le Dimanche 14 septembre 2025

C’est avant tout la promesse de quitter la politique faite à sa conjointe qui aurait motivé sa décision. 

«S’il y a une promesse qu’un politicien doit tenir, c’est bien celle qu’il fait à sa conjointe», plaisante à moitié le député de Glengarry—Prescott—Russell, qui a annoncé son intention à la fin juillet. 

Élu en 2015 en même temps que son chef, le premier ministre Justin Trudeau, il reconnait neuf ans plus tard que la baisse de sa «passion» et de sa «patience» y sont aussi pour quelque chose. 

Francis Drouin fait notamment référence au Comité des langues officielles du 6 mai dernier, où il s’était emporté contre deux témoins venus s’exprimer sur le financement fédéral des établissements postsecondaires de la minorité anglophone du Québec. 

La tempête politique qui en a découlé a duré des semaines. De «plein de marde» aux «propos extrémistes», les éléments de langage du politicien avaient volé la vedette ce jour-là.

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Défense féroce de la francophonie minoritaire

Francis Drouin se dit usé par certains points de vue exprimés durant le comité. Le chercheur indépendant, Frédéric Lacroix, et le professeur membre du Regroupement pour le cégep français, Nicolas Bourdon, avaient notamment assuré que les personnes qui étudient dans un collège ou une université anglophone seraient davantage amenées à vivre en anglais.

Mais travailler en anglais ne veut pas dire qu’on fait notre vie en anglais! Avant d’entrer en politique, je travaillais en anglais. [Est-ce que] ça fait que je suis moins francophone qu’un autre? Ça n’a aucun rapport

— Francis Drouin

En réaction à ses propos, le Bloc québécois et les conservateurs avaient demandé sa démission de la présidence de la section canadienne de l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF).

Ces témoignages mettaient selon lui de l’avant la vision d’une «petite minorité québécoise», «très nationaliste» qui mine la francophonie minoritaire. «L’un des témoins [invités au Comité le 6 mai, NDLR] n’a jamais dit qu’il était candidat en 2015 pour le Bloc québécois», raille le député. 

L’invitation des deux témoins en question avait d’ailleurs été suggérée par le Bloc québécois, souligne-t-il.

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S’il reconnait avoir «manqué de patience», c’est aussi parce qu’il pense que «ce n’est pas au Canada seul, mais à l’espace francophone [international] dans son ensemble de se pencher sur le sujet des minorités francophones». 

Sur les «321 millions de locuteurs francophones dans le monde, nous sommes minoritaires. Si on ne commence pas à traiter de cette question-là sérieusement, j’ai peur que la langue soit menacée dans le futur, car nos jeunes [francophones] consomment tous du contenu anglophone sur les plateformes»

«Pas le choix de passer par l’immigration» pour maintenir la francophonie

Francis Drouin estime qu’il laissera une francophonie qui n’est pas «statique tout le temps». «Oui notre poids démographique a diminué, c’est pourquoi on a voulu rétablir celui de 1971 dans la loi C-13 [la modernisation de la Loi sur les langues officielles adoptée en juin 2023, NDLR].»

Pour lui, l’élément sur lequel les politiciens doivent continuer d’insister reste le même : favoriser l’immigration. «Il y a des jeunes de moins de 25 ans qui vont représenter de 50 à 60 % de la population francophone», indique-t-il.

Le président sortant de l’APF assure qu’un projet sur la mobilité de la main-d’œuvre sera présenté aux chefs d’État au prochain Sommet de la francophonie. La question de l’amélioration des visas et des programmes francophones au Canada est aussi sur la table, dit-il, autant au fédéral qu’au niveau des provinces. 

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Des comptes à demander sur l’immigration francophone

Selon lui, certaines provinces comme le Nouveau-Brunswick sont par contre à la traine. Il s’inquiète de Blaine Higgs, «un anti-francophone» qui ne s’en cache pas.

Les communautés francophones et les associations doivent demander des comptes aux gouvernements. Certains programmes provinciaux peuvent choisir les immigrants francophones, donc les provinces aussi doivent s’assurer qu’elles rencontrent leurs objectifs.

— Francis Drouin

Côté fédéral, «on n’a pas été bons jusqu’à il y a à peu près trois ans. Ça a pris un peu trop de temps, mais au moins, il y a du progrès de ce côté. Il faut donner les outils et les budgets!»

Après son départ de la politique, Francis Drouin compte s’impliquer dans sa communauté francophone à sa façon. «Ma conjointe est anglophone, mais comprend très bien l’importance de garder ma langue, donc mon fils va à l’école en français. Je continuerai d’appuyer nos institutions francophones chez nous.»

Au-delà de ce principe, le député franco-ontarien n’a «aucune idée de ce qu’[il] va faire par la suite». «J’ai deux priorités : sortir de ma zone de confort et m’assurer que j’ai assez de temps pour le passer en famille.»

Garder un lien avec la politique peut-être? «Je vais y réfléchir. La politique est la grande université du monde, on y apprend toutes sortes de choses. J’espère avoir encore un an pour le faire!»

«Rehausser» l’image libérale

Questionné sur la faible popularité de son parti et de son chef, Francis Drouin n’émet aucune critique, mais il admet que «l’équipe de M. Trudeau a beaucoup de travail à faire pour rehausser son image, car les Canadiens ont perdu de l’attachement au premier ministre».

L’équipe libérale devra également démontrer qu’elle «a un plan», car le «chef de l’opposition officielle a fait un bon job pour pointer du doigt tous les problèmes et les attribuer à Justin Trudeau».

Il ne donne néanmoins pas Pierre Poilievre gagnant des prochaines élections, puisqu’il n’a «pas de plan concret» sur des «questions existentielles», comme la taxe carbone. 

«Je ne dis pas que le nôtre est parfait, mais on en a un. Ce sont nos enfants qui vont ressentir l’impact de nos décisions et je trouve ça triste que des politiciens n’aient pas le culot d’avoir ces conversations d’adultes».

«La culture est l’aspect le plus important de l’existence humaine. Je ne vois pas pourquoi elle devrait être rentable», affirme la directrice générale de l’Association de la musique de la côte Est (AMCE), Blanche Israël, en entrevue avec Francopresse.

Pour Blanche Israël, directrice générale de l’AMCE, les subventions publiques sont essentielles à la qualité et à l’originalité des activités culturelles au-delà des questions de rentabilité. 

Photo : Courtoisie

Devant l’incompréhension des gouvernements provinciaux hors Québec, la gestionnaire est néanmoins «souvent obligée de faire valoir ses apports économiques et touristiques» pour obtenir des fonds.

«Côté francophone, il y a une meilleure compréhension et souvent plus d’aides, car la culture est intrinsèquement liée à la préservation et à la défense de la langue française», concède Blanche Israël.

L’AMCE réunit les membres de l’industrie musicale du Canada atlantique et organise tous les ans un festival pour promouvoir et récompenser les artistes de la région. Des responsables de production et de l’organisation de festivals du monde entier y participent.

Chaque année, cinq jours de concerts et de remises de prix apportent des retombées économiques directes de 4 à 5 millions de dollars à la région hôte, selon Blanche Israël.

Elle évoque également les gains financiers indirects, «presque impossibles à mesurer», comme «la marque Canada atlantique» qui s’exporte dans le monde entier.

«Ce genre de festivités rend une ville plus attrayante, donne envie aux touristes de revenir, permet à des musiciens locaux de percer à l’étranger», explique-t-elle. 

Des données pour accroitre le soutien

Pour pallier le manque de données sur les revenus que génère le secteur culturel dans les communautés francophones en situation minoritaire, la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF) a réalisé une étude d’impact économique. 

Les résultats ont été dévoilés lors de l’Agora du Conseil des ministres sur la francophonie canadienne, les 9 et 10 aout.

La directrice générale de la FCCF, Marie-Christine Morin, explique qu’il existe de grandes disparités entre les provinces et les territoires en fonction de la concentration d’artistes et d’industries culturelles.

Selon les premières données dévoilées, 36 100 personnes travaillent dans le domaine de la culture en français hors Québec, dont 7700 artistes.

«Historiquement, notre secteur est sous-financé, car son impact est sous-évalué, relève Marie-Christine Morin. Avec ce portrait détaillé, notre ambition est de démontrer que la culture a sa place dans le monde économique pour convaincre les gouvernements d’investir plus.»

Sans argent public, «plus du divertissement que de l’art»

Pour organiser son festival, l’AMCE compte sur des subventions municipales, provinciales et fédérales pour la moitié de son budget.

«Les subventions sont des coussins de sécurité. Sans elles, l’évènement n’aurait pas la même envergure», relève Blanche Israël.

Selon Marie-Christine Morin de la FCCF, le secteur culturel francophone souffre d’un sous-financement chronique, car les pouvoirs publics ont toujours sous-évalué ses répercussions économiques et sociales. 

Photo : Courtoisie

À ses yeux, réduire la taille de l’évènement à son «potentiel purement commercial» n’aurait aucun sens. «Ce serait possible, mais pas désirable, la culture vaut beaucoup plus que cela.»

Elle prend l’exemple des États-Unis, où les financements publics sont réduits au minimum dans le secteur musical. Résultat, la rentabilité guide le choix que font les artistes. 

«Ils créent leurs œuvres comme des produits commerciaux. C’est plus du divertissement que de l’art à même de questionner notre époque», regrette Blanche Israël.

«On ne peut pas limiter la culture à son utilité économique. On doit aussi prendre en compte son impact sur la cohésion sociale, le bienêtre, la santé mentale, autant de choses qu’on ne peut pas monétiser», renchérit la directrice générale de la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF), Marie-Christine Morin, en entretien avec Francopresse.

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S’ouvrir à d’autres auditoires 

Au Manitoba, l’ancien directeur général du Festival du Voyageur, Darrel Nadeau, a également été confronté au dilemme qui semble opposer rentabilité et épanouissement de la culture. 

Entre 2017 à 2023, il a fait le choix d’élargir la programmation de l’évènement francophone à des artistes anglophones et d’autres langues. Sous sa direction, seulement la moitié des musiciens qui se sont produits sur scène étaient d’expression française. L’objectif alors affiché était clair : attirer plus de monde pour engendrer plus de recettes.

«Dans l’Ouest, si on restreint les activités à un auditoire exclusivement francophone, l’impact est limité. Ce n’est pas soutenable financièrement sans dépendre totalement des subventions publiques», assure celui qui est aujourd’hui responsable de l’expérience de visite au Musée canadien pour les droits de la personne à Winnipeg.

Autrement dit, pour générer des retombées économiques, «il faut s’ouvrir à d’autres communautés, aux anglophones», poursuit Darrel Nadeau en entrevue avec Francopresse.

Dans des zones où le potentiel économique de la culture en français est plus limité, Marie-Christine Morin voit dans l’ouverture prônée par Darrel Nadeau, «une manière de créer des échanges et de faire découvrir au plus grand nombre l’identité francophone».

Les chiffres semblent leur donner raison : le Festival du Voyageur génère désormais quelque 8 millions de dollars de retombées annuelles. Son incidence non négligeable a retenu l’attention des bailleurs de fonds et des commanditaires privés qui n’ont pas hésité à multiplier leurs contributions, rapporte Darrel Nadeau. 

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L’inflation qui menace 

Le risque d’anglicisation du Festival a cependant fait l’objet de vives critiques. À cet égard, Darrel Nadeau reconnait volontiers «les tensions» et le risque «de perdre l’âme francophone».

«Il n’y a pas de formule parfaite. C’est un difficile compromis à faire entre la préservation de l’authenticité culturelle, l’épanouissement de la langue française et la volonté de faire des profits», analyse le Franco-Manitobain. 

L’ancien directeur du Festival du Voyageur à Winnipeg, Darrel Nadeau, estime que dans l’Ouest, les évènements culturels à destination exclusive des francophones sont difficilement rentables. 

Photo : Courtoisie

Un avis que partage Blanche Israël : «Il faut trouver un juste milieu entre l’argument économique, directement mesurable, et le besoin de protéger les artistes francophones pour qu’ils ne se fassent pas avaler culturellement.»

Cet équilibre est de plus en plus délicat à trouver depuis la pandémie de COVID-19. La crise inflationniste qui a suivi a provoqué une explosion des couts de production, éloignant d’autant les espoirs de rentabilité, estiment les spécialistes. 

«Le trou en termes de revenus est vraiment dur à combler, alerte Darrel Nadeau. Il y a de plus en plus de pression pour que les évènements s’autofinancent, car les subventions gouvernementales n’ont pas augmenté depuis dix ou quinze ans.»

De nombreux évènements francophones cherchent à résoudre la quadrature du cercle : ils tentent d’augmenter les prix des billets pour se maintenir à flot sans pour autant faire fuir le public. Un véritable exercice d’équilibriste.

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Plus sur la francophonie

De passage à Halifax jeudi, le ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et des Langues officielles, Randy Boissonnault, a confirmé que le gouvernement fédéral investira 227,9 millions de dollars sur 5 ans dans les services dans la langue de la minorité. L’argent, déjà annoncé dans le Plan d’action sur les langues officielles, sera attribué par le biais des ententes bilatérales avec des gouvernements provinciaux et territoriaux.

Des ententes bilatérales ont récemment été conclues avec la Nouvelle‑Écosse, l’Île-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve-et-Labrador, le Nouveau-Brunswick, l’Ontario, le Manitoba, la Saskatchewan, l’Alberta, la Colombie-Britannique et les Territoires du Nord-Ouest, note le communiqué.

Le gouvernement souligne que l’argent ira à des secteurs clés, comme les soins de santé, les services de justice et l’intégration de nouveaux arrivants.

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L’économie est au programme de l’Agora du Conseil des ministres de la francophonie ces 9 et 10 aout à Halifax. Les différentes conférences tenteront de déterminer comment la francophonie peut servir le développement économique.

Le ministre Randy Boissonnault a annoncé, parmi d’autres mesures, qu’Ottawa pourrait refuser le recours aux travailleurs étrangers temporaires à des employeurs canadiens, en cas de fraude. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Le rôle des différents paliers de gouvernements sera également au centre des discussions, avec par exemple la question de l’impact économique du bilinguisme au Nouveau-Brunswick ou la stratégie de développement économique en Ontario. La capitalisation des relations avec le Québec sera aussi abordée.

L’importance de la culture et de l’entrepreneuriat fera partie des échanges avec plusieurs experts.

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Des limites pour les travailleurs étrangers temporaires, une enquête sur des «fermes à robots», négociations à Postes Canada et soins dentaires

Mardi, des mesures ont été annoncées par Randy Boissonnault pour lutter contre la fraude en lien avec le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET). Des employeurs «de certaines régions» pourraient se voir refuser le recours aux travailleurs étrangers temporaires à bas salaires dans «certains secteurs d’activité».

Plusieurs mesures ciblent les fraudes commises par certains employeurs canadiens. Parmi elles, l’application plus cohérente du plafonnement à 20 % des embauches de travailleurs étrangers temporaires, l’augmentation des frais des études d’impact sur le marché du travail, nécessaires pour délivrer les visas des futurs employés, ou encore une analyse plus rigoureuse de ces études.

«La santé et la sécurité des travailleurs étrangers temporaires au Canada constituent une responsabilité que je prends très au sérieux. De mauvais intervenants profitent des gens et compromettent le Programme au détriment des entreprises légitimes», a indiqué Randy Boissonnault par communiqué.

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Deux députés néodémocrates ont demandé l’ouverture d’une enquête auprès de la Commissaire aux élections fédérales et de la Commissaire à l’éthique pour déterminer si le Parti conservateur du Canada (PCC) a employé une «ferme à trolls» pour diffuser des informations flatteuses concernant son chef, Pierre Poilievre.

La demande du NPD survient après que plusieurs comptes robots – ou «bots» –  sur la plateforme X ont vanté l’énergie d’un rassemblement du chef du PCC dans le Nord de l’Ontario la semaine dernière.

Le syndicat des employés et Postes Canada négocient depuis novembre 2023. 

Photo : Colby Winfield - Unsplash 

Ces comptes auraient diffusé des affirmations «absurdes», critique le NPD par communiqué. L’un d’entre eux aurait notamment «brav[é] le froid» pour rejoindre le rassemblement, «alors qu’une vague de chaleur sévissait». D’autres comptes, identifiés comme venant d’un autre pays, ont également publié des messages très similaires, parfois identiques.

Les communications du PCC ont nié que le parti ait quoi que ce soit à voir avec cette campagne.

Par ailleurs, des députés libéraux, tels que les Franco-Ontariens Vivianne Lapointe et Marc Serré, ont envoyé une lettre à Elon Musk, PDG de la plateforme X, afin de demander le partage de toute information concernant cette campagne.

C’est ce qui ressort d’une déclaration du Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP). Le Syndicat demande maintenant au gouvernement «d’aider les parties à dénouer l’impasse dans laquelle elles se trouvent», indique-t-il par voie de communiqué.

La présidente nationale du STTP, Jan Simpson, assure que «les offres patronales que nous avons reçues jusqu’à présent s’attaquent directement aux travailleurs et travailleuses, notamment à leur régime de retraite et à leurs avantages sociaux». «Aucun syndicat digne de ce nom n’accepterait de tels reculs.»

Ce constat a été dressé par le ministre fédéral de la santé, Mark Holland, mercredi. Il a affirmé qu’il y avait désormais 16 612 dentistes participants au programme, ce qui représente environ 75 % de tous les dentistes et spécialistes dentaires au Canada.

Ils étaient 11 500 le mois dernier selon la Presse canadienne. Plus de dentistes auraient pris la décision de participer au programme lorsque le gouvernement a modifié le processus d’inscription des prestataires, qui peuvent maintenant s’initier au programme avant de s’engager à long terme.

Selon Emmanuelle Marceau, les membres des communautés universitaires doivent se familiariser avec cette technologie pour pouvoir connaitre et comprendre les risques et les bénéfices. 

Photo : Courtoisie

L’intelligence artificielle générative est «une nouvelle réalité qui va s’accentuer dans les années à venir», prévient la professeure associée au département de médecine sociale et préventive à l’École de santé publique de l’Université de Montréal, Emmanuelle Marceau. Il faut donc s’adapter à sa présence.

Dans ce contexte, les professeurs doivent apprendre aux membres de la communauté étudiante à voir «l’intelligence comme un produit humain, voir ses forces, ses faiblesses, ses potentiels et ses risques», explique la professeure auxiliaire en français langue seconde et en intégration des technologies en contexte universitaire à la faculté d’éducation de l’Université d’Ottawa, Banafsheh Karamifar.

Transparence et éthique

Selon Marc Lanovaz, professeur à l’école de psychologie et d’éducation de l’Université de Montréal, la transparence reste la clé pour intégrer cette technologie.

Pour celles et ceux qui redoutent la multiplication des cas de plagiat, il précise que les étudiants peuvent déjà tricher sans avoir recours à l’intelligence artificielle.

Selon Marc Lanovaz, la transparence reste la clé pour intégrer l’intelligence artificielle. 

Photo : Sarah Latulippe

De plus, il rappelle qu’il y a peu de personnes qui produisent un travail plagié et qu’il faut aussi faire confiance à la grande majorité qui souhaite étudier et développer ses compétences.

Si les professeurs autorisent les étudiants à manipuler l’intelligence artificielle, ils ont la responsabilité «d’accompagner les étudiants et de les former à son usage responsable, parce qu’un étudiant ou une étudiante ne sait pas comment l’utiliser», précise Banafsheh Karamifar. Pour pouvoir transmettre un usage éthique de l’intelligence artificielle, il faut «l’intégrer dans la pratique pédagogique».

Les étudiants doivent donc s’informer, se familiariser et développer leurs connaissances pour une utilisation éthique et responsable de la technologie afin de comprendre les risques et les bénéfices, ajoute Emmanuelle Marceau.

L’intégration de l’intelligence artificielle ne peut se faire que par un effort de responsabilité collective, estime Martine Pellerin. 

Photo : Martine Pellerin

La professeure titulaire de l’Université de l’Alberta à la faculté Saint-Jean et spécialiste en technologie éducative et en évolution des technologies du numérique, Martine Pellerin, raconte avoir déjà donné à ses étudiants la tâche de documenter leurs utilisations et de porter un regard critique sur cette nouvelle technologie.

De son côté, l’Université d’Ottawa a mis en place des cours d’éthique et d’intelligence artificielle au sein des programmes de Génie pour former les étudiants à la littératie, informe Banafsheh Karamifar.

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Apprendre à l’utiliser

Le professeur au département de communication sociale et publique de l’Université de Québec à Montréal, Alexandre Coutant, tient aussi à rappeler que l’intelligence artificielle n’est pas un «un truc extérieur qui nous est arrivé, mais en fait c’est nous qui la faisons; c’est notre choix».

D’après lui, l’intelligence artificielle ne s’impose donc pas à nous; c’est l’être humain qui la façonne à sa manière par les fonctionnalités que lui-même a développées.

Pour éviter ainsi d’avoir des problèmes avec l’utilisation de l’intelligence artificielle, il faut «apprendre à connaitre la bête et apprivoiser la bête», illustre Martine Pellerin.

Dans ses formations, Martine Pellerin commence par faire comprendre ce qu’est l’intelligence artificielle aux éducateurs et aux étudiants. «Si on a une compréhension des algorithmes, on va vraiment avoir une meilleure façon de comprendre et de développer son jugement critique.»

La professeure critique toutefois le manque de formation adéquate sur le sujet pour les professeurs et les étudiants. Mentionner sur le syllabus l’autorisation d’utiliser l’intelligence artificielle n’est pas suffisant. Il faut, selon elle, expliquer aux étudiants ce qu’est cette technologie et déculpabiliser ceux qui souhaitent s’en servir pour appuyer leurs études.

Pour Banafsheh Karamifar, l’objectif aujourd’hui est d’intégrer l’intelligence artificielle dans la pratique pédagogique. 

Photo : Courtoisie

Roue de secours

Un bon usage de l’intelligence artificielle peut donc «servir à des principes de justice et d’équité dans nos sociétés», explique Emmanuelle Marceau.

Des personnes peuvent l’utiliser pour lutter contre le syndrome de la page blanche ou comme un outil pour se dépasser, donne en exemples Alexandre Coutant.

L’intelligence artificielle peut aussi aider des étudiants à comprendre des concepts méconnus ou être une branche de secours pour les personnes en situation de handicap, ajoute Marc Lanovaz.

Banafsheh Karamifar rappelle toutefois que l’intelligence artificielle n’est pas exemptée d’erreurs et peut aussi se tromper. Il est donc impératif de rester prudent et garder un esprit critique quand elle est utilisée.

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Responsabilité collective

Pour assurer un bon déploiement de l’intégration de l’intelligence artificielle à l’université, il faut déterminer collectivement quels sont les enjeux et les écueils de l’utilisation de cette technologie, établir de meilleures pratiques et rester ouvert à les revoir et les bonifier, explique Emmanuelle Marceau.

Pour y arriver, Banafsheh Karamifar encourage la mise en place de règles précises et claires au niveau institutionnel.

Il faut avoir des règles communes pour éviter que les professeurs choisissent eux-mêmes d’autoriser ou de refuser l’usage de cette technologie, défend de son côté Martine Pellerin. 

La professeure rappelle que l’université a une responsabilité de former une nouvelle génération capable de s’adapter à un monde qui est en constante évolution technologique rapide. 

Pour y arriver, il faut «que les étudiants, les professeurs et l’université soient dans ce dialogue et qu’ensemble ils développent des directives», précise Martine Pellerin.

Selon elle, intégrer les étudiants dans ce processus leur permet de bien comprendre l’importance de l’intégrité scolaire.

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Les survivant·es des pensionnats pour enfants autochtones parlent depuis longtemps du décès d’élèves et de leur enterrement au cimetière attenant à l’école. De nombreuses familles ont également partagé n’avoir jamais été informées du décès ou de la disparition d’un enfant. Un volume entier du rapport de la Commission de vérité et réconciliation du Canada (CVR) est d’ailleurs consacré à cette question.

Des recherches sont ainsi en cours pour retrouver la trace de ces enfants et pour trouver l’emplacement exact de tombes sans sépultures. 

Tandis que le Centre national pour la vérité et la réconciliation a pu retrouver jusqu’à présent 4139 noms d’enfants disparus, mon travail de soutien auprès des communautés autochtones effectuant le même travail laisse déjà entrevoir que ce nombre sera beaucoup plus élevé.

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De l’espoir à la déception

Il est d’ailleurs important de savoir que la plus grande partie du travail de recherche est effectué par des équipes créées par des Premières Nations ou encore par des organismes qui les représentent. Dans l’espace de quelques semaines, ces équipes ont vu leur travail reconnu, puis arrêté.

Le rapport historique de l’interlocutrice spéciale indépendante, Lieux de vérité, lieux de conscience, met en lumière la difficulté de ces recherches, l’état actuel des cimetières et des archives, ainsi que les réseaux complexes qui liaient les pensionnats à une série d’autres institutions où les enfants pouvaient être envoyés, et souvent mourir, à l’insu de leurs parents.

Cette publication valide les résultats préliminaires des équipes de recherche et aurait dû encourager le gouvernement fédéral à appuyer leur travail. Mais ce dernier a fait volteface et a annoncé une limite aux fonds disponibles pour ces recherches.

Parler de «plafonnement» est simplement une manière d’éviter le mot «coupures». Ces fonds avaient été promis plusieurs années après la publication du rapport de la CVR, qui les réclamait déjà, et seulement après l’annonce de la découverte de tombes sans sépultures aux anciens pensionnats de Kamloops et Marieval par les Premières Nations, qui avaient lancé ces recherches elles-mêmes.

La limite de 500 000 dollars par année fait qu’un nombre très restreint de personnes peuvent être embauché·es, que les voyages pour accéder aux archives, retrouver des survivant·es éparpillé·es partout au Canada seront limités ou qu’il sera plus difficile d’assurer la participation des survivant·es au processus.

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Des besoins à long terme

Dans son rapport provisoire de juin 2023, l’interlocutrice spéciale indépendante, Kimberly Murray, indiquait déjà une série de besoins liés notamment à l’accès aux documents et aux sites, aux délais à prévoir, à la protection contre les réponses du public allochtone ainsi qu’au soutien et au financement des équipes de recherche.

Pour que la recherche soit menée d’une bonne manière, la souveraineté des peuples autochtones doit être reconnue et le Canada doit assumer ses responsabilités.

Le travail ne peut se limiter à la recherche archéologique et à la recherche archivistique des données.

En effet, les abus et le nombre des décès n’étaient pas notés dans les documents officiels; ce sont les survivant·es qui ont préservé cette mémoire. Or, ces personnes sont désormais d’un âge avancé et leurs décès sont de plus en plus fréquents. Les communautés perdent donc la seule source possible d’information pour mener à bien certaines recherches.

Les membres des équipes de recherche doivent avoir la possibilité de recevoir des formations, afin de développer la capacité de recherche au sein des communautés autochtones. Elles pourront ainsi continuer à diriger leurs propres travaux… et éviter que des compagnies privées ne les arnaquent ou n’exploitent les ressources financières dédiées à ces projets.

Malgré de belles paroles en faveur de la vérité et de la réconciliation par le gouvernement de Justin Trudeau, le plafonnement du financement pour la recherche sur les résidents des pensionnats autochtones est en fait un recul sur une promesse. 

Photo : Domaine public

Un long chemin pour la réconciliation

Dans un contexte où même le Comité sénatorial permanent des peuples autochtones reconnait les défis et manquements actuels, la décision de limiter les fonds pour ces recherches par le gouvernement fédéral ne peut avoir que deux explications.

La première hypothèse est le paternalisme. Le gouvernement ne fait pas confiance aux capacités des peuples autochtones et désire contrôler davantage le processus . Il veut éviter que les Premiers peuples prennent le contrôle et exercent leur souveraineté. Il préfère que des experts externes soient embauchés.

Autrement dit, il veut éviter que l’expertise se développe dans les communautés autochtones. En limitant le financement, il maintient la dépendance des Premières Nations à son endroit ainsi qu’à l’endroit des centres d’archives qui ne sont pas gérés par les peuples autochtones et qui n’arrivent pas, eux non plus, à faire tout le travail nécessaire.

La seconde hypothèse est plus cynique. C’est que le gouvernement, ou les organismes et institutions qui font pression sur lui, ne veulent pas que ce travail se fasse. 

En effet, le travail actuel reste critique. Les témoignages des survivant·es lors des travaux de la CVR ont montré ce que les enfants et adolescent·es ont vu, le travail dans les archives disponibles à l’époque a exposé les politiques étatiques.

Mais avant d’avoir accès aux archives qu’ouvrent désormais peu à peu les églises et les congrégations religieuses, nous ne savions pas comment les pensionnats étaient gérés et opérés, ni quelles étaient les politiques mises en place par les religieux sur place. Cette connaissance semblait à portée de main… Elle est désormais beaucoup plus éloignée.

Il est toujours difficile, voire impossible, pour les peuples autochtones de faire confiance aux églises ou à l’État pour ce travail, étant donné la teneur des relations et surtout la responsabilité pour les torts causés par les écoles. Sans oublier les morts d’enfants et le non-respect des corps.

D’une manière ou d’une autre – et en fait des deux –, le gouvernement agit à l’encontre de la volonté de réconciliation qu’il revendique pourtant, et détruit à nouveau une partie du travail de réconciliation qui a eu lieu jusqu’à présent.

La saison touristique bat son plein partout au pays, des hordes de visiteurs envahissent de nombreux sites naturels et des villes emblématiques. Pour éviter ce trop-plein de touristes, certaines destinations pionnières ont pris le taureau par les cornes.

Elizabeth Halpenny pointe du doigt la communication des influenceurs sur les réseaux sociaux qui encourage la prise d’assaut de certains sites touristiques. 

Photo : Courtoisie

La municipalité des Îles-de-la-Madeleine a ainsi décidé de faire payer une redevance touristique de 30 dollars. L’objectif est double : l’aider à préserver le territoire, mais aussi prendre en charge les couts associés au tourisme de masse, comme la gestion des déchets dont la quantité explose en été. En revanche, face aux critiques, les autorités madelinoises ont reculé et la redevance est maintenant optionnelle.

«Le caractère obligatoire a soulevé de nombreux débats sur comment justifier l’accès payant à un territoire public canadien, comment savoir qui est local de qui ne l’est pas», rapporte le professeur au Département d’études urbaines et touristiques à l’Université du Québec à Montréal, Luc Renaud.

Des taxes pour préserver le patrimoine

Aux yeux d’Elizabeth Halpenny, professeure spécialiste du tourisme à l’Université d’Alberta, «il faut trouver un bon équilibre».

«On doit éviter que les touristes ne viennent plus, car ils génèrent des retombées économiques essentielles, mais en même temps il me semble normal qu’ils paient aussi une certaine redevance pour participer à l’entretien du patrimoine touristique.»

Pour Rachel Dodds, les contraintes de la société font que certaines familles sont limitées par les vacances scolaires ou l’été. 

Photo : Courtoisie

De son côté, la Première nation Tla-o-qui-aht, située en Colombie-Britannique, a mis en place une taxe volontaire appelée Tribal Park Allies donation (Don des alliés du parc tribal, traduction libre). Les entreprises touristiques sont invitées à verser 1 % de leurs recettes pour contribuer à la gestion des terres.

«À ma connaissance, aucune autre destination au Canada n’a mis en place de tels systèmes, mais je suis certaine que beaucoup envisagent de le faire», observe de son côté la professeure de gestion du tourisme à l’Université métropolitaine de Toronto, Rachel Dodds.

Ces taxes permettent en effet de récolter des fonds pour remédier aux problèmes écologiques et sociaux engendrés par le surtourisme. Selon Elizabeth Halpenny, l’argent perçu peut être également réinvesti dans des campagnes de sensibilisation des vacanciers sur la manière correcte d’interagir avec les résidents, de respecter la culture et l’environnement.

Le surtourisme, ou quand voyage rime avec dommage

Les chercheurs parlent de surtourisme quand l’excès de tourisme nuit à la conservation d’une œuvre ou d’un espace; lorsque le nombre de touristes vient dégrader la qualité même de la visite et quand on assiste à des réactions de rejet des populations locales, comme récemment aux iles Canaries, dans les Cyclades ou à Barcelone.

«Le seuil de tolérance des habitants s’est abaissé depuis la fin de la pandémie, car pendant la COVID-19, ils se sont réapproprié leur territoire et ils ne veulent plus revoir les touristes», constate Selma Zaiane-Ghalia, professeure à l’École de kinésiologie et de loisir de l’Université de Moncton.

«Les gens manifestent leur mécontentement, car leurs espaces de vie deviennent des espaces touristiques, les commerces de proximité disparaissent et sont remplacés par des boutiques de souvenirs, les prix des loyers explosent», poursuit Luc Renaud. 

Selon le spécialiste, «la situation n’est pas comparable au Canada, mais il faut être prudent». Depuis la fin de la pandémie de COVID-19, le trafic aérien a atteint de nouveau des pics de fréquentation.

Se faire oublier

Les redevances ne dissuadent pas pour autant les visiteurs. «Certaines destinations sont devenues des listes de choses à faire. Si vous avez toujours voulu aller à Venise, aucune somme d’argent ne vous en empêchera», confirme Rachel Dodds.

La chercheuse prend l’exemple du mont Kilimandjaro, en Tanzanie. Depuis une dizaine d’années, les touristes doivent débourser 600 dollars US pour grimper le sommet, «mais tout le monde paie parce que tout le monde veut escalader cette montagne mythique».

Pour lutter contre le surtourisme, d’autres sites, à l’image du Machu Picchu au Pérou, ont mis en place des quotas journaliers ou annuels de visiteurs. Luc Renaud estime que ces quotas ne sont «pas nécessairement applicables», car «le nombre d’arrivées est difficile à contrôler» dans certains lieux touristiques.

La municipalité des Îles-de-la-Madeleine a décidé d’instaurer une taxe touristique de 30 dollars pour préserver son territoire et l’aider à gérer les infrastructures. 

Photo : Marc-Lautenbacher – Wikimedia

Un avis que ne partage pas Elizabeth Halpenny : «Ça peut se révéler efficace si c’est bien administré, avec des procédures de réservation longtemps à l’avance pour accéder aux sites.»

Des collectivités promeuvent des circuits alternatifs, en dehors des sentiers battus. Des sites ont également changé leur façon de communiquer. Certains ont opté pour le silence, quand d’autres vont jusqu’à faire du déréférencement sur Internet ou du démarketing, en véhiculant des images de plages bondées ou de stationnements sauvages.

Les Îles-de-la-Madeleine ont ainsi arrêté toute campagne publicitaire dans les médias nationaux et n’envoient plus de représentant dans les salons de tourisme.

En Alberta, l’association touristique de Banff – Lac Louise et le parc national de Banff, qui a accueilli plus 4,3 millions de visiteurs en 2023, ne diffusent plus aucune image en été.

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L’option des tarifs préférentiels

La pratique de la tarification différenciée en fonction de l’origine, peu répandue au Canada, existe dans de nombreux pays.

Au Taj Mahal, en Inde, au Machu Picchu, au Pérou, dans des parcs nationaux au Kenya, les tarifs d’entrée pour la population locale peuvent être 10 fois moins chers que pour les voyageurs étrangers.

Au Royaume-Uni, les Londoniens paient seulement 1 livre sterling pour visiter la Tour de Londres, contre plus de 13 livres pour les autres.

«Il faut arrêter de “faire” des pays, il faut les vivre»

«Les destinations canadiennes essayent de répartir les visites tout au long de l’année, d’inciter les vacanciers à venir en automne ou au printemps», explique la présidente-directrice générale de l’Association de l’industrie touristique du Canada, Beth Porter.

Elizabeth Halpenny note cependant que beaucoup de facteurs échappent à l’industrie, «à commencer par la communication des influenceurs sur les réseaux sociaux qui encourage la prise d’assaut de certains sites».

Des sites touristiques albertains très populaires, comme le parc national de Banff, ne font plus de promotion pour attirer les visiteurs l’été. 

Photo : Camille Langlade

Pour mieux réguler les flux touristiques et éviter les pics d’engorgement, les chercheurs proposent une autre manière de voyager, plus écologique et responsable. Autrement dit, partir à l’autre bout du monde moins souvent, mais plus longtemps et, le reste du temps, redécouvrir les richesses de sa région.

«On aura du mal à diminuer le nombre de touristes, on ne peut pas empêcher les gens de voyager, c’est humain d’avoir envie de découvrir, considère Luc Renaud. Mais on peut réduire l’empreinte écologique et sociale de ses voyages.»

«Il faut arrêter de “faire” des pays, il faut les vivre, prendre le temps de faire des rencontres, d’aller dans les musées, on n’a pas besoin de tout voir», renchérit Selma Zaiane-Ghalia à l’Université de Moncton, qui dénonce une course effrénée aux monuments, aux photos et aux vidéos.

Éveiller les consciences 

Néanmoins, tout le monde ne peut pas se permettre d’adapter son calendrier et son choix de destination.

Pour Selma Zaiane-Ghalia, «il faut arrêter de “faire” des pays, il faut les vivre». 

Photo : Courtoisie

«Voyager un mois hors saison c’est l’idéal, mais les contraintes de la société font que les familles sont limitées par les vacances scolaires et de nombreuses personnes sont limitées aux mois d’été», reconnait Rachel Dodds.

Face aux excès du tourisme de masse, Selma Zaiane-Ghalia appelle à l’éveil des consciences dès le plus jeune âge. «Les éducateurs doivent sensibiliser les prochaines générations au respect de la nature et à l’importance de s’imprégner d’autres cultures.»

Dans une société individualiste où l’essor des compagnies aériennes à bas tarif a cassé les frontières, rendant accessibles les pays plus reculés, le pari est loin d’être gagné.

Convaincre les gens de changer leurs habitudes est d’autant plus difficile en voyage, «où l’on ne veut pas de contraintes», observe Luc Renaud. À l’autre bout du monde, les gestes écoresponsables s’oublient vite.

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Douceur fransaskoise

Ce printemps, l’autrice-compositrice-interprète fransaskoise Alexis Normand présentait quelques-unes de ses plus belles chansons francophones. Avec Empreintes, elle nous invitait dans un univers rempli de tendresse et de mélancolie.

Elle a fait appel à deux réalisateurs chevronnés, Marc Pérusse et James Bunton, qui ont bien su comprendre son univers folk auquel ils ont ajouté des nuances de blues et de jazz.

Couverture de l’album Empreintes d’Alexis Normand. 

Photo :alexisnormand.com 

La douceur de la voix d’Alexis livre toute la puissance de chaque mot. Ces chansons nous interpellent sur divers sujets, comme l’exploitation des ressources naturelles, la richesse de la famille et le retour aux sources.

Ce nouvel album comprend une dizaine de chansons, dont quelques petits bijoux savoureux. Il faut  parle de l’exploitation des ressources naturelles avec une force extraordinaire.

Le country folk Tous les matins est vraiment touchant et offre un beau moment de tendresse. L’album se termine par un duo avec Daniel Lavoie Sing me home. Il s’agit de l’une des plus belles chansons de la Fransaskoise. Cette ode au retour aux sources est tout à fait sublime.

Depuis environ une quinzaine d’années, Alexis Normand a forger un parcours musical qui démontre toute sa richesse artistique. Avec Empreintes, elle offre une parcelle de ses plus belles chansons. Elle nous livre un univers folk riche et une voix remplie de tendresse.

Sing me home
Album : Empreintes

Bijou caché en Alberta

Mon plus grand plaisir lorsque je fais des commentaires sur des albums, c’est de découvrir de petits bijoux irrésistibles. Tel est le cas avec Girlz with Guitarz, un trio féminin de la région de Plamondon, en Alberta.

Couverture du EP de Girlz with Guitarz. 

Photo : girlzwithguitarz.ca

Ce trio est composé des sœurs Tracy Gauthier Lord et Karen Gautier Levoir accompagnées de leur tante Michèle Gauthier. Ces multi-instrumentistes aux voix harmonieuses nous captivent avec un univers folk dont la richesse se trouve dans les arrangements musicaux. Les harmonies vocales constituent souvent la force maitresse des chansons proposées.

Girlz with Guitarz débutent leur EP avec l’un des plus beaux textes de l’album, Langage de la poésie. Mon corps dit en est un autre sur le mal d’amour. La pièce maitresse est sans aucun doute Feel Good chanson. Une superbe valse country sur un texte vraiment touchant.

Le trio de musiciennes folk offre un EP éponyme des plus intéressants. Le temps de six chansons, Tracy, Karen et Michèle offrent un univers folk riche et harmonieux.

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Langage de la poésie
Album : EP Girlz with Guitarz

Musique à tous les étages 

Au printemps 2020, Soir de semaine lançait son 3e album, Au gré du vent. Cette formation du Yukon poursuivait ainsi sa démarche artistique avec originalité et diversité.

Couverture de l’album Au gré du vent du groupe yukonnais Soir de semaine. 

Photo : soirdesemaine.com

La diversité des genres musicaux est une force pour Soir de semaine. Rock, pop rock, ska et reggae, de plage en plage, l’auditeur est interpellé par une humeur différente et ne s’ennuie jamais. En revanche, les thèmes ne sont pas dépaysants : la famille, les amis, les fêtes ou encore les voyages.

Champagne m’a beaucoup séduit avec un reggae digne du groupe The Police. La pièce titre, Au gré du vent, également offerte en version instrumentale, se démarque également par une belle musicalité. Tes yeux est un autre excellent texte inspirant, appuyé par une belle trame musicale.

Parlant de trame musicale, je termine mon commentaire par Olivier. Une belle pièce instrumentale avec une progression d’accord qui nous captive de seconde en seconde.

Soir de semaine, ce sont des musiciens talentueux et généreux à l’énergie communicative, qui a offert un merveilleux 3e opus à la musicalité solide et aux textes puissants.

Champagne
Album : Au gré du vent

Marc Lalonde, dit Lalonde des ondes, est chroniqueur musical depuis plus de 25 ans au sein de la francophonie musicale canadienne et animateur de l’émission radiophonique Can-Rock. Il se fait un malin plaisir de partager cette richesse dans 16 stations de radio à travers le pays chaque semaine.

Le chef héréditaire Dasta’hyl (en haut à droite) a participé à la conférence de presse d’Amnistie internationale par vidéoconférence et d’Ana Piquer (au bas), puisqu’il est assigné à résidence. 

Photo : Capture d’écran

Prisonnier d’opinion et élections partielles

L’organisme Amnistie internationale a déclaré que le chef Wet’suwet’en Dsta’hyl était le premier «prisonnier d’opinion» au Canada.

Ce dernier a été visé en 2020 par une injonction de la Cour suprême de la Colombie-Britannique qui lui interdisait, lui et d’autres militants, de bloquer la construction du gazoduc Coastal GasLink (CGL) qui traverse leur territoire ancestral et pour lequel les chefs héréditaires Wet’suwet’en disent ne pas avoir donné leur accord.

«[Ces] actions [de défense], sont pacifiques et protégées en vertu des droits humains à la liberté d’expression et de réunion pacifique», affirme l’organisation dans un communiqué.

Plus tôt ce mois-ci, le chef Dsta’hyl a été condamné à 60 jours d’assignation à résidence pour ne pas avoir respecté l’ordonnance du tribunal. 

«Cette lutte dure depuis 240 ans. Nous avons été incarcérés dans les réserves où ils nous ont transformés en “Indiens inscrits”. Aujourd’hui, nous sommes tous des prisonniers de conscience en raison de ce que les colons nous ont fait subir», a-t-il déclaré.

«Amnistie internationale demande la levée immédiate et inconditionnelle de son assignation à résidence et la fin de la criminalisation des défenseur·e·s des terres des Wet’suwet’en dans un contexte d’urgence climatique globale», signale dans le communiqué la directrice régionale pour les Amériques d’Amnistie internationale, Ana Piquer.

Le bureau du ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, n’a pas désiré commenter la déclaration d’Amnistie internationale.

Un prisonnier d’opinion?

Amnistie internationale est à l’origine du terme «prisonnier d’opinion» et le définit comme «toute personne emprisonnée ou soumise à d’autres restrictions physiques (comme l’assignation à résidence), uniquement en raison de ses convictions politiques, religieuses ou autres, de son origine ethnique, de son sexe, de sa couleur de peau, de sa langue, de son origine nationale ou sociale, de sa situation socioéconomique, de sa naissance, de son orientation sexuelle, de son identité ou expression de genre, ou de toute autre situation», décrit un communiqué de l’ONG.

Ce statut de prisonnier d’opinion englobe par ailleurs des personnes n’ayant pas eu «recours à la violence ni prôné la violence ou la haine» dans le cadre de leur arrestation.

Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé des élections partielles dans les circonscriptions de LaSalle–Émard–Verdun, à Montréal au Québec, et de Elmwood–Transcona, au Manitoba. Elles auront lieu le 16 septembre.

La première a été remportée par les libéraux aux trois dernières élections.

Lundi, Dominic LeBlanc, a annoncé que les mesures de protection mises en place pour les élections partielles de 2023 seront mises en œuvre pour toutes les élections partielles à venir. Ces mesures ont pour but de protéger les élections de potentielles tentatives d’ingérence étrangère.

Le dernier député de la circonscription de LaSalle–Émard–Verdun, à Montréal, était l’ancien ministre de la Justice David Lametti, qui s’est retiré de la vie politique en janvier 2024. 

Photo : Inès Lombardo – Francopresse

L’ancien député de la circonscription de Elmwood–Transcona, au Manitoba, était le néodémocrate Daniel Blaikie. 

Photo : Courtoisie page Facebook Daniel Blaikie

Discrimination, hypothèques et concurrence dans le transport

Un rapport interne de la fonction publique obtenu par la Coalition contre la discrimination en milieu de travail dévoile qu’il y aurait de la discrimination envers les employés racialisés du Bureau du Conseil privé.

Dans son communiqué, la Coalition dénonce des «stéréotypes raciaux», des «microagressions» et de la «violence verbale».

Le Bureau du Conseil privé est un organe gouvernemental qui aide le premier ministre et son Cabinet à mettre en œuvre leur politique.

Le mot en «N» aurait été employé et, sur le plan professionnel, des employés blancs auraient eu davantage d’opportunités d’avancement que leurs collègues noirs.

Le gouvernement fédéral n’a pas suffisamment suivi les recommandations du rapport, selon la Coalition. Par ailleurs, un recours contre le gouvernement en cours allègue qu’environ 30000 fonctionnaires noirs ont perdu des opportunités du fait de leurs origines ou couleurs de peau depuis les années 1970.

À lire : Racisme dans la fonction publique : un Plan d’action insatisfaisant

La ministre fédérale des Finances, Chrysta Freeland, a annoncé que les prêts hypothécaires pourront être offerts avec une période d’amortissement pouvant aller jusqu’à 30 ans. Les remboursements mensuels seront alors moins élevés, ce qui rendra l’achat d’une première propriété plus abordable aux Canadiens.

Cette mesure est entrée en vigueur jeudi et fait partie de la charte hypothécaire canadienne bonifiée. Elle devrait aider «davantage ces jeunes à devenir propriétaires, tout en encourageant la construction d’un plus grand nombre de logements», peut-on lire dans le communiqué de Finances Canada. 

Cette mesure faisait partie du budget 2024-2025.

À lire : Budget 2024 : Ottawa garde une petite place pour la francophonie

Une étude de marché a été lancée par le Bureau de la concurrence sur la qualité et la concurrence du transport aérien au Canada. 

Photo : John MacArthur – Unsplash

Une étude de marché servira à observer la concurrence dans l’industrie du transport aérien au Canada et déterminer comment l’améliorer.  

Elle mettra aussi en lumière «les obstacles qui empêchent les Canadiens et Canadiennes de faire des choix éclairés en matière de transport aérien», détaille le communiqué

Il s’agit également de faire un état des lieux de la concurrence dans le transport intérieur. Les conclusions des observations seront développées dans un rapport final qui devrait être publié en juin 2025.

Il est possible de soumettre des observations jusqu’au 31 aout 2024.

Pendant près de 15 ans, de 2001 à 2015, deux grands fabricants – Weston et Canada Bread – ainsi que cinq détaillants – Loblaw, Sobeys, Metro, Walmart Canada et Tigre Géant – auraient fixé les prix du pain en épicerie. Le stratagème aurait permis à ces entreprises d’engranger un surprofit de près de 5 milliards de dollars durant cette période.

Le règlement survenu la semaine dernière permet à Loblaw et Weston de mettre fin aux actions collectives contre elles. Bien que le montant puisse paraitre énorme, ce n’est que l’équivalent d’une petite tape sur les doigts plutôt qu’une punition sérieuse, vu les profits excédentaires possiblement enregistrés et la taille des entreprises visées.

Une tape sur les doigts

Loblaw et Weston avaient reconnu leur responsabilité dans cette affaire dès 2017, après l’ouverture d’une enquête du Bureau de la concurrence. Loblaw avait offert un remboursement de 96 millions de dollars à ses clients à l’époque. Ce montant est donc déduit du règlement qui vient d’être conclu. Weston paiera 247,5 millions. Loblaw acquittera les 156,5 millions restants.

Pour le géant de l’alimentation, cela représente au final un recul du profit net de son dernier trimestre de 10 % par rapport à la même période l’an passé. Son profit trimestriel s’élève tout de même à 457 millions de dollars sur un chiffre d’affaires de près de 15 milliards. Pas de quoi s’énerver. L’action de l’entreprise a perdu 3 % le jour de l’annonce, mais a vite remonté le lendemain.

Les résultats de l’enquête du Bureau de la concurrence, eux, se font toujours attendre, depuis sept ans maintenant.

Canada Bread, l’autre fabricant impliqué dans cette affaire qui détient les marques Dempster’s et POM notamment, a reconnu sa responsabilité l’année dernière et a été condamné par le Bureau de la concurrence à payer une amende de 50 millions de dollars. Encore une fois, cette somme peut paraitre bien faible par rapport à l’ampleur de la fraude.

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Les limites de la police antitrust

Le Bureau de la concurrence est le principal gendarme qui s’occupe de protéger la concurrence. Il traite les plaintes et lance des enquêtes quand des entreprises sont soupçonnées de fixer les prix.

L’enquête interminable du Bureau et les montants dérisoires des amendes et règlements dans le cas du cartel du pain ne laissent cependant présager rien de bon quant à l’avenir de l’antitrust au Canada.

Le cas de la fixation des prix du pain ne devrait pas prendre plus de sept ans à régler. Après tout, les deux instigateurs du stratagème, Weston et Canada Bread, ont reconnu leur responsabilité et participent à l’enquête. Des courriels font expressément référence à l’entente. Il y a des preuves écrites. C’est un cas classique de fixation des prix, et non une ruse très élaborée.

Si le Bureau de la concurrence peine à mener cette enquête à bien, comment peut-on croire qu’il aboutira dans des cas plus complexes? Il vient d’ailleurs d’entamer ce printemps une enquête contre les géants de l’épicerie Sobeys et Loblaw, qui limiteraient la concurrence par l’entremise de leur contrôle immobilier.

Ces entreprises ne sont pas que des épiciers; elles gèrent aussi des divisions dans la pharmacie, le vêtement, les services financiers et, oui, les investissements immobiliers.

Le Bureau de la concurrence soupçonne ces épiciers de contrôler le type de commerce qui peut s’établir dans les centres commerciaux par l’entremise d’ententes restrictives ou directement d’acheter des terrains vacants pour empêcher d’éventuels compétiteurs de s’installer et de les concurrencer.

Ce type de pratiques qui limitent la concurrence seront assurément plus complexes à prouver que le cas du cartel du pain.

La confiance du public

L’alimentation n’est pas le seul secteur économique où l’on observe une grande concentration des entreprises. Le secteur du transport aérien, le raffinage et la distribution d’essence ou la téléphonie cellulaire sont quelques autres exemples de biens et services qui coutent plus cher au Canada qu’ailleurs.

On peut évidemment soupçonner que des pratiques anticoncurrentielles sont la cause de ces prix élevés, mais encore faut-il le prouver. Seul un régulateur fort disposant de moyens conséquents peut y arriver.

Au-delà de l’impact économique sur nous tous, c’est surtout la confiance du public qui est en jeu dans ces histoires. Les pratiques anticoncurrentielles peuvent prendre de nombreuses formes et ne se limitent pas à des ententes directes sur les prix.

Les consommateurs doivent avoir des recours et avoir confiance que les institutions publiques qui les protègent ont les moyens de faire valoir leur droit, surtout devant des entreprises milliardaires qui opèrent à la grandeur du pays. Pour l’instant, les résultats sont, au mieux, mitigés.