le Vendredi 14 novembre 2025

Le sénateur acadien René Cormier a versé quelques larmes au Sénat mercredi, lors du débat en troisième lecture du projet de loi C-13 sur la refonte des langues officielles. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

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Tard jeudi soir, les sénateurs ont voté en faveur de la modernisation de la Loi sur les langues officielles, le projet de loi C-13, sans amendement. Il devrait obtenir la sanction royale d’ici le début de la semaine prochaine.  

Depuis deux semaines au Sénat, le projet de loi a fait l’objet de demandes d’amendements pour reconnaitre la place des langues autochtones et le retrait de la Charte de la langue française du Québec.

Déposé le 1er mars 2022 par la ministre des Langues officielles Ginette Petitpas Taylor, ce projet de loi était attendu des communautés francophones en situation minoritaire depuis 6 ans.

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Le ministre Marco Mendicino a passé une semaine compliquée en plaidant l’ignorance du transfert du tueur en série et violeur Paul Bernardo début juin. Son personnel aurait été mis au courant, mais pas lui. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Polémique autour du transfert Paul Bernardo et Erin O’Toole fait ses adieux

Le ministre de la Sécurité publique Marco Mendicino a affirmé avoir appris dans les médias que le tueur en série Paul Bernardo a été transféré d’une prison à sécurité maximale vers une prison à sécurité moyenne.  

Son personnel aurait été au courant du transfert plusieurs mois avant le ministre lui-même. L’information ne lui serait jamais parvenue. Cependant, Service correctionnel du Canada (SCC) confirme avoir averti le bureau du ministre à deux reprises.

Un échec aux yeux du Parti conservateur du Canada (PCC), qui a occupé toute la période de questions de mercredi et de jeudi. En plus du manque d’information latent, les conservateurs reprochent au ministre d’avoir manifesté un «intérêt soudain» envers les victimes et leurs proches, qui n’ont pas été informées au préalable du transfert.

Marco Mendicino a donné l’ordre que le SCC informe les victimes et les familles de victimes pour qu’elles soient désormais les premières au courant de décisions qui pourraient les affecter.

Le chef de l’opposition, Pierre Poilievre, a donc demandé la démission du ministre. Son parti a introduit mercredi le projet de loi C-342 pour que les tueurs en série demeurent détenus dans des établissements soumis à une sécurité maximale. Le texte aurait pour effet le retour de Paul Bernardo dans une prison à sécurité maximale.

Le projet de loi C-311 de la conservatrice Cathay Waganthall sur l’inscription de circonstances aggravantes pour la détermination des peines, dans des cas d’agression envers des femmes enceintes, a été rejeté hier aux Communes.

Seuls les conservateurs ont voté en faveur avec 113 voix. Les 205 députés des autres partis s’y sont opposés.

Selon les libéraux, le projet de loi rouvrait les débats sur l’avortement au Canada. Ce à quoi s’opposaient les conservateurs, soutenant qu’il n’y avait aucune mention du fœtus et de son statut dans le texte.

Le ministre d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada Sean Fraser a annoncé de nouvelles mesures pour protéger les étudiants victimes de fraudeurs dans le système d’immigration canadien. 

Photo : Eya Ben Nejm – Francopresse

La marraine du projet de loi, Cathay Waganthall, connue pour être antiavortement avait déjà proposé deux projets de loi en 2016 et 2021.

Un groupe de travail composé d’agents d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) et de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) déterminera au cas par cas les demandes de permis d’étudiants étrangers frauduleuses.

Après un reportage de la CBC qui mentionnait, au printemps, l’expulsion du Canada de 700 étudiants punjabi à cause de fraudes du système d’immigration, IRCC a pris des mesures pour éviter le renvoi injustifié de bonne foi.

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Alors que de nombreux feux de forêt sévissent toujours au Canada, le Bloc québécois a fait voter lundi une motion pour exiger du fédéral d’en faire «davantage dans la lutte aux changements climatiques», notamment par le biais d’investissements plus conséquents.

Le vote a également porté sur la fin du financement fédéral dans les énergies fossiles, tout en stimulant «l’utilisation des énergies renouvelables et du transport collectif».

Tous les partis ont appuyé la motion à l’exception des conservateurs, qui restent des défenseurs de l’exploitation pétrolière. Le ministre de l’Environnement Steven Guilbeault a salué de la main ses collègues du Bloc québécois.

Dans un point presse jeudi, le ministre de l’Environnement a confirmé que 5,7 millions d’hectares du pays avaient brulé et que «le pire [était] peut être devant nous».

Le député conservateur de Durham et ex-chef du Parti conservateur du Canada (PCC) a livré un dernier discours en Chambre lundi, après 11 ans en tant qu’élu.

Après s’être redit le sauveur de la seule nation francophone en Amérique du Nord, le Québec, il a plaidé pour «une égalité des chances» des jeunes Autochtones, qui n’ont pas tous accès à l’eau potable au Canada.

S’adressant à ses collègues conservateurs, il a lancé, dans une pique à peine voilée au chef Pierre Poilievre, connu pour intervenir régulièrement via ses réseaux sociaux : «Au lieu d’être un chef de file et de débattre de notre dessein national, certains d’entre nous sont trop concentrés à poursuivre les algorithmes dans le gouffre de la diversion et de la division. Nous jugeons notre valeur personnelle en fonction du nombre de “j’aime” que nous obtenons sur les médias sociaux plutôt qu’en fonction du nombre de vies que nous changeons dans la vie réelle.»

«La politique de la performance alimente la polarisation. Trop souvent, nous n’avons pas de véritables débats, nous cherchons plutôt à générer des extraits vidéos. Les médias sociaux n’ont pas construit notre pays, mais ils commencent à démolir sa démocratie.»

Il a alerté sur «une génération de jeunes électeurs qui n’auront jamais entendu parler d’un point de vue différent du leur. Je crains que l’ignorance des opinions contraires n’évolue lentement vers une aversion pour les autres. Ça commence à se produire».

«Nous ne devons pas nous contenter de tweeter par frustration […] Le Canada a devant lui de meilleurs jours. Je crois en chacun d’entre vous», a-t-il conclu.

L’annonce est tombée mercredi en milieu de journée. Un groupe de travail composé d’agents d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) et de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) déterminera, au cas par cas, les demandes de permis d’étudiants étrangers frauduleuses.

Le ministre d’IRCC, Sean Fraser, a précisé que les étudiants venus au Canada sans savoir qu’ils ont été la cible de fraude pourront terminer leurs études, après une analyse scrupuleuse de leur dossier pour déterminer qu’ils avaient bel et bien l’intention d’étudier.

Photo : Eya Ben Nejm – Francopresse

Ottawa vise une meilleure protection des étudiants étrangers victimes de personnes malveillantes qui offrent souvent leurs services pour faciliter leur processus d’immigration, long et couteux.

Pour remédier aux expulsions d’étudiants étrangers dupés par des fraudeurs, le ministre de l’Immigration, Sean Fraser, permet aux étudiants dupés d’obtenir un permis qui leur garantit de terminer leurs études.

Autre nouveauté : ils n’auront pas à faire face à l’interdiction de territoire de 5 ans qui s’applique normalement en cas de fausse déclaration.

À cela s’ajoute une livraison de permis de séjour temporaires pour éviter les expulsions imminentes pendant que les dossiers sont examinés.

Les personnes qui participeraient à la fraude sont, en plus des étudiants qui auraient commis de la fraude intentionnellement, des acteurs malveillants qui tentent de faciliter la délivrance des lettres d’acceptation de l’étudiant ou même le processus d’immigration.

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Consultants frauduleux

Le soir même, le ministre Sean Fraser comparaissait au Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration, dans le cadre d’une étude pour clarifier le sujet.

Il a confirmé que des consultants participaient à ces fraudes. Si ces agents malveillants sont au Canada, il prévoit d’avoir recours au Collège des consultants en immigration et en citoyenneté (CICC) pour juger de sanctions appropriées.

Trois pays sont principalement concernés par la fraude, a indiqué sa sous-ministre, Christiane Fox : l’Inde, le Vietnam et la Chine. «Ce sont à 85 % des Indiens qui sont victimes de fraude», a-t-elle précisé. Si des «conversations générales» sont en cours avec ces pays, aucune entente concrète n’est engagée pour lutter contre la fraude.

Mercredi, dans un communiqué de presse, le comité a condamné «fermement les gestes des “consultants fantômes” en Inde qui ont abusé des étudiants internationaux».

Pas de détails sur le jugement de la fraude

Déterminer les cas de fraude prendra «toutes les preuves pertinentes que nous pourrons identifier, et elles peuvent être très différentes d’un cas à l’autre», a précisé le ministre Fraser en conférence de presse mercredi, avant le comité.

«Par exemple, dans le cas où une personne demande un permis d’études et ne va pas en cours, ce serait un signal fort que leur intention de base n’a jamais été d’étudier. Si vous avez été admis au Canada sur la base d’une fraude et que vous le saviez, vous êtes soumis au processus d’expulsion», a-t-il indiqué.

En comité parlementaire, les sous-ministres interrogés sur l’annonce n’ont pas fourni de réponse précise lorsque le député bloquiste Alexis Brunelle-Duceppe leur a demandé les critères pour juger d’un cas de fraude et comment éviter que les agents d’IRCC et ceux de l’ASFC jugent avec des préjugés, notamment raciaux.

L’an dernier, IRCC avait reconnu, après avoir essuyé de nombreuses critiques, que les préjugés raciaux des agents pouvaient expliquer les refus de visas d’étudiants africains.

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Pour éviter un tel biais, la sous-ministre Christiane Fox a seulement assuré que «des formations» étaient dispensées à tous les agents d’IRCC qui accordent des visas. Mais aucune règle commune ne suivra, notamment parce que «les preuves varient fortement d’un cas à l’autre», a encore affirmé Sean Fraser.

Situation connue depuis des mois

En comité, ce dernier s’est notamment fait épingler par plusieurs députés d’opposition sur le fait qu’il connaissait l’existence de fraudeurs depuis des mois, et qu’il aurait pu éviter des cas d’expulsion injustifiée.

«On m’a appris cette question au début du printemps [2023], pas à l’automne dernier», a répliqué Sean Fraser.

Selon le ministre, quelques mois de travail ont été nécessaires pour «régler un problème complexe». Il avait d’ailleurs fait état de la situation dans un gazouillis en mai.

À la mi-mars, la CBC rapportait l’expulsion de 700 étudiants, mais le ministère dispose de chiffres «considérablement plus bas». «Ce ne sont que quelques dizaines de personnes qui sont sujettes à des ordres d’expulsion», a souligné Sean Fraser en conférence de presse.

Le ministre a fait valoir que seulement huit personnes ont été expulsées sur la base de fraude. «Elles pourront utiliser le nouveau processus puis revenir si elles démontrent qu’elles n’étaient pas au courant de la fraude.»

Le ministre a en outre fait état de 82 personnes qui ont été renvoyées vers la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR), le tribunal qui juge de la question. 25 d’entre eux suivent le processus en cours. Il reste 57 personnes visées par des mesures de renvoi.

Une enquête menée actuellement par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) concerne 2000 étudiants touchés par la fraude, a confirmé la sous-ministre Christiane Fox en comité parlementaire.

Un autre processus d’enquête est en cours, cette fois au sein d’IRCC, sur la fraude des lettres d’acceptation. «C’est un processus continu [qui] existe pour tout agent qui voit une tendance [de fraude, NDLR] émerger», a-t-elle encore précisé.

Le ministère de l’Immigration s’attend à ce qu’après l’annonce, les étudiants étrangers deviennent plus «conscients» qu’ils pourraient éventuellement faire l’objet de fraude, et les encourage à dénoncer.

«Le programme des étudiants étrangers est un avantage incroyable pour le Canada, mais sa réputation dépend de notre capacité à défendre son intégrité», a conclu Sean Fraser.

L’organisme de représentation des communautés anglophones du Québec, le Quebec Community Groups Network (QCGN), souhaite voir le projet de loi C-13 amendé et espère une analyse juridique plus rigoureuse. 

«Jusqu’à présent, nous avons toujours espéré que le gouvernement fédéral soit notre protecteur, nous soutienne en tant que communauté linguistique minoritaire, et nous nous sentons trahis», déclare Eva Ludvig, présidente de QCGN. 

Eva Ludvig, présidente de QCGN, sent avoir perdu le soutien d’Ottawa. 

Photo : Courtoisie QCGN

Dans son document d’information présenté devant le Comité permanent des langues officielles le 5 juin, l’organisme indique être profondément préoccupé «par les effets du projet de loi C-13 sur la communauté anglophone du Québec et par l’asymétrie accrue par rapport au Québec dans la fédération canadienne».

Eva Ludvig assure que sa déception porte surtout sur les risques perçus que présente C-13 pour les anglophones du Québec, et non face aux gains des francophones : «Nous comprenons [que les francophones] veulent que cette loi soit adoptée parce qu’elle apporte beaucoup de bonnes choses.»

«Je sais qu’il y a un grand besoin parmi les communautés francophones. […] Nous comprenons et soutenons cela, assure-t-elle. Notre préoccupation est donc de savoir ce qui nous arrive ici au Québec, où nous vivons une réalité totalement différente en tant que communauté linguistique minoritaire.»

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Source : Commissariat aux langues officielles

La Charte de la langue française inquiète

«Ce que nous craignons, c’est de perdre parce que le gouvernement fédéral jouera, au Québec, selon les règles du gouvernement québécois», explique Eva Ludvig. 

La référence à la Charte de la langue française du Québec, amendée par la Loi 96, dans le projet de loi C-13, inquiète la présidente de QCGN.

«Nous comprenons que les communautés francophones n’obtiennent souvent pas de services en français à l’extérieur du Québec, souvent parce que les services ne sont pas disponibles, mais il n’y a pas de loi qui empêche les francophones d’obtenir des services s’ils sont disponibles. [Au Québec], ce n’est pas une question d’accessibilité, c’est une question d’éligibilité.»

Eva Ludvig craint surtout l’interprétation juridique qui pourrait en être faite de la loi, une fois adoptée.

Selon François Larocque de l’Université d’Ottawa, la référence générique à la Charte n’effacera pas plus de 40 ans de jurisprudence. 

Photo : Valérie Charbonneau

François Larocque, titulaire de la Chaire de recherche, Droits et enjeux linguistiques de l’Université d’Ottawa, est convaincu que «la référence générique à la Charte n’effacera pas plus de 40 ans de jurisprudence […]. Des principes d’interprétation ont été établis et ne disparaitront pas [à cause de la mention].»

«Ce n’est pas comme si on vient d’adopter, en droit fédéral, l’ensemble du droit québécois sur la langue française. La LLO ne fait que reconnaitre l’existence de ce régime linguistique parmi d’autres régimes provinciaux», précise-t-il.

Dans un courriel à Francopresse, le bureau de la ministre des Langues officielles affirme entendre les préoccupations de certains anglophones du Québec et assure que «C-13 ne diminue en rien la protection des droits des Québécois d’expression anglaise. Le gouvernement fédéral sera toujours aux côtés des communautés de langue officielle en situation minoritaire pour protéger leurs droits constitutionnels, au Québec et [ailleurs].»

Comme C-13 est une loi fédérale où prime la Constitution et comme la mention de la Charte de la langue française est générique, François Larocque ne voit pas comment les droits acquis des anglophones pourraient être limités.

«S’il y a une diminution dans l’offre des services provinciaux à la communauté anglo-québécoise, le blâme et la faute résideront au Québec. La loi fédérale ne prévoit aucunement une diminution des services aux Anglo-Québécois», précise-t-il.

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Un «conflit artificiel» entre francophones et anglophones

Si QCGN espère une analyse juridique plus approfondie du projet par le Sénat, sa présidente veut être claire : «ce n’est pas pour aller à l’encontre des francophones». 

C-13 a donné lieu à «un conflit artificiel entre francophones et anglophones. Ce n’est pas du tout le problème et nous ne voulons pas non plus que cela soit perçu comme tel», indique Eva Ludvig.

Elle précise que les anglophones du Québec veulent être traités équitablement et que la différence des besoins de chacune des communautés doit être reconnue.

«On n’enlève pas à l’un pour donner à l’autre. On aide l’autre à atteindre la même chose.»

La question de l’asymétrie

Selon François Larocque, C-13 introduit l’idée d’asymétrie dans la Loi sur les langues officielles (LLO), mais n’enlève rien aux anglophones du Québec. «Ça veut dire que le fédéral va consentir des investissements nouveaux et plus importants que ceux consentis par le passé pour faire la protection et la promotion du français au Canada dans tous les domaines qui relèvent du fédéral», explique-t-il en précisant que le projet de loi ne diminue aucunement les investissements destinés aux anglophones du Québec.

«Pour réaliser l’égalité réelle, et non formelle, il faut en faire davantage pour la partie la plus vulnérable», souligne-t-il.

Ginette Petitpas Taylor, ministre des Langues officielles, assure qu’elle continuera d’appuyer la communauté anglophone du Québec. 

Photo : Inès Lombardo-Francopresse

Pour la présidente de QCGN, l’asymétrie ne tient pas bien compte de la réalité anglo-québécoise : «La langue anglaise n’est pas menacée en Amérique du Nord. […] Cependant, nous vivons dans la province du Québec où la langue française est majoritaire et où nous sommes la minorité.»

«On parle peut-être l’anglais comme nos amis de Toronto, même si nous le parlons un peu différemment, mais on travaille au Québec, on joue au Québec, on magasine au Québec. C’est notre vie ici et nous y sommes depuis des centaines d’années.»

Eva Ludvig consent que la communauté anglophone du Québec a été économiquement dominante à une certaine époque. «Mais cette communauté a changé, précise-t-elle Si l’on regarde les chiffres actuels, on constate que le taux de chômage est supérieur de 4 % chez les anglophones.»

Le bureau de la ministre Petitpas Taylor tient à rappeler que son nouveau Plan d’action pour les langues officielles (2023-2028) inclut «des ressources supplémentaires en matière de services à l’emploi pour les Québécois d’expression anglaise, en plus des investissements pour l’apprentissage du français comme langue seconde».   

Après plus de 20 ans, le temps était venu pour l’Association des groupes en arts visuels francophones (AGAVF) de faire une mise à jour sur l’évolution du secteur au Canada.

Elise Anne LaPlante, codirectrice générale de l’Association des groupes en arts visuels francophones (AGAVF), soutient que «faire valoir la valeur langagière» des arts visuels demeure un grand défi.

Photo : AGAVF

«Ça devient un outil […] du côté de la représentation ou du positionnement politique, mais aussi auprès des bailleurs de fonds. C’est une manière de montrer la réalité, de soutenir nos argumentaires quand nous ou nos membres faisons des demandes de subvention», explique Elise Anne LaPlante, codirectrice générale de l’AGAVF.

Selon elle, «faire valoir la valeur langagière» des arts visuels demeure un grand défi, notamment auprès des bailleurs de fonds. «Travailler dans sa langue, réseauter, le sentiment d’appartenance à nos communautés francophones : tout ça a un impact.»

Consultante indépendante et travailleuse culturelle, Anne Bertrand a participé à la réalisation de cette étude. Elle rapporte que les artistes «ont souligné l’importance de la langue dans la création. Ils veulent travailler et créer en français […] ça contribue à l’identité qui est au cœur de la création et de la production».

Le rapport souligne que les artistes visuels de la francophonie minoritaires ont peu accès à des espaces de travail commun où ils peuvent notamment partager de l’équipement et des connaissances. Ces endroits renforcent l’identité culturelle des artistes selon le document.

«Les gens dans les centres d’artistes autogérés se retrouvent en communauté, se retrouvent partie prenante de la vie démocratique, sociale et politique d’un organisme, et ça se passe dans la langue française, ajoute-t-elle. C’est important pour la vitalité de la communauté.»

Manque de structure d’appui

Parmi les constats les plus probants de l’étude de l’AGAVF, Anne Bertrand note un grand «manque de structures d’appui». Celles-ci incluent, entre autres, les structures de formation à tous les niveaux, les associations professionnelles et les regroupements.

Anne Bertrand, consultante indépendante et travailleuse culturelle, souligne l’importance de pouvoir créer dans sa langue maternelle.

Photo : Courtoisie

À l’exception de l’Ontario, dans les provinces et territoires, il n’existe aucune structure d’appui francophone à but non lucratif spécialisée en arts visuels. Par manque de ressources, les conseils culturels et regroupements n’arrivent pas toujours à répondre à leurs besoins.

À l’échelle nationale, l’AGAVF est le seul organisme de services aux arts qui représente et défend les intérêts des arts visuels en francophonie minoritaire. L’étude note qu’«en l’absence d’institutions muséales, les commissaires indépendant·e·s jouent un rôle clé dans la reconnaissance des artistes en arts visuels des CFSM».

«Pour rayonner en français, en plus du réseau des espaces de diffusion de l’AGAVF, l’artiste devra se tourner vers les galeries communautaires, dont certaines offrent désormais de bonnes conditions d’exposition, ou encore, se tourner vers les réseaux de diffusion professionnels des groupes de la majorité au Canada et au Québec, et même à l’international», rapporte le document.

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Malgré l’amélioration des conditions offertes par les galeries, «il reste que c’est insuffisant pour réellement soutenir les pratiques», défend Elise Anne LaPlante.

Couverture médiatique

«Les artistes des CFSM font l’objet d’une couverture médiatique locale enviable si on la compare à celle des artistes en arts visuels de Montréal», affirment les chercheurs dans l’étude tout en reconnaissant qu’il est difficile de rejoindre les médias nationaux.

Les participants à l’étude soulignent en outre «avoir fait l’objet d’articles dans les journaux hebdomadaires francophones comme L’Aquilon (YK), Le Gaboteur (TNL), Le Franco (AB), L’Eau vive (SK), La Liberté (MB), Le Voyageur et La voix du Nord (ON), et dans les quotidiens dont Le Droit (Ottawa/Gatineau) et l’Acadie Nouvelle (NB).»

Plus d’artistes, peu de formation

Le rapport de l’AGAVF souligne le manque d’accès à la formation en français en arts visuels dans la francophonie minoritaire.

L’Université de Moncton et l’Université d’Ottawa offrent des programmes de premier cycle en français. La seconde s’est dotée d’un programme de 2e cycle bilingue, seule nouveauté depuis 2001, à l’exception de quelques formations temporaires offertes par l’AGAVF au fil des ans.

Aujourd’hui, toutes formations confondues, 43 % des artistes ont suivi leur formation en français, 30 % en anglais et 27 % dans les deux langues, selon l’étude.

Certains ont reçu leur formation dans une école d’art privée, un centre communautaire, un regroupement national, un regroupement régional ou en ligne.

Le document souligne toutefois les inconvénients pour les artistes francophones d’être formés au Québec.

Une fois diplômé·e, au lieu de revenir dans sa communauté, l’artiste aura l’option de poursuivre les débouchés possible au sein de sa nouvelle communauté, contribuant à l’érosion du bassin artistique déjà fragile de sa communauté d’origine.

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Baisse des revenus

«Au chapitre des revenus, dans l’ensemble, on constate une légère diminution depuis 2001», indique le rapport. Les sources de revenus des artistes proviennent principalement des subventions que des ventes d’œuvres. Ce qui s’explique notamment, selon les auteurs, par le peu de représentation dans les galeries privées.

Les artistes qui ont répondu au sondage lancé par l’AGAVF en prévision de l’étude ont répondu dans une proportion de 46 % que leurs revenus artistiques ne dépassaient pas les 25 000 $ par année. En fait, un peu plus du quart de ce groupe enregistre des revenus artistiques annuels sous la barre des 15 000 $. Les répondants ont affirmé que près de la moitié de leurs revenus annuels provenaient d’activités non reliées aux arts.

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Au palier provincial, selon Anne Bertrand, les bourses de création en arts visuels demeurent très modestes. L’étude rapporte une moyenne variant de 5 000 $ à 18 000 $ dans les CFSM, contre un maximum de 50 000 $ établi par le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ).

Somme toute, sans tirer de conclusion générale, le rapport émet 31 recommandations au secteur pour permettre à tous les acteurs de pouvoir contribuer à la vitalité des arts visuels en français au Canada.

Les sénateurs ont voté lundi soir pour que le projet de loi C-13 soit envoyé en troisième et dernière lecture au Sénat, sans amendement qui supprimerait les références à la Charte de la langue française du Québec. Et sans aucun autre qui mentionne une place pour les langues autochtones.

«Ce n’est pas le bon véhicule», a assuré le sénateur acadien René Cormier, en réponse à l’un des amendements portés par la sénatrice franco-ontarienne Bernadette Clément.

Depuis la semaine dernière, cette dernière demande que C-13 garde une place pour les langues autochtones, pour reconnaitre «qu’il y avait quelque chose avant qu’on arrive».

«Barrières systémiques»

«Je suis une alliée ici, je ne suis pas une Autochtone, mais c’est maintenant qu’on fait ce travail», a-t-elle lancé à ses pairs.

Le sénateur acadien Cormier s’est revendiqué un «allié» des enjeux autochtones, assurant comme les fonctionnaires de Patrimoine canadien que ce n’était pas le bon outil.

Photo : Courtoisie Sénat

Devant l’insistance de sa collègue, le sénateur Cormier a mentionné son «inconfort» : «Je ne veux certainement pas envoyer le message que les langues autochtones sont moins importantes que le français ou l’anglais en milieu minoritaire. […] Je crois que la Loi sur les langues officielles n’est pas le véhicule pour faire avancer cette question. Bien qu’imparfaite, la Loi sur les langues autochtones permettrait de faire un travail de fond.»

Appuyé par les fonctionnaires de Patrimoine canadien présents pour la séance, l’argument du sénateur Cormier a convaincu les autres membres du comité, à l’exception des sénatrices Bernadette Clément et Michèle Audette.

«Quand on dit que la question autochtone ne doit pas se retrouver dans ce projet de loi, mais qu’on dit qu’on doit avoir des Autochtones dans des postes importants dans la fonction publique, là on les a, les barrières systémiques», a insisté la sénatrice Audette, qui a assuré qu’un travail aurait dû être fait de la part de «tout le monde ensemble depuis le départ».

Cette dernière, Innue et Québécoise, a elle aussi tenté de faire reconnaitre sans succès dans C-13 la conformité et l’application de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, notamment dans son article 13, afin que les Autochtones puissent conserver leurs droits et langues.

Article 13 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones

  1. Les peuples autochtones ont le droit de revivifier, d’utiliser, de développer et de transmettre aux générations futures leur histoire, leur langue, leurs traditions orales, leur philosophie, leur système d’écriture et leur littérature, ainsi que de choisir et de conserver leurs propres noms pour les communautés, les lieux et les personnes.
  2. Les États prennent des mesures efficaces pour protéger ce droit et faire en sorte que les peuples autochtones puissent comprendre et être compris dans les procédures politiques, juridiques et administratives, en fournissant, si nécessaire, des services d’interprétation ou d’autres moyens appropriés.

Source : Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones

«Je ne peux plus apprendre ma langue»

Michèle Audette a témoigné de la difficulté des Autochtones de faire valoir leurs droits à leurs langues, dans un contexte où le gouvernement fédéral assure qu’un travail est fait pour les inclure davantage, notamment dans des postes influents.

Prise d’une vive émotion, elle a déploré que le «filtre» de la Déclaration des Nations Unies et de la Loi canadienne sur cette Déclaration n’avait pas été passé sur le projet de loi C-13 afin de reconnaitre l’existence des langues autochtones.

Ça vient me chercher. Je ne peux pas apprendre ma langue à cause de ces lois-là. Je suis la génération qui a coupé complètement!

— Michèle Audette

Pour la sénatrice Audette, la reconnaissance de la Déclaration des Nations Unies dans d’autres lois canadiennes donne des outils juridiques pour avoir accès à l’apprentissage des langues autochtones.

«Il y a un vide»

La sénatrice a aussi attiré l’attention sur le fait que Patrimoine canadien refusait de traduire les communiqués de presse dans les langues autochtones, et que le commissaire aux langues autochtones rejetait la responsabilité sur le commissaire aux langues officielles. «Il y a un vide», a-t-elle souligné.

La sénatrice Bernadette Clément a travaillé pour l’ajout de plusieurs amendements faisant référence aux langues autochtones.

Photo : Courtoisie Sénat

Sensibles à sa position, les fonctionnaires n’en sont pas moins restés sur l’interprétation de la loi, assurant que celle sur les langues autochtones serait le meilleur outil, notamment pour inclure les langues autochtones dans la fonction publique, qui était un amendement de la sénatrice franco-ontarienne, Bernadette Clément.

«L’identité canadienne ne passe pas par des silos. L’espace pour les langues autochtones devrait être partout, notamment dans la Loi sur les langues officielles», a-t-elle défendu, après le rejet des amendements sur les langues autochtones.

La pression au comité s’est relâchée après la séance, lorsque Michèle Audette a serré les fonctionnaires dans ses bras, en signe d’apaisement. Mais elle n’a pas fait partie des sénateurs en faveur au passage de C-13 en troisième et dernière lecture au Sénat.

En résumé, la politique 713 du Nouveau-Brunswick, entrée en vigueur en aout 2020, établit les exigences minimales afin que les écoles publiques soient des milieux sécuritaires, inclusifs, et favorables à l’affirmation pour tous les élèves 2ELGBTQI+.

Malgré le fait que cette politique est généralement applaudie par les élèves, par une majorité de parents et intervenants du milieu scolaire néobrunswickois, l’administration du gouvernement en place a décidé d’en opérer une révision controversée.

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Droits fondamentaux

Étaient mises en cause dans le cadre de cette révision : les dispositions qui traitent de l’accès aux toilettes sur la base de l’identité de genre, la participation aux sports d’équipe et la permission pour les élèves de moins de 16 ans de changer de prénom et de choisir leurs pronoms préférés sans aucune communication aux parents.

Bien que cette révision pouvait sembler assez inoffensive aux yeux de plusieurs, rappelons-nous que toute remise en question des droits de minorités constitue une menace pour l’intégrité du droit en question. Des droits fondamentaux peuvent être si facilement enlevés que nous ne pouvons les tenir pour acquis, même dans un pays comme le Canada. L’annonce de la nouvelle mouture de la politique 713 qui empêchera les élèves de moins de 16 ans d’utiliser le prénom ou pronom de leur choix à l’école si leurs parents ne l’ont pas autorisé ne fait que confirmer ce constat.

C’est dans ce contexte que nous souhaitons réitérer qu’en plus d’être tenu de respecter son propre cadre législatif en matière de droits de la personne, le gouvernement d’une province est assujetti aux dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés (article 32) sous certaines réserves.

La Charte est on ne peut plus claire à l’effet que tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment fondée sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques (article 15).

La Cour suprême a d’ailleurs été non équivoque à l’effet que l’orientation sexuelle est un motif sur lequel une plainte pour discrimination est fondée (Egan c. Canada). De plus, les tribunaux peuvent déterminer d’autres motifs illicites analogues à ceux énumérés à la Charte, notamment lorsqu’ils visent une caractéristique personnelle qui est immuable.

Un contexte «inquiétant»

En tant que législateurs, nous sommes d’avis que toute démarche législative, règlementaire ou politique devrait en tout temps tendre vers la progression des droits plutôt que de les faire régresser.

En 2020, la politique 713 a été mise en œuvre pour faire exactement cela : s’assurer que les étudiants 2ELGBTQI+ sont en mesure d’apprendre, de vivre et de s’épanouir dans des espaces éducatifs surs et positifs.

La régression des droits des étudiants 2ELGBTQI+ devrait tous nous inquiéter. Nous ne devrions en aucun cas priver les étudiants de leur droit à la non-discrimination et à des environnements d’apprentissage surs.

À notre point de vue, si la révision de la politique 713 se veut sérieuse et légitime, nous estimons qu’elle devrait faire l’objet d’un processus de consultation rigoureux des parties prenantes et le résultat devrait tendre vers le progrès et l’égalité, en conformité avec les impératifs législatifs qui l’imposent.

Considérant ce qui précède et comme la nouvelle mouture de la politique 713 n’entrera en vigueur qu’au 1er juillet 2023, nous ne pouvons qu’espérer comme dénouement positif, une volteface quant à la disposition traitant de l’auto-identification ci-dessus mentionnée.

Alors que le contexte actuel entourant la nouvelle mouture de la politique 713 nous inquiète, tout comme le climat dans lequel s’inscrit la saison de la Fierté 2023, nous souhaitons rappeler qu’il est du devoir de tout un chacun d’œuvrer à rendre notre société plus ouverte et inclusive. Il est de la responsabilité des parlementaires, gouvernements, parents, organismes de la société civile et citoyens, d’être bienveillants, de reconnaitre les réalités des personnes 2ELGBTQI+ et de s’engager dans la progression de leurs droits par des actions concrètes.

Plus sur la francophonie

Le comité sénatorial des langues officielles a fait salle comble lundi soir pour le retour du projet de loi C-13.

Deux visions claires s’y sont affrontées : les francophones en situation minoritaire souhaitent que le projet soit adopté avant le 23 juin, tandis que la minorité anglophone du Québec pousse plutôt pour que les sénateurs «prennent leur temps», afin d’évaluer leur demande de suppression des références à la Charte de la langue française du Québec.

Ces derniers plaident depuis des mois que la mention de la Charte dans C-13 porte un coup à leurs droits. La ministre des Langues officielles, Ginette Petitpas Taylor, a défendu le contraire, assurant que le projet de loi était solide et englobait la protection de toutes les communautés.

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Feux de forêt et «guérilla parlementaire»

Après l’Alberta et la Nouvelle-Écosse, le nord du Québec flambe à son tour depuis la semaine dernière. La Colombie-Britannique, l’Ontario et les Territoires du Nord-Ouest sont également touchés par les incendies de forêt.

En point presse mercredi, le premier ministre Justin Trudeau accompagné de Bill Blair, ministre de la Protection civile, a fait état de plus de 400 incendies toujours actifs à travers le Canada, dont la moitié hors de contrôle, et 40 000 km2 de territoire brulé. C’était toujours le cas jeudi.

Photo : Capture d'écran - Source CIFFC

De fait, 2023 se classe au quatrième rang des pires années en matière de feux de forêt au Canada.

Cette situation compromet la qualité de l’air non seulement au Canada, mais aussi aux États-Unis où près de 75 millions de personnes seraient touchées par des avertissements de pollution de l’air, devenu irrespirable par endroits.

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Le rapporteur spécial indépendant sur l’ingérence étrangère a remis sa démission au premier ministre Justin Trudeau vendredi, en fin de journée. David Johnston quittera officiellement ses fonctions après avoir remis son rapport final, attendu à la fin juin.

L’ancien gouverneur général souligne dans sa lettre que «[…] le climat hautement partisan entourant ma nomination et mon travail» a nui à son objectif «d’aider à accroitre la confiance envers nos institutions démocratiques».

Quelques jours plus tôt, l’ancien gouverneur général avait défendu son poste au Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre. La semaine dernière, les partis d’opposition avaient voté en faveur d’une motion non contraignante pour qu’il quitte ses fonctions.

Le texte, présenté par le NPD, demandait aussi le déclenchement d’une enquête publique, ce qu’exigeaient également les conservateurs et le Bloc québécois. Une demande réfutée par David Johnston dans sa lettre de démission tout comme dans la conclusion de son premier rapport, pour des questions de sécurité nationale, entre autres.

David Johnston encourage le premier ministre à consulter les partis d’opposition pour nommer son successeur.

Selon une source parlementaire, Pierre Poilievre mènerait une «guérilla parlementaire» cette fin de session, à cause de vœux non exaucés.

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Le chef du Parti conservateur, parrain de cette motion, a vu sans surprise les libéraux, le Bloc québécois et le NPD s’unir pour voter contre sa demande de rejet de la taxe carbone mise en place par le gouvernement libéral.

En début de semaine, Pierre Poilievre avait menacé de faire obstruction à l’adoption du budget fédéral, présenté le 28 mars dernier.

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Le chef conservateur avait exigé que libéraux répondent à deux conditions pour éviter cette obstruction : pas de hausse de la taxe carbone et une annonce du fédéral pour faire baisser l’inflation.

Depuis le rejet de la motion, les conservateurs ont déposé plusieurs projets de loi pour ralentir les travaux. Une source au Parlement a qualifié de «guérilla parlementaire» la tactique du chef conservateur, qui a eu pour effet de garder les députés en Chambre jusqu’à minuit mercredi, pour adopter les projets de loi avant la fin de session parlementaire, le 23 juin.

La Banque du Canada a augmenté mercredi son taux directeur de 25 points de base, pour atteindre 4,75 %, le plus haut depuis 2001. En cause : l’inflation élevée et les prêts hypothécaires.

Pour justifier sa position, l’institution a assuré que «sur la base de l’accumulation des données, le Conseil de direction a décidé de relever le taux directeur, jugeant que la politique monétaire n’était pas suffisamment restrictive pour rétablir l’équilibre entre l’offre et la demande et assurer un retour durable à la cible d’inflation de 2 %».

C’est la première fois que la Banque du Canada augmente son taux directeur en six mois : il était à 4,5 % en janvier.

Le ministre de la santé fédéral Jean-Yves Duclos a annoncé le financement de trois projets pour répondre à la pénurie de main-d’œuvre, jeudi.

Photo : Inès Lombardo – Francopresse 

Le ministre de la Santé Jean-Yves Duclos a annoncé jeudi un financement de 78,5 millions de dollars pour appuyer trois nouveaux projets visant à répondre à la pénurie de personnel dans le secteur de la santé.

Une enveloppe de 29 millions permettra au Conseil médical du Canada (CMC) de créer un registre national des médecins pour «améliorer la mobilité des médecins et faciliter leur réemploi en cas de crise», selon le ministre. Deux autres organismes se sont partagé le reste de l’enveloppe.

L’annonce de jeudi ne comporte aucune mesure spécifique pour les francophones. Le ministre a cependant indiqué en conférence de presse que les travailleurs de la santé étrangers pourront profiter des changements pour les professions de la santé et les compétences linguistiques en français annoncées par le ministère de l’Immigration la semaine dernière.  

Jeudi sur la Colline, le premier ministre Justin Trudeau et la ministre de l’Égalité des genres et de la Jeunesse, Marci Ien, étaient entourés de parlementaires et de centaines de membres de la communauté LGBTQIA2+ du pays pour hisser le drapeau de la Fierté sur le Parlement.

«Vous avez votre place ici, vous avez une voix ici, vous êtes respectés et entendus et votre existence n’est pas à débattre, ni maintenant, ni jamais», a martelé Justin Trudeau devant la tour du Parlement. Ce dernier avait déjà marqué les esprits en étant le premier chef d’État canadien à participer à la marche de la Fierté.

La ministre Ien a annoncé qu’une enveloppe de 1,7 million provenant du Plan d’action fédéral 2ELGBTQI+l financera six organisations du pays.

Justin Trudeau a voulu rassurer les membres les plus jeunes de la communauté LGBTQIA2+, malgré la haine qu’il peut y avoir «à la frontière sud du Canada» : «Au Canada, vous pouvez aimer en toute liberté!»

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

«Le silence n’est pas une option! Il faut être solidaires. Nous devons soutenir nos amis de l’Ouganda, du Rwanda […] Il est de notre devoir de prendre la parole!» a clamé René Cormier, sénateur acadien, jeudi devant le Parlement à l’occasion du Mois de la Fierté.

Photo : Inès Lombardo – Francopresse
Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Le drapeau de la fierté flotte désormais sur le Parlement.

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

La ministre de l’Égalité des genres et de la Jeunesse, Marci Ien, a déclaré à la communauté LGBTQIA2+ du Canada : «On vous voit, on vous valorise. Vous aurez toujours une place dans ce pays!» 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

Scott Moe! Selon un sondage Angus Reid [uniquement disponible en anglais], le premier ministre de la Saskatchewan récolte 57 % de cote de popularité, reléguant le Québécois François Legault, auparavant premier, à la troisième place avec 48 %. Tim Houston, à la tête de la Nouvelle-Écosse, se hisse quant à lui à la seconde place du podium.

Les trois derniers sont, dans l’ordre : Doug Ford en l’Ontario, Blaine Higgs, impopulaire chez les francophones au Nouveau-Brunswick, et Heather Stefanson, première ministre du Manitoba, qui ne recueille que 25 % des sondages.

Le premier ministre de la Saskatchewan prend la place que François Legaut occupait lors de la pandémie. Photo : Facebook Scoot Moe

Hormis ces trois derniers, «la plupart [des premiers ministres] obtiennent une évaluation positive de la part d’au moins 40 % de la population de leur province».

Le Canada s’est bâti comme un pays européen, une nouvelle France (et un Québec dont le Code civil est inspiré de celui de la France), puis il a adopté un système reposant sur les mêmes principes que le Royaume-Uni.

Les impératifs de la colonisation et du développement économique capitaliste ont été renforcés par les attitudes que disséminaient les organisations religieuses qui ont participé à la construction du pays.

Le résultat de cette fondation économique et idéologique du pays est l’exclusion de plusieurs formes de vies non seulement de l’espace public, mais aussi de l’espace privé.

Il n’a jamais été suffisant pour les groupes dominants que les membres des communautés 2ELGBTQIA+ gardent leur sexualité dans la chambre à coucher ou que les Premiers Peuples demeurent isolés dans des réserves.

Une répression souvent violente trouvait les membres de ces groupes et nations pour les punir et empêcher qu’ils aient des pratiques jugées contraires à celles du reste de la population – et surtout pour qu’ils se conforment aux normes et à l’ordre que l’on cherchait à imposer.

Cette visée de faire disparaitre les personnes 2ELGBTQIA+ et les Premiers Peuples n’a malheureusement pas été abandonnée par toutes les parties de la population.

Des changements qui tardent à se faire sentir

Ce n’est que très récemment que l’interdiction constitutionnelle de discriminer sur la base de l’orientation sexuelle a été reconnue par la Cour suprême (2006) et qu’une loi protégeant la diversité de genre a été adoptée (2017).

On voit également un désir d’inclusion plus grand au sein de plusieurs organismes, comme au sein de l’Assemblée communautaire fransaskoise.

Toutefois, les avancées ne sont pas acquises pour de bon. Un mouvement homophobe et transphobe plus large a notamment mené des conseils scolaires en Ontario et en Saskatchewan à signaler leur opposition à la reconnaissance des personnes 2ELGBTQIA+.

Et il ne faut pas oublier que l’interdiction de la participation de policiers et policières en uniforme par les comités d’organisation des défilés de la Fierté à Toronto et à Vancouver ces dernières années répond à une histoire de violence et de persécutions policières.

Et la question du racisme autochtone

La Loi sur les Indiens régit la vie seulement des personnes autochtones et demeure toujours en vigueur aujourd’hui, malgré quelques modifications qui ne font que l’adoucir sans éliminer la discrimination envers les femmes qu’elle renferme.

Par ailleurs, les droits que la Constitution devait définir par le biais d’une conférence constitutionnelle – donc une négociation qui reconnaitrait la souveraineté autochtone – n’ont fait l’objet d’une véritable discussion qu’à la Cour Suprême.

Le racisme et la discrimination envers les personnes autochtones demeurent par ailleurs bien ancrés dans la société canadienne. Le sociologue Brieg Capitaine a pu montrer comment ce racisme, tout en se manifestant de plusieurs manières, est lié aux enjeux politiques et économiques.

Le racisme n’est pas seulement une question de préjugés; il permet aussi à la majorité de continuer à exercer un contrôle sur les groupes minorisés et, ici, à empêcher le partage des ressources et la détermination par les Premiers Peuples de leur propre destinée.

Des enjeux démocratiques en commun

Il demeure aujourd’hui difficile pour les personnes 2ELGBTQIA+ et pour les personnes autochtones de participer à la vie politique commune.

— Jérôme Melançon, chroniqueur - Francopresse

Des enjeux démocratiques en commun

Il demeure aujourd’hui difficile pour les personnes 2ELGBTQIA+ et pour les personnes autochtones de participer à la vie politique commune. Peu de personnes appartenant à ces groupes siègent au Parlement. Pourtant, leur présence permet de porter certains des problèmes qui touchent leurs communautés à l’attention du gouvernement.

Il en va de même pour les Autochtones. Les premières femmes autochtones à siéger au Parlement d’une province ont été élues seulement en 2022 au Québec et le mois dernier en Alberta.

Même après avoir remporté une élection, il est difficile pour une personne autochtone d’être en politique. L’ancienne députée fédérale du Nunavut, Mumilaaq Qaqqaq, a expliqué qu’elle avait quitté la vie politique à cause du profilage, du racisme et de la discrimination dont elle a été victime pendant tout son mandat.

Et tandis qu’elle a pu amener une autre perspective au Parlement, la possibilité d’y apporter des changements demeurait limitée.

Ainsi, l’élection de membres des communautés 2ELGBTQIA+ et des nations autochtones ne signifie pas que les intérêts de ces groupes seront représentés. Il faut encore que ces personnes puissent porter la voix de leur communauté ou nation et puissent en mettre les intérêts devant certaines questions chères à leur parti, que leur parti soit enclin à les écouter, et que les plateformes incluent des politiques favorisant l’égalité.

Autodétermination et fierté

Plusieurs des enjeux propres aux communautés de la diversité sexuelle et de genre diffèrent de ceux au centre des préoccupations des Premiers Peuples. Mais de part et d’autre, au cœur des revendications se trouvent le désir et le droit à l’autodétermination et à la fierté.

La Fédération des nations autochtones souveraines a récemment affirmé que la fierté d’être soi-même et d’appartenir à une communauté est un enjeu commun aux deux groupes et que ce sentiment est nécessaire à la contribution de chaque personne à ses communautés d’appartenance.

La fierté n’est pas, ou pas seulement, une question d’identité. En termes politiques, elle est plutôt liée au sentiment d’être respecté·e tant par ses droits que par le traitement réservé par autrui.

Elle se ressent aussi par le sentiment de compter pour l’autre, qui passe par le droit et la possibilité pour une personne non seulement d’apparaitre dans l’espace public et d’être entendue et prise en compte, mais aussi de pouvoir y demeurer en vie, comme l’a montré le mouvement Black Lives Matter.

La question de l’autodétermination se pose alors de manière individuelle et collective.

Au niveau individuel, il s’agit de pouvoir prendre ses propres décisions et de participer pleinement aux décisions collectives.

Et au niveau collectif, à plus forte raison pour les Premiers Peuples, ce pouvoir de décision renvoie à la capacité de vivre selon ses propres lois et structures politiques – ensemble, avec ceux et celles qui désirent vivre comme soi, et sans ceux et celles qui empêchent cette forme de vie.

Notice biographique

Jérôme Melançon est professeur agrégé en études francophones et interculturelles ainsi qu’en philosophie à l’Université de Regina. Ses recherches portent notamment sur la réconciliation, l’autochtonisation des universités et les relations entre peuples autochtones et non autochtones, sur les communautés francophones en situation minoritaire et plus largement sur les problèmes liés à la coexistence. Il est l’auteur et le directeur de nombreux travaux sur le philosophe Maurice Merleau-Ponty, dont «La politique dans l’adversité. Merleau-Ponty aux marges de la philosophie» (Metispresses, 2018).

Lindsay Tremblay Cr. Courtoisie : Lindsay Tremblay, directrice générale de l’Association des théâtres francophones du Canada (ATFC), craint que le théâtre francophone «soit en déclin dans les prochaines années». 

Photo : Courtoisie

Pour Lindsay Tremblay, directrice générale de l’Association des théâtres francophones du Canada (ATFC), la situation est plutôt bonne, «pour l’instant» : «Nos compagnies ont accès à des fonds de relance qui leur donnent un immense coup de main.»

«Le problème, c’est qu’il n’y a pas de fonds de relance annoncés pour la prochaine année», nuance-t-elle.

«J’ai vraiment peur que ce soit en déclin dans les prochaines années, confie-t-elle. Pas parce qu’il n’y a pas d’offres [ou] de bonnes idées, de bonnes visions artistiques. C’est vraiment au niveau des capacités financières et opérationnelles des compagnies qui ne pourront pas suivre la demande artistique des communautés. J’espère qu’il y aura d’autres annonces.»

Selon elle, un manque de financement dans le théâtre se traduit par une diminution du nombre de projets qui sont montés, mais aussi mène à des coupures de postes. «Ça affecte tout ce qui est offre culturelle francophone dans une ville qui vit en situation minoritaire.»

«Si tout le monde est obligé de réduire, comment est-ce qu’on veut contribuer au développement de la francophonie?, s’interroge la directrice générale. Les compagnies jouent un rôle identitaire et de développement de la langue très important.»

De nouveaux défis

«Ce qui est de plus en plus difficile, ce sont les conditions de tournée. L’accès au financement des tournées n’est pas évident, lance Lindsay Tremblay. Les bailleurs de fonds n’arrivent pas à suivre le cout de la vie.»

Lindsay Tremblay souligne que les conditions de tournée sont de plus en plus difficiles pour les artistes. Les compagnies de théâtre et les producteurs éprouvent parfois de la difficulté à accéder à du financement pour faire circuler un spectacle parce que «les bailleurs de fonds n’arrivent pas à suivre le cout de la vie», précise-t-elle.

«Depuis la pandémie, […] les gens veulent leur propre chambre, pis c’est correct, ils ont raison. Ça coute plus cher per diem parce qu’avoir un hôtel à 90 $ la nuit, ça n’existe plus nulle part. Manger pour 50 $ par jour tes trois repas, ça n’existe pas non plus.»

La pandémie aurait aussi changé le comportement du public. «Les salles se remplissent, mais à la dernière minute, remarque Lindsay Tremblay. Pour tout ce qui est des abonnés, on a vu une baisse importante, évidemment pendant la pandémie, mais les gens ne reviennent pas […] Leur fidélisation n’est pas la même qu’avant.»

La baisse des abonnements, qui assurent une certaine de garantie aux compagnies, «ajoute un stress à l’équipe», se désole la directrice générale de l’ATFC.

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Joël Beddows est professeur de théâtre à l’Université d’Ottawa. 

Photo : Maude Chauvin

Pour Joël Beddows, professeur de théâtre à l’Université d’Ottawa, «un savoir-faire a été perdu» quant au développement de publics : «[Certains disent] “je crée une ou deux fois et je cherche à vendre mon show. Je veux tourner, et je laisse ce travail de mise en rapport avec le public à d’autres”, comme si ça avait quelque chose d’un peu vulgaire.»

Le professeur a aussi l’impression «que les directions artistiques sont plus intéressées parfois par faire venir des spectacles d’ailleurs que de créer des spectacles». Pourtant, selon son expérience à la direction du Théâtre la Catapulte, les créations locales attirent plus de spectateurs.

La disparition du théâtre jeune public est l’une des causes potentielles des difficultés de fidélisation des publics.

«Il y avait un temps où on faisait beaucoup [de théâtre pour les jeunes], ce qui a été essentiel à maintenir et à créer un public. Là, il y a beaucoup de compagnies qui en font moins. Il faudrait deux fois plus de théâtre jeune public que de théâtre pour adultes», ajoute le chercheur.

Manque de formation

Pour la directrice générale de l’Association des théâtres francophones du Canada (ATFC) Lindsay Tremblay, il y a un manque d’offres de formation francophone en théâtre.

Après la disparition du programme en la matière de l’Université Laurentienne de Sudbury, seules l’Université de Moncton et l’Université d’Ottawa proposent aujourd’hui des études en théâtre dans la francophonie minoritaire.

«Il faut que [les étudiants suivent] une formation en anglais […] ou ils doivent s’expatrier, à l’Université d’Ottawa ou au Québec, et après on espère qu’ils vont revenir», précise-t-elle.

Dans un tel contexte, l’ATFC essaie d’offrir de la formation continue aux artistes, comme les stages qui ont eu lieu au Centre des arts de Banff, en Alberta pendant dix ans.

S’il manque de programmes de formation d’interprètes des arts de la scène, Lindsay Tremblay remarque que la situation est encore pire pour les techniciens et autres artisans du théâtre, mais aussi pour l’administration des arts, où «il n’y en a pas pantoute» de formation.

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Les jeunes et le théâtre

Également conseiller spécial en francophonie au décanat de la Faculté des arts de l’Université d’Ottawa, Joël Beddows déplore le manque d’exposition des jeunes au théâtre francophone : «Un show par année, par groupe d’âge, ce n’est pas assez.»

Tibor Egervari, professeur émérite de théâtre à l’Université d’Ottawa, insiste sur l’importance de la rencontre entre les jeunes et le théâtre. 

Photo : Courtoisie

«Le théâtre, c’est quand tu le fréquentes souvent que ça prend un sens. Mais tu dois composer avec le réseau scolaire, les enseignants, les autobus et il y a des gens qui ne veulent pas faire ça», rapporte le professeur.

Le théâtre étant beaucoup moins accessible que la musique ou le cinéma, il «est à peu près le seul domaine où on peut arriver à l’âge adulte sans ne l’avoir jamais affronté, confronté, absorbé», rappelle Tibor Egervari, professeur émérite de théâtre à l’Université d’Ottawa.

Cela est d’autant plus vrai en situation linguistique minoritaire : «Si vous êtes minoritaire, même dans un environnement urbain, il y a des chances que vous ne voyiez jamais de spectacle dans votre langue au théâtre», regrette le professeur.

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«Le théâtre est une rencontre, dit-il. Ce n’est pas simplement d’absorber quelque chose, c’est de participer à une sorte de cérémonie, et il faut qu’on arrive à instiller chez les personnes que c’est un plaisir.»

IRCC a indiqué que le chemin Roxham concentrait «90 % des entrées irrégulières au Canada».

Photo : Inès Lombardo - Francopresse

Au fil de ses 13 recommandations, le rapport du Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration (CIMM) est clair : il faut durcir la politique pour les personnes qui passent la frontière canadienne aux points d’entrée irréguliers.

Le rapport appelle ainsi le gouvernement à «moderniser» l’Entente sur les tiers pays sûrs (ETPS), sans fermer le chemin Roxham. Le rapport a été basé sur une étude menée en automne 2022, soit avant l’accord entre le Canada et les États-Unis de fermer les points de passage non officiels à l’immigration irrégulière.

Plusieurs experts qui ont témoigné devant le Comité avaient prévenu que la fermeture du chemin Roxham aurait pour effet un «[accroissement] des risques pour les demandeurs d’asile, qui contourneraient probablement les barricades et emprunteraient plutôt d’autres itinéraires dangereux». Ce dont convenait à l’époque Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC).

Le gouvernement fédéral a tout de même fermé le chemin Roxham le 25 mars dernier, à travers un élargissement de l’Entente aux points de passage irréguliers de la frontière avec les États-Unis.

Entente sur les tiers pays sûrs (ETPS)

L’Entente, qui vise les demandeurs d’asile les oblige à présenter leur demande «dans le premier pays sûr où ils arrivent, à moins d’être visés par une exception prévue par l’Entente».

L’Entente a pour mission de répartir et protéger les réfugiés qui tentent d’immigrer au Canada, souvent pour des questions de sécurité. Seuls les États-Unis ont été désignés comme tiers pays sûr par le Canada en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

Conclue entre les États-Unis et le Canada en 2004, l’Entente est actuellement devant la Cour suprême du Canada, car elle est considérée comme une violation à la Charte canadienne des droits et libertés, notamment son article 7, qui garantit «le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne».

Des chiffres à la baisse

Selon la professeure Luisa Veronis, la suspension de l’Entente aurait permis aux personnes qui veulent traverser la frontière de le faire où elles le souhaitent. Ce n’est plus le cas depuis mars dernier.

Photo : Courtoisie

Le rapport n’a pas pu peser dans la décision d’IRCC de passer l’accord avec les États-Unis, puisque l’élargissement de l’Entente est entré en vigueur en mars, tandis que le rapport a été déposé mi-mai.

Déjà en novembre dernier, Christiane Fox, sous-ministre d’IRCC, avait rapporté devant le comité que le chemin Roxham concentrait «90 % des entrées irrégulières au Canada».

Le bureau d’IRCC a affirmé que depuis l’élargissement de l’Entente aux points d’entrée non officiels du Canada, le nombre d’immigrants qui passent la frontière de manière irrégulière a décru.

Les interceptions de ces personnes par la GRC sont passées de 4,173 en mars, à 85 en avril.

Pour Luisa Veronis, professeure agrégée de géographie à l’Université d’Ottawa et spécialiste en immigration canadienne, il est normal que ces chiffres aient diminué, vu le changement annoncé en mars.

Mais impossible d’avoir les chiffres véritables : «Le Canada n’intercepte pas tous les immigrants qui passent tous les points de la frontière de façon irrégulière», nuance-t-elle.

Le Bloc québécois et le NPD en désaccord avec le rapport

Selon Jennifer Lopes, anthropologue à l’Université d’Ottawa, le rapport présente des contradictions, dont une majeure : la mise en avant des conditions inhumaines causées par l’Entente sur les tiers pays sûrs.

La professeure de l’Université d’Ottawa Jennifer Lopes, anthropologue, voit un «paradoxe» dans le fait de durcir la frontière à l’immigration irrégulière tout en se préoccupant des conditions d’accueil des demandeurs d’asile aux États-Unis.

Photo : Courtoisie

«Mais [en parallèle] on va tenter de justifier le renforcement de ce cadre législatif. On souligne la sécurité des migrants, que cette entente est là pour les protéger alors que de l’autre côté, les conditions vont se dégrader de plus en plus avec la fermeture du chemin Roxham.»

C’est aussi l’avis du Bloc québécois et du NPD qui ont chacun rédigé un rapport dissident en réaction à celui du Comité.

Les deux partis, notamment le NPD, mettent de l’avant leurs inquiétudes sur les conditions dans lesquelles les personnes traversent la frontière.

«Le fait que le rapport du Comité ne reflète pas une telle recommandation illustre clairement le fait que la majorité des membres ont des préjugés préexistants», conclut le NPD dans son rapport.

«Le rapport [officiel] ne reflète pas du tout les témoignages qui ont été entendus en comité», laisse tomber de son côté Alexis Brunelle-Duceppe, membre du Bloc québécois au Comité.

Le gouvernement fédéral sourd aux demandes de levée de l’Entente

Par ailleurs, dans le rapport du Comité, plusieurs témoins d’organismes d’aide aux immigrants réguliers ou irréguliers plaident pour une levée de l’Entente. Ce à quoi le gouvernement n’a jamais entendu accéder, vu qu’il avait déjà conclu l’élargissement de l’Entente en février 2022, un an avant son entrée en vigueur.

À quelques recommandations près, les deux partis d’opposition souhaitent également suspendre l’Entente.

Les personnes venant au Canada par les États-Unis pouvaient alors faire une demande d’asile et vice-versa. C’était le cas avant que l’Entente ne soit signée, c’est conforme avec le droit international de la Convention de Genève de 1951 référant aux réfugiés, de laquelle le Canada et les États-Unis sont signataires.

— Luisa Veronis, professeure à l’Université d’Ottawa

Le Bloc québécois et le NPD demandent également qu’IRCC et l’Agence des services frontaliers du Canada émettent un permis de travail et des documents de demandeur d’asile aux migrants réguliers ou irréguliers sans différence, tout en réduisant les délais.

De leur côté, les conservateurs assurent dans le rapport être «d’accord avec toutes les recommandations», sauf une demande liée à la livraison de documents aux demandeurs d’asile.