La professeure en communication et politique de l’Université du Québec à Trois-Rivières, Mireille Lalancette, voit venir une «tempête parfaite», qui a le potentiel d’exacerber la désinformation électorale.
«Il y a de moins en moins de gens qui s’identifient à un parti politique, qui ont une carte de parti par exemple. Dans la même veine, il y a une montée du populisme […] Il y a aussi une méfiance envers les gouvernements et les médias. Donc on va se tourner vers une autre source.»
«C’est tout ça mis ensemble qui rend possible que cette désinformation ait plus de prise», résume-t-elle.
Désinformation ou mésinformation?
Selon Mireille Lalancette, la désinformation est liée au partage volontaire de fausses informations. La mésinformation est surtout liée au partage involontaire d’une fausse information.
Les avancées technologiques n’expliquent pas à elles seules l’exacerbation de la désinformation électorale. Le contexte est aussi important, estime Mireille Lalancette.
L’opinion aux dépens des faits
Selon Mireille Lalancette, «dans certains cas, il n’y a plus d’intérêt pour les faits». Aujourd’hui, les opinions prennent de plus en plus de place.
«Le sous-financement des médias amène à avoir beaucoup d’opinions, de commentaires, explique la professeure. Quand on normalise l’importance d’avoir des opinions et des commentaires, ça mène les gens à dire : “Moi j’y crois, moi je pense ça, moi je l’aime cette personne”. On n’est plus dans les faits, dans la véracité. On est dans l’ordre de l’émotion.»
«Les médias doivent recevoir une certaine aide, comme ça a été fait en Finlande, afin que les salles de nouvelles puissent être peuplées de journalistes capables d’offrir des analyses sérieuses plutôt que, comme on le voit beaucoup aujourd’hui, des chroniqueurs d’opinion», défend de son côté le député bloquiste de Trois-Rivières, René Villemure.
Ce n’est pas que l’opinion n’est pas valable, mais elle n’est pas toujours valide
IA et réseaux sociaux
M. Villemure anime, dans sa circonscription le 15 octobre, un colloque sur la désinformation électorale. Cette initiative est non seulement motivée par sa carrière prépolitique d’éthicien, elle est aussi d’actualité.
Pour contrer la désinformation électorale, René Villemure prône une presse indépendante plus forte et un enseignement renforcé de la pensée critique dans les écoles.
«L’arrivée de toutes les méthodes de surveillance qu’on peut appeler médias sociaux, téléphones ou intelligence artificielle fait qu’on devrait être à même d’intéresser la personne ordinaire» à ce phénomène, dit-il.
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Les complots et les opinions trouvent leur confort dans les réseaux sociaux, où, comme le rappelle Mireille Lalancette, les codes journalistiques ne s’appliquent pas. Pourtant, les gens s’informent de plus en plus au sein de ces plateformes.
«Quand votre source d’information est YouTube ou Facebook, et que vous prenez votre vérité là, qu’est-ce que ça fait? C’est là qu’on est beaucoup plus influençables», met en garde l’expert en résidence à l’École supérieure d’études internationales de l’Université Laval et militaire de carrière, Richard Giguère.
«Quand on parle de désinformation ou de mésinformation, on essaie d’influencer les gens», dit-il. Certains États étrangers l’ont d’ailleurs bien compris.
Ingérence étrangère
«Certains pays étrangers peuvent mener des campagnes sophistiquées qui masquent efficacement les sources de désinformation», note la présidente de la Commission sur l’ingérence étrangère, la juge Marie-Josée Hogue, dans son rapport initial paru en mai 2024.
«La Russie cherche aussi à façonner l’opinion publique, à manipuler les enjeux sociaux existants et à exacerber les clivages sociaux. Elle cherche à miner la confiance du public dans les systèmes politiques et les processus démocratiques en Occident», lit-on. La Chine est aussi identifiée comme autrice de désinformation au Canada.
«La Chine ne vise pas à s’approprier nécessairement le contrôle du pays, mais à créer un certain chaos en politique afin d’empêcher certaines décisions de se prendre», commente René Villemure.
Selon lui, malgré l’approche d’élections fédérales, le Canada «n’est malheureusement pas mieux outillé». La ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, l’a affirmé elle-même la semaine dernière.
Richard Giguère voit un lien entre la désinformation et la guerre cognitive.
«[Certains] gouvernements étrangers ont probablement fait le calcul que ce serait préférable pour eux d’avoir tel ou tel gouvernement en place dans les pays qui sont en élections», stipule Richard Giguère.
Celui-ci fait un lien entre la désinformation et la «guerre cognitive» : «Les espaces de confrontation traditionnels, c’était le domaine terrestre, maritime et aérien. Là, on voit l’apparition de nouveaux espaces […] comme le cyberespace, la bulle informationnelle et le domaine cognitif.»
En d’autres mots, l’objectif de ces États est d’influencer en «ciblant le cerveau des gens».
Le problème, c’est qu’il est «extrêmement difficile de trouver le coupable, ajoute le chercheur. Il y a plein de moyens de détourner [la source de la désinformation]».
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Un enjeu domestique aussi
«Les gens sont plus sensibles au discours politique en période d’élections», note Richard Giguère. C’est donc un moment propice pour mener une campagne de désinformation.
On voit que les acteurs politiques eux-mêmes se servent de la désinformation pour arriver à leurs fins, comme raconter des faussetés à propos d’autres candidats, raconter des choses qui pourraient influencer le vote, miner les faits
Parmi les techniques utilisées par les politiciens, elle remarque «la répétition, même d’un élément faux, qui à force d’être répété devient comme vrai ou plus vérifiable».
S’inspirant de techniques américaines républicaines, «ils vont être très répétitifs dans leurs contenus, nier, attaquer systématiquement l’adversaire», poursuit la professeure.
«Tout ça participe aussi à créer une forme de cynisme envers la politique, de méfiance, ce qui fait en sorte qu’on va encore plus se détourner des médias pour aller chercher de l’information ailleurs», dit-elle.
René Villemure soutient que son parti ne joue pas le jeu de la désinformation. «Là où on a un contrôle [comme député], c’est quand on voit de la désinformation par un parti politique. Je pense qu’on a un devoir de la dénoncer et d’exiger de rendre compte.»
La campagne américaine sera un test de désinformation, «mais la campagne canadienne n’y échappera pas», prévient-il. «La désinformation vient des États étrangers, mais il y a [aussi] des acteurs malveillants à l’intérieur du pays.»
Quelles que soient leurs ambitions, les organismes de la francophonie canadienne se heurtent à un problème de taille : ils restent encore largement méconnus en dehors des frontières du pays.
Martin Théberge de la SNA insiste sur l’importance de la diplomatie civile pour faire exister la francophonie canadienne sur la scène internationale.
«Il y a une certaine compréhension que le français existe à l’extérieur du Québec, mais les gens ne comprennent pas nécessairement les nuances, le fait qu’il s’agit d’une langue minoritaire», explique le président de la Société nationale de l’Acadie (SNA), Martin Théberge.
«Il y a un gros travail d’éducation et de sensibilisation à faire pour que les gens nous connaissent et pensent à nous quand ils veulent nouer des partenariats», ajoute le président-directeur général par intérim de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), Martin Normand.
Les organismes communautaires ont profité du Sommet organisé par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), à Villers-Cotterêts, au nord de Paris, pour changer la donne. Les 4 et 5 octobre derniers, ils ont multiplié les rencontres avec des responsables politiques français et des acteurs et actrices de la société civile de divers horizons.
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«C’était important qu’on soit à Paris pour renforcer nos liens avec le reste de la francophonie, ça représente un potentiel énorme», confirme la présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA), Liane Roy.
«Ça nous ouvre de nouveaux canaux de communication, de nouvelles collaborations. Ça élargit notre cercle d’influence», poursuit Martin Théberge.
Durant deux jours, les 88 États et gouvernements membres de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) ont débattu de la place des femmes, de l’importance de l’entrepreneuriat, de culture, de technologie ou encore de la guerre au Liban.
Les gouvernements du Canada et du Nouveau-Brunswick, membres de plein droit de l’OIF depuis les années 1970, mais aussi celui de l’Ontario, membre observateur depuis 2016, étaient présents à cette grand-messe de la francophonie internationale.
Le député fédéral Darrell Samson se dit «extrêmement fier» de l’adhésion de la Nouvelle-Écosse à l’OIF.
Preuve que la francophonie canadienne renforce son poids diplomatique, la Nouvelle-Écosse a obtenu son statut d’observateur auprès de l’OIF au cours du Sommet.
«Grâce aux Acadiens, la province devient un joueur sur la scène internationale et s’engage davantage dans la francophonie mondiale», se réjouit le député fédéral libéral de Sackville–Preston–Chezzetcook en Nouvelle-Écosse et membre de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF), Darrell Samson.
«Ça nous ouvre des portes un peu partout. Nous allons développer de nouveaux liens et partenariats dans les domaines de la culture, de l’éducation, de l’économie», renchérit la présidente de la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse (FANE), Denise Comeau-Desautels.
Liane Roy met cependant en garde : «C’est un bon début, mais tout va dépendre de ce que le gouvernement provincial va faire de cette participation, du rôle plus ou moins actif qu’il va vouloir jouer.»
Peter Hominuk de l’AFO souhaiterait que l’Ontario devienne membre à part entière de l’OIF.
En Ontario, le directeur général de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), Peter Hominuk, pense déjà à la suite. Il aimerait que la province devienne membre de plein droit de l’OIF, à l’image du Nouveau-Brunswick.
«Notre voix est amplifiée [quand nous sommes plusieurs à participer]. Les Franco-Ontariens sont reconnus comme un joueur qui compte, ça nous ouvre des opportunités économiques et ça peut même encourager l’immigration francophone», affirme-t-il.
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Pour Martin Théberge, prendre part au Sommet donne une «réelle capacité d’influence» : «On peut porter nos messages clés auprès du premier ministre Justin Trudeau et des politiques.»
Liane Roy de la FCFA se dit très heureuse que le sujet de la pénurie du personnel enseignant ait été abordé lors du Sommet de la Francophonie.
Les communautés francophones en situation minoritaire ont fait de la diplomatie civile un axe central de leur action sur la scène internationale. La SNA et la FCFA font notamment partie de la Conférence des organisations internationales non gouvernementales de la Francophonie (COING) de l’OIF. La FCFA a récemment été élue au sein du comité de suivi.
Liane Roy considère qu’il s’agit d’«une vraie reconnaissance» du travail mené depuis des années : «En tant que structure de la société civile, nous jouons un rôle pour faire entendre la voix des femmes, des jeunes, des minorités à l’étranger.»
«On est arrivé à un point d’inflexion, avertit néanmoins Martin Normand. Les instances politiques souhaitent [que les organismes communautaires] prenne[nt] plus de place, mais nous avons des moyens limités pour le faire. Pour nous engager davantage, il nous faut des sources de financement supplémentaires.»
Le président de la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF), Simon Thériault, estime, lui, que le Canada doit pousser davantage pour que la jeunesse soit écoutée au sein des instances de la francophonie internationale : «Notre modèle canadien par et pour les jeunes est très convoité, il faut en faire profiter d’autres pays.»
La FJCF s’investit notamment pour que le Réseau international de la jeunesse de la Francophonie (RIJF), créé en octobre 2022, soit mieux financé et plus actif.
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Dans la déclaration finale du 19e Sommet de la Francophonie, les chefs d’État et de gouvernement rappellent leur attachement au rôle de la société civile «au bénéfice des populations et de la Francophonie institutionnelle».
Ils soulignent également l’importance de faciliter les échanges entre les chercheurs et les étudiants dans le cadre de projets de mobilités. «Ce travail résonne avec notre volonté de valoriser et promouvoir le savoir scientifique en français», salue Martin Normand.
Concernant la question du manque de professionnels de l’éducation, les responsables politiques évoquent le développement «d’actions de formations linguistiques et pédagogiques, afin d’augmenter significativement le nombre d’enseignants».
«La FCFA a beaucoup poussé pour le sujet. Le Canada va travailler en partenariat avec l’OIF pour trouver des solutions durables, favoriser la mobilité des cerveaux et l’échange des connaissances sur la formation des enseignants», relève Liane Roy.
Simon Thériault de la FJCF aimerait qu’un prochain Sommet de la Francophonie soit organisé dans une communauté francophone en situation minoritaire.
Aux yeux de Peter Hominuk, la diplomatie culturelle reste une autre manière de renforcer la présence de la francophonie canadienne dans le reste du monde : «Nos artistes sont nos portevoix, ils sont capables de faire rayonner notre culture à l’extérieur.»
Le directeur de l’AFO parle également des possibilités de diffuser dans le monde des outils pédagogiques spécifiques à l’enseignement du français en milieu minoritaire.
De son côté, Simon Thériault espère convaincre Ottawa d’organiser un prochain Sommet de la Francophonie dans une communauté en situation minoritaire. «Ce serait la meilleure manière d’être plus visible et de promouvoir notre langue», assure-t-il.
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Columba livia, c’est le nom latin du pigeon biset (du vieux français bis, qui signifie gris sombre ou grisâtre). La plupart des pigeons voyageurs sont de cette espèce. C’est le plus vieil oiseau domestique au monde.
Les premières traces d’utilisation du pigeon pour transmettre des messages remontent à au moins 3000 ans, lorsque les Égyptiens s’en servaient pour annoncer leur arrivée dans un port plusieurs jours à l’avance.
Pendant la Première Guerre mondiale, certains pigeons étaient munis d’un appareil photo pour espionner l’ennemi.
À la même époque, en Grèce, des pigeons étaient parfois utilisés pour faire savoir aux différentes cités les vainqueurs des Jeux olympiques.
Les Romains, pour qui la Grèce était une source intarissable d’inspiration, adoptent le petit volatile, mais comme à leur habitude, ils voient grand. Ils construisent d’énormes pigeonniers pouvant abriter jusqu’à 5000 oiseaux, auxquels ils confient toutes sortes de missions.
Par exemple, ils les teignent de différentes couleurs et les relâchent pour communiquer les résultats des courses de chars à leurs propriétaires. Après la mort de Jules César, des témoignages montrent que le pigeon voyageur est mis à profit à des fins militaires.
L’oiseau et les armées vont d’ailleurs entretenir une relation très proche, qui va perdurer tout au long de l’histoire. En Europe médiévale, Charles Martel proclame sa victoire sur les Sarrasins à Poitiers au moyen de pigeons.
Sous le règne de son célébrissime petit-fils, Charlemagne, roi des Francs et empereur, l’usage du volatile se répand énormément. Charlemagne fait de l’élevage du pigeon un privilège des nobles. On retrouvait des tours à pigeons dans presque tous les châteaux et les abbayes.
Lors des Croisades, les deux camps chrétiens et musulmans feront appel à ces oiseaux pour véhiculer des messages, particulièrement les résultats des batailles.
Cette pratique s’est poursuivie pendant les siècles suivants.
L’un des meilleurs exemples du rôle utilitaire joué par les pigeons reste celui de la bataille de Waterloo, lors de laquelle Napoléon a subi son ultime défaite face à plusieurs armées alliées menées par le duc de Wellington.
Exemple de pigeonnier où ces oiseaux voyageurs étaient élevés. C’était leur point de retour.
Un membre de la très connue et influente famille Rothschild, qui agissait comme banquier des pays ennemis de Napoléon, a été le premier informé de l’issue de la bataille de Waterloo grâce à un pigeon voyageur, ce qui lui aurait permis d’en retirer des avantages financiers.
Quelques décennies plus tard, lors de la guerre de 1870-1871, plus de 60 ballons chargés de pigeons sont dépêchés à différents points de la France alors que les armées prussiennes assiègent Paris. C’est ainsi que le gouvernement, réfugié à Tours, peut prendre connaissance de ce qui se déroule dans la capitale française.
La technologie avait alors fait de grandes avancées. Quelques années avant la guerre, René Dragon avait mis au point un procédé réduisant la taille des photographies au point où il fallait un microscope pour les observer. Il avait réussi par exemple à fixer 400 portraits sur une surface de 2 mm carrés.
Cette nouveauté permet d’acheminer 3000 dépêches sur une pellicule pouvant être attachée à la patte d’un pigeon. Environ 115 000 dépêches ont ainsi pu être expédiées pendant le siège de Paris.
Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer l’incroyable habileté des pigeons à servir de messagers.
Les pigeons voyageurs sont devenus un instrument de communication crucial pendant les guerres.
D’abord, il faut savoir que, lancés avec leurs précieux messages, ils retournent à leur point de départ, c’est-à-dire leur colombier, qui est leur nid. Monogame, le pigeon mâle revient surtout pour retrouver sa femelle, alors que celle-ci est plutôt motivée par l’idée de revoir ses petits. La nourriture peut aussi les pousser à rentrer au colombier.
Ils s’orientent grâce au soleil, à la lune ou même aux étoiles, par temps clair évidemment. Mais des études indiquent que le champ magnétique de la Terre joue pour eux le rôle d’une boussole. C’est que les pigeons ont des particules d’oxyde de fer dans le crâne et les muscles du cou qui interagissent avec le champ magnétique terrestre.
D’autres scientifiques croient que ces oiseaux peuvent détecter des infrasons provenant de leur colombier.
Les pigeons voyageurs connaitront leur dernière heure de gloire lors des deux conflits mondiaux du XXe siècle. L’histoire du pigeon «Cher Ami» est probablement la plus célèbre… si elle est vraie.
France, septembre-novembre 1918. Offensive de la Meuse, près de Verdun. C’est la dernière bataille de la Première Guerre mondiale, celle qui mènera à la signature de l’armistice du 11 novembre. Lors de l’attaque, une division américaine se retrouve prise au piège derrière les lignes allemandes. Le quartier général perd sa trace, car le signal radio est trop faible.
La division se fait bombarder par sa propre armée qui ignore sa position. Lorsque les troupes ennemies avancent dangereusement vers elle, la division dépêche des pigeons afin d’informer son commandement. Mais les soldats allemands parviennent à les abattre.
Un pigeon «militaire» s’envole avec son message enroulé sur une de ses pattes.
Il ne reste qu’un pigeon nommé Cher Ami. La division américaine l’envoie, mais il est atteint d’une balle.
Est-ce la fin? Non. Cher Ami reprend son vol. Malgré ses blessures, il parcourt 40 km en 30 minutes, son message toujours attaché à sa patte droite abimée. Il accomplit sa mission. Entretemps, les tirs «amis» avaient cessé, mais grâce à Cher Ami, le sauvetage de la division a été facilité.
Amené aux États-Unis, le pigeon meurt quelque mois plus tard de ses blessures. Il devient un héros et reçoit même la Croix de Guerre américaine.
C’est une belle histoire, sauf que… En 2021, une enquête d’un conservateur du Musée national d’histoire américaine (où Cher Ami, empalé, est exposé) conclut que le récit a été embelli. Cher Ami a bel et bien transporté un message alors qu’il était gravement blessé. Mais plusieurs détails demeurent incertains.
Conclusion, ne laissez pas les faits gâcher une bonne histoire, comme l’a dit l’écrivain américain Mark Twain. Mais, ironiquement, personne ne sait avec certitude s’il a véritablement prononcé ces paroles…
Qui dit Canada, dit lacs, fleuves et rivières en masse. Le pays dispose d’environ 20 % des réserves d’eau douce et de près de 7 % des réserves renouvelables de la planète, pour moins de 0,5 % de la population mondiale. Pourtant, ces ressources sont loin d’être inépuisables.
«Au Canada, les gens ont un faux sentiment de sécurité pour ceux qui ne comprennent pas la crise [de l’eau]», lâche Soula Chronopoulos, présidente d’AquaAction, une organisation dédiée à la santé de l’eau douce en Amérique du Nord.
Une crise qui se caractérise par des extrêmes, causés par les changements climatiques : sècheresses à l’Ouest, tempêtes et inondations à l’Est, explique la chercheuse.
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Les solutions à court terme, comme consommer moins en été, restent insuffisantes pour préserver la ressource, affirme Hossein Bonakdari. «On a besoin d’un plan assez solide et fort à long terme.»
«Nous avons de gros soucis avec les variations spatiotemporelles», confirme le professeur agrégé au Département de génie civil à l’Université d’Ottawa, Hossein Bonakdari. À Vancouver, en Colombie-Britannique, il pleut plus de 1000 millimètres par année, mais seulement 30 mm en été illustre le chercheur, ce qui cause des épisodes de sècheresse.
Le dérèglement climatique ne fera qu’aggraver ces déséquilibres, alerte le responsable des politiques canadiennes à l’Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent, Maxime Hayet.
«Il y a des agriculteurs qui déjà doivent puiser dans les nappes phréatiques parce qu’il y a des épisodes de sècheresse importants et que les nappes n’arrivent pas à se remplir.» Et lors des inondations, la pluie ruissèle au lieu d’être retenue par le sol.
Selon un rapport de Statistique Canada publié en juillet 2024, l’utilisation de l’eau dans l’industrie des cultures agricoles a augmenté de 30,9 % entre 2019 et 2021, coïncidant avec de faibles niveaux de précipitations, notamment dans les Prairies.
Mais l’or bleu reste également une ressource très prisée des ménages. Leur demande en eau augmente plus rapidement que la population. Leur part d’utilisation est passée de 8,4 % à 8,8 % entre 2019 et 2021, soit une augmentation de 5,7 % du volume d’eau d’une période à l’autre.
En 2021, les ménages canadiens ont consommé en moyenne 223 litres d’eau par jour par personne, ce qui correspond à un total de 2 678 millions de mètres cubes, soit 55 % de l’eau potable produite dans les usines de traitement.
Pendant ce temps, «la consommation d’eau a augmenté», remarque Hossein Bonakdari. Il évoque des modes de vie avec des équipements gourmands en eau, comme les piscines, les systèmes d’arrosage ou certains électroménagers. Selon lui, il est essentiel de sensibiliser davantage la population.
Pour Maxime Hayet, l’un des enjeux les plus importants pour limiter la consommation d’eau, «ça va être d’éviter les fuites».
De petits gestes comme arrêter le robinet quand on se savonne sous la douche n’ont pas encore été adoptés par les consommateurs, relève Maxime Hayet, «probablement en bonne partie parce que l’eau n’est pas payante» partout.
Certaines municipalités au pays ont cependant déjà adopté la tarification à l’utilisation calculée au moyen de compteurs d’eau. Les infrastructures et les services nécessaires pour traiter l’eau et la distribuer sont en outre parfois financés par une combinaison d’impôts fonciers et de frais d’utilisation.
De plus, les capacités de traitement de l’eau n’ont pas augmenté, alors que la population, oui, commente le responsable. D’après lui, cela pourrait entrainer des pénuries d’eau, obligeant les villes à imposer des restrictions, comme l’interdiction d’arroser la pelouse.
D’autres solutions existent, comme l’utilisation de bacs pour récupérer l’eau de pluie qui tombe des toits, l’aménagement de jardin, l’amélioration de l’absorption et des initiatives liées au concept de «ville éponge», énumère-t-il.
Cet été, les problèmes de canalisations et d’aqueducs défaillants ont fait les manchettes. La rupture de la principale conduite d’eau de Calgary, en Alberta, a mené à une importante restriction pour ses habitants.
L’Alberta a par ailleurs été pointée du doigt par un rapport pour la mauvaise gestion de ses eaux de surface.
Dans certains lacs, les apports de phosphore et d’azote provenant de l’agriculture entrainent la prolifération d’algues toxiques qui peuvent affecter les prises d’eau potable dans les villes environnantes, prévient Jérôme Marty.
La préservation de la ressource passe aussi par l’installation de réseaux efficients. «Au Canada, on a des infrastructures très vieillissantes», expose Maxime Hayet.
«Dans beaucoup de villes, la moitié de l’eau potable produite est perdue dans le transport parce que les tuyaux sont très vieux», indique le directeur de l’Association internationale de recherche sur les Grands Lacs, Jérôme Marty.
Pour Hossein Bonakdari, il est indispensable de moderniser les infrastructures et de s’adapter avec des technologies durables pour réduire la consommation d’eau et améliorer sa qualité.
Mais cela demande des financements importants que les villes n’ont pas forcément, souligne Maxime Hayet, même s’il reconnait les efforts fournis par les municipalités.
L’absence de données de consommation individuelle fiable pour toute la population empêche également, selon lui, la prise de conscience du public.
Quand il arrose son entrée de garage pour la nettoyer, le citoyen sait que ce n’est pas bien, mais il ou elle ne va pas forcément se rendre compte à quel point sa consommation est importante.
«C’est qu’on habite dans un pays où on pense qu’on a toute la richesse de l’eau autour de nous, sauf qu’on ne le gère pas bien», assure Soula Chronopoulos.
L’accès à l’eau potable est l’autre enjeu majeur. Comme le rappelle Soula Chronopoulos, «nous sommes une nation riche en eau, mais ça ne veut pas dire qu’on peut la boire». Celle-ci doit être traitée.
«Les eaux qui se trouvent au sud du Canada sont généralement polluées parce qu’on a plus d’activité humaine», détaille Jérôme Marty, mentionnant les exploitations minières et agricoles.
«Dans des communautés éloignées, où on va avoir des communautés des Premières Nations, on observe qu’ils n’ont même pas accès à une eau potable, ce qui est quelque chose de dramatique», dénonce le spécialiste.
Selon l’Assemblée des Premières Nations (APN), le fédéral devrait investir 6,6 milliards de dollars pour répondre à la crise de l’eau potable et des services d’assainissement dans les communautés autochtones.
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Traitement des eaux souterraines, programme de protection contre la sècheresse, exploitation des structures pour la rétention d’eau : «Il faut avoir un plan assez fort pour la gestion de l’eau», insiste Hossein Bonakdari.
Le spécialiste déplore l’absence de ce dossier de la plupart des discours politiques, sauf en cas de crise. Il dénonce une mémoire «sélective».
Nous sommes dans une situation cyclique. Pendant un court temps, l’été, on touche la sècheresse, mais à partir de septembre ou octobre, quand on touche pour la précipitation, on oublie tout.
Néanmoins, plusieurs projets de recherche explorent des innovations pour améliorer la gestion de l’eau. «On a des technologies de l’IA [intelligence artificielle] qui peuvent par exemple prédire où on va voir les prochaines chutes d’eau», appuie Soula Chronopoulos.
Autant de techniques qui pourront aider à résoudre ce qu’elle qualifie de crise majeure : «L’eau va être le combat de nos vies.»
Le lundi 7 octobre était la date limite avancée par le Collectif de journalisme canadien (CJC-CCJ) pour que le Conseil de radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) rende sa décision sur l’exemption demandée par Google afin de «permettre au CJC-CCJ de distribuer des fonds au cours de l’année civile 2024», peut-on lire dans le calendrier du Collectif que Francopresse a pu consulter.
Or, le CRTC n’a pas rendu sa décision cette semaine. Par courriel à Francopresse, l’organisme public assure qu’il «ne surveille pas la remise des fonds par le CCJ» et qu’il prévoit de publier sa décision «cet automne», sans plus de précision.
La seule annonce émanant du CRTC est le lancement des consultations publiques sur le projet de code de conduite qui encadrera les négociations entre les plateformes en ligne et les médias canadiens sous la Loi sur les nouvelles en ligne.
La gouverneure générale du Canada, Mary Simon, est de nouveau dans la tourmente en raison de son incapacité à parler français, trois ans après sa nomination par Justin Trudeau.
Lors d’un déplacement au Québec en septembre, la gouverneure générale du Canada, Mary Simon, n’a pas pu soutenir une conversation en français. Elle a de nouveau été confrontée à une vague de mécontentement.
Mardi, une motion a été déposée par les conservateurs au Comité permanent des langues officielles, pour que ce dernier étudie pendant cinq séances «les raisons qui ont amené le premier ministre à la nomination de la Gouverneure générale, incapable de s’exprimer dans l’une des deux langues officielles du Canada».
Les libéraux du Comité et le Nouveau Parti démocratique (NPD) ont voté contre jeudi.
Si, avant le vote, Joël Lightbound et Darrell Samson s’étaient dits «déçus» du français de Mary Simon, les deux députés libéraux avaient néanmoins averti que la motion ferait «perdre du temps [au Comité] dans des stratégies politiques» des conservateurs qui paralysent déjà selon eux les travaux de la Chambre.
Dans son dernier rapport, intitulé Un avenir en commun : regard sur nos communautés de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM), le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, livre son analyse de l’état de l’éducation en français au Canada et de l’immigration francophone.
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En accord avec plusieurs experts et associations francophones partout au pays, il assure que les clauses linguistiques dans les ententes intergouvernementales restent la «clé de la réussite» pour garantir des places en garderies ou davantage de programmes en français dans les écoles et universités.
Les cibles de l’immigration francophone sont également à surveiller afin qu’une main-d’œuvre francophone qualifiée puisse pallier le manque de personnel dans plusieurs secteurs clés, l’éducation en premier plan.
Il s’agissait du dernier rapport de Raymond Théberge, puisque son mandat prend fin en janvier 2025.
Des professionnels de la petite enfance et de l’éducation francophone ont alerté cette semaine le Comité des langues officielles à propos «sous-financement chronique» qui affecte les places en services de garde francophones au pays.
Certaines régions sont parfois dépourvues totalement de garderies francophones. Selon la Commission nationale des parents francophones (CNPF), près de 80 % des parents francophones ne peuvent pas obtenir une place en français dans une garderie, faute d’infrastructure et de personnel qualifié suffisants.
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Le chef de l’opposition, Pierre Poilievre, est accusé par les libéraux de «paralyser» le Parlement depuis plusieurs semaines.
Le Parlement canadien n’a approuvé aucune nouvelle loi au cours des dernières semaines, alors que les conservateurs bloquent les travaux en menant un débat sur une question de privilège.
Ils demandent depuis le début de la session parlementaire d’automne la transparence du gouvernement concernant un fonds vert controversé créé par les libéraux. Ce fonds est au centre d’un scandale de conflits d’intérêts relevé par la vérificatrice générale du Canada, Karen Hogan, dans un rapport publié en juin.
Depuis, les conservateurs demandent que les documents soient transmis à la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Les libéraux répondent que le Parlement ne doit pas s’ingérer dans une enquête policière. La GRC dit pouvoir obtenir les documents par ses propres moyens.
Les débats actuels en Chambre concernent presque exclusivement cette affaire.
La ministre de l’Agriculture, Marie-Claude Bibeau, au rassemblement pour le projet de loi C-282, jeudi, devant la Flamme du centenaire.
Le projet de loi C-282 déposé par le Bloc québécois a rassemblé des députés et sénateurs de tous les partis, jeudi, sur la Colline du Parlement. Leur but : accélérer l’étude de la pièce législative actuellement examinée en comité sénatorial.
Le texte porte sur la protection de la gestion de l’offre dans les négociations commerciales internationales. De nombreux représentants du secteur agricole canadien, notamment les producteurs laitiers et de volailles, ce sont rassemblés autour des politiciens.
C-282 fait partie de l’ultimatum lancé par le Bloc aux libéraux. Pour que le parti au pouvoir obtienne l’appui du Bloc lors de votes importants, C-282 doit obtenir la sanction royale d’ici le 29 octobre.
Mais deux sénateurs assurent qu’il ne faut pas presser le Sénat, qui a besoin après l’étude de réviser le projet de loi article par article.
La ministre de l’Agriculture, Marie-Claude Bibeau, a assuré, entourée de ses collègues des trois partis, «qu’une loi rassurerait tout le monde».
En juin 2023, la Chambre des communes avait voté en majorité pour le projet de loi.
Plusieurs membres du Parti libéral, dont Francis Drouin et la leadeure du gouvernement en Chambre Karina Gould, étaient présents au rassemblement pour le projet de loi C-282.
La Chambre des communes a observé une minute de silence lundi en hommage aux victimes du conflit entre le Hamas et Israël, récemment étendu au Liban.
Le Hamas a attaqué les Israéliens autour de Gaza le 7 octobre 2023. La controffensive israélienne à Gaza a fait plus de 41 000 morts et près de 2,3 millions de déplacés et a plongé la région dans une crise humanitaire et une famine sans précédent.
Lundi, le président de la Chambre des communes, Greg Fergus, a demandé au chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, de retirer un commentaire émis au sujet de la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly. Il l’accusait de vouloir «plaire aux partisans du Hamas» en ne condamnant pas des «des chants antisémites» lors de manifestations en soutien à la Palestine au Canada.
«Après avoir revu une transcription, le langage du chef de l’opposition était semblable à celui que l’on avait trouvé non parlementaire par le passé. Plus tôt cette année, un député a accusé le chef de l’opposition de travailler pour un régime que nous trouvons odieux. On a demandé à ce député de retirer son commentaire», a rappelé Greg Fergus.
Ce dernier a ainsi demandé à M. Poilievre de retirer son commentaire, ce qu’il a refusé de faire.
«Un impact sur CBC est un impact sur Radio-Canada», dit Jean François Rioux.
Lors d’une réunion du Comité du patrimoine canadien en mai 2024, le député libéral de Nickel Belt en Ontario, Marc Serré, a demandé à la présidente-directrice générale de CBC/Radio-Canada : «Comment peut-on garder Radio-Canada fort en situation [francophone] minoritaire si CBC est complètement rayée de la carte par les conservateurs?»
«Ça va être très difficile, presque impossible», avait-elle répondu.
En soulignant qu’elle ignore la portée précise de la proposition conservatrice, la présidente-directrice générale ne s’est pas aventurée à spéculer sur l’incidence exacte qu’elle aurait. Elle a tout de même confirmé que «si on coupe, ça va être un désastre pour les médias francophones à l’extérieur du Québec. Ça, c’est sûr.»
«Le rôle du diffuseur public est de desservir tous les Canadiens. Ça veut dire qu’on est dans les communautés autochtones, en situation minoritaire, et même si ce n’est pas rentable. C’est notre service public. C’est ça notre mandat. On sait très bien que […] nous sommes un fil de vie pour les gens qui veulent vivre en français à l’extérieur du Québec», a-t-elle ajouté.
Si le chef conservateur fédéral Pierre Poilievre promet de maintenir la programmation francophone de Radio-Canada, «c’est impossible de dire qu’on va toucher CBC sans avoir d’impact négatif sur Radio-Canada, particulièrement dans les régions», affirme le directeur général des Médias régionaux de Radio-Canada, Jean François Rioux.
Les conséquences se feront surtout sentir dans les stations francophones à l’extérieur du Québec, car – sauf à Moncton, à Ottawa et à Sudbury – elles partagent notamment les locaux, les véhicules et la technologie avec CBC.
«Il faut absolument que l’on comprenne l’interrelation qui existe entre les deux [entités]», insiste Jean François Rioux. Que ce soit pour la tenue de débats électoraux, la couverture des Jeux olympiques ou la publication de grandes histoires, comme celle des «Panama Papers» d’il y a quelques années, la collaboration entre CBC et Radio-Canada s’avère cruciale.
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Marie-Linda Lord, professeure à la retraite en information-communication à l’Université de Moncton, confirme que sabrer le financement de CBC aurait «un impact direct» sur les équipes radio-canadiennes de Charlottetown, Halifax, St. John’s, Winnipeg, Regina et Edmonton, par exemple.
Il va falloir que [Pierre Poilievre] comprenne que les dommages collatéraux seront là s’il touche CBC. Ça va affecter la qualité et la production à Radio-Canada, poursuit-elle. Il va y avoir des conséquences pour Radio-Canada, surtout en région.
«C’est impossible de définancer CBC […] sans porter atteinte au cœur de Radio-Canada, d’autant plus dans nos communautés en situation minoritaire», appuie la présidente de la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF), Nancy Juneau.
Les services de CBC et de Radio-Canada «sont imbriqués les uns dans les autres, sont interdépendants, tant du point de vue de l’infrastructure, que des ressources humaines et financières», précise Nancy Juneau.
«Il y a un partage des locaux, de l’équipement, des techniciens. Si tu définances CBC, ça risque de couter tout aussi cher de maintenir Radio-Canada parce que les techniciens anglophones avec qui nos collègues de Radio-Canada travaillent, ben, il va falloir en trouver d’autres», poursuit-elle.
La FCCF aimerait savoir comment les conservateurs entrevoient concrètement de «définancer» l’entité anglophone tout en maintenant sa sœur francophone. À ce sujet, Nancy Juneau estime qu’il sera bientôt temps d’organiser une rencontre avec le Parti conservateur du Canada.
L’équipe conservatrice n’avait pas répondu aux questions de Francopresse sur la question au moment de publier le présent article.
Pierre Poilievre ne précise pas dans ses discours si son intention de «définancer» la CBC mènera à une diminution de son financement ou à sa fermeture complète.
«On a aucune idée ce que [Pierre Poilievre] va faire, en toute honnêteté. C’est très difficile de spéculer sur ce que ça pourrait représenter, fait remarquer Jean François Rioux. On va traverser le pont quand on arrivera à la rivière.»
La société d’État est habituée à l’incertitude, dit-il.
Le directeur travaille à Radio-Canada depuis 36 ans. «Le côté politique des choses, on apprend à vivre avec. J’ai traversé plusieurs crises [assez importantes], au début et à la fin des années 1990, au début des années 2000. Dans chaque cas, il n’y avait pas de couleur politique. C’est-à-dire que les gouvernements prennent des décisions qui nous affectent et il faut apprendre à s’ajuster.»
«C’est sûr que pour nous, ça rajoute un peu de zones grises dans notre regard sur les prochaines années, poursuit-il, en faisant référence aux intentions des conservateurs. Mais on ne peut pas s’attarder sur ça, parce que dans les faits, on n’a pas de financement stable. C’est un financement qui varie d’une année à l’autre.»
Nancy Juneau souhaite justement que le «gouvernement donne à Radio-Canada les moyens d’être un radiodiffuseur public à 100 %. Parce qu’on sait qu’une partie du financement de Radio-Canada provient de recettes publicitaires. Ça fait en sorte que Radio-Canada doit faire des choix en ce sens-là».
Marie-Linda Lord doute fortement que Pierre Poilievre revienne sur sa promesse de maintenir la programmation de Radio-Canada.
«On sait que les Québécois et les minorités francophones à travers le pays sont très attachés à Radio-Canada, qui joue un rôle extrêmement important au niveau de la francophonie. Ça, je pense que M. Poilievre le reconnait», estime Marie-Linda Lord.
Selon elle, le politicien ne reviendra pas sur sa promesse de ne pas toucher à Radio-Canada, notamment parce qu’il est «quand même fier de ses origines francophones» et parce que des poursuites judiciaires pourraient s’en suivre.
«Ça serait facile, sans doute, pour des avocats bien aguerris de montrer que c’est une atteinte aux droits des minorités francophones de les priver [de Radio-Canada]», avance la chercheuse.
Selon elle, si le chef conservateur touche Radio-Canada, il y aura «une levée de boucliers extraordinaire».
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Au-delà de ces hypothèses, il faut aussi attendre la réaction de Pierre Poilievre et des conservateurs au nouveau mandat de la société d’État, qui devrait être annoncé d’ici un mois par la ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, selon une source de CBC.
L’identité de la nouvelle présidence-direction générale devrait aussi être dévoilée cet automne, car le mandat de Catherine Tait doit prendre fin en janvier 2025. Elle occupe ce poste depuis 2018.
D’entrée de jeu, Raymond Théberge prévient que plusieurs questions clés «ne sont que peu abordées dans ce rapport» : «Il ne faut pas y voir une omission, mais le résultat d’un tri nécessaire pour un rapport concis mettant l’accent sur certains secteurs qui vivent ou se préparent à vivre de grandes transformations en lien avec la Loi modernisée [sur les langues officielles]».
Parmi les domaines où Ottawa a encore du travail à faire en matière de droits linguistiques, l’éducation – surtout la petite enfance – et l’immigration se démarquent.
Il relève aussi des «retards inquiétants» dans les versements de fonds destinés au fonctionnement de base des organismes communautaires. Certains accusent plus d’un an de retard. Le commissaire enjoint Patrimoine canadien à procéder au suivi des sommes, comme le ministère s’y est engagé dans le dernier Plan d’action.
«Bien qu’elles soient en hausse par rapport aux années précédentes, les sommes annoncées dans le Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028 […] sont demeurées significativement inférieures au besoin chiffré par [les organismes communautaires].»
En réaction au rapport, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) souligne dans un communiqué qu’un an et demi après la publication du Plan d’action, «la situation précaire des organismes qui font vivre le français partout au pays n’a guère changé» en raison des problèmes de distribution des fonds.
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Besoin de clauses linguistiques spécifiques dans les ententes
Le commissaire s’engage aussi à examiner le Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadiens pour vérifier s’il aide réellement les francophones en situation minoritaire à bénéficier de places en garderie pour leurs enfants.
«Il serait inadmissible que l’ensemble des [communautés de langues officielles en situation minoritaire (CLOSM)] ne puissent bénéficier de cette politique positive», souligne le rapport.
En réponse à une question de Francopresse sur l’absence de clauses dans les ententes intergouvernementales, Raymond Théberge déplore que «dans l’histoire des relations entre les provinces, les territoires et le fédéral, il y a beaucoup d’impunité autour des ententes».
Trop souvent dans ces ententes, on n’identifie pas le nombre de places ou la proportion du financement désigné pour les [CLOSM].
Il a insisté sur le fait que les clauses étaient «l’outil par excellence» pour garantir des places en garderies francophones en dehors du Québec.
Mardi, lors d’une réunion du Comité permanent des langues officielles à la Chambre des communes, deux experts ont justement martelé la nécessité d’avoir à tout prix «des clauses spécifiques aux francophones pour soutenir un financement stable et continu» dans les ententes passées entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires, mais aussi dans les plans d’action sur les langues officielles de ces derniers.
«Tout dépend de la province ou du territoire, c’est à la pièce», a soutenu le directeur général de la Commission nationale des parents francophones (CNPF), Jean-Luc Racine, devant les députés du comité.
Ce dernier et la présidente du CNPF, Gillian Anderson, ont par exemple rappelé que l’Alberta ne disposait d’aucune clause linguistique. Pire, ils affirment qu’aucun financement fédéral n’a été réservé pour les garderies en milieu minoritaire depuis le Plan d’action pour les langues officielles de mars 2023.
Pour Raymond Théberge, ces clauses devraient aboutir à des «mécanismes d’évaluation […] de surveillance et […] de transparence et de reddition de comptes» du gouvernement fédéral.
Il répète à plusieurs endroits du rapport attendre le règlement de la partie VII de la Loi sur les langues officielles modernisées, qui porte sur l’obligation des institutions fédérales de consulter les CLOSM et prendre des mesures nécessaires pour favoriser l’inclusion des clauses linguistiques.
Problèmes structurels et de financement en éducation
Le commissaire aux langues officielles rappelle que, dans le domaine de l’éducation, la demande «surpasse la capacité actuelle», notamment en petite-enfance, avec une pénurie «aigüe» d’une main-d’œuvre qualifiée.
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À cela s’ajoute le fait que le cout des salaires et des infrastructures n’est pas pris en compte dans les sommes accordées aux services de garde. Tout cela rend «les prochaines générations vulnérables à l’assimilation», peut-on lire dans le rapport.
Concernant l’éducation primaire et secondaire, de 5 à 17 ans, Raymond Théberge s’attend à ce que le gouvernement fédéral mette en œuvre son engagement de recenser régulièrement le nombre d’enfants des ayants droit admissibles à l’éducation francophone en situation minoritaire, comme assuré dans la Loi sur les langues officielles.
Le commissaire attend aussi des données de la prochaine enquête de Statistique Canada sur les minorités de langues officielles qui sont censées guider le gouvernement fédéral pour «renforcer un continuum si essentiel à la vitalité des CLOSM».
Il rappelle que «plus du tiers» des enfants d’ayants droit admissibles à l’éducation en français hors Québec n’ont jamais fréquenté les écoles de la minorité.
Raymond Théberge cible également le postsecondaire, qui souffre d’un «sous-financement structurel et opérationnel chronique» qui démontrent les «effets tangibles» obtenus par les ententes intergouvernementales.
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L’immigration francophone dans la mire du commissaire
Le commissaire souligne par ailleurs que certains établissements postsecondaires voient dans la décision récente du gouvernement de plafonner le nombre de permis d’étude délivrés aux étrangers, une «incidence négative […] sur leur viabilité financière et leur offre de programmes en français».
L’immigration reste l’une des clés pour recruter des francophones, ont soutenu Gillian Anderson et Jean-Luc Racine mardi en comité parlementaire. Non seulement pour combler les manques de main-d’œuvre dans tous les secteurs de l’éducation en français, mais aussi pour maintenir la demande pour les programmes en français.
Raymond Théberge encourage en outre le ministère d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) à écouter «activement» les CLOSM francophones à tenir compte «à la fois de leurs préoccupations et de la récente recommandation du Comité [des langues officielles de la Chambre des Communes]» concernant l’immigration.
Cette dernière consiste à faire reconnaitre à IRCC que ses cibles de 6 %, 7 % et 8 % pour les années 2024, 2025 et 2026 sont insuffisantes.
Les députés demandent par ailleurs à IRCC d’atteindre la cible de 20 % fixée par la FCFA de façon progressive jusqu’en 2036.
La situation est très précaire en ce moment pour le Parti libéral et aussi pour le Nouveau Parti démocratique (NPD). Certains prédisent même que ce sera le Bloc québécois qui formera l’opposition officielle.
Mais si l’impatience des conservateurs, et aussi de leurs électeurs, se comprend, est-ce en soi un argument pour que des élections générales soient déclenchées dès maintenant, c’est-à-dire à un an de la date prévue des prochaines élections?
Dans notre système politique, on ne gouverne pas par sondage. Ce ne sont pas eux qui décident qui doit être à la tête du pays ni quand les élections doivent être déclenchées.
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Comme dans toute démocratie digne de ce nom, ce sont les résultats des élections qui désignent le parti politique qui formera le prochain gouvernement.
Le processus électoral fixe à l’avance les règles qui déterminent le vainqueur (est-ce le parti qui a remporté le plus de circonscriptions?, le plus de voix?, un mélange des deux?) ainsi que la durée du mandat du gouvernement.
Au Canada, la Constitution stipule que des élections doivent avoir lieu au plus tard tous les cinq ans. Mais le gouvernement fédéral et les provinces choisissent généralement de réduire la durée des mandats à environ quatre ans.
Est-ce donc dire que le gouvernement devrait avoir la possibilité de gouverner pendant toute la durée de son mandat, peu importe sa popularité ou son impopularité? Dans certains pays, la réponse est oui.
C’est le cas aux États-Unis, par exemple. Les élections présidentielles se tiennent tous les quatre ans, le mardi suivant le premier lundi de novembre, sans possibilité de changer la date.
Ainsi un président fortement impopulaire (pensons à Jimmy Carter à la fin de sa présidence) restera en poste jusqu’à la fin de son mandat. Personne ne s’en offusquera : ce sont les règles du jeu.
Au Canada, gagner une élection n’est pas une condition suffisante pour rester au pouvoir, bien qu’elle soit nécessaire.
Dans notre système parlementaire, lorsqu’un parti politique est porté au pouvoir, il doit être capable de compter sur l’appui d’une majorité de députés à la Chambre des communes pour continuer à gouverner, sinon il devra remettre sa démission.
Si le gouvernement est majoritaire, l’appui d’une majorité de députés s’obtient sans difficulté. Il serait vraiment surprenant qu’un gouvernement tombe en raison d’un mécontentement chez ses propres députés.
Mais si le gouvernement est minoritaire, nous entrons alors en période d’incertitude. Le gouvernement doit former des alliances avec d’autres partis ou des députés indépendants, le cas échéant, pour espérer demeurer au pouvoir durant tout son mandat.
C’est évidemment le cas qui nous intéresse ici. Nous avons actuellement un gouvernement fédéral minoritaire, ce qui veut dire qu’une élection peut survenir avant la fin de son mandat. Mais ce ne sont pas les sondages qui décident, mais bien les élus à la Chambre.
Ces députés doivent donc décider ce qui est préférable : appuyer le parti au pouvoir en espérant que ce dernier mettra en œuvre certaines de leurs idées ou s’opposer à ce parti quitte à déclencher des élections hâtives.
Jusqu’à ce qu’ils mettent fin à l’entente conclue avec les libéraux en aout dernier, les néodémocrates avaient choisi la première voie. Fait assez rare en politique canadienne, ils avaient même négocié une entente de plusieurs années, portant sur plusieurs thèmes.
En moins de trois ans, le NPD a obtenu de nombreux gains : protection accrue pour les travailleurs, programmes de soins dentaires, d’assurance médicaments et d’aide au logement, surtout pour les plus démunis, imposition accrue des institutions bancaires, cibles plus ambitieuses pour combattre les changements climatiques, etc.
Selon une compilation effectuée par Le Devoir en mars dernier, seulement 3 des 27 initiatives négociées dans le cadre de cette entente n’avaient pas été réalisées.
Dans ces conditions, quels nouveaux avantages les néodémocrates peuvent-ils espérer arracher au gouvernement? Aucun qui obtiendrait l’appui des libéraux, semble-t-il.
En déchirant avec grand éclat l’entente qui le liait aux libéraux, Jagmeet Singh a lancé le message qu’il n’avait plus de bonnes raisons de continuer à appuyer les libéraux.
Le Bloc québécois, quant à lui, a essayé de prendre la place du NPD et d’obtenir des concessions du gouvernement libéral au cours des dernières semaines. Il a soumis les deux dossiers qu’il juge prioritaires : la bonification des pensions et la protection du système de la gestion de l’offre.
Mais les libéraux ont montré très peu d’empressement à répondre aux demandes du Bloc. À vrai dire, le Bloc est devenu la cible des attaques des libéraux, qui lui reprochent notamment de «comploter pour la souveraineté du Québec». Dans de telles circonstances, il est difficile de voir comment les deux partis pourraient trouver un terrain d’entente.
Par conséquent, des élections devraient-elles être déclenchées?
Il faut décréter des élections maintenant, car manifestement aucune collaboration ne semble plus possible entre le gouvernement libéral minoritaire et un autre parti de la Chambre.
Il ne faut pas désirer des élections parce que l’opposition officielle le veut (elle le voudra toujours) ou encore parce que les sondages ne sont pas favorables au gouvernement.
Il faut des élections parce que le Parti libéral est maintenant incapable de tisser des alliances qui lui permettraient de compter sur l’appui d’une majorité de députés à la Chambre pour assumer pleinement les fonctions de gouvernement. C’est ainsi que notre système politique fonctionne.
Geneviève Tellier est professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les politiques budgétaires des gouvernements canadiens. Elle commente régulièrement l’actualité politique et les enjeux liés à la francophonie dans les médias de tout le pays.
«Demain matin on serait un gouvernement majoritaire assuré, un raz-de-marée libéral, je ne changerai pas ma décision.»
Pour René Arseneault, c’est la famille surtout qui a pesé dans sa décision de quitter la scène politique fédérale. «Mes enfants sont tous revenus à côté de chez nous», lâche-t-il avec un sourire.
René Arseneault, député sortant de Madawaska–Restigouche au Nouveau-Brunswick, assure qu’il ne voit pas Pierre Poilievre rester plus de quatre ans s’il est élu aux prochaines élections fédérales.
«J’ai besoin d’une pause politique, de me reconnecter avec le travail, quand le poids de ton travail et de ta sueur mène à quelque chose. Qu’il n’y ait pas d’influence, de jeu ou de stratégie, parce que c’est ça la politique, tu fais dix pas le jour, puis la nuit c’est six pas en arrière sans aucune raison.»
Le député néobrunswickois est le deuxième francophone en région minoritaire à avoir annoncé son départ du caucus libéral cet été, après Francis Drouin.
Ce dernier confie quant à lui avoir perdu «le cœur et la passion» d’être député, non pas à cause de la controverse qui a suivi ses propos en comité au printemps, mais bien à cause d’une forte pression et surtout, à la demande de sa conjointe.
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Les deux députés reconnaissent qu’il y a une «fatigue» ambiante à l’égard de Justin Trudeau dans leurs circonscriptions, principalement rurales, et que les électeurs se sentent déconnectés des décisions prises à Ottawa. Cependant, ils nient que les sondages favorables aux conservateurs pour les prochaines élections fédérales aient pesé dans leur décision de quitter.
Les sondages n’ont jamais été si défavorables pour le Parti libéral de Justin Trudeau, qui se retrouve pratiquement au même niveau d’intentions de vote que le Nouveau parti démocratique (NPD), autour de 21 %. Le Parti conservateur de Pierre Poilievre en récolte jusqu’à 43 %.
Le ministre Randy Boissonnault, également député d’Edmonton–Centre, annonce qu’il se représentera officiellement en janvier.
Si le Parti conservateur du Canada accède au pouvoir, Francis Drouin craint que, «comme sous Harper», les enveloppes aux organismes francophones en situation minoritaire soient gelées. «[Les francophones] ont survécu, mais ils n’ont pas pu avancer.»
René Arseneault nuance : «Pour les droits linguistiques, le projet de loi C-13, ça se change difficilement. La feuille de route est déjà déployée jusqu’en 2028.»
Les conservateurs avaient d’ailleurs massivement voté en faveur de ce projet de loi, devenu la loi modernisée sur les langues officielles.
Selon le ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et des Langues officielles, Randy Boissonnault, les francophones hors Québec ont «besoin de champions qui savent ce que c’est de vivre en situation minoritaire».
Il rappelle que le Plan d’action pour les langues officielles, présenté par les libéraux en 2023 avec un budget «record» de 4,1 milliards de dollars, touche une trentaine d’initiatives et huit ministères.
Le Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028 a repris la somme de 2,7 milliards de dollars sur cinq ans du plan précédent. Cette somme est permanente, donc reconduite à chaque plan.
Toutefois, la nouvelle somme de 1,4 milliard ajoutée en 2023 amène bien à un total de 4,1 milliards, mais il s’agit d’une somme temporaire, qui pourrait ne pas être reconduite après 2028.
Si les conservateurs veulent modifier la nouvelle Loi sur les langues officielles, «ils doivent introduire une nouvelle législation», rappelle François Rocher, professeur émérite à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa.
«Par ailleurs, même si la Loi sur l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale a elle aussi été adoptée, elle n’est pas encore en vigueur, car on attend toujours le décret et l’adoption des règlements pour la rendre opérante.»
Le politologue François Rocher assure que des coupes sont «dans la mire» des conservateurs.
Mais c’est surtout l’avenir du Régime canadien de soins dentaires, de l’allocation canadienne pour enfants (ACE) ou encore des garderies à dix dollars qui préoccupent René Arseneault, Randy Boissonnault et Francis Drouin.
Sollicités, des députés du Parti conservateur du Canada n’ont pas donné suite à nos demandes pour clarifier leurs positions sur ces sujets.
«Ces craintes ne sont pas infondées étant donné le “flou artistique” qui entoure la position des conservateurs sur ceux-ci, remarque François Rocher. Comme toutes ces politiques sont particulièrement couteuses et que Pierre Poilievre ne cesse de dire qu’il faut réduire les dépenses de l’État canadien, couper ou retarder ces programmes me semble être dans la mire des conservateurs.»
Pour Francis Drouin, l’avenir de l’information serait également en jeu sous un gouvernement conservateur : «Je trouve qu’un parti politique qui dit “je veux éliminer CBC”, ça va avoir un impact sur Radio-Canada. Et ça va avoir un impact sur les communautés en situation minoritaire.»
Son collègue René Arseneault voit un défi plus large : «Tout se dit et se vaut. Il n’y a plus du tout de respect par rapport aux professionnels de l’information. Quelqu’un qui a étudié, qui a fait sa carrière là-dedans, il n’est pas plus pesant qu’un “nono” qui prend son téléphone cellulaire et qui dit n’importe quoi.»
Mona Fortier, députée fédérale d’Ottawa–Vanier, partage les mêmes appréhensions que ses trois collègues quant à un éventuel gouvernement Poilievre, mais elle y ajoute les droits reproductifs des femmes et «une fonction publique en santé».
La députée Mona Fortier se dit «prête» pour les prochaines élections fédérales.
Ce sont ces raisons qui la «motivent le plus» à se représenter à nouveau sous la bannière libérale. «[Pierre] Poilievre n’a pas de plan», réagit-elle en entrevue avec Francopresse. La députée assure simplement qu’elle «sera prête pour aller affronter les opposants».
Écartée du Cabinet par Justin Trudeau en 2023, elle a été remplacée par Anita Anand au Conseil du Trésor. Sans commenter cette exclusion, elle assure avoir de nouveau eu «l’honneur pour la troisième fois» d’être tout juste nommée par le premier ministre à la présidence du Comité national de la plateforme libérale.
Randy Boissonnault fait lui aussi partie de ceux qui se représenteront aux prochaines élections.
Malgré le désir de changement des Canadiens, visible dans le dernier sondage sur les intentions de vote des élections fédérales de l’institut Angus Reid, le ministre lance : «Les sondages, c’est la dernière chose que je regarde. Le seul qui compte est celui de la journée de l’élection, point à la ligne.»
«Le parti libéral va gagner les prochaines élections, sous le leadeurship de Justin Trudeau. Tous les gens qui se sont engagés contre M. Trudeau se sont trouvés sur le mauvais côté de l’histoire le lendemain.»
Bon nombre de députés espèrent «rebâtir» le parti, assure une source libérale proche du caucus, avec la volonté de voir à sa tête un nouveau chef. Plusieurs d’entre eux s’attendaient à ce que Justin Trudeau jette l’éponge et déclenche des élections dans l’été.