher.
Le Parti conservateur a rapidement fait savoir que le député conservateur Damien Kurek, élu à plus de 80 % dans la circonscription albertaine de Battle River–Crowfoot, acceptait de céder son siège aux Communes.
Le premier ministre, Mark Carney, a indiqué lors de son premier point de presse, le 2 mai, qu’il ne tarderait pas à déclencher une élection partielle, sans toutefois en préciser la date. Il a fixé le retour du Parlement au 26 mai, mais l’élection de la présidence de la Chambre, et le 27 mai pour le discours du Trône.
Tant qu’il ne sera pas élu lors d’une élection partielle, Pierre Poilievre ne pourra pas siéger à la Chambre des communes.
À lire aussi : Mark Carney veut ralentir l’immigration temporaire pour «réduire la pression»
Pierre Poilievre, qui a obtenu une large majorité de plus de 68 % lorsqu’il a été élu chef du Parti conservateur du Canada (PCC) en 2022, tient toujours son parti, affirme François Rocher, et cela tient en grande partie au fait que le chef n’a «pas de successeur naturel ou de têtes fortes».
À lire aussi : L’ère Poilievre commence chez les conservateurs
Yan Plante abonde dans le même sens : Pierre Poilievre reste le chef de parti. «Dans l’écrit, trompons-nous pas, tout ce qui va se passer d’important à la Chambre des communes [chez les conservateurs] devra recevoir l’aval du chef du parti, qu’il siège ou non.»
Il rappelle que le chef aura toujours son bureau au Parlement et une équipe «chargée d’écrire les questions qui seront posées en Chambre».
Celles-ci ne seront pas posées par Pierre Poilievre, mais par le leadeur parlementaire et certains députés choisis en amont… par le chef et son équipe, anticipe François Rocher.
Le caucus conservateur se réunissait d’ailleurs le 5 mai pour décider si ce serait lui ou Pierre Poilievre qui choisirait le prochain leadeur parlementaire. Les députés sont divisés sur la question.
Il y a quelques jours, Pierre Paul-Hus, lieutenant du Québec pour le Parti conservateur, a affirmé que le caucus était «uni» derrière son chef, malgré sa défaite.
En outre, les gains des conservateurs lors de la dernière élection fédérale l’ont emporté sur les défaites, estime Yan Plante. «Malgré tout ce qu’on entend sur le fait que [Pierre Poilievre] était apparemment contrôlant, il y a quand même 41 % des Canadiens qui ont voté pour lui. Donc force est d’admettre que ce [côté] n’est pas quelque chose qui a influencé les électeurs beaucoup.»
Le PDG du RDÉE entrevoit toutefois que la défaite individuelle de Pierre Poilievre ne lui laisse «pas le choix que d’écouter [ses députés] et de prendre des notes pour voir comment on peut faire mieux la prochaine fois».
«Avec l’augmentation de l’immigration francophone à l’extérieur du Québec, la demande de justice en français est de plus en plus importante», affirme le directeur général de la Fédération des associations de juristes d’expression française de common law, Rénald Rémillard.
Les besoins des nouveaux arrivants et des nouvelles arrivantes qui maitrisent mal ou aucunement l’anglais exercent une pression toute nouvelle à laquelle l’appareil judiciaire ne parvient pas toujours à répondre, selon l’avocat.
Pour François Larocque, la formation des magistrats aux droits linguistiques n’est pas encore à la hauteur. Il cite notamment l’affaire Mazraani dans laquelle le juge connaissait mal les droits linguistiques des témoins et avait commis des erreurs.
«La langue demeure encore trop souvent une barrière à l’accès à la justice, confirme le professeur de droit à l’Université d’Ottawa, François Larocque. L’expérience des justiciables varie d’un bout à l’autre du pays. Plus on va à l’ouest, plus la situation est critique […], mais le problème demeure systémique.»
Sur le papier, l’article 530 du Code criminel prévoit que toute personne accusée d’une violation de la loi peut réclamer un procès dans l’une des deux langues officielles du Canada, à savoir le français et l’anglais, et qu’elle doit être informée de ce droit.
En ce qui a trait au droit de la famille, en vertu de modifications à la Loi sur le divorce adoptées en 2021, il devrait être possible de divorcer en français partout au Canada. Tous les gouvernements provinciaux et territoriaux n’ont cependant pas encore adopté les règlements nécessaires.
En décembre 2024, la Colombie-Britannique a permis l’utilisation des deux langues officielles dans des procédures de séparation.
«Chaque province devrait avoir une capacité de bilinguisme suffisante pour traiter les requêtes en français. Les cours provinciales ont les mêmes obligations sur l’offre active que les cours fédérales», estime François Larocque.
À lire aussi : Procès dans la langue de son choix : l’histoire se répète
En réalité, le degré de bilinguisme judiciaire diffère fortement d’une province à l’autre. Selon Rénald Rémillard, il est «le plus abouti» au Nouveau-Brunswick, au Manitoba et en Ontario et le «moins exhaustif» dans les autres provinces.
Depuis la création de la Faculté de droit de l’Université de Moncton, d’«énormes progrès ont été faits dans la nomination de personnel de justice francophone», salue Denis Lavoie au Nouveau-Brunswick.
«Grâce à notre loi sur les langues officielles, nous avons des services juridiques en français plus avancés qu’ailleurs, confirme le vice-président de l’Association des juristes d’expression française du Nouveau-Brunswick, Denis Lavoie. Mais on ne peut pas s’assoir sur nos acquis. On pensait être secure et des enjeux sont remontés à la surface avec Blaine Higgs.»
L’avocat évoque notamment la fermeture par l’ancien gouvernement progressiste-conservateur de deux tribunaux dans la péninsule acadienne majoritairement francophone.
La situation dans les territoires est légèrement différente, car ils ont été créés par le gouvernement fédéral. «Ils ont donc des obligations linguistiques imposées par Ottawa beaucoup plus importantes», détaille Rénald Rémillard.
Quelles que soient les disparités à l’échelle du pays, la pénurie de juges, de juristes, mais aussi de personnel de soutien bilingues est généralisée.
«Un avocat ou un juge bilingue qui parle français, ça ne suffit pas. Il y a tout un staff en arrière-plan qui doit aussi avoir des compétences juridiques en français», insiste la présidente de l’Association des juristes d’expression française de l’Ontario, Naaila Sangrar.
Il manque des greffiers, des interprètes, des shérifs, des médiateurs francophones dans les palais de justice, de même que des assistants capables de préparer les documents juridiques dans les cabinets d’avocats.
À lire aussi : Accès à la justice en français : encore du chemin à faire (L’Aquilon)
L’offre active de services en français est de ce fait quasi «inexistante» dans les tribunaux et les salles d’audience, rapporte le directeur général de l’Association des juristes d’expression française du Manitoba, Tarik Daoudi.
«Même s’ils sont francophones, beaucoup d’avocats préfèrent déposer des dossiers en anglais», rapporte Tarik Daoudi au Manitoba.
«Quand un avocat se présente au tribunal et tente de déposer un dossier en français au comptoir, ce n’est pas évident. Il faut vouloir s’imposer comme francophone, revendiquer ses droits», déplore le responsable.
De la même manière, il dénonce une attente «de plusieurs heures» si un avocat sollicite une ordonnance en français auprès d’un juge, contre seulement quelques minutes si elle est rédigée en anglais.
«Si la personne bilingue n’est pas disponible pour prendre le dossier ou traiter une demande, c’est comme ça que les délais plus longs commencent», poursuit Naaila Sangrar.
François Larocque mentionne à cet égard une décision de 2024 de la Cour supérieure de l’Ontario ayant conclu à des «délais déraisonnables» en français en matière criminelle : «La cour a donc ordonné l’arrêt de la procédure à cause de l’incapacité systémique à fournir une justice dans les deux langues officielles.»
Des progrès significatifs ont néanmoins été accomplis ces dernières années. Grâce à la modernisation de la Loi sur les langues officielles, le ou la ministre de la Justice et procureur général du Canada a l’obligation de tenir compte des besoins d’accès à la justice dans les deux langues officielles et de la pénurie de juges bilingues au moment de nommer les juges des cours provinciales supérieures.
«Il y a une approche plus intentionnelle pour pallier les déficiences systémiques», salue François Larocque.
À lire aussi : L’accès à la justice en français de nouveau mis à mal en Alberta (Le Franco)
«Les autorités prennent ça au sérieux, il y a des efforts de recrutement pour embaucher plus de personnes bilingues», appuie Tarik Daoudi. La juge en chef du Manitoba, Marianne Rivoalen, est notamment francophone.
«Les acteurs unilingues doivent aussi être formés pour avoir une meilleure compréhension des droits linguistiques. Tout le système doit être sensibilisé», estime la professeure Caroline Magnan à l’Université d’Ottawa.
Pour changer la donne, l’Université d’Ottawa a également lancé en 2016 un programme de Certification de common law en français. L’objectif est de permettre à des étudiants et des étudiantes des facultés de droit de l’Ouest canadien de suivre des cours de common law et d’acquérir les outils nécessaires pour offrir des services juridiques en français. Plus de 100 juristes ont déjà été formés.
Le nombre insuffisant de personnes bilingues dans le domaine de la justice n’est pas seul en cause. Trop souvent, les justiciables connaissent mal leurs droits linguistiques.
«Les francophones sont souvent réticents à réclamer, car le système judiciaire est punitif et conflictuel. C’est presque toujours une épreuve, analyse Rénald Rémillard. Ils veulent en sortir le plus vite possible pour limiter les couts et les délais.»
Les associations de juristes se mobilisent aux quatre coins du pays et organisent des ateliers de sensibilisation afin d’«expliquer aux francophones, et en particulier aux nouveaux arrivants, qu’ils ont le droit fondamental d’avoir des services en français à chaque étape d’une procédure», relève Tarik Daoudi.
À lire aussi : La Cour suprême traduira quelques anciennes décisions : «insuffisant» pour certains
Le système métrique, ou «Système international d’unités» de son nom officiel, est un produit de la Révolution française. C’est l’un des legs positifs de cette période trouble où presque n’importe qui pouvait se faire guillotiner pour n’importe quelle raison.
Le mètre étalon exposé à la place Vendôme, à Paris. Son matériel a défini le mètre de la Révolution française jusqu’à 1960.
Comme dans plusieurs pays de l’époque, la France utilisait un système chaotique pour mesurer, peser et calculer une multitude de choses. En fait, plus de 700 unités de mesure étaient alors en usage dans l’Hexagone.
L’idée de simplifier tout ce désordre était inspirée de l’idéal d’égalité qui motivait ceux qui ont renversé l’Ancien Régime. Avec un système universel et standard, on estimait que les citoyens pourraient mieux gérer leurs intérêts et commercer équitablement. L’égalité par le mètre.
À lire aussi : L’aventure extraordinaire de la Compagnie de la Baie d’Hudson
Au début de 1791, des scientifiques français se mettent d’accord sur le choix du mètre comme base de la mesure de la distance. Le mètre donnera d’ailleurs son nom au système comme tel.
Ce panneau de limite de vitesse en Ontario en 1977 illustre bien la conversion au système métrique. Sous le chiffre 40 (km/heure), on devine l’ancienne limite de 25 miles à l’heure.
On définit alors le mètre (mot dérivé du grec «metron», qui signifie «mesure») comme étant égal à la dix-millionième partie d’un méridien (longitude) entre le pôle Nord et l’équateur. C’est simple, mais il fallait y penser.
Mais même si la France revendique l’invention du système métrique, il est aussi établi que l’évêque britannique John Wilkins, fondateur de la prestigieuse British Royal Society, avait proposé plus de 120 ans auparavant la standardisation de plusieurs mesures, comme celles de la distance, du volume et de la masse.
Même si sa démarche est restée lettre morte dans son pays, ses recherches ont jeté les bases du système métrique élaboré ensuite en France.
En 1799, Napoléon rend le nouveau système métrique obligatoire en France.
Dans les décennies qui vont suivre, les nouvelles mesures adoptées en France se propagent dans de nombreux autres pays.
À l’aube de la Seconde Guerre mondiale, le système métrique s’était répandu dans presque tous les pays d’Europe, d’Amérique centrale et du Sud, dans la majeure partie de l’Afrique, au Moyen-Orient, en Chine et dans plusieurs pays voisins.
La vente de la viande dans les épiceries est l’un des bastions du système impérial au Canada, avec le prix à la livre affiché bien plus visiblement que celui au kilo.
Le monde anglo-saxon, plusieurs pays africains sous l’égide du Royaume-Uni ainsi que l’Inde résistent alors à l’envahisseur métrique.
En 1960, on peaufine et précise les unités métriques lors de la onzième Conférence générale des poids et des mesures et l’on crée le Système international d’unités (SI), dont l’abréviation française est utilisée dans toutes les langues. Si la France avait perdu son empire depuis longtemps, son système de mesures avait conquis le monde. Ou presque…
L’année 1965 sera un jalon important puisque le Royaume-Uni, voulant s’intégrer économiquement au reste de l’Europe, cède à son tour aux unités françaises et laisse tomber son système impérial de mesures, une conversion que plusieurs scientifiques préconisaient depuis une centaine d’années.
Dans la foulée, le Canada montera lui aussi dans le train quelques années plus tard, même si son voisin du Sud, et son plus grand partenaire commercial, refusera – et refuse toujours – d’adopter le SI.
Aux débuts des années 1970, le gouvernement canadien de Pierre Elliot Trudeau, élu deux ans auparavant et féru d’idées réformistes dans plusieurs secteurs, se lance dans l’aventure métrique.
Après quelques années d’études et de préparation, le premier pas est franchi le 1er avril 1975, alors que le service météorologique canadien adopte officiellement le degré Celsius. Quelques mois plus tard, c’est au tour des précipitations d’être mesurées en centimètres ou millimètres.
La conversion se fait par étapes. En 1975 et 1976, on voit apparaitre les unités métriques sur un nombre croissant de produits ménagers. L’année suivante, en 1977, les kilomètres prennent leur place sur les panneaux routiers. Le kilomètre-heure s’affiche sur les indicateurs de vitesse des voitures, mais coexistera pendant longtemps avec le mille à l’heure.
Au début de 1979, le litre commence à remplacer le gallon dans les stations-service. Cette étape a particulièrement suscité la grogne au sein de la population. À la Chambre des communes, une quarantaine de députés progressistes-conservateurs ont défendu des pétitions contenant des milliers de signatures contre l’adoption du litre à la pompe.
Au printemps de la même année, l’arrivée du gouvernement de Joe Clark marque une pause dans l’implantation du système métrique au pays. Après seulement quelques mois au pouvoir, ce gouvernement minoritaire est remplacé par les libéraux, qui remettent la machine en marche.
En marche, mais pas toujours rondement. En 1983, un Boeing 747 d’Air Canada, parti de Montréal à destination d’Edmonton, doit atterrir d’urgence au Manitoba. Les réservoirs de l’appareil n’avaient été remplis qu’à moitié en raison d’un mauvais calcul des unités métriques.
Situation du SI dans le monde. Vert : conversion complète; jaune : presque complète; orange : partielle; rouge : peu de mise en œuvre.
L’élection de Brian Mulroney à la tête du pays en 1985 change encore la donne. Le nouveau premier ministre progressiste-conservateur abolit la Commission du système métrique créé en 1971. Dorénavant, le SI, en implantation depuis 10 ans, sera volontaire.
Logo utilisé sur de nombreux produits lors de la période de conversion au système métrique.
Mais le système est là pour rester, notamment dans les instances gouvernementales. Les Canadiens et les Canadiennes cependant vivent toujours, 50 ans plus tard, dans deux univers parallèles. On roule en kilomètres, mais une bonne partie de la population continue de mesurer leur taille et leurs matériaux de construction en pieds et en pouces, et leur poids en livres.
Les températures extérieures et intérieures se mesurent en Celsius, mais dans plusieurs chaumières, on chauffe le four en Fahrenheit. Et un pied de neige semble plus concret que 30 centimètres.
À l’épicerie, la grande majorité des produits est vendue en grammes ou en millilitres, mais le prix à la livre prévaut pour la viande, avec la conversion en kilos affichée plus discrètement. Le beurre est bien vendu «métriquement», en emballage de 454 grammes, même si on persiste à dire qu’on achète une livre de beurre.
N’empêche, le SI a bel et bien établi son emprise sur la planète. Seuls trois pays résistent toujours et encore : les États-Unis, le Liberia et le Myanmar. C’est bien l’un des rares secteurs où le pays de l’Oncle Sam n’a pas réussi à s’imposer.
Autrice-compositrice-interprète de Mahone Bay en Nouvelle-Écosse, Kristen Martell a voulu se rapprocher de ses racines acadiennes avec son quatrième opus, Allume mon courage.
Elle a lancé cet album francophone avec son univers folk rempli de nostalgie à la fin de mars 2025. Tout en douceur, on est séduits par des textes puissants qui nous interpellent sur la fragilité du cœur, les souvenirs parfois heureux, parfois douloureux. Les orchestrations folks aux allures pop sont irrésistibles. Les guitares et le piano sont souvent maitres du jeu et très accrocheurs.
Avec sa voix un peu mielleuse, Kristen Martell charme l’oreille tout au long des six chansons. Comment c’était avant dévoile toute la pureté de sa voix. La pièce titre, Allume mon courage, est un excellent exemple de la richesse de son timbre. L’autrice-compositrice-interprète termine son album avec une superbe version instrumentale de la pièce-titre.
Petite oasis francophone dans la carrière anglophone de l’artiste, ce nouvel album réussit à séduire. Avec beaucoup de musicalité et de justesse dans la voix, la Néoécossaise livre un produit fort réussi qui nous caresse tendrement. Allume mon courage est un univers exceptionnel auquel il faut tendre l’oreille.
L’auteur-compositeur-interprète fransaskois Étienne Fletcher revient avec un quatrième album, cette fois sur le thème de l’espoir d’un monde meilleur où chaque être humain a droit à la liberté d’expression. Il s’inspire de l’extinction des kauaʻi ʻōʻō, une espèce d’oiseau qui vivait sur l’une des iles d’Hawaii, pour décrire le danger de perdre son identité, sa langue.
L’une des chansons maitresses de cet album, Poète, est une quête de vérité. Elle nous invite à tendre davantage l’oreille aux poètes, qui font souvent appel à la fraternité.
Tout au long de ce disque, Étienne Fletcher prêche pour l’espoir et l’importance de la liberté d’expression pour un monde meilleur. Il nous interpelle sur la peur du non-respect, de la différence, de l’incompréhension de l’autre.
Parmi les chansons qui composent cet album, il y a Assis-toi et À quoi on joue?, deux merveilleuses pièces qui soulignent le besoin de garder en soi l’espoir d’arriver à créer un monde meilleur. Étienne Fletcher nous invite aussi à prendre le temps de respirer et de réfléchir à l’essentiel avec Pas le temps.
Berceuse pour Riel tire sa puissance dans le non-dit. Cette trame instrumentale au piano accompagne les mots d’un enfant qui parle seulement en anglais. L’artiste montre ainsi l’importance de se battre afin de garder le français vivant.
Avec des pièces parfois énergiques et d’autres plus en douceur, l’auteur-compositeur-interprète lance un appel au recueillement et à l’écoute de soi afin de prendre la place qui nous revient. L’intériorité des mélodies vient appuyer la puissance du message. Kauai O’o offre un univers musical captivant pour un message important.
Il y a un an déjà, Paul Cournoyer, auteur-compositeur-interprète originaire de Calgary, proposait un deuxième opus solo, Victoires et défaites.
Le bassiste franco-albertain y résume l’ensemble de ses expériences sur 11 plages à saveur folk rock et pop rock où les jeux de guitare et les trames de piano sont des éléments importants qui sont à l’origine de la séduction.
Avec des orchestrations solides, une voix tout en douceur et des textes profonds, l’artiste propose des thèmes comme l’essentiel, la vérité, l’intégrité et le moment présent.
La profondeur des orchestrations n’a d’égale que celle des textes. La plume de Paul Cournoyer ramène à l’essentiel, au moment présent et à l’intégrité.
L’album a ses moments forts, entre autres la pièce C’est bien comme ça, qui nous rappelle que l’on peut faire plusieurs détours, mais que l’important c’est soi-même. Parfois est une superbe balade sur l’avenir et l’inconnu, alors que l’artiste visite l’univers blues pour parler de nos racines et de notre destin avec Ça coule dans notre sang.
La pièce-titre, Victoires et défaites, rappelle qu’il y a toujours un prix à la réussite, à la victoire.
Marc Lalonde, dit le Lalonde des ondes, est chroniqueur musical depuis plus de 25 ans et animateur de l’émission radiophonique Can-Rock. Il se fait un malin plaisir à partager la richesse musicale francophone dans 16 stations de radio partout au pays chaque semaine.
Au lendemain de l’élection fédérale, les organismes francophones ont rappelé leurs demandes auprès du prochain gouvernement de Mark Carney.
La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) et la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF) rappellent qu’elles attendent les règlements d’application de la Loi sur les langues officielles.
Elles souhaitent aussi des politiques qui englobent davantage les jeunes, notamment en ce qui concerne le logement, les bourses au postsecondaire ou encore le cout de la vie.
Côté culture, la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF) veut plus d’investissement de la part du fédéral, aussi bien sur le plan financier que stratégique, pour protéger les artistes et promouvoir le contenu francophone auprès de la population canadienne.
À lire aussi : Francophonie : après les promesses électorales, l’heure des comptes
Selon Élections Canada, plus de 19,5 millions de Canadiennes et Canadiens ont voté lors de l’élection fédérale du 28 avril. Le taux de participation dépasse les 68 %, six points de pourcentage de plus qu’en 2021 (62,6 %).
Une Chambre en deux tons : Le gouvernement de Mark Carney siègera donc à la Chambre des Communes avec 168 députés, soit 16 de plus que sous le dernier gouvernement Trudeau.
Les conservateurs ont réalisé un gain de 24 sièges, avec 144 députés, en grande partie grâce aux votes dans l’ouest du pays et en Ontario.
Le Nouveau Parti démocratique (NPD) a subi une cuisante défaite, n’ayant pas remporté assez de circonscriptions pour automatiquement avoir le statut de parti officiel. Ils sont passés de 25 à 7 sièges. Le chef du parti, Jagmeet Singh, a démissionné dans la foulée.
Le cochef du Parti vert, Jonathan Pedneault, a démissionné après avoir terminé dernier dans la circonscription d’Outremont, à Montréal, avec moins de 10 % des suffrages exprimés.
De son côté, le Bloc québécois passe de 33 à 23 sièges.
Le Parti vert passe de deux sièges à un seul. Sa cocheffe, Élizabeth May, a remporté sa circonscription en Colombie-Britannique, mais son compère, Jonathan Pedneault, a démissionné après avoir terminé dernier dans la circonscription montréalaise d’Outremont. Les verts ont obtenu seulement 1,2 % des votes.
À lire aussi : Francophonie : après les promesses électorales, l’heure des comptes
Le chef de l’opposition officielle a terminé deuxième dans la circonscription ontarienne de Carleton – qu’il représentait depuis 2004 –, face au libéral nouveau venu en politique, Bruce Fanjoy.
Pierre Poilievre a perdu son siège de député, mais a signifié aux Canadiens qu’il continuera «de se battre» pour eux. Il reste néanmoins le chef de son parti à l’extérieur de la Chambre.
Vue de la fenêtre : Pierre Poilievre reste le chef du Parti conservateur du Canada, mais ne pourra pas diriger son parti dans la Chambre des communes; un autre élu conservateur devra prendre sa place lorsque les travaux parlementaires reprendront, selon plusieurs analystes.
Pour que Pierre Poilievre puisse reprendre sa place de chef de parti à la Chambre, un député conservateur devra démissionner afin qu’il puisse se présenter et remporter une élection partielle, déclenchée par Mark Carney. Ce processus pourrait prendre quelques mois.
L’actu : Des Nunavimmiuts (habitants du Nunavik, dans le Nord-du-Québec) se sont cogné le nez sur des portes de bureaux de vote fermées le jour de l’élection, selon Radio-Canada.
La conséquence : Dans certains villages, ils ont soit ouvert plus tard que prévu, soit fermé plus tôt, empêchant ainsi plusieurs personnes de voter. De plus, le vote par anticipation n’a pas non plus été possible dans plusieurs de ces communautés.
Élections Canada a mentionné la mauvaise météo et les problèmes de recrutement pour expliquer la situation. Ils se sont excusés et mèneront une enquête.
L’Association canadienne des libertés civiles (ACLC) a rappelé que «des obstacles historiques, systémiques et juridiques ont longtemps privé ces groupes marginalisés du plein exercice de leurs droits politiques».
À lire aussi : Élection fédérale : les Autochtones attendent plus de mesures concrètes
Le produit intérieur brut (PIB) réel du Canada a diminué de 0,2 point en février 2025, a annoncé Statistique Canada mercredi. Une hausse de 0,4 % avait été enregistrée en janvier.
Cette diminution s’expliquerait par un ralentissement de «l’extraction minière, de l’exploitation en carrière, de l’extraction de pétrole et de gaz et celui de la construction», selon le communiqué de l’agence.
Plusieurs évènements météorologiques auraient en partie contribué au ralentissement de ces activités.
Le gouvernement canadien subventionne depuis 2022 de l’engrais qui dissémine des microplastiques dans les sols, selon un reportage de Radio-Canada.
Le gouvernement fédéral subventionne de l’engrais polluant
Le gouvernement canadien autorise depuis 2022 l’utilisation d’un engrais enveloppé d’une fine couche de plastique qui laisserait des microplastiques dans le sol, selon un reportage de Radio-Canada.
Cette fine couche de plastique éviterait l’importante production de gaz à effet de serre qui se dégage des engrais. Toutefois, en 2022, des scientifiques qui conseillaient le gouvernement ont indiqué que cette pellicule n’était pas efficace pour limiter la propagation de ces gaz.
La Cour suprême refuse d’entendre une cause climatique
La Cour suprême du Canada a refusé d’entendre la cause de sept jeunes écologistes âgés de 16 à 28 ans. Ces derniers soutiennent que les politiques environnementales de l’Ontario sont inconstitutionnelles et nuisent à la santé des générations futures.
Ils avaient déjà essuyé un premier échec devant la Cour d’appel de l’Ontario.
Aucune raison n’est jamais avancée par la Cour suprême pour justifier son refus d’entendre une cause.