Le Comité permanent des langues officielles est parvenu à un compromis après de vifs échanges entre libéraux et conservateurs au sujet de la divulgation de l’agenda du premier ministre Mark Carney.
Agenda du premier ministre : Les conservateurs souhaitaient obtenir l’agenda complet afin d’évaluer les efforts de Mark Carney pour apprendre le français, après qu’un reportage de Radio-Canada ait compilé que le premier ministre ne s’était exprimé en français que 17 % du temps lors de discours publics depuis son élection.
Les libéraux, pris de court par une motion de Joël Godin (PCC), ont d’abord refusé une divulgation totale des activités de leur chef, invoquant des enjeux de sécurité nationale.
Les partis se sont entendus pour une divulgation partielle : seules les activités liées à l’apprentissage du français – y compris les séances de tutorat – seront rendues publiques. Des experts, le président du Conseil du Trésor et le ministre des Langues officielles seront invités au comité pour discuter, entre autres, de l’état du bilinguisme au Canada et au Québec.
La sénatrice Lucie Moncion a affirmé par écrit à Francopresse qu’elle «craint les répercussions des compressions budgétaires sur les établissements postsecondaires francophones en contexte minoritaire ainsi que, plus généralement, sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire».
Dans une lettre adressée au ministre des Finances, François-Philippe Champagne, Bernadette Clément, René Cormier, Lucie Moncion et Allister Surette ont partagé leur vive inquiétude face à la réduction importante du financement fédéral accordé au Collège nordique francophone, seul établissement postsecondaire offrant une éducation entièrement en français dans le Grand Nord canadien.
Promesse brisée : Les sénateurs et sénatrices font valoir que, malgré la promesse du gouvernement de maintenir ou d’augmenter son financement, les fonds complémentaires pour le postsecondaire ont été fortement réduits, entrainant la perte d’un tiers du budget, la mise à pied de 7 personnes sur 20 et la menace de fermeture de plusieurs programmes.
Ils dénoncent le fait que ces compressions ignorent le statut minoritaire des communautés francophones et risquent de compromettre leur accès à l’éducation, leur développement et leur survie culturelle.
Ils demandent au gouvernement de rétablir les fonds coupés et de revoir ses critères budgétaires afin de respecter le principe de protection des minorités inscrit dans la Constitution.
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Mark Carney a présenté ses priorités budgétaires aux Canadiens et aux Canadiennes mercredi soir, depuis l’Université d’Ottawa.
Selon lui, le Canada doit diversifier ses partenaires commerciaux et réduire sa dépendance envers les États-Unis.
Le prochain budget fédéral s’articulera ainsi autour de quatre grandes priorités : la diversification des partenaires commerciaux, un nouveau plan pour l’immigration et les talents, le climat et la réduction des dépenses pour favoriser l’investissement.
Faire face aux États-Unis : Le premier ministre veut aussi doubler les exportations canadiennes vers les pays autres que les États-Unis d’ici dix ans, ce qui représenterait 300 milliards de dollars supplémentaires en échanges commerciaux.
Face aux politiques protectionnistes de Donald Trump, Mark Carney a souligné que les anciens atouts du Canada liés à sa proximité économique avec les États-Unis sont désormais devenus des faiblesses.
Investissements : Il a aussi promis que son budget stimulerait des investissements sans précédent au cours des cinq prochaines années. Le premier ministre a également assuré qu’il protègerait le Régime canadien de soins dentaires et rendrait permanent le programme national d’alimentation scolaire.
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les mercredis et samedis
Yves-François Blanchet, chef du Bloc québécois, a réaffirmé que le gouvernement fédéral n’obtiendrait pas de soutien de son parti s’il n’y avait pas de réponses à leurs six demandes dans le budget, notamment concernant les transferts de fonds du fédéral vers les provinces.
Parti conservateur du Canada : Cela fait plusieurs semaines que le chef conservateur, Pierre Poilievre, a livré la liste de points qu’il souhaite voir dans le budget du 4 novembre : la suppression des taxes «cachées» sur les paniers d’épicerie, la réduction des taxes sur le travail et l’énergie – entre autres, avec la taxe carbone en ligne de mire – et le maintien du déficit sous la barre des 42 milliards de dollars.
Ce qui serait un exploit, alors que l’institut C.D. Howe anticipait un déficit de 90 milliards de dollars en septembre.
Pour atteindre cette cible, Pierre Poilievre propose notamment des réductions de budget et de personnel dans la fonction publique, ainsi que des suppressions d’aide aux «faux demandeurs d’asile», comme l’a indiqué son parti dans un communiqué.
Bloc québécois : Mercredi, le chef bloquiste, Yves-François Blanchet, a fait état d’une conversation «très intéressante» avec Mark Carney où il pense que le premier ministre a pris «acte» des six demandes de son parti.
Le Bloc a 18 attentes budgétaires au total, dont les six qui non négociables pour leur vote du budget, a fait valoir le porte-parole bloquiste des finances, la semaine dernière.
Les demandes du Parti vert et du Nouveau Parti démocratique ont été entendues début octobre par le premier ministre.
Le 4 juillet, le SEPF a envoyé une lettre au CSF dans laquelle il demande la démission de cinq des sept membres du conseil d’administration. Le syndicat juge que le conseil a pris des décisions qui mettent en péril la qualité de l’enseignement et les services aux élèves.
Aussi bien le CSF que la présidente du SEPF, Maria Stinchcombe, confirment que le conseil scolaire a offert une réponse verbale le 14 octobre lors de sa rencontre avec des groupes partenaires.
Sans se souvenir des mots exacts, Maria Stinchcombe indique que la réponse confirmait «que les membres du CA sont résolu·es à continuer à travailler ensemble».
«Bien que le SEPF ne soit pas surpris par cette réponse, nous la jugeons tout à fait insatisfaisante», explique la présidente du syndicat par écrit à Francopresse.
Elle dit regretter le manque de transparence des derniers mois et «une communication minimaliste», plutôt que de chercher une «collaboration authentique et constructive». Une réponse qui «nous enracine davantage dans notre perte de confiance envers ces élu·es», précise-t-elle.
En aout 2024, le CSF a demandé à la Cour suprême de la Colombie-Britannique d’ordonner la mise en œuvre d’un jugement de la Cour suprême du Canada de 2020 qui demandait à la province de financer l’éducation de langue française de façon équitable.
Dans son jugement rendu en mai 2025, le juge Geoffrey B. Gomery ordonne à la province de donner des pouvoirs d’expropriation au CSF. Il ne garantissait cependant pas la propriété des terrains et des édifices et laissait entendre que le Conseil n’avait pas bien géré le dossier.
En juin, le CSF a décidé de faire appel du jugement.
Dans un échange de courriel précédant la rencontre du 14 octobre, le CSF a précisé à Francopresse sa position quant aux dépenses en lien avec le recours en justice.
Au conseil d’administration (CA) du CSF, nous comprenons les inquiétudes exprimées par nos partenaires quant aux impacts sur le quotidien dans nos écoles. Nous tenons à rassurer nos communautés que la réussite et le bienêtre des élèves demeure notre priorité.
«Les décisions que nous prenons sont parfois très difficiles, mais s’inscrivent dans un contexte exceptionnel. […] La poursuite des démarches judiciaires vise à obtenir des solutions durables, telles que reconnues par la Cour suprême du Canada en 2020, au bénéfice des élèves actuels et futurs, puisque la réussite et le bienêtre de toutes et tous demeurent notre priorité.»
Le CSF a décidé en juin qu’il ferait appel du jugement. C’est cette décision que le SEPF juge néfaste pour la santé financière du conseil scolaire et ses capacités à fournir des services aux élèves.
Le CSF a cependant confirmé que la firme d’avocats qui le représente avait offert de ne pas facturer d’honoraires pour la procédure d’appel.
Par courriel, le CSF confirme que la «défense contre la Province et le [Vancouver Board of Education (VBE)] a couté 17 983 028 $ au CSF (de mars 2021 à juin 2025). Ce montant comprend entre autres les honoraires, les déboursés, les traductions et le remboursement des témoins».
Le 17 octobre, le juge Geoffrey B. Gomery a rendu son verdict concernant le remboursement d’une partie des couts encouru dans la cause devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique.
Il permet au CSF de récupérer 65 % de ses dépenses auprès du VBE. Dans son jugement, il explique que le Conseil scolaire francophone n’a pas remporté tous les points litigieux, en plus d’avoir fait trainer les audiences en longueur avec la lecture superflue de preuves, entre autres.
Invitée au comité permanent du Patrimoine canadien d’abord et sénatorial des Transports et communications le lendemain, la présidente-directrice générale de CBC/Radio-Canada a affirmé que les francophones en situation minoritaire étaient «au cœur du mandat» de Radio-Canada, notamment via un processus de consultation.
Celui-ci aurait été suivi avec «assiduité», explique la PDG, pour comprendre les besoins des communautés de langues officielles en situation minoritaire (CLOSM).
«Le service aux francophones [en situation linguistique minoritaire, NDLR] porte sur les mêmes enjeux de changements dans la consommation de médias. On doit s’adapter à ce que représente la francophonie moderne», dit-elle.
La PDG de CBC/Radio-Canada était devant les deux comités du Parlement cette semaine pour présenter les priorités de la société d’État.
C’est cette «francophonie moderne», modelée par l’immigration, explique la PDG de Radio-Canada, qui fait que la société d’État vise les nouveaux arrivants, la façon dont ils peuvent les atteindre, surtout, via leurs plateformes numériques.
Les plateformes donnent une «force» aux histoires locales relayées par Radio-Canada, car elles remontent et nourrissent ainsi les informations nationales, a insisté Jean-François Rioux, directeur général des services régionaux de Radio-Canada, devant les sénateurs.
«Souvent, une grande partie d’une histoire qui va sortir à Toronto ou Vancouver vient de l’extérieur de la province, majoritairement du Québec. Donc, il y a un intérêt pour savoir comment les francophones vivent dans leurs régions» a-t-il présenté en comité mardi.
C’est un début de réponse pour intéresser les nouveaux arrivants, parce que la manière de les rejoindre est un «enjeu».
Dans les comités parlementaire et sénatorial, la PDG de CBC/Radio-Canada a présenté les «trois piliers» sur lesquels la société d’État se basera pour s’orienter dans les cinq prochaines années.
La direction vise une proximité avec des communautés oubliées dans des régions moins couvertes.
En comité parlementaire lundi, Marie-Philippe Bouchard a évoqué un «désir de rétablir une présence journalistique dans un grand nombre de communautés», avec une vingtaine de journalistes recrutés pour cela partout au Canada.
La PDG veut aussi avoir une agilité numérique en facilitant l’accès à leur contenu et jouer un rôle rassembleur.
Pour ce rôle rassembleur, CBC/Radio-Canada planche sur une collaboration notamment avec les médias privés et locaux.
Je suis très préoccupée de voir le sort de nos collègues, avec les revenus publicitaires à la baisse. Ce contexte fragilise le potentiel de maintenir l’écoute aussi forte
Elle a expliqué qu’elle veut «réduire les couts qui étranglent tout le monde», ce qui comprend Radio-Canada et les médias privés locaux au Canada.
Selon la PDG, cette collaboration se traduirait par un partage de cout d’un sondage avec un collectif de journalistes ou des images pool partagées, mais pas chargées aux plus petits médias. «Radio-Canada veut agir en “polinisateur” et non-concurrent», a-t-elle affirmé.
De plus, les jeunes, les nouvelles et nouveaux arrivants et les gens insatisfaits de Radio-Canada sont les publics prioritaires à conquérir pour la société d’État.
En entrevue avec Francopresse à la suite du comité sénatorial, Marie-Philippe Bouchard a expliqué ne pas savoir si le ministère des Finances du Canada allait couper dans le budget de CBC/Radio-Canada.
«On a fait un plan stratégique en ne sachant pas ce qui allait nous arriver, entre plus 150 ou moins 200 millions de dollars. C’est sûr que ça a de gros impacts dans un sens ou dans un autre. Probablement que la vérité est quelque part au milieu. Et donc, l’objectif était de se donner des orientations très précises pour pouvoir faire des choix prioritaires, soit en réinvestissement, soit en protégeant.»
La société d’État a perdu environ 2 % de son financement public en 2023-2024.
Le sénateur acadien René Cormier a de son côté demandé à l’équipe de direction de Radio-Canada des données plus justes pour distinguer les producteurs indépendants francophones canadiens de l’extérieur du Québec.
«Il y a un enjeu sur la méthode de calcul de la Société Radio-Canada dans ses rapports au [Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC)] pour comptabiliser les dépenses des émissions francophones canadiennes des producteurs indépendants des CLOSM», a-t-il précisé.
Marie-Philippe Bouchard a assuré que «même si on détricotait [les deux], on verrait que l’essence de l’enveloppe qui va aux émissions francophones va aux producteurs en milieu minoritaires».
Elle a toutefois souligné que Radio-Canada avait besoin de l’appui du CRTC si la société s’embarquait pour faire la distinction entre les deux dans ses rapports.
«Il faut aussi que le producteur francophone en milieu minoritaire soit majoritaire» au sein de l’équipe de production pour compter, a-t-elle nuancé. Comme un producteur qui est à la tête du processus de décision, et non un poste de producteur adjoint.
Marie-Philippe Bouchard a aussi affirmé que Radio-Canada pouvait servir «d’entremetteurs» entre les productions francophones québécoises et les productions francophones des autres provinces et territoires.
Ce maillage avec les producteurs du Québec peut être une opportunité pour avoir la capacité de réaliser des projets que les producteurs francophones des CLOSM ne pourraient faire seuls
La commissaire à l’information a demandé à CBC/Radio-Canada de divulguer le nombre d’abonnés payant sur Gem, la plateforme de contenu audiovisuel de CBC/Radio-Canada. Jusqu’ici, la société d’État refuse, évoquant des conséquences sur les négociations commerciales entourant l’intégration de Gem à d’autres services de diffusion en continu.
La question est revenue en comité parlementaire lundi. Pressée sur cette question par plusieurs députés conservateurs, Marie-Philippe Bouchard n’a pas donné de chiffres.
Elle a toutefois révélé que 5,3 millions de personnes «utilisaient» Gem. «Ça ne veut pas dire qu’ils sont [des abonnés payants] pour autant», a contrecarré le député conservateur Kevin Waugh.
Les médias comptent parmi les indicateurs de vitalité qui reviennent le plus souvent dans les «exemples de questions pouvant servir à décrire l’état de la situation» de Patrimoine canadien. Plus souvent que «bilinguisme», «association», «évènement», «écoles», «garderie» ou «postsecondaires».
La présence de médias de langue officielle en situation minoritaire (MLOSM) permet de voir facilement si la communauté est culturellement active, si la langue minoritaire y est bien visible et d’évaluer ses relations avec les autres communautés linguistiques.
Les communautés de langue officielle en situation minoritaire doivent donc trouver une façon de participer activement à leur maintien et à leur dynamisme, tout en respectant leur indépendance.
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Les médias de langue minoritaire ont réfléchi à leur avenir en compagnie d’autres intervenants lors d’un forum en septembre à Ottawa.
Le constat que les communautés doivent s’engager dans la sauvegarde de leurs journaux et de leurs radios reste l’un des points les plus audacieux du Livre blanc : Vérités, défis, occasions à saisir et pistes d’avenir, produit par le Consortium des médias communautaires de langues officielles en situation minoritaire. Il s’agit aussi de l’un des plus complexes.
On parle depuis longtemps de la responsabilité du gouvernement fédéral, mais le rôle des communautés elles-mêmes est souvent passé sous silence. Elles sont pourtant les premières à utiliser leurs médias.
Cependant, les journaux n’ont pas le devoir de seulement présenter le bon côté des choses. Ils doivent aussi dire quand les choses vont mal. L’incompréhension du rôle de chaque partie peut mettre du plomb dans l’aile d’une collaboration. Si les rôles sont bien compris et que les canaux de communications sont bien établis, la coopération est possible.
Pour bien comprendre les défis qui attendent les MLOSM, les communautés doivent savoir qu’une grande partie des solutions que trouvent les grands médias écrits pour assurer leur survie sont peu ou pas transférables aux MLOSM.
Préserver les médias communautaires est un défi de taille dans l’environnement actuel. Si les communautés veulent leur venir en aide, elles doivent comprendre qu’une grande partie des solutions développées par et pour les grands médias écrits sont peu ou pas transférables aux MLOSM. Ces derniers doivent donc innover encore plus, avec moins de ressources que les autres.
La plus grande limite peut être comprise avec les mathématiques les plus élémentaires : le nombre de francophones.
Comme le souligne le Livre blanc :
Les retombées financières demeurent insuffisantes pour que les canaux numériques assurent une source de revenus viable, capable de soutenir adéquatement les salles de rédaction ou le fonctionnement des médias.
La raison en est simple : les modèles publicitaires du Web ont été créés à partir de la possibilité de rejoindre des centaines de milliers de personnes. Aucun MLOSM n’a un lectorat potentiel assez vaste pour que le modèle publicitaire imposé par les grandes entreprises numériques des États-Unis soit rentable.
Et si les réseaux sociaux – ceux qui sont encore accessibles au Canada pour les médias – restent une bonne façon de rejoindre un public, surtout plus jeune, ils n’ouvrent pas la porte directement aux revenus.
La solution se trouve donc bien plus près des médias et de leurs communautés. À quels besoins non comblés le journal pourrait-il répondre? Quels canaux de communication peuvent renforcer le lien avec la communauté et rendre le média plus pertinent et intéressant?
On ne peut pas accuser le gouvernement fédéral de se croiser les bras. Plusieurs mesures de financement visent les MLOSM. Mais il donne parfois l’impression d’offrir d’une main et prendre de l’autre.
L’initiative de journalisme local permet aux médias de payer des journalistes. Par contre, la Loi sur les nouvelles en ligne ne leur offre pas de statut spécial et les critères sont trop restrictifs pour que plusieurs puissent en bénéficier.
Tous les médias ont besoin d’un gouvernement plus cohérent dans ses interventions pour protéger le système médiatique canadien. Ça peut commencer par le retrait du crédit d’impôt à l’achat de publicité en ligne sur des plateformes étrangère.
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Les audiences qui se sont tenues fin septembre devant la Cour fédérale ramènent à l’avant-scène une saga qui dure depuis 10 ans à Terre-Neuve-et-Labrador.
Le Conseil scolaire francophone provincial (CSFP) affirme que Patrimoine canadien n’a pas respecté son obligation de consulter la communauté francophone, comme l’exige l’article 43 de la Loi sur les langues officielles.
En 2015, le CSFP avait déposé une plainte auprès du commissaire aux langues officielles, qui avait conclu en décembre 2016 qu’elle était fondée. L’affaire a ensuite été portée devant la Cour fédérale pour contraindre Patrimoine canadien à respecter ses obligations.
La Cour devra également trancher sur une question constitutionnelle : Patrimoine canadien manque-t-il à ses obligations en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés? Cet article impose notamment de consulter les parents ayants droit et de fournir des fonds suffisants pour garantir une éducation de qualité équivalente dans la langue de la minorité.
Finalement, Patrimoine canadien n’aurait jamais demandé de comptes au gouvernement provincial afin de s’assurer que les fonds destinés à l’éducation en français avaient bel et bien été versés au CSFP, argumente ce dernier.
Patrimoine canadien s’est engagé à verser annuellement 1,3 million de dollars à Terre-Neuve-et-Labrador dans le cadre du Protocole d’entente de 2013-2018. Une entente entre le fédéral et chaque province et territoire pour financer l’enseignement de la langue de la minorité et l’enseignement de la langue seconde.
Fin septembre la Cour fédérale, le Conseil scolaire francophone de Terre-Neuve-et-Labrador a avancé qu’il n’a jamais été consulté par Patrimoine canadien sur les besoins de la communauté francophone de la province. Par conséquent, les fonds versés sont inadéquats et ne répondent pas aux besoins réels de cette communauté.
Dans son mémoire de défense en Cour, Patrimoine canadien affirme de son côté que la Loi sur les langues officielles ne prévoit «aucune obligation de mettre sur pied une consultation à chaque fois qu’une décision ou initiative est susceptible d’affecter ou d’intéresser une [communauté de langue officielle en situation minoritaire]». Une telle obligation serait «excessivement lourde», dit le ministère.
Selon la défense de Patrimoine canadien, il s’agirait plutôt de «consultation à haute échelle». Les fonds de Patrimoine canadien sont «limités» et servent aussi à d’autres provinces et territoires. Le pouvoir fédéral de dépenser est un «pouvoir discrétionnaire», ajoute-t-elle.
Cependant, dans l’affaire Arseneault-Cameron, la Cour suprême du Canada a statué que le pouvoir discrétionnaire du gouvernement doit considérer le rattrapage à faire pour le financement de l’éducation des francophones, rappellent les représentants du conseil scolaire. es détenteurs de droit sont «les mieux placés pour identifier les besoins locaux».
Patrimoine canadien renvoie également la balle à la province, en affirmant que l’obligation de consultation incombe «seulement» aux provinces et territoires et non au gouvernement fédéral.
L’autre pomme de discorde concerne le fait que le Conseil scolaire déplore depuis 10 ans que l’entente entre la province et le fédéral ne contienne aucun «mécanisme clair» de reddition de compte, ce que demande pourtant la Loi sur les langues officielles.
Le Conseil demande plus de 2 millions de dollars de réparation, car il affirme que Patrimoine canadien a dédié la vaste majorité des fonds en respectant uniquement le «seuil minimal».
Roger Paul, ex-directeur général de la Fédération nationale des conseils scolaires francophones désormais à la retraite, raconte en entrevue avec Francopresse que la Fédération avait embauché un chercheur pour analyser «tous les rapports des ministères de l’Éducation des provinces et territoires».
Celui-ci avait conclu qu’il était souvent impossible de retrouver des détails importants et de savoir concrètement où allait l’argent.
Il est difficile et presque impossible d’obtenir, de retracer beaucoup de détails parce que tout est caché dans les grandes rubriques des rapports que Patrimoine canadien fournit au ministère de l’Éducation
Il affirme que le «manque de transparence» est aussi dû aux formulaires de reddition de comptes, qui sont «très généraux».
L’ancien responsable a comparu devant le Comité sénatorial permanent des langues officielles «à maintes reprises» pour dénoncer ce manque de transparence. Ce problème fait l’objet des «mêmes revendications» depuis une trentaine d’années. Un mémoire datant de 1996 intitulé Où sont passés les milliards? faisait déjà état de ce que Roger Paul qualifie de «crise» sur la reddition de compte.
Ce dernier partage un grief avec le CSFP, qui affirme que les fonds fédéraux financent souvent des «opérations régulières», comme l’embauche et le salaire des enseignants.
«Ça, ça relève du ministère de l’Éducation. Les fonds [fédéraux] devraient servir pour des opérations qui vont au-delà des opérations régulières, tout ce qu’on peut faire pour améliorer la construction identitaire», dit Roger Paul.
La date du dépôt du jugement n’est pas encore connue.
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Avec des informations de Lê Vu Hai Huong
Selon le plan ministériel 2025-2026 de FEGC, les dépenses prévues par le ministère pourraient chuter de près de 407 millions $ à seulement 76,3 millions $ pour l’année financière 2027-2028.
Le 7 octobre, l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne (AFFC) a lancé une pétition en ligne pour alerter la population canadienne à propos de ces compressions.
À l’aube du budget fédéral du 4 novembre, l’organisme demande au gouvernement de reconduire les programmes de FEGC et de garantir un financement stable et durable aux organismes de femmes francophones.
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«On sait que les différents ministères ont été appelés à faire des coupures de 15 %, mais 80 %, c’est absolument alarmant», déplore la vice-présidente de l’AFFC et représentante du Nouveau-Brunswick, Geneviève L. Latour.
Geneviève L. Latour lance l’alerte sur la perte de programmes qui aident les femmes victimes de violences conjugales.
L’objectif de la pétition est d’informer sur l’ampleur et l’effet de ces suppressions budgétaires, mais aussi de mobiliser le public. La responsable n’hésite pas à parler d’«un recul historique pour le droit des femmes». Elle invite les membres de la société civile à contacter leur député fédéral pour les interpeler sur ce sujet.
«On sait que les femmes jouent un rôle crucial dans les communautés francophones. Ces coupures-là vont avoir un impact sur les femmes, que ce soit au niveau de la santé, de la communauté, de la vitalité», dit Geneviève L. Latour.
Elle rappelle que plusieurs organismes viennent en aide aux victimes de violence conjugale : «Ça peut faire la différence entre la vie et la mort pour certaines d’entre nous.»
«C’est inquiétant et ça va certainement se traduire par une réduction du service pour les femmes. Quand ça vient aux femmes francophones, nos services en français sont déjà rares et sous-financés. Ces coupures-là vont aggraver les inégalités et invisibiliser encore plus nos réalités.»
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FEGC assure de son côté par courriel qu’aucune réduction budgétaire n’a été effectuée : «Les chiffres du plan ministériel ne représentent aucune réduction actuelle ou prévue du ministère. Ils reflètent plutôt l’expiration prévue de certains financements de programmes à durée déterminée.»
Le ministère affirme avoir bénéficié d’un «financement sans précédent» en 2025-2026 par rapport aux années précédentes, alors que le pays est confronté aux tarifs douaniers américains. Son budget est passé de 323 millions de dollars en 2022-2023 à 407 millions en 2025-2026.
«Au cours des cinq dernières années, Femmes et Égalité des genres Canada a financé quatre projets avec l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne, pour un montant total de plus de 2,1 millions de dollars. L’un de ces projets est toujours en cours», précise-t-il.
Si l’AFFC est en discussion avec Ottawa, l’organisme n’est pas encore «rassuré», commente Geneviève L. Latour. Pour elle, ces réductions budgétaires auront des conséquences à court et à long terme.
C’est un retard qu’on va avoir de la difficulté à rattraper. C’est pour ça qu’il faut agir dès maintenant.
La présidente de l’Union culturelle des Franco-Ontariennes (UCFO), Sylvie Gravelle, affirme qu’une réduction budgétaire de cette taille affecterait toutes les femmes de son organisme, en particulier celles en milieu rural.
Sylvie Gravelle craint la perte du pouvoir collectif résultant de l’isolement. Elle pense qu’«un tel pouvoir est vraiment fort quand on [les femmes sont] toutes ensemble».
La présidente de l’Union culturelle des Franco-Ontariennes (UCFO), Sylvie Gravelle, affirme qu’une réduction budgétaire de cette taille affecterait toutes les femmes de son organisme, en particulier celles en milieu rural.
Selon elle, les subventions permettent d’organiser des rencontres essentielles où les femmes peuvent discuter, briser leur isolement et partager leur culture, leur patrimoine et des traditions parfois vieilles de 400 ans. La disparition de ces cercles menacerait également la transmission de la langue.
L’UCFO demande aux citoyens de signer la pétition en ligne, d’envoyer des lettres au premier ministre et d’appeler leurs députés.
La directrice générale de l’UCFO, Janie Renée Myner, déplore que la décision du gouvernement affaiblisse davantage un système déjà précaire. Elle précise que ces compressions feraient perdre à l’organisme les deux tiers de ses fonds d’opération.
«Quand les fonds arrêtent, on doit mettre des gens à la porte», lâche-t-elle. En conséquence, elle constate que les employées ne reçoivent jamais une rémunération équitable et que leur valeur n’est jamais reconnue par les bailleurs de fonds.
Les bénévoles de l’UCFO jouent aussi un rôle crucial, poursuit Janie Renée Myner. Elles offrent des services de soutien aux proches aidants, un travail «invisible».
L’UCFO, qui célèbrera son 90e anniversaire en janvier 2026, est l’une des plus anciennes institutions franco-ontariennes. L’organisme a notamment servi d’université pour des femmes qui n’avaient pas accès à l’éducation.
La directrice générale souligne la situation des femmes francophones âgées, qui, selon elle, ont contribué toute leur vie à la communauté, mais qui restent «ni vues ni reconnues ni comptabilisées» dans les statistiques, y compris celle du recensement.
Pour Hafsa Aatiq, présidente de Réseau-Femmes Colombie-Britannique, cette baisse budgétaire ne ferait qu’aggraver une situation déjà fragile dans la province pour les femmes francophones.
«C’est honteux parce que notre dualité linguistique, c’est vraiment ce qui nous rend uniques au Canada. Et couper le financement offert aux communautés francophones, c’est vraiment menacer notre force», déplore Hafsa Aatiq.
«Elles font face à beaucoup d’obstacles justement en raison du manque de services en français dans plusieurs domaines majeurs comme la santé, la justice et la lutte contre la violence basée sur le genre.»
Les fonds fédéraux sont d’autant plus cruciaux qu’ils constituent l’une des rares sources de revenus de l’organisme : «Si on ne peut pas compter sur un financement qui est durable et stable, ça menace la continuité de nos services. La création de nouveaux programmes n’est pas garantie non plus, tout comme certains postes», signale Hafsa Aatiq.
Pendant ce temps, les besoins ne faiblissent pas, bien au contraire. «Il y a de plus en plus de femmes francophones en Colombie-Britannique, notamment les nouvelles arrivantes», poursuit-elle.
«On entend parler de coupures de financement, ce n’est pas nouveau. Mais le financement des organismes en milieu minoritaire, ça ne peut pas être traité comme une variable budgétaire, surtout de la part du ministère des Femmes et de l’Égalité des genres Canada. Il devrait être un levier de justice et d’équité linguistique et de genre», insiste Hafsa Aatiq.
Janie Renée Myner révèle que l’UCFO a survécu grâce à des subventions irrégulières de 300 $ ou de 1500 $ parfois. À son avis, ce mode de financement invite l’organisme à «recommencer la roue éternellement» quand la subvention est restreinte pour leur projet.
Janie Renée Myner souligne le manque de considération pour les besoins spécifiques des femmes francophones en contexte minoritaire au sein du gouvernement fédéral.
Elle rapporte que la sous-ministre de FEGC, Frances McRae, «nous a plus ou moins dit et confirmé que le ministère de Femmes et Égalité des Genres n’avait jamais pris en compte la loi sur les langues officielles au Canada et n’a jamais réparti ses fonds en considérant la précarité justement de la langue officielle en contexte minoritaire».
Cela signifie que les femmes francophones canadiennes en dehors du Québec n’ont pas reçu un financement équitable, déduit la responsable.
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Cette Semaine nationale vise à favoriser la rétention du personnel et à encourager l’attraction de la profession, souligne le président-directeur général de l’ACUFC, Martin Normand.
L’évènement sera marqué par la remise des premiers Prix nationaux de reconnaissance des éducatrices et éducateurs de la petite enfance. Ceux-ci seront accompagnés d’une bourse de 2000 $, qui pourra être utilisée pour suivre une formation continue.
Une série de balados, Empreintes sur l’avenir, enregistrés avec des professionnels du milieu, sera également dévoilée.
«Ils et elles vont parler de leurs espoirs pour la profession, des défis qu’ils rencontrent et de comment la formation initiale et continue permet de les aider à exercer ce métier-là et à répondre aux besoins croissants de la population», explique Martin Normand.
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Car les défis dans le milieu de la petite enfance francophone persistent. À commencer par la pénurie de personnel, mais aussi le manque de places et d’infrastructures pour les services de garde dans les communautés.
Martin Normand espère faire de cette nouvelle semaine un rendez-vous récurrent.
«Ça devient d’autant plus important d’agir rapidement là-dessus parce que la petite enfance c’est la porte d’entrée de tout le continuum éducatif en français», rappelle le président-directeur général.
«Un enfant qui serait inscrit dans un service de garde en français est beaucoup plus susceptible de continuer son éducation dans les établissements de la francophonie canadienne.»
«Il y a aussi des attentes à ce que les éducatrices et les éducateurs participent à la construction identitaire des tout-petits», ajoute-t-il.
Martin Normand insiste également sur l’importance de l’accès à la formation continue pour retenir des professionnels qualifiés dans les services de garde, alors que les besoins «sont grandissants et se complexifient».
«L’arrivée de nouveaux arrivants francophones dans nos communautés accroit la demande pour des places en service de garde. Ça va accroitre la demande pour des éducateurs et éducatrices qualifiées aussi.»
Selon l’ACUFC, d’ici 2035, les services de la petite enfance francophone auront besoin de près de 22 000 professionnels, alors que le bassin disponible ne devrait compter qu’environ 11 000 éducateurs et éducatrices. «Il manque déjà une personne sur deux», résume le responsable.
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«On est dans un contexte où, dans les dernières années, le gouvernement fédéral a mis beaucoup l’accent sur l’accès à l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, remarque Martin Normand. Donc, on estime que c’est un dossier qui devrait demeurer pertinent et important pour ce gouvernement-là.»
L’ACUFC surveillera les nouveaux investissements fédéraux pour la petite enfance, afin de s’assurer que les francophones tirent leur épingle du jeu.
À l’occasion de cette semaine nationale, l’ACUFC espère que les éducateurs et éducatrices renforceront leur sentiment d’appartenance. «Ils et elles sont parfois très isolés», dit Martin Normand.
«Évidemment, ils et elles peuvent partager leurs impressions avec leurs collègues sur place, mais il n’y a pas toujours l’occasion de se projeter, de parler de bonnes pratiques, de créer des occasions pour se reconnaitre, se souligner, se célébrer.»
Les balados qui seront présentés lors de l’évènement en ligne ont également la mission de fédérer : «C’est de se voir; de voir et d’entendre les expériences d’autres professionnels dans le secteur, puis de comprendre qu’ils et elles ne sont pas seuls dans ces efforts-là, qu’ils sont beaucoup à traverser ces défis-là, puis peut-être trouver des solutions de façon collective.»
L’ACUFC compte bien inscrire ce nouveau rendez-vous dans la durée : «On va apprendre de cette édition. C’est la première, mais ce n’est certainement pas la dernière Semaine de reconnaissance», assure Martin Normand.
La programmation complète est disponible sur le site Web de l’évènement : www.merci-mon-educ.ca
Avec des informations de Lê Vu Hai Huong
D’après les études du Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PEICA), au Canada, la proportion des personnes ayant de faibles compétences en lecture et écriture (niveaux 0 et 1) est passée de 19 % en 2012 à 24 % en 2024, toutes langues confondues. Donc, près d’un adulte sur 5 au Canada peut seulement lire des textes courts sur des sujets familiers et comprendre des phrases de base.
Les études révèlent aussi qu’environ 50 % des Canadiens se situent en dessous du niveau 3 de littératie, considéré comme le seuil minimal pour une participation pleine et entière à la société.
Un chiffre d’autant plus éloquent que les analphabètes sont «difficiles à analyser, car ils ont des stratégies pour éviter de lire», explique le président du RESDAC, Geoffroy Krajewski.
Il regrette d’ailleurs que les francophones en situation minoritaire n’aient pas été sondés séparément dans la dernière mouture de l’étude. Sans cette mise à jour, les plus récentes données datent de 2012, dit-il.
Le plus récent PEICA a été mené par Statistique Canada, qui défend son choix : «[Il] a été conçu pour évaluer les compétences à travers le Canada de manière à représenter fidèlement la population du pays dans son ensemble ainsi que celles de chaque province. Afin de produire une enquête fiable avec optimalisation des ressources, il a été décidé de se concentrer uniquement sur ces populations. Par conséquent, la taille de l’échantillon pour les minorités linguistiques était trop limitée pour permettre une analyse statistique robuste ou la diffusion de résultats désagrégés.»
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Geoffroy Krajewski rapporte que l’étude du PEICA de 2012 avait permis d’identifier que les francophones du Nouveau-Brunswick avaient un niveau d’alphabétisation plus bas que les anglophones de la même province, mais aussi plus bas que les autres francophones du Canada.
Pour Geoffroy Krajewski, l’absence de données précises sur les francophones est dommageable. Il cite l’étude de 2012, qui avait révélé un écart important entre francophones et anglophones.
«Au Nouveau-Brunswick, 62 % des adultes francophones étaient en deçà du niveau 3. En comparaison, on voyait que les anglophones étaient à 48 %.»
Quand vient le temps de suivre l’évolution de la situation, les données sont essentielles. Elles servent aussi à répartir les investissements équitablement, souligne-t-il.
«De pouvoir avoir des données spécifiques pour les francophones, ça permet de revendiquer une juste proportion de tout ce volume d’argent qui est dépensé [par le fédéral] au niveau du développement des compétences.»
La directrice générale de la Coalition ontarienne de formation des adultes, Gabrielle Lopez, ajoute que les données que fournirait le PEICA à propos des francophones permettraient aussi de mesurer le degré d’assimilation.
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Un nouvel outil
Pour pallier le manque de données, le RESDAC développe TOPO RESDAC. En se basant sur différentes données existantes et des formules mathématiques, il extrapole des variables qui correspondent à la francophonie minoritaire.
Le RESDAC est un regroupement d’organismes qui offrent des services d’éducation aux adultes en français en milieu minoritaire. Parmi ses objectifs, le réseau souhaite valoriser des pratiques alternatives dans une stratégie nationale pour la littératie.
L’apprentissage non formel correspond aux gens qui développent des compétences via des formations, mais qui n’ont pas de valeur juridique. L’apprentissage informel est basé sur des compétences qu’on développe sans en avoir conscience
Pour arriver à ses fins, le principal cheval de bataille du RESDAC est la Loi des langues officielles. Avec la Loi mise à jour en 2023, le gouvernement fédéral doit s’engager à assurer l’apprentissage des francophones en contexte formel, mais aussi informel et non formel. La Loi reconnait donc l’existence d’un apprentissage hors du cadre scolaire.
Le RESDAC fait du lobby auprès d’Ottawa pour mieux définir comment reconnaitre officiellement l’apprentissage informel.
Pour répondre à cette problématique de légitimité, l’organisme travaille sur la reconnaissance des badges numériques. «Cet outil donne une série d’informations sur les compétences de son porteur, il permet de voir le contexte d’apprentissage», décrit Geoffroy Krajewski. Lesdites compétences peuvent se compter par centaines et portent par exemple sur le leadeurship, le savoir-faire ou le savoir-être.
Face aux multiples spécificités des différentes minorités linguistiques, le RESDAC élabore également un catalogue de compétences linguistiques articulé autour du bilinguisme additif. «Nous souhaitons éviter le soustractif – à savoir la perte du français –, mais aussi mettre l’accent sur l’affirmation identitaire, l’engagement citoyen et le vivre-ensemble.»
Parmi les membres impliqués dans le réseau, Jean Gauvin, retraité de 65 ans basé en Nouvelle-Écosse, a suivi 19 formations depuis 5 ans.
En Nouvelle-Écosse, Jean Gauvin a suivi 19 formations en 5 ans au sein du RESDAC.
«Après 37 ans à travailler dans la boulangerie, j’ai fait un voyage en France et je me suis rendu compte que j’avais besoin d’apprendre le numérique, parce que je ne pouvais pas suivre le mode de vie d’aujourd’hui». Il confie avoir eu son premier téléphone intelligent à 64 ans.
«Avec les cours, je me sens beaucoup impliqué dans la communauté, j’essaye de passer à un autre niveau pour faire des choses nouvelles.»
Le RESDAC lui a ainsi proposé un poste d’administrateur au sein du conseil d’administration. «On suit le déroulement des affaires, on donne notre opinion sur ce qui est planifié, détaille Jean Gauvin. J’expose aussi ce que j’ai fait dans la dernière année.»
Comme suivre des cours de français pour un niveau de littératie fonctionnel. «Ça m’a beaucoup aidé, apprécie l’apprenant. Quand on écrit des courriels, on peut être plus clair. J’ai pu communiquer avec le conseil municipal pour demander des fonds pour le centre communautaire.»
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L’Association des conseils scolaires des écoles publiques de l’Ontario (ACÉPO) craint que la Loi sur la laïcité de l’État du Québec – également connue sous le nom de «loi 21» – actuellement devant la Cour suprême, ne crée une brèche dans les droits à l’éducation de la minorité francophone au Canada.
Un droit déjà acquis : Dans un mémoire déposé à la Cour, l’ACÉPO affirme que si la décision de la Cour d’appel du Québec – qui a validé l’application de la loi 21 aux écoles de la minorité anglophone – est maintenue, cela pourrait affaiblir le droit de gestion des écoles francophones hors Québec.
L’ACÉPO ne prend pas position sur la loi elle-même, mais elle redoute que cette interprétation permette aux provinces d’imposer un curriculum aux écoles de langue minoritaire qui ne tiendrait pas compte de leur autonomie de gestion et de leur particularité culturelle.
Cela irait à l’encontre des protections garanties par l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés et de précédents jugements de la Cour suprême. L’ACÉPO a obtenu le statut d’intervenant pour faire valoir ses arguments devant la Cour suprême.
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L’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés
L’article 23 de la Charte canadienne garantit le droit à l’instruction dans la langue officielle de la minorité (français ou anglais), là où le nombre d’élèves le justifie.
Il accorde aussi aux communautés linguistiques minoritaires le droit de gérer leurs propres écoles.
Le ministre de l’Identité et Culture canadiennes, Steven Guilbeault, a débloqué 12 millions de dollars pour prolonger, jusqu’en 2025-2026, le volet Mesures spéciales pour appuyer le journalisme du Fonds du Canada pour les périodiques.
Cette aide était prévue dans le budget 2024 et vise à soutenir les journaux communautaires et les magazines, notamment ceux à distribution gratuite ou à faible tirage payant, y compris ceux de langue officielle en situation minoritaire.
Les éditeurs admissibles peuvent soumettre leur demande jusqu’au 17 novembre 2025.
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Le député conservateur Joël Godin demande au Comité permanent sur les langues officielles de se pencher sur l’usage du français par le premier ministre pendant ses apparitions publiques. Radio-Canada a calculé que 17 % du contenu de 59 discours de Mark Carney était en français. Le député croit que l’utilisation du français et de l’anglais devrait être plus proche du 50 %.
Le premier ministre a dévoilé de nouvelles mesures jeudi pour renforcer la sécurité au Canada et lutter contre la criminalité.
Une réforme sur la table : Le gouvernement entend réformer le Code criminel afin de durcir les règles pour les délinquants violents et récidivistes, avec des peines plus sévères et des conditions de libération plus strictes.
Le gouvernement investira également 1,8 milliard $ sur quatre ans pour embaucher 1000 agents de la GRC, améliorer la lutte contre la criminalité financière et augmenter l’indemnité des cadets.
Des efforts seront aussi demandés aux provinces et territoires, aux municipalités et à la police locale pour lutter contre la criminalité, mais aussi sécuriser la population à travers la construction de logements, le soutien en santé mentale et des programmes pour les jeunes dits «à risque».
Garnett Genuis, ministre de l’Emploi du Cabinet fantôme conservateur, a présenté quatre points pour lutter contre le chômage chez les jeunes au Canada, qui est monté à 14,7 % en septembre, selon Statistique Canada.
En conférence de presse mercredi, le ministre du Cabinet fantôme responsable de l’Emploi, Garnett Genuis, a présenté le plan conservateur fédéral pour lutter contre le chômage chez les jeunes.
Quatre mesures : Le parti de Pierre Poilievre souhaite «libérer l’économie» en abrogeant notamment «les lois anti-ressources» et en réduisant les impôts et «la paperasse».
Il souhaite en outre réformer l’immigration (en abolissant, entre autres, le Programme des travailleurs étrangers temporaires), encourager les employeurs à construire des logements et réformer l’aide financière aux études.
Pour cette dernière mesure, ils les conservateurs ciblent les domaines d’études en demande plutôt que seulement les revenus. Les détails sur les secteurs prioritaires n’ont pas été précisés.
Cette annonce intervient alors que Statistique Canada rapporte que le taux de chômage des jeunes entre 15 et 24 ans a atteint 14,7 %, son plus haut niveau depuis septembre 2010 (hors pandémie).
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Jean-Denis Garon, porte-parole du Bloc québécois en matière de finances, affirme que son parti a dû «prioriser» ses attentes budgétaires, résumées cette semaine en 18 points.
Mardi, le porte-parole du Bloc québécois en matière de finances, Jean-Denis Garon, a affirmé aux journalistes que les attentes de son parti tenaient en 18 points, dont six «incontournables», en vue du prochain budget qui sera dévoilé le 4 novembre :
En conférence de presse, Jean-Denis Garon a ri nerveusement lorsqu’une journaliste lui a demandé si le Bloc allait appuyer le budget fédéral. «Il faudra notamment que [nos] demandes soient rencontrées et que ces mesures n’aggravent pas les crises [climatiques et du cout de la vie].»
La présidente de la Tribune de la presse parlementaire canadienne, Mia Rabson, a signalé cette semaine que les journalistes n’ont pas été informés à l’avance du voyage du premier ministre en Égypte. Il a participé au Sommet pour la paix au Moyen-Orient, le 13 octobre.
Exclusion alarmante : Dans sa déclaration, la Tribune affirme qu’«une exclusion complète des médias canadiens d’un tel voyage d’un premier ministre à l’étranger est sans précédent».
«Chaque gouvernement à la tête d’une démocratie en santé doit montrer un engagement envers la liberté de la presse. Au Canada, cela inclut le respect du rôle vital que jouent la Tribune et ses membres. Chaque incident qui vient réduire l’accès, la transparence, et l’imputabilité constitue un pas dans la mauvaise direction.»
Dans un contexte de renouvèlement du contrat des interprètes du Parlement, le ministère de Joël Lightbound, Services publics et Approvisionnements Canada (SPAC), a proposé au Bureau de la traduction, qui emploie les interprètes, d’adopter une politique du «plus bas soumissionnaire» pour les embauches.
Cela implique une modification de la nature même du contrat actuel, qui expirera en janvier 2026.
Le ministère et le Bureau de la traduction veulent mettre de côté le contrat actuel, appelé «contrat ouvert», pour le remplacer par une «offre à commande», où les interprètes-pigistes seraient accrédité·e·s sur les missions parlementaires selon l’offre la plus basse.
Les plus chevronnés – qui enseignent la qualité et l’expérience aux nouveaux – sont les plus à risque de partir si les possibilités de rémunération baissent, ont affirmé les deux témoins membres de l’Association internationale des interprètes de conférence Canada (AIIC), au Comité permanent des langues officielles, le 7 octobre.
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Le Bureau de la traduction, qui emploie les interprètes du Parlement, a fait valoir également au Comité que c’est le processus de renouvèlement normal du contrat.
Ses représentants ont toutefois omis de répondre aux questions du député conservateur Joël Godin à propos de l’offre du plus bas soumissionnaire.
Il s’agit bien d’une modification de la nature même du contrat, contredit l’AIIC. «Cela contraindra les interprètes pigistes à rogner sur les couts. […] Il y a un risque de perdre de la qualité d’interprétation et de perdre les pigistes les plus chevronnés», affirme Nicole Gagnon, membre de l’AIIC.
Sondées sur la question par l’AIIC, 50 % des 90 des interprètes qui ont répondu qu’il est «improbable» qu’ils et elles offrent leurs services au Parlement, contre 3 %, qui offriraient «probablement» leurs services quand même.
| Attribution des missions uniquement selon l’offre la plus basse. | |||||
|---|---|---|---|---|---|
| Probable | Peu probable | Neutre | Plutôt improbable | Improbable | |
| Toutes les répondantes (90) | 9 % | 9 % | 10 % | 28 % | 50 % |
| Répondantes acceptant des missions parlementaires, et celles acceptant des missions parlementaires et des missions ministérielles. | 3 % | 10 % | 12 % | 27 % | 47 % |
Une autre proposition du ministère SPAC consisterait, selon les interprètes, à augmenter leurs heures de travail au micro, soit faire 6 heures contre les 4 heures actuelles. Ce serait seulement possible si le parlement se remettait à fonctionner entièrement en personne, disent ces derniers, ce qui n’est pas dans les plans des élus.
Nicole Gagnon, porte-parole de l’AIIC, déplore les propositions du ministère de Services publics et Approvisionnements Canada, qui pourrait modifier les conditions de travail des interprètes et la qualité de leurs services au Parlement.
SPAC propose de ne plus payer à la journée comme actuellement, mais à l’heure. Le sondage de l’AIIC révèle que 79 % de leurs membres qui ont répondu ne comptent pas revenir au Parlement si cette rémunération est appliquée. Selon les règles, les interprètes doivent être présents pour que le Parlement siège.
La rémunération à l’heure est une manière d’exclure de la paie les temps de préparation et de pauses, critique l’AIIC à Francopresse, après la rencontre du comité.
En comité, le Bureau de la traduction a affirmé de son côté que les interprètes étaient payés pour une heure de préparation. Il en faut généralement deux, dit l’AIIC, surtout dans les cas où les interprètes reçoivent de la documentation pour les aider à préparer leur tâche.
Dans une logique de réduction des couts promis par le gouvernement, notamment au sein de la fonction publique, les députés libéraux ont largement insisté sur l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) et des technologies pour aider les interprètes dans leur travail de préparation. La plateforme libérale le mentionnait clairement, de même que le gouvernement Carney depuis sa victoire électorale.
L’IA n’est pas une tête pensante […], a rétorqué Nicole Gagnon. On n’empêche pas le progrès, on n’est pas contre. C’est un outil utile à la préparation, si les interprètes reçoivent les textes à l’avance […] Mais [l’IA] n’interprète pas les concepts comme l’humour, les émotions, la culture.»
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Les deux interprètes de l’AIIC ont déploré mardi que les règles de santé et de sécurité auditives ne figurent plus dans le prochain contrat proposé.
Ces dernières années, des blessures sérieuses ont été rapportées par plusieurs interprètes du Parlement du fait du changement de leurs conditions de travail.
Annie Plouffe, vice-présidente des Services au Parlement et Interprétation du bureau de la traduction, a insisté en comité sur le fait que ces règles étaient acquises et intégrées et, qu’à cet égard, le Bureau ne sentait «pas le besoin de les écrire».
«Ça leur lie les mains» de les avoir écrites, observe un membre de l’AIIC.
Au moment de publier, SPAC n’avait pas encore répondu aux questions de Francopresse.
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Le Bureau de l’ombud de l’approvisionnement (BOA) a publié un rapport où il a jugé recevables 37 plaintes faites par des interprètes dirigés vers SPAC. Elles avaient été déposées entre juin et juillet 2024 et concernaient la gestion de contrats.
Une modification proposée par SPAC pour prolonger les contrats et redéfinir certaines heures comme du temps de non-interprétation était l’enjeu principal des plaintes.
Le rapport donne raison aux plaintes concernant les changements demandés, notant que «la modification proposée par SPAC aurait entrainé un changement substantiel aux modalités du contrat».