le Lundi 15 septembre 2025

Le journal britannique The Guardian publiait récemment une série d’articles qui interrogeait les leadeurs du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) par rapport à leur vision de l’avenir.

La plupart d’entre eux (77 %) croient que, dans l’état actuel des choses, nous ne parviendrons pas à limiter le réchauffement climatique à moins de 2,5 °C par rapport à l’époque préindustrielle (av. 1850). Parmi les répondants au sondage du Guardian, 40 % prévoient un réchauffement au-dessus de 3 °C.

Rappelons que l’accord de Paris visait à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C.

Ces résultats devraient tous nous alarmer profondément. Ces scientifiques sont à l’avant-plan de la recherche en matière de changement climatique. Ils savent que ce qu’ils prévoient correspond à un monde semi-dystopique, où les enfants d’aujourd’hui seront témoins de transformations difficiles à imaginer au cours de leur vie.

Les modèles prédisent qu’un réchauffement climatique de 3 °C d’ici 2100 entrainera le déplacement de milliards de personnes, la fonte totale de la calotte glacière arctique, une hausse du niveau des mers de plus de 1,5 m, l’augmentation par un facteur de 100 des évènements météo extrêmes, la déstabilisation majeure des capacités de production agroalimentaire, la disparition complète de la forêt amazonienne, une extinction de masse des espèces animales, etc.

Les feux de forêt précoces et répandus que nous connaissons depuis quelques années au Canada ne sont que la pointe de l’iceberg des catastrophes à venir.

Une récente étude publiée par le très sérieux National Bureau of Economic Research évalue que chaque degré d’augmentation de la température moyenne entrainera une contraction de 10 à 12 % du PIB mondial.

Dans un scénario à 3 °C, c’est une contraction de 31 % du PIB mondial qui est prévue. C’est énorme! C’est l’équivalent pour un pays de financer le cout d’une guerre comme celle en Ukraine, tous les ans, pour toujours.

Dans ce scénario, le cout réel d’une tonne de carbone devrait être de 1439 $ CA. En ce moment, le cout de la tarification carbone au Canada est de 80 $ la tonne! On est loin du compte…

Le Canada est dépendant du pétrole

Le Canada est loin, très loin de faire sa part pour limiter les changements climatiques. Nous ne sommes pas en voie d’atteindre nos objectifs, déjà modestes, de réduire de 40 % les émissions de carbone par rapport à 2005. Ces objectifs sont insuffisants pour atteindre nos engagements de l’accord de Paris.

L’exploitation du pétrole fait du Canada un des pays les plus riches, mais aussi un des plus grands pollueurs. 

Photo : David Thielen – Unsplash

Si tous les pays émettaient du carbone à la même intensité que le Canada, le réchauffement climatique atteindrait 4 °C d’ici la fin de la décennie. Nous serions alors dans la zone la plus catastrophique imaginée par les modèles, celle d’un déclin de la population humaine.

Le Canada arrive au deuxième rang des émetteurs de gaz à effet de serre par personne au monde, juste derrière l’Arabie saoudite. Chacun de nous émettons trois fois plus de carbone que l’humain moyen et six fois plus qu’un citoyen d’un pays en développement. 

Ce bilan carbone peu enviable n’est pas principalement causé par nos habitudes de vie. Oui, nous voyageons trop en automobile ou en avion et nous mangeons trop de viande rouge ou de produits importés. En fait, nous consommons trop en général, mais ce n’est pas le cœur du problème. 

Le Canada est un pétro-État dépendant économiquement de l’exploitation pétrolière et gazière. C’est là, de loin, la principale source d’émission carbone au pays. Ce secteur à lui seul représente près du tiers de toutes les émissions de gaz à effet de serre au pays, 10 fois plus que tout le transport par automobile.

Pourtant, on nous présente l’électrification des transports individuels comme une panacée sans jamais parler sérieusement de mettre fin à l’extraction pétrolière.

Se sevrer de l’apport économique de cette industrie représente un défi immense, tant pour le gouvernement fédéral que pour les provinces ou les travailleurs qui en dépendent. C’est pourtant le sacrifice qu’il faudra faire dans les prochaines années pour faire notre part et limiter les répercussions de la catastrophe à venir pour nos enfants et nos petits-enfants.

Que faire?

Que pouvons-nous faire devant un constat si alarmant? Nous avons souvent comme réflexe de nous en remettre à des gestes individuels pour limiter notre empreinte carbone. Il faut continuer de se questionner sur nos habitudes de vie et tenter de consommer avec modération et différemment.

Mais selon les scientifiques du GIEC, le principal geste pour faire pencher la balance consiste à élire des gouvernements qui appuient l’implantation de mesures environnementales importantes, dans les pays où cela est possible.

Trop de politiciens hésitent à imposer des mesures qui peuvent avoir un effet conséquent sur les émissions de gaz à effet de serre parce qu’ils redoutent l’opprobre populaire.

Le parti libéral n’a pas un plan assez ambitieux pour éviter la crise. Le parti conservateur n’en a pas — du moins pour l’instant. Mais même quelqu’un comme Pierre Poilievre, qui est d’abord un populiste et un démagogue, mettrait de l’avant des mesures pour limiter les émissions de gaz à effet de serre s’il sentait une demande en ce sens de la population. 

Ce futur dystopique n’est pas une fatalité. Chaque dixième de degré de réchauffement en moins changera le cours des choses pour les plus jeunes. Agissons maintenant, car retarder nos actions imposera un cout encore plus grand à ceux qui viendront après nous. 

Le 8 mai dernier, le ministre des Langues officielles, Randy Boissonnault, a voulu appuyer son collègue libéral Francis Drouin qui a traité deux témoins de «plein de marde», lors d’une réunion du Comité permanent des langues officielles.

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Boissonnault, qui s’identifie comme Franco-Albertain, a contesté l’idée selon laquelle étudier en anglais encourage l’anglicisation, en se basant sur sa propre expérience.

Yves-François Blanchet lors de la conférence de presse du 8 mai. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

«Je ne pense pas parce que quand on a des francophones qui étudient en Alberta, comme moi j’ai fait au Campus Saint-Jean, ça n’a pas francisé la province de l’Alberta. Et si on regarde le nombre d’étudiants qu’on a au Québec, ça n’anglicise pas la province non plus», a-t-il déclaré le 8 mai dernier devant des journalistes.

Quelques heures plus tard, questionné sur cette déclaration du ministre en conférence de presse, Yves-François Blanchet a répliqué que «personne ne pense que d’étudier en français en Alberta va faire en sorte que les gens qui vont sortir de l’université vont travailler en français. Il n’y a personne qui travaille en français en Alberta, à part les profs de français».

Un débat sur les réseaux sociaux

Une journaliste de Francopresse a rapporté les propos du chef bloquiste dans une publication sur X, ce qui a mené à de vives réactions.

Parmi elles se trouvait celle d’Amy Vachon-Chabot, directrice générale adjointe de l’Association canadienne-française de l’Alberta (ACFA), qui citait des chiffres du recensement de 2021 pour affirmer que 25 000 personnes travaillaient en français en Alberta.

Selon Statistique Canada, «en 2021, 21 770 travailleurs et travailleuses résidant dans la province utilisaient le français au moins régulièrement au travail». 30,6 % d’entre eux travaillaient dans les services d’enseignement, laissant environ 70 % aux autres domaines.

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Nathalie Lachance est d’avis qu’il faut davantage informer sur la réalité des francophones en situation minoritaire. 

Photo : Courtoisie ACFA

Toujours sur la plateforme X, Yves-François Blanchet a commenté la réponse une première fois le 9 mai, défendant que son propos «était une image» et que malgré la petite taille des communautés franco-albertaines, elles «n’en sont pas moins légitimes». 

Il est ensuite revenu sur X trois jours plus tard pour ajouter, entre autres, «qu’une personne engagée dans une institution qui promeut le français en Alberta – ce qui est très souhaitable – suggère que tout va bien pour le français hors-Québec a quelque chose de naïf».

Comme la réaction de l’ACFA à cette dernière publication du chef du Bloc québécois dépassait la limite de caractères d’une publication X, l’organisme a écrit une lettre ouverte au chef du Bloc québécois et l’a publiée sur son site.

Le titre de la lettre : Si nous n’osons plus rêver, à quoi bon lutter? Longue vie aux rêveurs de la francophonie.

«Un manque de connaissances»

Dans la lettre, l’ACFA accuse Yves-François Blanchet d’avoir traité leur employée de «naïve». Toutefois, dans sa publication X, c’était plutôt la suggestion que tout va bien pour le français hors Québec que le politicien qualifiait de naïf.

«La réponse de notre employée ne disait pas que tout va bien», rétorque la présidente de l’ACFA, Nathalie Lachance, en entrevue avec Francopresse. «Elle disait qu’on fait des avancées, qu’on continue de travailler fort.»

D’ailleurs, l’ACFA réitère le réalisme dont elle fait preuve dans sa lettre : «Nous sommes conscients qu’il faut être vigilants, car l’assimilation guette.»

La lettre, signée par Mme Lachance, est aussi une réponse aux propos qui circulent depuis la réaction d’Amy Vachon-Chabot sur X.

Sur les réseaux sociaux comme sur la scène politique, l’ACFA témoigne d’une méconnaissance de la réalité franco-albertaine.

Les commentaires qui ont été faits à l’égard de la francophonie albertaine étaient déplacés. Je crois qu’ils reflétaient un manque de connaissances de ce qui se passe sur le terrain, au quotidien, même au niveau des statistiques.

— Nathalie Lachance

Selon elle, toute cette situation «reflète le besoin de partager plus souvent ce qui se passe à l’extérieur du Québec».

La lettre de l’ACFA rappelle la hausse du nombre de Franco-Albertains depuis 1991 qui a eu lieu en dépit d’une baisse de leur poids démographique. Cependant, selon Statistique Canada, l’Alberta est la seule province de l’Ouest ayant enregistré une diminution du nombre de personnes pouvant soutenir une conversation en français entre 2016 et 2021. 

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Oser rêver

«Vivre en situation francophone minoritaire, c’est notre réalité au quotidien. Nous ne sommes pas naïfs et nous sommes bien au fait des limites de cette réalité. Je ne vous dirai donc pas que c’est toujours facile et automatique, loin de là», écrit Nathalie Lachance dans la lettre.

Nous ne sommes pas naïfs, poursuit-elle. En fait, je crois plutôt que nous osons rêver.

— Nathalie Lachance

En entrevue, elle précise que rêver, «ça parle d’espoir, […] d’imaginer notre futur, de continuer à voir nos enfants et nos petits-enfants dans les écoles francophones, d’avoir de plus en plus d’écosystèmes où nous pouvons parler français, de pouvoir interagir et vivre en français de façon plus régulière».

Si l’assimilation guette, l’ACFA ne baisse pas les bras. Elle a même des raisons de célébrer, car comme mentionné dans sa lettre, l’Alberta est passée de deux écoles francophones en 1984 à 43 écoles francophones en 2024.

En mars dernier, le gouvernement albertain annonçait qu’il allait financer huit nouveaux projets d’école, ce qui ne sera pas chose perdue étant donné que 75 000 enfants sont admissibles à l’éducation francophone en Alberta.

«Si nous n’osons plus rêver, à quoi bon lutter?» questionne encore la présidente dans sa lettre.

Yves-François Blanchet n’était pas disponible pour une entrevue.

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«Que signifierait une fermeture?» Certaines organisations se posent la question sans détour, rapporte Karin Kierstead, responsable des programmes à l’Association des musées de la Nouvelle-Écosse.

Cette réalité s’observe partout au pays, ajoute Robin Etherington, qui a dirigé divers musées de l’Ontario au cours des 30 dernières années. «Notre monde change, et ce n’est pas que la COVID, mais la COVID a exposé les failles.» Elle cite le cycle de vie normal, les désastres, des communautés éprouvées par des changements démographiques, la rotation de personnel.

Si quelques musées ont fermé leurs portes avec la pandémie, plusieurs se sont complètement réinventés. «Ces musées sont ceux qui ont survécu ou qui ont progressé», observe Robin Etherington.

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Un cycle de vie

Il faut se renouveler… ou fermer.

— Lauren Wheeler, directrice des services stratégiques à l’Association des musées de l’Alberta

À quelques jours de son ouverture, le Musée canadien du canot mettait la touche finale à son nouveau site, construit au cout de 45 millions de dollars. 

Photo : Andréanne Joly

«Les gens ne se rendent pas compte du travail que représente un musée», observe Lauren Wheeler, directrice des services stratégiques à l’Association des musées de l’Alberta. 

Selon elle, il y a une expression qui peut annoncer la mort d’un musée : «Nous n’avons jamais fait ça comme ça.»

«Si votre musée a été fondé dans les années 1960, même dans les années 1980 ou 1990, et que vos mission/vision sont les mêmes, ça en dit déjà plus long que le nombre de visites», prévient Lauren Wheeler. «Révisez-les!»

Sur la trame de mouvements sociaux comme les Black Lives Matter et Land Back, les musées ne peuvent faire autrement que de se réinventer, estime Sean Stoughton, coordonnateur du musée régional Ken Seiling à Waterloo, en Ontario, et qui travaille dans les musées d’histoire vivante du sud de l’Ontario depuis 2006. Il faut aujourd’hui des projets plus collaboratifs, plus inclusifs.

Attirer sa communauté

Denis Longchamps est directeur général du Musée canadien de l’argile et du verre, à Waterloo, en Ontario, depuis l’été 2018. À son entrée en poste, il s’est donné le mandat d’augmenter l’affluence du musée en visant, justement, la collaboration et l’inclusion.

Il est allé à la rencontre des municipalités et des organismes culturels de la région pour cerner les occasions de développement. Il s’est fait répondre que son musée devait s’engager davantage dans la communauté.

Pour Carolyn Hyslop, le canot occupe une place de choix dans l’imaginaire et le cœur de la population canadienne. 

Photo : Andréanne Joly

L’équipe a invité des groupes qui fréquentaient peu la galerie, comme la communauté 2ELGBTQI+ et un groupe de femmes musulmanes. «Les projets qu’on fait doivent être inclusifs et s’adresser à un public très large», constate-t-il.

Demeurer en contact avec la collectivité a été salvateur dans bien des situations, remarque de son côté Karin Kierstead.

Elle expose le cas d’un musée de la Nouvelle-Écosse qui a choisi de présenter ouvertement à la communauté ses difficultés. «Des gens se sont présentés, ont discuté et la communauté a trouvé une solution. De nouveaux bénévoles se sont avancés», rapporte-t-elle.

Rebâtir un conseil, s’est se réengager avec la communauté.

— Lauren Wheeler

«Il faut de la passion de la part du personnel et du conseil d’administration», complète Carolyn Hyslop, directrice générale du Musée canadien du canot (MCC), à Peterborough, en Ontario. Elle se considère particulièrement chanceuse, car le canot occupe une place de choix dans l’imaginaire et le cœur de la population canadienne.

«Les gens comprennent l’importance que revêt cette collection pour le pays.» Le Sénat a d’ailleurs reconnu l’importance de la collection du musée, la plus importante collection d’embarcations à pagaie au monde, en 2013.

Cette reconnaissance a facilité la tâche lorsque l’administration a décidé, en 2012-2013, de lancer études et consultations pour vérifier la faisabilité d’un déménagement de l’établissement. Celui-ci est désormais installé dans deux bâtiments industriels modernisés pour accueillir un musée, situé sur une artère commerciale de Peterborough.

C’est grâce à l’attachement à la collection que le MCC a réussi à construire un nouvel édifice sur le bord de l’eau. Pour faire honneur à son thème, mais aussi pour une question de durabilité et de préservation adéquate de la collection. Il en aura couté 45 millions de dollars.

Pour Denis Longchamps, les projets des musées doivent être inclusifs et s’adresser à un public très large. 

Photo : Musée canadien de l’argile et du verre

Attirer des fonds

Peter Elmhirst, qui était membre du comité des finances du MCC à l’époque, se souvient que le conseil avait alors pris une décision difficile. Mais le Musée a réussi à relever le défi d’ouvrir ses portes avec une enveloppe équilibrée après 12 ans de travail, plus tôt ce mois-ci.

«Nous avons entièrement financé nos couts en capital, y compris l’achat du terrain et le développement des nouvelles expositions», un accomplissement énorme, aux yeux de Carolyn Hyslop.

«La bonne santé financière de l’organisation est prépondérante. Pour le fonctionnement d’un musée, ça passe ou ça casse», lâche-t-elle.

Denis Longchamps a consacré beaucoup d’énergie à obtenir plus de financement régional une fois établi à Waterloo.

En novembre, une ouverture s’est faite : la municipalité régionale a ajouté les galeries d’art à la liste des entreprises culturelles admissibles au fonds de financement. «Alors ça pour nous, c’est un important step forward. On ne sait pas ce qu’on va avoir, mais il y a une ouverture», qui aura selon lui des incidences sur le financement courant de l’établissement.

«Si je veux garder mon équipe, il faut que j’aie des salaires qui rencontrent la compétition. Parce que sans ça, tu perds tes employés rapidement», indique le directeur.

Dans l’immédiat, «personne ne travaille dans les musées pour l’argent, mais par passion», relève Sean Stroughton. «Dans les petits musées, on a la faculté de faire beaucoup avec très peu», observe-t-il.

Ce à quoi Robin Etherington ajoute : «Nous devons peut-être prendre du recul et revoir notre modèle d’affaires.»

Plus sur la francophonie

L’avenir du député franco-ontarien Francis Drouin à l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) sera voté le 23 mai. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Une assemblée générale extraordinaire de la section canadienne de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) a été convoquée en réponse à une motion du Bloc québécois afin de discuter de la démission du député Francis Drouin comme président. Le vote sur la motion aura lieu le 23 mai.

Le Franco-Ontarien a fait les manchettes la semaine dernière après avoir traité deux témoins de «plein de marde» lors d’une réunion du Comité permanent des langues officielles. Malgré ses excuses, des députés conservateurs et bloquistes ne sont pas prêts à passer l’éponge.

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Les libéraux, eux, s’empressent de s’inscrire par dizaines comme membres de l’APF. Selon le Journal de Montréal, le nombre d’élus libéraux est passé de 26 à plus d’une centaine en moins d’une semaine.

L’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), de son côté, a affirmé son soutien à Francis Drouin dans une lettre envoyée mercredi au Comité permanent des langues officielles. «Depuis que M. Drouin a été élu, il a été un député disponible, à l’écoute et ayant œuvré pour le bien de la francophonie», peut-on lire dans la lettre dont Francopresse a obtenu copie.

Le ministre des Langues officielles, Randy Boissonnault, sera invité à comparaitre une deuxième fois devant le Comité permanent des langues officielles. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Le même jour, les députés du Comité ont voté à l’unanimité en faveur d’une motion invitant le ministre des Langues officielles, Randy Boissonnault, à comparaitre d’ici la fin de la session parlementaire, prévue en juin.

Celui-ci avait tenté de témoigner dans le cadre de l’étude sur le financement fédéral du postsecondaire que mène actuellement le Comité, mais il n’a jamais pu témoigner en raison des débats sur les propos de M. Drouin tenus trois jours plus tôt.

La troisième édition de Mobilisation franco s’est tenue à Montréal, lundi et mardi. Plus d’une centaine de représentants d’institutions et d’organismes francophones de partout au pays se sont rencontrés.

Ce rendez-vous annuel, organisé par la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) et le Centre de la francophonie des Amériques, a pour but de renforcer les liens entre les communautés francophones en situation minoritaire et le Québec. Plus de 80 rencontres en face-à-face ont permis d’explorer les potentiels projets communs.

«En deux ans, nous avons presque doublé le nombre de participants et participantes à Mobilisation franco. Ça montre l’immense valeur que les francophones voient dans une telle occasion de prendre contact et de se connaitre», s’est réjouie la présidente de la FCFA, Liane Roy, dans un communiqué de presse.

Comité consultatif pour CBC/Radio-Canada, ArriveCAN et procès de Pat King

La ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, sera conseillée par sept experts. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Un comité consultatif formé de sept experts en multimédia conseillera la ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, dans sa réflexion sur le nouveau mandat de CBC/Radio-Canada.

La ministre a annoncé en décembre 2023 qu’il était temps de redéfinir le rôle du diffuseur public avant les prochaines élections fédérales, pour se préparer à un éventuel gouvernement conservateur qui promet de définancer la CBC.

À l’époque, elle avait notamment expliqué le besoin de revoir les lacunes en information régionale et de moderniser le mandat.

«Le monde a changé depuis les débuts du diffuseur en 1936. La population a besoin d’un diffuseur public indépendant qui soit solide, novateur et prêt à relever les défis que pose cette période de transformation et de bouleversements dans les nouvelles et la création de contenus», a déclaré la ministre dans un communiqué de presse, lundi.

En mai 2023, son prédécesseur, Pablo Rodriguez, avait entamé cette réflexion, notamment pour voir comment le gouvernement pourrait financer davantage la société d’État afin qu’elle soit moins dépendante des revenus publicitaires.

Un fonctionnaire, Chulaka Ailapperuma, a admis mardi avoir commis une «erreur de jugement» lorsqu’il a participé à une dégustation de whiskey organisée par la firme GC Strategies. Il en a fait l’aveu mardi, devant le Comité permanent des comptes publics.

Chulaka Ailapperuma fait partie des fonctionnaires ayant dégusté du whiskey et soupé au restaurant avec les propriétaires de GC Strategies. Photo : Capture d’écran – Francopresse

Ses supérieurs de l’époque, Cameron MacDonald et Antonio Utano, étaient aussi présents à l’évènement. Contrairement à M. Ailapperuma, qui a depuis été promu au rôle de directeur de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), ils ont été suspendus.

Rappelons que GC Strategies est au cœur du scandale ArriveCAN, l’application mobile fournie par l’ASFC lors de la pandémie de COVID-19 pour les voyageurs entrant au Canada. La firme de deux employés a obtenu le contrat non concurrentiel de développer l’application et, selon la vérificatrice générale, a empoché plus de 19 millions de dollars pour le faire.

La dégustation de whisky avait semé la controverse étant donné l’obscurité entourant l’octroi du contrat à GC Strategies.

Dans son témoignage devant le Comité, M. Ailapperuma a reconnu avoir violé le code de conduite de l’ASFC.

Aussi présente à la réunion, la présidente de l’ASFC, Erin O’Gorman, a indiqué que le code de conduite des employés a été mis à jour le 6 mai dernier avec des précisions supplémentaires sur la partie concernant les cadeaux.

Le procès criminel de l’organisateur du convoi des camionneurs a débuté lundi. Face à une liste de neuf chefs d’accusation, Pat King a plaidé non coupable.

Il est, entre autres, accusé de méfait, d’avoir conseillé à d’autres de commettre des méfaits, de désobéissance à une ordonnance du tribunal et d’entrave au travail des policiers.

Les manifestations à Ottawa pour protester contre les mesures sanitaires liées à la COVID-19 ont eu lieu à l’hiver 2022.

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

De nombreux policiers sont intervenus lors de la manifestation contre les restrictions sanitaires imposées pendant la pandémie de COVID-19.

Le mouvement de protestation avait duré plusieurs jours dans le centre-ville d’Ottawa et avait rassemblé des foules et des milliers de véhicules. Il avait aussi incité le gouvernement à invoquer la Loi sur les mesures d’urgence.

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Le premier procès de Frank Yvan Tayo Tompouba a eu lieu en anglais en 2019, devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Bien que le Britannocolombien parle anglais, il n’aurait pas été informé dès le départ de son droit d’obtenir un procès dans la langue officielle de son choix.

La Cour d’appel de la Colombie-Britannique a rejeté sa contestation sur la base de la langue. Il s’est donc rendu en Cour suprême, qui a évoqué l’article 530 du Code criminel pour lui donner raison : il aurait dû être informé de son droit.

«C’est un droit absolu, c’est comme ça que la Cour suprême le qualifie, que de pouvoir subir son procès criminel dans la langue de son choix», explique François Larocque, professeur de droit à l’Université d’Ottawa.

«Tout ce qui est fédéral, en vertu de la Constitution du pays, doit se faire dans les deux langues officielles, ajoute-t-il. C’est la Constitution qui l’exige. La Charte canadienne des droits et libertés en l’occurrence.»

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L’histoire se répète

En 1988, le Parlement adopte une nouvelle Loi sur les langues officielles qui stipule que le français et l’anglais sont les deux langues officielles des tribunaux fédéraux.

Rapidement, les articles 530 et 530.1 du Code criminel entrent en vigueur dans toutes les provinces. L’article 530 garantit à l’accusé le droit à un procès dans la langue officielle de son choix.

Avec l’affaire Frank Yvan Tayo Tompouba, l’histoire se répète. En 1999, l’article 530 avait mené à l’arrêt Beaulac. Jean Victor Beaulac, accusé de meurtre, s’était vu refuser un procès en français. La Cour suprême avait alors évoqué l’article pour la première fois et M. Beaulac avait eu droit à un nouveau procès.

En 2008, l’article 530 est modifié afin de clarifier qu’il appartient à la Cour d’aviser l’accusé de son droit d’obtenir un procès dans la langue officielle de son choix.

«Pour qu’un accusé soit systématiquement avisé de son droit et pour éviter qu’une autre cause comme M. Tompouba se répète, si tous les juges ont dans leur guide de procédure une note comme quoi il faut aviser chaque accusé de son droit et s’assurer qu’il a compris ce droit-là, ça règle la question», dit François Larocque.

Ça prend une certaine formation des juges, de la magistrature. Ça prend aussi un certain bilinguisme institutionnel pour que la Cour puisse se tourner de bord et offrir un procès dans la langue officielle du choix de l’accusé.

— François Larocque

Selon le professeur de droit, c’est une question d’offre active : «Il faut que le gouvernement ou l’institution ou le tribunal ou dans le cas même de l’Université d’Ottawa fasse l’offre active des droits linguistiques. […] Le juge doit activement offrir à l’accusé le choix.»

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Un désaccord entre les cours

Dans le cas de Frank Yvan Tayo Tompouba, «il y a eu un désaccord par rapport à la caractérisation de l’erreur qui a été commise», commente François Larocque.

L’accusé a premièrement tenté de faire valoir son droit d’être informé et d’avoir un procès dans la langue de son choix devant la Cour d’appel de Colombie-Britannique.

Selon celle-ci, le fait que l’accusé n’ait pas été informé de son droit linguistique plus tôt était une erreur procédurale, plutôt mineure.

Dans le cas de ce type d’erreur, explique François Larocque, il «faut mettre le fardeau sur les épaules de l’accusé de démontrer qu’il a subi un préjudice et qu’il y a eu une injustice qui a été commise du fait qu’il n’a pas été avisé».

Frank Yvan Tayo Tompouba a perdu cet appel, puis l’a porté en Cour suprême. Cette dernière, en désaccord avec la Cour d’appel, considérait que l’erreur commise était une erreur de fond, une erreur de droit en lien avec le Loi sur les langues officielles.

Étant donné la nature grave de l’erreur et qu’il soit question d’un droit absolu, c’était donc à l’État (à la Couronne) de démontrer qu’une injustice n’avait pas été commise à l’endroit de l’accusé. La démonstration n’ayant pas été faite de façon concluante, la Cour suprême a accordé le droit à un nouveau procès.

Un peu comme l’arrêt Beaulac, […] on reconnait que c’est un droit linguistique fondamental qui doit être pris au sérieux et, lorsqu’il ne l’est pas, les conséquences sont sérieuses.

— François Larocque

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«Revictimisation»

«Nous reconnaissons l’importance de cette décision pour l’accès équitable à la justice pour les francophones en situation minoritaire. Cependant, la décision d’opter pour un nouveau procès à titre réparateur surprend», laisse tomber Marie Dussault, porte-parole de l’organisme Inform’Elles, par courriel.

Selon Soukaina Boutiyeb, il y a une montée de la violence fondée sur le genre et le sexe au Canada, et un manque chronique de services de soutien pour les francophones en milieu minoritaire.

Photo : Courtoisie AFFC

«Les difficultés auxquelles sont confrontées les femmes agressées sexuellement qui entreprennent des actions légales sont bien documentées et on ne peut pas en ignorer les effets dissuasifs», souligne la représentante de l’organisme britannocolombien.

Le jugement ne précise pas si la victime devra se représenter en cour lors d’un éventuel nouveau procès, mais si c’est le cas, Marie Dussault dit qu’il est «difficile de ne pas parler de revictimisation».

De son côté, la directrice générale de l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne (AFFC), Soukaina Boutiyeb, se demande de quel soutien bénéficie la victime et dans quelle langue, dans le cas où la victime parlerait français.

«Y avoir accès en français, c’est très difficile, rapporte-t-elle. [Par exemple], il n’y a pas de maison d’hébergement par et pour les femmes francophones en Colombie-Britannique.»

Soukaina Boutiyeb souligne d’ailleurs que la ligne de soutien d’Inform’Elles, disponible pour les femmes et filles francophones de Colombie-Britannique «peine à vivre. [Elle] est toujours sur le point de fermer les portes par manque de financement, avec un essoufflement des bénévoles».

Depuis sa création, le Congrès de l’Acfas vise à «nourrir la vitalité de la recherche en français» dans l’ensemble du territoire, souligne Sophie Montreuil, directrice générale de l’Acfas.

Pour elle, ce rendez-vous reste aussi une bonne occasion pour les chercheuses et les chercheurs francophones de venir présenter les résultats de leur travail.

Selon Sophie Montreuil, le Congrès de l’Acfas rassemble différents champs disciplinaires et permet de nourrir la vitalité de la recherche en français. 

Photo : Acfas

Il s’agit de la douzième édition du Congrès qui se déroule à l’Université d’Ottawa. L’évènement a eu lieu pour la première fois dans la capitale en 1940. L’université s’est chargée de trouver les 200 bénévoles nécessaires au bon déroulement.

Un rendez-vous multidisciplinaire

Plus de 220 colloques sont proposés tout au long de la semaine, notamment en sciences de la santé et naturelles, en génie, sur les arts, les sciences sociales et l’éducation.

Le Congrès permet également d’avoir une idée des recherches et des problématiques actuelles de la société, commente Sophie Montreuil.

Pour Mathieu Wade, professeur en sociologie à l’Université de Moncton, il est important de travailler et de mettre en valeur les recherches en français qui dépassent la composante linguistique et identitaire.

«Nous, les chercheurs qui travaillons sur la francophonie, on a tendance à oublier un peu qu’on est des êtres complexes qu’on ne se limite pas à des minorités linguistiques», déclare-t-il.

D’ailleurs, la particularité du Congrès reste son aspect multidisciplinaire, rappelle Sophie Montreuil. «Ça fait un rassemblement inédit parce qu’on peut croiser sur le campus des chercheurs dans toutes les disciplines.»

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Pour Mathieu Wade, le Congrès reste un moyen de construire un réseau avec les chercheurs issus des quatre coins du Canada. 

Photo : Denis Duquette

Construire des réseaux

C’est aussi un lieu d’échanges scientifiques et un lieu de rencontre pour les chercheuses et les chercheurs qui n’ont pas l’habitude de se voir régulièrement en raison de la distance géographique, ajoute-t-elle. «Ça fait émerger des idées nouvelles, des collaborations nouvelles.»

Une idée que partage Mathieu Wade, qui considère ces évènements comme un moyen de construire des réseaux de chercheurs et de travailler ensemble sur un nouvel objet d’étude.

Le professeur remarque aussi que le Congrès est une occasion de montrer les études réalisées par des professeurs francophones en milieu minoritaire, pas uniquement des recherches québécoises.

Sophie Montreuil informe en outre que l’Acfas travaille aussi tout au long de l’année avec des chercheurs issus des francophonies canadiennes «par l’entremise de nos antennes régionales».

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Quel futur pour les recherches en français?

Selon Lucie Hotte, la recherche en français permet de comprendre les besoins des francophones et d’aider à mieux accueillir les nouveaux arrivants au sein des communautés francophones. 

Photo : Mélanie Provencher

Afin d’assurer la pérennité de la recherche en français en milieu minoritaire, les professeurs ont besoin de financement, interpelle Lucie Hotte, directrice du Centre de recherche sur les francophonies canadiennes et professeure titulaire au département de français à l’Université d’Ottawa.

Elle s’inquiète de voir de moins en moins de recherches menées sur les francophonies canadiennes, notamment la francophonie ontarienne.

Lucie Hotte tient à rappeler que la recherche en français n’est pas une perte de temps ou d’argent. Au contraire, ces travaux permettent de justifier les besoins des francophones et d’accueillir les nouveaux arrivants.

Le Congrès permet aussi de mettre sur la table différentes interpellations telles que les préoccupations des chercheurs en milieu minoritaire quant au suivi de la recherche en français et des lacunes persistantes dans le secteur.

Ce déclin se trouve encore une fois confirmé par la publication d’un «tableau de bord» que vient de mettre en ligne l’agence statistique pour nous permettre de visualiser les tendances linguistiques sur plusieurs décennies.

Il ne s’agit pas de nouvelles données, mais plutôt d’un nouvel outil permettant d’examiner les tendances lourdes caractérisant l’usage des deux langues officielles à partir des données des recensements depuis 1951.

Grâce à ce tableau, on voit clairement que la situation du français se fragilise. Par exemple, on constate que le pourcentage de personnes déclarant avoir le français comme seule langue maternelle est en diminution constante : il est passé de 24,1 % en 1991 à 19,6 % en 2021.

Cette baisse s’observe dans toutes les régions du pays, mais de manière inégale. Les endroits les plus touchés, déjà hautement vulnérables, sont la Saskatchewan et le Manitoba. Les pourcentages ont diminué de moitié ou presque, passant de 2,1 % à 1,1 % en Saskatchewan et de 4,6 % à 2,8 % au Manitoba.

Au Québec, la baisse est moins marquée, mais néanmoins préoccupante : le pourcentage est passé de 81,6 % à 74,8 %.

Si bon nombre d’observateurs tentent de tirer la sonnette d’alarme depuis des années, bien peu de choses ont été faites par nos gouvernements pour renverser ce déclin. Oui, il y a bien eu des victoires linguistiques de temps à autre, grâce surtout à la vigilance des tribunaux, mais les avancées ont été nettement insuffisantes pour freiner la tendance. 

Possible évolution récente 

Le gouvernement fédéral a finalement réussi à faire adopter son projet de loi pour moderniser la Loi sur les langues officielles l’année dernière.

Le Commissariat aux langues officielles aura ainsi plus de pouvoirs, incluant la possibilité d’imposer des sanctions financières aux organismes pris en faute et d’émettre des ordonnances pour forcer une institution fédérale à se conformer aux décisions qu’il rendra.

Le principe de l’asymétrie des défis auxquels sont confrontées les communautés minoritaires francophones et anglophones est enfin reconnu.

Le législateur a aussi décidé de cibler davantage la fonction publique fédérale en exigeant le bilinguisme non seulement pour les juges de la Cour suprême, mais aussi pour la haute fonction publique. Les gestionnaires devront pouvoir communiquer avec leur personnel dans les deux langues officielles.

Le gouvernement devra aussi s’engager activement à faire la promotion de l’égalité réelle des deux langues officielles dans la société canadienne.  

Qui veillera à l’application de la nouvelle loi? 

Cette fonction revient naturellement au Commissariat aux langues officielles. À la lecture de son dernier rapport annuel, déposé au Parlement la semaine dernière, on sent déjà qu’il a hâte de se mettre au travail. C’est déjà fait en partie, comme il le souligne lui-même, à plusieurs reprises, dans son rapport. 

Toutefois, il devra attendre encore un certain temps avant de pouvoir pleinement exercer ses nouvelles responsabilités.

En effet, la mise en œuvre de plusieurs dispositions de la loi doit être précisée par voie de règlement et de décret que doit adopter le gouvernement. Par exemple, quels seront les critères utilisés pour déterminer les postes de gestionnaires bilingues?

De quelle façon le gouvernement mesurera-t-il les progrès accomplis en matière d’égalité d’usage des deux langues et les efforts consentis par les institutions fédérales pour y parvenir?

Quelles entités pourront encourir des amendes en cas de non-respect de la loi et quelles seront les sanctions pécuniaires?

Ces règlements, le commissaire voudrait déjà les avoir. Il doit cependant patienter, car le gouvernement n’a pas encore indiqué quand ceux-ci seront prêts. Dans son rapport, le commissaire prévient que cela pourrait être encore long. Rappelons que la loi est adoptée depuis près d’un an maintenant. 

En fait, ces règlements pourraient bien constituer la pièce maitresse de la nouvelle loi. C’est qu’ils ont aussi bien la capacité de pouvoir renforcer les nouvelles dispositions de la loi que de les amoindrir.

Ils peuvent forcer le gouvernement à agir en présentant des directives claires, contraignantes et ambitieuses ou, à l’opposé, ils peuvent permettre au gouvernement de ne pas assumer pleinement ses responsabilités en établissant des règles vagues, facultatives et sans envergure.

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Deux approches possibles

Tous ceux qui ont à cœur la protection du français espèrent que le gouvernement présentera des règlements clairs, contraignants et ambitieux.

Par contre, ce gouvernement, et plusieurs autres avant lui, ont plutôt montré une propension à préférer une voie plus conciliante.

Il faut dire qu’en politique, les électeurs sont plus enclins à blâmer les gouvernements en cas d’échec qu’à les féliciter lorsqu’il y a des succès. Un plan peu ambitieux permet donc de diminuer les attentes des électeurs et ainsi les risques pour les gouvernements. 

Le Commissariat aura donc la responsabilité de talonner le gouvernement pour que ce dernier adopte rapidement des règlements, mais aussi pour que ceux-ci donnent au Commissariat aux langues officielles de vrais pouvoirs d’intervention lui permettant de corriger les situations problématiques. 

Le commissaire a déjà commencé à faire pression sur le gouvernement. Dans son rapport, il conclut, à propos de la modernisation de la Loi, que «le gouvernement doit déployer les moyens d’en faire une œuvre durable, en déclenchant une cascade de responsabilités».

Le gouvernement écoutera-t-il? Nous en saurons certainement un peu plus dans son rapport de l’an prochain. Comme le dit le commissaire, l’année qui vient de se terminer a été une année de transition. Il ne faudrait pas que cela ait été en vain.

«Je regarde mon téléphone tous les matins en me réveillant et tous les soirs en me couchant pour checker l’avancée des feux. Si tôt dans la saison, c’est quand même inquiétant. Ce n’est pas toujours facile de s’endormir», confie Mafily Mae Diabagate, résidente de Fort McMurray, en Alberta.

Mafily Mae Diabagate avait bénéficié d’un accompagnement psychologique après l’incendie qui avait ravagé Fort McMurray en 2016. 

Photo : Courtoisie

Un feu de forêt se déchainait à une quinzaine de kilomètres de cette ville du nord-ouest de la province, située en pleine forêt boréale, au moment où Francopresse s’est entretenu avec elle. Les habitants se préparaient à une éventuelle évacuation. À l’échelle de l’Alberta seulement, 44 incendies sont actuellement actifs. 

En mai 2016, les flammes avaient déjà ravagé Fort McMurray, forçant les 90 000 habitants à quitter précipitamment la région. À l’époque, Mafily Mae Diabagate avait fait partie des premières équipes de bénévoles venues nettoyer l’agglomération. Elle se souvient encore du choc à son arrivée dans une «ville fantôme» aux façades fondues et brulées. 

Depuis, la jeune femme a dû apprendre à vivre «sur le qui-vive», avec cette peur constante, «ce quelque chose de pesant derrière la tête», qui s’est instillé dans son quotidien. 

«Mais en même temps, la communauté est aussi plus unie et solidaire. On se comprend, on a les mêmes traumatismes», nuance-t-elle.

Une nouvelle saison des incendies hors norme s’annonce 

Après un hiver marqué par le manque de neige dans plusieurs régions du Canada, le gouvernement fédéral a reconnu, le 10 avril, craindre un nouvel été «catastrophique». En 2023, le Canada a connu la pire saison de son histoire. 

Lors d’une mise à jour diffusée le 9 mai dernier, Ottawa prévoyait que des «températures supérieures à la normale» dans les prochains mois, cumulées à des «conditions de sècheresse», allaient «exacerber le risque et l’intensité des feux de forêt».

Plusieurs ordres d’évacuation ont été donnés le weekend dernier pour de petites agglomérations en Alberta et dans le Manitoba, tandis que les vents violents ont poussé la fumée à travers l’ouest du pays, faisant suffoquer plusieurs grandes villes. La qualité de l’air y pose ainsi des risques «très élevés», selon Ottawa.

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Une fumée qui ne se dissipe pas

Une centaine de feux – dont certains ont débuté l’an passé, mais ne se sont jamais éteints – font également rage en Colombie-Britannique. Des milliers de personnes ont été déplacées étant donné la progression d’un brasier qui s’étend maintenant sur plus de 4000 hectares dans le nord-est de la province. 

En Colombie-Britannique, Céline Beuvens Nicaise et son mari Manu Nicaise se posent de nombreuses questions avec les feux de forêt qui progressent rapidement. Ils pensent déjà à préparer leur sac avec des effets personnels de base pour partir le plus rapidement possible en cas d’évacuation. 

Photo : Courtoisie

«On savait que ça reviendrait. C’est tellement sec, ça me frappe, il ne pleut presque jamais et il fait déjà plus de 26 degrés. Il va falloir qu’on apprenne à vivre avec», se résigne Céline Beuvens Nicaise, qui habite à Kelowna, tout au sud de la Colombie-Britannique.

En aout dernier, elle avait dû quitter son logement avec son mari à cause de l’avancée d’incendies destructeurs. Cette année, le couple ne préfère «pas trop y penser pour ne pas se mettre trop de pression».

Dans les Territoires du Nord-Ouest voisins, les incendies sont en revanche au cœur des conversations. 

«On en parle depuis avril, en fait, on n’a jamais vraiment cessé d’en parler et maintenant on commence à se retrouver autour des barbecues avec un petit bémol. On espère qu’on ne devra pas à nouveau partir, qu’on pourra vraiment profiter de l’été», témoigne Angélique Ruzindana Umunyana, qui habite à Yellowknife depuis 20 ans. 

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«Est-ce qu’on aura encore une maison, une ville à notre retour»

En aout 2023, la Ténoise était parmi les 20 000 habitants qui ont fui la capitale des Territoires du Nord-Ouest, menacée par un important brasier non maitrisé.

«La fumée était tellement forte, l’air tellement irrespirable, on n’avait pas d’autre choix, il fallait se mettre à l’abri, loin, juste pour respirer», se remémore Angélique Ruzindana Umunyana. 

Pendant trois semaines, elle a vécu avec sa famille dans un hôtel de Rivière-la-paix, une petite ville d’Alberta, à plus de 1000 kilomètres de son domicile. 

Angélique Ruzindana Umunyana explique que tout le monde parle des feux de forêt à Yellowknife. Tout le monde redoute de nouvelles évacuations. 

Photo : Courtoisie

Angélique Ruzindana Umunyana se souvient de l’inquiétude qui l’habitait, de cette peur de l’inconnu qui ne la lâchait pas : «Est-ce qu’on aura encore une maison, une ville à notre retour? Quand est-ce qu’on pourra même rentrer chez nous?»

Aujourd’hui, la Canado-Rwandaise tente de se préparer mentalement au retour des feux : «Le niveau des rivières et des lacs est dramatiquement bas, et on a connu des températures ridiculement chaudes l’hiver dernier. On peut craindre un été très difficile.»

La ville de Yellowknife sensibilise déjà la population avec l’organisation de séances d’informations sur les mesures à prendre pour minimiser les risques et faciliter d’éventuelles évacuations. 

«Ils prennent le lead pour nous informer très tôt, ils semblent mieux organisés que l’an dernier, où nous avions pas mal de messages contradictoires. J’essaie de rester positive», observe Angélique Ruzindana Umunyana.

De nombreux éléments préoccupent néanmoins la mère de famille, au premier rang desquels figurent le manque d’argent du gouvernement territorial pour faire face à de tels évènements deux ans de suite et l’accompagnement des sans-abris en cas de nouveau départ.

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Stress prétraumatique 

Les mégafeux représentent un évènement traumatique indéniable, en particulier pour celles et ceux qui ont dû fuir face à l’avancée des flammes, qui ont craint pour leur vie et celles de leurs proches. 

Dans le cadre d’une étude menée à Fort McMurray en 2016, Geneviève Belleville, professeure de psychologie à l’Université Laval à Québec, a constaté qu’environ 15  % de la population souffrait d’un trouble de stress posttraumatique à la suite de l’incendie dévastateur. 

Un grand nombre de symptômes caractérisent ce trouble : la personne revit l’évènement en permanence, fait des cauchemars et des insomnies, elle se sent déconnectée de son entourage, son humeur est altérée, etc. 

«Cela peut apparaitre à retardement, des semaines ou des mois après, relève Geneviève  Belleville. Les personnes qui souffrent déjà de problèmes de santé mentale ou qui ont moins de soutien social sont plus à risque.» 

À l’approche d’une nouvelle saison des feux, la psychologue explique qu’il est normal d’éprouver une «inquiétude excessive et d’envisager le pire» : «Le plus important, c’est la manière dont on gère ce stress. Il faut le verbaliser le plus possible.» 

«Les changements s’emballent, mais que faire?»

Angélique Ruzindana Umunyana doute surtout que les autorités réussissent à convaincre les gens d’évacuer cette année : «J’ai le sentiment qu’on va se tenir prêts, mais qu’on ne va peut-être pas obéir, qu’on va vouloir se protéger nous-mêmes.»  

En Nouvelle-Écosse, Serge Desjardins s’inquiète des difficultés de la province à recruter des pompiers bénévoles pour lutter contre les incendies. 

Photo : Courtoisie

À l’autre bout du pays, dans la banlieue d’Halifax, en Nouvelle-Écosse, Serge Desjardins anticipe également avec angoisse une nouvelle saison hors norme.

«Nous avons eu quelques jours de pluie, mais nous n’avons pas eu assez de neige cet hiver. Le sol et la végétation sont très secs. C’est apeurant après ce qu’on a vécu l’an dernier», détaille celui qui est président de la Société canadienne de météorologie et d’océanographie.

En juin 2023, un imposant feu de forêt avait détruit 150 maisons dans cette région du pays et contraint 16 000 personnes à fuir leur domicile.

«Avec le changement climatique, ça ne va pas s’arranger. Notre environnement est beaucoup plus vulnérable. Il faut qu’on investisse davantage pour s’assurer qu’on soit prêts», insiste Serge Desjardins.

À Yellowknife, Angélique Ruzindana Umunyana est consciente que la situation catastrophique de l’été dernier risque de devenir la norme : «Les changements s’emballent, mais que faire? Je n’ai qu’un gros point d’interrogation en guise de réponse. En attendant, j’essaie de faire mon bout de chemin dans ma communauté.»

En dépit de la multiplication des catastrophes naturelles, Mafily Mae Diabagate compte elle aussi rester à Fort McMurray. Elle envisage même de s’acheter une maison. «Après tout ce qu’on a traversé, que peut-il arriver de pire?», lâche-t-elle.

Elle se tient cependant prête à toute éventualité. Elle dispose d’un sac d’évacuation chez elle, d’un autre sur son lieu de travail, sans oublier des bouteilles d’eau dans sa voiture. 

Mafily Mae Diabagate salue à cet égard la qualité du travail de prévention et de sensibilisation des autorités : «On est traumatisés, mais ça ne nous empêche pas de fonctionner, on le supporte, car on fait confiance aux secours pour gérer la situation.»

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Le COPA National, qui a pour mission de prévenir la violence, l’intimidation et les agressions faites aux enfants, a présenté en avril une nouvelle campagne d’adhésion.

Marie-Claude Rioux rappelle qu’il y a deux fois plus de maltraitance chez les enfants et les jeunes qui vivent en région rurale et que plusieurs communautés francophones sont en région rurale. 

Photo : Rory John Photo

Le Centre a adopté une nouvelle structure, qui inclut désormais des organismes membres plutôt que des membres individuels.

Sa directrice générale, Marie-Claude Rioux, rappelle que l’organisation, anciennement connue sous le nom de Centre ontarien de prévention des agressions, s’est donné depuis plusieurs années un mandat national pour dépasser les frontières provinciales. Le COPA National a d’ailleurs déjà des partenariats avec des organismes d’autres provinces.

«C’est impossible de gérer des membres individuels à une échelle nationale […] On était prêts à prendre des membres qui provenaient des régions et des territoires sur l’ensemble du territoire canadien», raconte-t-elle.

Des chiffres alarmants

Pour elle, cet élargissement répond à un besoin criant. «La violence à l’endroit des enfants augmente de façon incroyable et effrayante, et il n’y a pas que l’Ontario. C’est dans toutes les provinces.»

La directrice générale poursuit : «C’est en train de prendre une dimension folle, que je ne me souviens pas d’avoir vue de mon vivant. Le COPA a une expertise basée sur près de 30 ans d’expérience, et c’est cette expertise-là qu’on veut aller partager avec l’ensemble des provinces et territoires.»

Car en situation minoritaire, les organismes sont souvent confrontés à un manque de financement, de services et d’outils. «Nous, on ne dit pas qu’on va être là pour régler tous les problèmes, mais on est convaincus qu’on peut apporter une pierre à cet édifice-là de protection des enfants», rassure-t-elle.

Les populations rurales les plus touchées

Le COPA National rapporte dans un document que selon une recherche menée par Statistique Canada en 2019, «il y a deux fois plus de maltraitance chez les enfants et les jeunes qui vivent en région rurale par rapport aux enfants et jeunes qui vivent en région urbaine».

Pour Emmanuelle Billaux, l’accès aux services et aux informations en français reste un défi important en situation minoritaire. 

Photo : Courtoisie

«Or, on sait que nos régions francophones sont en milieu rural en très grande majorité», remarque Marie-Claude Rioux.

La particularité du milieu rural, «c’est le fait que tout le monde se connait, souligne-t-elle. Alors, quand il y a des épisodes de violence, d’agression, on a tendance à vouloir cacher ça et ne pas en parler parce que, forcément, ça vient toucher quelqu’un qu’on connait.»

L’offre de services d’appui en santé y reste aussi insuffisante, ajoute-t-elle. «On se trouve doublement minorisés, parce que non seulement on n’a pas l’accès à ces services-là, mais en plus de ça, on est une minorité et, comme minorité, on a tendance à se protéger.»

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Donner des outils plutôt que victimiser

En matière de protection des enfants, deux méthodes s’affrontent, explique Marie-Claude Rioux.

«Il y a l’approche traditionnelle où on fait des règles, on établit et adopte des lois pour contrer la violence. Est-ce que ça marche? Je ne crois pas. La preuve, c’est qu’on n’a jamais eu de règles aussi contraignantes et il n’y a jamais eu autant de violence.»

La directrice générale préconise plutôt une autre façon de faire, qui est l’autonomisation, c’est-à-dire qu’«on ne victimise pas, surtout pas, les personnes qui ont subi une agression ou une violence et on les appuie pour se sortir de cette situation-là».

«La première erreur qu’on fait c’est qu’on dit aux enfants “méfie-toi des étrangers”, alors que 53 % des agressions sont faites par des personnes qu’on connait. Deuxièmement, on ne leur dit pas quoi faire, on ne leur montre pas comment se défendre, on ne leur donne pas les outils pour se sortir de ces situations-là», poursuit-elle.

Par le biais de son nouveau système d’adhésion, le COPA National veut justement offrir son expertise en faveur de l’autonomisation, notamment par des cours et des ateliers, dans toutes les régions du pays.

Partenariats interprovinciaux

L’organisme a notamment noué un partenariat avec Actions Femmes I.P.É, à Île-du-Prince-Édouard.

Ronald Labrecque souligne qu’en Saskatchewan, toutes les villes et toutes les régions ne sont pas également pourvues en termes de services en français.

Photo : Courtoisie

«Nous avons fait appel à l’expertise du COPA National en matière de formations pour enfants pour créer un programme d’ateliers pour les 7e et 8e années qui sera animé directement par des jeunes du secondaire (10e et 11e années)», déclare Emmanuelle Billaux, directrice générale d’Actions Femmes I.P.É.

Parmi les thèmes abordés lors de ces rencontres, il y a le consentement, les relations saines, la cyberintimidation et le multiculturalisme.

«Les défis ici, comme dans la plupart des provinces minoritaires, sont l’accès aux services et aux informations en français», corrobore Emmanuelle Billaux.

En Saskatchewan, le COPA National travaille avec l’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF) pour, entre autres, former et outiller des travailleurs en établissement dans les écoles.

Le directeur général de l’ACF, Ronald Labrecque, souligne que les enfants immigrants doivent notamment faire face à des difficultés au niveau de leur intégration «soit dans la salle de classe, ou dans la société ou même à l’intérieur de leur famille».

L’ACF entend aussi lutter contre le racisme dont sont victimes certains enfants. «On fait plusieurs projets directement avec le conseil scolaire dans les écoles.»

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Cette édition du CMA aura lieu dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, dans les régions de Clare et d’Argyle, qui ont accueilli une population importante d’Acadiens à la suite de la Déportation. De nombreuses institutions et des organismes francophones y ont depuis vu le jour.

On y trouve entre autres l’Université Sainte-Anne, dont le recteur et vice-chancelier sortant, Allister Surette, préside le comité exécutif du CMA. C’est un retour pour celui qui a été fondateur et président du comité organisateur du CMA de 2004.

«Le Congrès est une bonne plateforme pour renouveler, si on veut, la fierté de notre population, les Acadiens, les francophones de la Nouvelle-Écosse, mais aussi d’augmenter l’intérêt de notre communauté auprès des gouvernements provincial, municipal et fédéral, parce que les trois paliers de gouvernement sont bien engagés financièrement et autrement», dit-il.

Le plus grand évènement de la francophonie?

Allister Surette est impliqué dans le Congrès mondial acadien depuis au moins 20 ans. 

Photo : Courtoisie

«J’oserais croire que oui, répond Allister Surette. On se prépare pour environ 30 000 personnes au cours des neuf jours.»

Plus de 50 familles acadiennes seront réunies avec chacune son activité spéciale. S’ajoutent à cela les activités principales organisées par le CMA et les spectacles annoncés, ce qui soulignent l’ampleur de cette rencontre.

«On a le festival d’ouverture, qui va être sur le campus principal de l’Université Saint-Anne dans la région de la Baie Sainte-Marie de Clare et là on aura des artistes comme le P’tit Belliveau, les Hay Babies […], annonce le président. Un des gros spectacles qui est toujours central des congrès mondiaux, c’est celui de la fête nationale de l’Acadie, le 15 aout.»

Originaire de Clare, en Nouvelle-Écosse, l’auteur-compositeur-interprète P’tit Belliveau a signé un nouvel album cette année. Il sera de la fête au Congrès mondial acadien. 

Photo : Courtoisie

À l’affiche de ce spectacle, on retrouve Zacharie Richard, Lisa LeBlanc, Édith Butler et les Salebarbes.

À lire aussi : Le Congrès mondial acadien a bousculé la vie de Zachary Richard (Acadie Nouvelle)

Le ministre Colton LeBlanc a confirmé qu’il sera présent au CMA 2024. 

Photo : Courtoisie

«J’ai hâte de rassembler cette communauté fière et de partager l’Acadie de la Nouvelle-Écosse avec d’autres», se réjouit le ministre des Affaires acadiennes et de la Francophonie de la Nouvelle-Écosse, Colton Leblanc.

Celui-ci, qui porte aussi le chapeau de coprésident du Conseil des ministres de la Francophonie canadienne, est impressionné par le nombre de visiteurs attendus.

En Nouvelle-Écosse, en 2021, 26 775 personnes avaient le français comme première langue officielle parlée, selon Statistique Canada. Le nombre de visiteurs au CMA, estimé à 30 000, est donc considérable pour les Acadiens et francophones de la province.

«À la fin du congrès, quand tout le monde retourne chez eux, ailleurs au Canada ou dans le monde, le sentiment du congrès va rester avec eux pour le reste de leur vie», espère le ministre.

— Le ministre Colton LeBlanc

Faire le point

Le CMA est aussi l’occasion de réfléchir à l’Acadie d’aujourd’hui, notamment au travers des états généraux préparés par la Société nationale de l’Acadie (SNA).

«Dans les derniers congrès, on appelait ça surtout des conférences académiques. Ce congrès-ci, c’est la première fois qu’on appelle ça des états généraux», explique Allister Surette.

Les derniers chiffres sur la langue française au Canada, basés sur le recensement de 2021, exposent un déclin du poids démographique des francophones. Cette question fera d’ailleurs partie des états généraux.

«On va parler aux académiques pour parler de structures de l’Acadie. Donc, non seulement le déclin de la langue française, mais tous les autres défis auxquels font face surtout les régions en situation minoritaire», indique le président du CMA.

À lire aussi : Sommet des femmes du Congrès mondial acadien : Les réalités multiples du féminisme en Acadie (La Voix acadienne

Selon Eric Forgues, directeur général de l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques, le CMA «donne une permission de vraiment afficher sa fierté identitaire».

Eric Forgues remarque que le mélange de festivités et de réflexion sur l’Acadie sème des tensions. 

Photo : Courtoisie

Mais c’est aussi une occasion de se projeter dans l’avenir. «Que peut-on faire en Atlantique, dans les provinces, pour participer à l’effort fait à l’échelle pancanadienne de renverser les tendances démographiques? Ça prend une bonne discussion et une bonne réflexion», indique le sociologue.

Faire la fête, aussi

Eric Forgues soulève qu’il existe un débat entre les participants du CMA : réfléchir à l’Acadie ou faire la fête? «Certains disent que c’est devenu une grande fête plus qu’un évènement politique, note-t-il. [Si c’était] surtout des moments de réflexion sur différents enjeux, je ne suis pas sûr que l’on arriverait à faire venir des gens de la Louisiane, du Maine ou d’Europe.»

Les différentes diasporas font d’ailleurs autant partie de la fête que de la réflexion.

«Dans un contexte où il y a eu la Déportation, on dirait qu’on a senti le besoin de se réunir, explique-t-il. C’est un petit peu comme pour refaire ou défaire l’histoire, pour essayer de retisser des liens qui ont été défaits par l’armée britannique, par la couronne britannique.»

Le chercheur se demande d’ailleurs comment les diasporas acadiennes de l’extérieur du Canada peuvent participer au projet de l’Acadie. «Une bonne partie de la diaspora a perdu le français, rappelle-t-il. Si on veut définir un projet pour l’Acadie qui inclut la diaspora, il faut déjà faire une discussion sur la langue de ce projet-là.»

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Les legs du CMA

Présenter la culture et le patrimoine acadien du coin d’Argyle et de Clare est un objectif du CMA 2024, «mais aussi montrer qu’on est prêts pour le futur», ajoute Allister Surette.

Au fil des éditions, le CMA laisse des legs dans ses régions hôtes.

Ça peut être de l’infrastructure ou des services qui restent par après, explique le président. Par exemple, afficher avec des gros panneaux sur les routes que ce sont des régions acadiennes.

— Allister Surette

Ce genre de trace reste important pour les régions acadiennes qui sont géographiquement dispersées : «C’est pour surtout augmenter la visibilité des régions acadiennes de la province.»

Les legs peuvent aussi être institutionnels. «En 2004, se souvient le président, on a utilisé le Congrès mondial pour préparer avec le gouvernement la Loi sur les services en français [de la Nouvelle-Écosse].» Une loi qui, 20 ans plus tard, a besoin d’être modernisée, croit-il. 

Eric Forgues partage cette opinion : «Je ne sais pas du tout ce qui se discute, mais ça serait l’occasion de moderniser et peut-être la renforcer. […] Les gouvernements aiment ça faire des annonces positives vis-à-vis de la francophonie ou l’Acadie dans le contexte du CMA. Habituellement, il y a toujours une petite surprise.»