le Vendredi 26 Décembre 2025

À l’extérieur du Québec, les services d’établissement en français sont majoritairement financés par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) à partir d’un système d’appels de proposition. La présente période de financement prend fin en mars 2025 et la prochaine s’amorce le 1er avril pour une durée de trois ans.

À l’heure actuelle, plus de 250 points de service financés par IRCC offrent des services en français à l’extérieur du Québec.

Malgré cela, des immigrants et immigrantes francophones sont parfois contraints de recourir à des services en anglais seulement, comme rapporté par Francopresse plus tôt cette année.

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Un casse-tête incomplet

Selon le coordonnateur du Réseau de soutien à l’immigration francophone du Nord de l’Ontario, Thomas Mercier, «même si on commence à voir l’arrivée d’un flux de migration plus organisé qui commence à se structurer, […] encore beaucoup de gens arrivent sans rien connaitre, complètement perdus».

Selon Thomas Mercier, les services d’établissement sont cruciaux pour la viabilité à long terme des communautés. 

Photo : Courtoisie

Un «gros facteur», explique-t-il, c’est le manque de services en français. «On est en train de se battre pour avoir des services d’établissement dans l’ensemble des régions.»

Il précise que la dernière période de financement d’IRCC a certes permis d’établir les premiers services d’établissement en français dans le Nord de l’Ontario – notamment à Sudbury, Timmins, Hearst, Kapuskasing et Thunder Bay –, mais il en manque encore à North Bay, Temiskaming Shores et Sault-Ste-Marie, par exemple.

Et l’Ontario français a aussi essuyé des refus pour la dernière période de financement, comme dans le district d’Algoma et aussi à Sudbury, où l’organisme Contact interculturel francophone de Sudbury avait demandé un appui pour faciliter la réinstallation de personnes réfugiées.

«Il [manque] encore des morceaux du casse-tête, mais on a des morceaux qui se mettent en place graduellement au fil du temps, surtout à comparer à 2018 où il n’y avait rien. On est loin de cette situation», tempère Thomas Mercier.

D’autres régions du pays connaissent aussi des difficultés.

Emmanuel Nahimana espère que les négociations entre la FANE et IRCC seront fructueuses. 

Photo : Courtoisie

Le directeur général adjoint de la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse (FANE), Emmanuel Nahimana, a lui aussi des inquiétudes. «On ne connait pas encore ce qui va être offert, mais l’objectif pour nous, c’est de pouvoir garder nos acquis […] de garder les services existants pour pouvoir vraiment servir et répondre aux besoins des immigrants.» 

La FANE a également demandé plus de fonds pour offrir de nouveaux services et attendait toujours la réponse au moment de publier.

Au Yukon, la directrice du développement économique de l’Association franco-yukonnaise, Édith Bélanger, indique aussi avoir demandé plus de moyens auprès d’Ottawa «pour être capable de répondre à la demande».

Elle précise que le français connait un essor au Yukon et que ce territoire devient de plus en plus un premier point d’arrivée au Canada.

«J’ai toujours une petite inquiétude tant que ce n’est pas signé, mais en principe, ça va quand même bien», dit Édith Bélanger au sujet des services d’établissement en français au Yukon. 

Photo : Courtoisie

Déjà des refus

«[IRCC] est actuellement en négociations pour conclure les ententes avec les organisations dont les demandes ont été retenues dans le cadre de l’appel de propositions», précise Rémi Larivière, un porte-parole d’IRCC, dans un courriel.

Pour des raisons de confidentialité, il n’est pas en mesure de révéler quels fournisseurs de services ont été retenus pour les négociations. 

L’Assemblée communautaire fransaskoise (ACF) fait partie des organismes dont la proposition n’a pas été retenue, confirme son directeur général, Ronald Labrecque. IRCC ne lui a pas fourni de raison, mais il voit un possible lien entre ce refus et le resserrement de la porte d’entrée migratoire du Canada.

Malgré les tentatives d’Ottawa de diminuer l’immigration générale, les cibles en immigration francophone hors Québec demeurent inchangées. Mais selon Ronald Labrecque, le gouvernement fédéral pourrait vouloir éviter d’ajouter de nouveaux points de service alors qu’il tente de ralentir les arrivées.

Le directeur général perçoit toutefois un «soleil à travers les nuages dans une perspective à moyen, long terme» : avec la modernisation de la Loi sur les langues officielles (LLO) effectuée en 2023, même si un gouvernement souhaite minimiser l’immigration au Canada, «il faut qu’il y ait une priorité au niveau de la francophonie».

La Politique en matière d’immigration francophone, enchâssée dans la nouvelle LLO, stipule justement que «pour traduire une hausse des admissions d’immigrants d’expression française en une augmentation du poids démographique, plusieurs conditions de réussite doivent être réunies, comme […] la prestation de services essentiels en français».

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Éviter le «plaster temporaire»

Les services d’établissement permettent de «connecter [les nouveaux arrivants] vers les institutions francophones», explique Thomas Mercier. 

Le service francophone va savoir qu’il y a des garderies, des écoles primaires, secondaires, postsecondaires, des services de santé, des évènements communautaires, des spectacles de musique, des lieux où les gens se rassemblent, des opportunités d’emploi [en français]

— Thomas Mercier

«Tout ça va faire en sorte qu’il y a beaucoup plus de chance qu’après une, deux, trois générations, la famille nouvelle arrivante francophone soit toujours francophone.»

Selon Thomas Mercier, si l’on continue de renouveler les vagues d’immigrants francophones sans faciliter leur intégration au sein des communautés francophones, alors l’immigration devient un «plaster temporaire» au déclin du français. 

«Il faut qu’à terme, ils fassent partie de la communauté franco-ontarienne, qu’ils contribuent, et que leurs descendants soient de fiers Franco-Ontariens qui font partie d’institutions francophones, qui parlent encore français, qui se battent encore pour leur langue, estime le coordonnateur. C’est comme ça qu’on va faire de la vitalité à long terme.»

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En ligne et dans la culture populaire, l’effet Dunning-Kruger est utilisé pour expliquer pourquoi les personnes qui ont peu de connaissances dans un domaine donné se croient plus compétentes qu’elles ne le sont vraiment, parfois même plus que les spécialistes du domaine en question.

Après avoir vu quelques vidéos au fil des ans, le sujet était déjà en partie maitrisé. Cet éditorial devait présenter cet effet afin que vous y soyez sensibles et que vous puissiez éviter d’en être victimes.

Sauf que cette définition de l’effet Dunning-Kruger est erronée.

Tout ce que l’étude des sociologues David Dunning et Justin Kruger a pu montrer en 1999, c’est que le commun des mortels se croit aussi bon sinon meilleur que la moyenne des gens. Inversement, les personnes plus compétentes sous-estiment leurs habiletés.

Les chercheurs ont demandé à des étudiants et étudiantes de répondre à des tests écrits, puis de donner d’abord leur avis sur leur propre niveau de réussite et ensuite sur leur niveau de réussite par rapport aux autres.

Les données de l’étude semblaient montrer que plus le résultat obtenu était mauvais, plus l’écart entre la perception de la réussite et la réalité était grand.

En plus d’avoir été mal interprétés par certaines personnes, les résultats de cette première étude dans le domaine sont contestés.

Même si elle a pu être reproduite par d’autres équipes de recherche, elle a mené à des résultats différents quand le niveau de difficulté des tests variait.

Aussi, selon d’autres scientifiques, les résultats s’expliqueraient au moins en partie par un effet statistique.

À lire : Notre cerveau primitif : pourquoi croit-on toujours avoir raison? (éditorial)

Varier ses sources d’information

Sans recherche supplémentaire, ou avec une recherche limitée à des vidéos sur YouTube présentant une version inexacte des conclusions de Dunning et Kruger, le présent texte aurait perpétué une mauvaise information.

Heureusement, puisque même un éditorial, ou tout bon texte d’opinion, doit reposer sur des faits vérifiables, il fallait creuser le sujet.

Après la consultation de sources de plus en plus variées sur l’étude et les résultats, il est devenu évident que la véritable définition de l’effet Dunning-Kruger n’était pas la même que celle qui est la plus couramment diffusée.

Seul un approfondissement du sujet a permis aussi d’apprendre qu’il ne bénéficie pas d’une reconnaissance unanime dans le milieu scientifique et qu’il est remis en question par d’autres recherches.

Cette conclusion vaut pour tout sujet d’actualité. Pour bien comprendre une nouvelle, il est préférable de ne pas lire la version d’une seule source. Il faut consulter des médias variés et des médias aux points de vue différents.

Cela ne veut pas dire qu’il faut visiter des sites de nouvelles spécialisées dans la désinformation, mais plutôt qu’il faut lire sur un même sujet un texte écrit par un média de droite, un média de gauche et un média reconnu comme étant plus neutre pour arriver à faire plus facilement la part des choses. À se former une opinion plus éclairée.

David Dunning le dit lui-même : pour sortir de l’effet, il faut toujours chercher à en apprendre plus, à demander l’avis d’autres personnes et à remettre en question ce que l’on sait.

Que l’effet soit réel ou non, ce sont de bons conseils.

À lire : Une «tempête parfaite» pour la désinformation électorale

Le débat en français, qui a eu lieu le 24 février, a été plus laborieux pour les candidats, en particulier pour Mark Carney. Le favori de la course a trébuché à quelques reprises et ses adversaires, Chrystia Freeland et Karina Gould, ont aussi dû répondre à des questions des journalistes à propos du niveau de français des uns et des autres. 

Les analystes et les journalistes prévoyaient que le débat en anglais du 25 février serait plus dynamique. Les échanges ont effectivement été plus fluides, moins entrecoupés d’hésitations, mais surtout plus nombreux entre les adversaires.

À lire aussi : Course libérale : un débat en français qui parle peu du français

Aucune mention des francophones

Si les francophones en situation minoritaire ne se sont pas taillé une grande place au débat en français, ils ont été complètement invisibles lors du débat en anglais. Aucun des candidats n’a mentionné la francophonie hors Québec, malgré avoir abordé des sujets chers à cette communauté, comme la santé.

Le français au Québec n’a pas été discuté non plus.

Mark Carney est le seul candidat à avoir mentionné la langue, lorsqu’il a dit que face à Donald Trump, il n’y aura aucune concession sur la langue, la culture et l’eau du Canada. Il avait dit la même chose en français le jour précédent.

Mark Carney avertit qu’il ne faut pas sous-estimer Donald Trump. 

Photo : Marianne Dépelteau - Francopresse

Augmenter la productivité

Les menaces tarifaires des États-Unis et le cout élevé de la vie au Canada ont donné lieu à de longues discussions sur l’économie. 

Selon Mark Carney, les salaires n’ont pas suivi l’augmentation du cout de la vie. Parmi ses propositions : réduire les impôts de la classe moyenne et augmenter la concurrence, notamment en transport et dans les épiceries. 

Il estime aussi qu’il faut maintenir les «progrès effectués par le gouvernement actuel», comme les soins dentaires, la garde des jeunes enfants et le régime d’assurance médicaments. 

Mais pour maintenir ces programmes, il faut être fiscalement plus responsable. Il prône une réduction des dépenses et une augmentation des investissements.

Pour le Québécois Frank Baylis, il faut augmenter la productivité, quelque chose qu’il dit pouvoir accomplir grâce à sa double expérience comme politicien et comme homme d’affaires. Il a aussi promis qu’il construirait deux oléoducs. 

Chrystia Freeland estime qu’il faut davantage consolider les relations avec nos alliés. 

Photo : Marianne Dépelteau - Francopresse

Chrystia Freeland voit dans les menaces économiques de Donald Trump une «occasion en or» pour augmenter la productivité, notamment en réduisant les barrières au commerce entre les provinces.

Si plusieurs consensus ont émergé entre Mme Freeland et M. Carney, ils se sont distingués sur un point lors des mêlées de presse : elle coupera dans la fonction publique, mais pas lui.

Pour rééquilibrer le budget, «pas de coupes dans la fonction publique, pas de coupes dans les transferts aux provinces et pas de coupes dans les transferts aux individus, mais une augmentation forte de la productivité des programmes [gouvernementaux]», dit Mark Carney.

Selon le favori de la course, ça fait trop longtemps que le gouvernement n’accorde pas assez d’importance sur les résultats dans ses programmes, ce que son gouvernement ferait s’il devenait premier ministre.

Logement

Tous les candidats sont du même avis : il faut rendre le logement plus abordable.

Frank Baylis veut ramener une «discipline budgétaire» à Ottawa, et ce, en augmentant la productivité. 

Photo : Marianne Dépelteau - Francopresse

D’ailleurs, pour Karina Gould, si le PLC n’attire pas autant de jeunes qu’avant, c’est qu’«on ne parle pas assez» des enjeux qui leur sont importants, notamment le logement. «On a perdu la confiance des jeunes», a-t-elle laissé tomber.

Dans son plan, elle avance l’idée d’augmenter les incitatifs pour les acheteurs d’une première maison et promouvoir le logement abordable, telle que les coopératives d’habitation.

Chrystia Freeland, elle, commencerait entre autres par retirer la taxe sur les produits et services (TPS) pour les acheteurs d’une première maison, maintiendrait les Comptes d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP) et augmenterait le montant que l’on peut y investir.

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Frank Baylis promet d’augmenter les salaires et l’argent dans les poches des Canadiens, notamment en créant de bons emplois. Il y a plus de détails techniques sur son site Web, a-t-il ajouté. Son message aux jeunes lors du débat a été de «garder espoir».

Mark Carney propose de doubler la construction de logements, ce qui ne sera possible que si on change notre manière de construire, selon lui. Il propose notamment de développer les technologies de la construction. En même temps, il concède qu’il faut aussi augmenter les revenus des Canadiens et des Canadiennes et couper les frais administratifs pour les constructeurs.  

Comme Chrystia Freeland, Mark Carney promet de retirer la TPS pour les acheteurs d’une première maison.

Face à Trump il faut renforcer la défense

Face à Donald Trump et ses menaces à la souveraineté canadienne, les quatre candidats et candidates acceptent qu’il faille donner plus de fonds à la défense nationale.

Frank Baylis a notamment suggéré d’augmenter les salaires dans les Forces armées canadiennes, ce que Karina Gould a appuyé. Selon elle, «on ne paie pas suffisamment notre personnel militaire». Elle a promis d’en faire une priorité si elle devient première ministre.

Selon Chrystia Freeland, les obstacles techniques et en matière de gestion ne devraient pas empêcher de renforcer la défense. L’ex-ministre a insisté sur le besoin de «travailler avec nos alliés».

Mark Carney croit que le pays sous-estime les intentions du président américain : «Trump cherche à dominer». C’est une crise économique, a-t-il expliqué, mais aussi une crise de souveraineté. On doit renforcer nos relations avec nos alliés et se servir de nos minéraux critiques et notre énergie propre à notre avantage.

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Karina Gould a critiqué les propositions de Mark Carney à quelques reprises pendant le débat en anglais, plus souvent que pendant le débat en français. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Mark Carney dans la ligne de mire de Gould

Karina Gould a interpelé Mark Carney plus d’une fois. Elle a, par exemple, critiqué sa proposition de réduire les impôts de la classe moyenne, arguant que les personnes les plus vulnérables ne font pas partie de cette classe économique. 

Mme Gould a tout de même félicité M. Carney pour son travail comme sous-ministre délégué aux Finances sous le gouvernement libéral de Paul Martin.

En mêlée de presse après le débat, la candidate a déclaré être la seule des quatre candidats à être prête à affronter Pierre Poilievre. «Certains de mes collègues ont pris des idées conservatrices. C’est OK si ce sont de bonnes idées […]. Moi, je ne vais pas compromettre mes valeurs», a-t-elle dit.

Chrystia Freeland a mis de l’avant ses propres propositions pendant le débat, promettant notamment de former des liens plus solides avec les «alliés» du Canada face à Donald Trump et de réduire les impôts de la classe moyenne, des idées appuyées par Mark Carney.

Frank Baylis a aussi mis de l’avant ses propres compétences, insistant sur le fait qu’il a de l’expérience en politique et en affaires. En promettant de ramener une «austérité financière» à Ottawa, l’ex-député s’est engagé à augmenter la productivité pour atteindre ses objectifs de dépenses, et non à couper dans les services ou à augmenter les taxes et impôts.

La prochaine personne qui dirigera le PLC sera choisie le 9 mars et deviendra, au même moment, premier ou première ministre du Canada.

La première mention des francophones en situation minoritaire a été faite après plus d’une heure de débat. La candidate Karina Gould a rappelé que les francophones en milieu minoritaire avaient aussi des besoins en matière d’accès aux soins de santé.

Karina Gould a affirmé que l’on peut bien représenter les intérêts francophones, peu importe son niveau de français. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Elle a suggéré que le fédéral utilise les transferts aux provinces pour améliorer les services. «C’est la responsabilité des provinces de distribuer cet argent de manière responsable. À mon avis, on a dépensé trop d’argent sans avoir de résultats. […] Les provinces et territoires doivent être honnêtes avec les gens.»

«Il y a un recul du français au Québec et partout au Canada», a reconnu l’ancienne ministre des Finances, Chrystia Freeland. «Je pense que tous les Canadiens comprennent que Trump menace notre pays, notre économie, mais il menace aussi notre identité. Ça inclut notre identité bilingue, ça inclut la langue française.»

Frank Baylis, qui a été député du Parti libéral du Canada (PLC) de 2015 à 2019, a aussi rappelé qu’il y a de «grands défis pour la langue française, ici au Québec», sans mentionner la francophonie en situation minoritaire.

La qualité du français de Mark Carney était une des grandes inconnues avant le débat. Il n’a pas accordé beaucoup d’entrevues en français. Il a fait quelques erreurs, comme «nous sommes d’accord avec Hamas». Une bévue corrigée rapidement par ses collègues, mais reprise en quelques minutes sur les réseaux sociaux par les conservateurs. 

Non seulement les défis des francophones hors Québec ont été très peu abordés, mais il n’y a eu presque aucune question sur les enjeux autochtones. Encore là, Karina Gould a été une des premières à les mentionner. Elle a rappelé que 16 des 60 milliards de dollars du déficit annoncé dans la mise à jour économique de décembre étaient mis de côté pour les réclamations à venir des Autochtones.

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Chrystia Freeland promet de prioriser les garderies francophones dans son plan pour ajouter 100 000 places. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Une promesse pour les garderies francophones

Pendant le débat, Chrystia Freeland a indiqué avoir un plan pour ajouter 100 000 places dans les garderies partout au Canada.

En mêlée de presse après le débat, l’ex-ministre a promis qu’elle prioriserait les places pour les francophones à l’extérieur du Québec et au Québec. «J’étais la ministre des Finances qui a créé pour la première fois un système national de garderies», a-t-elle rappelé. «Le français est plus que jamais important. La langue commence dans les garderies.»

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Immigration

Rappelant la crise du logement dans laquelle est plongé le Canada, Mark Carney a promis d’instaurer un plafond sur l’immigration de manière générale et de construire «des millions et des millions» de logements afin de rétablir l’équilibre.

Chrystia Freeland a aussi parlé du lien entre immigration et logement, promettant un «équilibre qui sera bon pour les immigrants, pour l’économie».

Frank Baylis (à droite) veut ramener une «discipline budgétaire» à Ottawa, mais assure que cela n’aura pas d’incidence sur les transferts aux provinces pour les francophones. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Karina Gould a décidé de critiquer son propre gouvernement, en indiquant que celui-ci a eu des cibles «trop ambitieuses» ces dernières années. Elle a aussi rappelé qu’il y a eu beaucoup d’immigration temporaire sous le règne de Justin Trudeau et s’est engagée à consulter les provinces à propos de leurs capacités d’absorption.

Frank Baylis a également parlé des capacités d’accueil, évoquant entre autres l’absorption par les systèmes de santé, de garde et d’éducation du Québec. 

L’immigration francophone hors Québec n’a pas fait partie des sujets.

L’ombre Trump

L’ombre du président américain plane sur la course depuis son inauguration dans ce poste. Les quatre candidats et candidates sont d’accord que le Canada doit garder des cartes dans sa manche pour d’éventuelles négociations. Par contre, l’eau, la culture et la gestion de l’offre des agriculteurs doivent être protégées.

Pour ce qui est de la façon dont ils transigeraient avec Donald Trump, les réponses ont varié. 

Frank Baylis avance pouvoir prédire les actions de Trump. Ce qu’il dit avoir fait dans une lettre publiée dans les journaux, une journée avant l’inauguration, où il affirmait que le président s’attaquerait à l’acier en premier. Ce qui est sur le point de se réaliser.

Chrystia Freeland a rappelé que ce n’était pas son premier affrontement avec Donald Trump. «Je l’ai déjà fait. En bout de ligne, on a eu un meilleur accord» de libre-échange, affirme-t-elle. 

Par contre, Mark Carney rappelle que «ce n’est pas le même qu’avant».

Il est plus unilatéraliste, plus isolationniste, plus agressif. Il faut se concentrer sur les choses que l’on peut contrôler. Il faut renforcer notre économie.

— Mark Carney

En se disant d’accord avec la réponse de Mark Carney, Karina Gould précise que le président respecte la force, et qu’il faudra faire la preuve que le Canada est fort.

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Mark. Carney a été gouverneur de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre. 

Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse

Déclenchement d’élection

Aucun candidat n’a voulu donner une date précise pour le déclenchement d’une élection fédérale après que la nouvelle personne à la tête du parti ait été choisie. Pour les quatre, ce serait imprudent de prendre une décision maintenant, sans connaitre où en seront les menaces de tarifs douaniers du président des États-Unis, qui pourraient être imposés le 4 mars.

Pour Mark Carney, «il ne faut pas prendre de décision avant que ce soit nécessaire».

Chrystia Freeland a souligné qu’elle avait déjà un siège dans la Chambre des communes : «Je ferai mon choix [d’aller en élection] sans me baser sur les sondages, juste sur l’intérêt national».

La prochaine personne qui dirigera le PLC sera choisie le 9 mars et deviendra, au même moment, premier ou première ministre du Canada. 

Un débat en anglais aura lieu le 25 février, à Montréal. 

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Selon Martin Bouchard, à la direction générale du Comité FrancoQueer de l’Ouest (CFQO), certains gouvernements provinciaux, comme au Nouveau-Brunswick avant l’élection de 2024, en Alberta ou en Saskatchewan, exploitent les enjeux queers à des fins électoralistes, «pour satisfaire une base plus conservatrice qui permet de les reconduire au pouvoir».

Selon Martin Bouchard, plutôt que de diffuser des discours sans fondement scientifique, des informations telles que la surreprésentation de l’itinérance chez les jeunes 2SLGBTQ auraient par exemple plus de poids auprès des gouvernements. 

Photo : Courtoisie

«Le conservatisme social reprend un peu sa place au sein des partis de droite au Canada, après environ deux décennies d’opposition plus tempérée aux droits LGBTQ+», confirme le doctorant en science politique à l’Université Concordia, à Montréal, Francesco MacAllister-Caruso.

Pour lui, la stratégie politique derrière ce type de discours n’est pas surprenante, ce qui l’est plus, c’est «la volonté de certains chefs de droite au Canada d’alimenter leur discours avec de la désinformation et de la mésinformation, et ce, même lorsqu’on a des données probantes pour contrer les arguments».

Aucun des élus du Parti conservateur du Canada contactés par Francopresse n’a donné suite à nos demandes d’entrevue.

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Désinformation ou mésinformation?

La désinformation désigne une information erronée ou déformant la réalité, créée dans le but de manipuler ou de tromper.

Francesco MacAllister-Caruso prend l’exemple de propos tels que : «Les femmes trans sont une menace à la sécurité des femmes cisgenres, surtout dans les salles de bain; les professionnels de l’éducation et de la santé tentent d’imposer la diversité de genre sur les jeunes et les forcer à transitionner.»

La mésinformation renvoie, elle, à une information incorrecte ou trompeuse, considérée comme véridique qu’une personne partage sans mauvaise intention.

«Les parents sont exclus de la prise de décision ou du processus de transition; les jeunes personnes trans subissent des chirurgies génitales, etc. Ce sont des propos qui sont fondés sur un manque d’informations», explique le doctorant.

«Bonne cible»

Lorsque des gouvernements tiennent des discours antiqueers, cela encourage les gens à reprendre cette rhétorique et à se l’approprier, observe Martin Bouchard.

«On a vu au cours des dernières années plusieurs politiques ou propositions à différents niveaux de gouvernement qui visaient à restreindre ou limiter les droits des personnes trans», remarque Francesco MacAllister-Caruso. 

Photo : Melody Maloney

«Je ne pense pas que les gens sont mauvais en tant que tel quand ils reprennent ces discours. Je pense que c’est une mésinformation pure et simple.»

Francesco MacAllister-Caruso rappelle que les personnes transgenres ou non binaires représentent environ 0,33 % de la population canadienne. «Ce qui les rend une bonne cible pour un mouvement réactionnaire qui tente de propager de fausses informations pour limiter leur droit.»

Au Nouveau-Brunswick, le directeur général d’Alter Acadie, Alex Arseneau, estime que la campagne électorale de l’ancien premier ministre progressiste-conservateur provincial, Blaine Higgs, candidat à sa réélection, s’est faite «sur le dos des jeunes personnes trans».

Le gouvernement progressiste-conservateur de la province soutenait aussi que «les soins affirmant le genre [étaient] dangereux pour les enfants».

Or, «les recommandations médicales qui concernent les soins d’affirmation du genre pour des jeunes sont non seulement fondées sur des recherches rigoureuses, mais c’est tout le temps dans un long processus qui implique les parents».

«Il n’y a pas de médecin au Canada qui opère des enfants, des mineurs, sans [le consentement des parents]», insiste-t-il.

Aux yeux d’Alex Arseneau, les personnes 2SLGBTQIA+ constituent des «boucs émissaires» et les médias sociaux amplifient ces discours de désinformation. «Tout le monde n’a pas accès à des informations fiables, mais tout le monde a accès à Facebook.»

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Déconstruire les mythes

Dans une de ses publications, l’organisme torontois FrancoQueer déconstruit différents mythes qui nourrissent les discours hostiles à la communauté 2SLGBTQIA+, comme celui selon lequel «l’homosexualité est un choix».

«La science a montré que l’orientation sexuelle et l’identité de genre ne sont pas un choix. En dépit des nombreuses tentatives de “conversion” effectuées par des établissements médicaux, juridiques et religieux pendant des décennies, la recherche montre qu’elles sont inefficaces et même nuisibles», explique le rapport.

«Il est facile de provoquer la peur dans la population en propageant de tels mythes, dont celui que les personnes 2SLGBTQIA+ sont prédatrices d’enfants», note encore l’organisme.

Ainsi, «la peur et la désinformation peuvent être instrumentalisées pour servir des objectifs politiques», affirme le rapport.

«Faire peur au monde»

«C’est des informations pour détourner l’attention des vrais problèmes. […] Les conservateurs du Nouveau-Brunswick ne peuv[ai]ent pas se baser sur leur bilan. Donc, il faut qu’ils passent par la panique morale, la désinformation, faire peur au monde», analyse Alex Arseneau.

Alex Arseneau se dit inquiet pour les prochaines élections fédérales et de «l’impact croissant des mouvements antiqueer». 

Photo : Annie France Noël

«Ces discours-là trouvent des échos en exploitant des peurs profondes liées à des changements sociaux rapides que tout le monde n’est pas un peu up-to-date avec. Ils vont chercher ce qui est plus nouveau et qui est mal compris. […] Ils déforment des enjeux complexes, qui sont émotionnellement chargés.»

«Ils associent la transidentité à des opérations du corps, au scalpel, à la peur de se faire ouvrir. […] Il y a aussi le fait d’associer l’homosexualité à la sexualité. Ils pensent qu’on enseigne la pornographie aux enfants», ajoute-t-il.

«Je dirais que c’est comme ça qu’ils gagnent les votes. Y’a rien qui fait plus voter qu’avoir peur ou haïr.»

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Meta modifie sa politique de modération des contenus

La société mère de Facebook et d’Instagram a annoncé, au début de janvier, qu’elle mettait fin à son programme de vérification des faits aux États-Unis.

Les utilisateurs et utilisatrices de ces plateformes peuvent désormais tenir des propos diffamatoires qui lient l’identité de genre à la santé mentale, par exemple.

«Meta a choisi de normaliser les discours haineux envers les personnes 2ELGBTQIA+ et c’est complètement inacceptable», a réagi sur sa page Facebook Alter Acadie NB.

Le Comité FrancoQueer de l’Ouest (CFQO) a également condamné par communiqué ce changement, qu’il qualifie d’«attaque directe contre des populations déjà marginalisées et met gravement en péril leur sécurité et leur bienêtre».

Campagne de communication

Martin Bouchard concède que la communication sur ces thèmes de la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, est bonne. «Ils ont des spin doctors de talent.»

Il fait notamment référence à l’un de ses discours où elle défendait sa politique en assurant justement qu’elle était là pour protéger les jeunes de la communauté 2SLGBTQIA+.

«Ça avait l’air empreint de bienveillance. Si j’étais quelqu’un qui ne connait pas du tout ces enjeux […] je me dirais : “Ah ben, elle a à cœur les jeunes trans non binaires. Elle a mon vote.”»

«Il faut commencer à s’organiser parce qu’il y a de l’argent qui est mis là-dedans. [La droite et les conservateurs en général] sont forts en communication, ils sont organisés. Puis nous, on court après l’argent des gouvernements. […] C’est David contre Goliath», illustre le directeur général.

Pour lutter contre la désinformation, le CFQO croit à la sensibilisation par le témoignage. «Quand une personne se présente devant un groupe et partage son histoire, c’est ça qui contribue un peu à changer les mentalités», estime Martin Bouchard.

Au Nouveau-Brunswick, Alter Acadie s’attache à «trouver des messages qui sont plus forts que [ceux des conservateurs]» : «La sensibilisation, la mobilisation passe par la communication», confie Alex Arseneau, y compris au-delà du cercle 2SLGBTQIA+.

«On a développé des partenariats avec des associations d’enseignants, de parents, d’élèves, des syndicats des travailleurs», détaille le directeur général. L’organisme a aussi mis sur pied une boite à outils à destination des parents notamment.

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Élections fédérales à venir

Alex Arseneau se dit inquiet pour les prochaines élections fédérales et de «l’impact croissant des mouvements antiqueer qui exploitent des discours populistes, comme Poilievre ou Trump».

«Ça va non seulement continuer à diviser la société, mais ça va mettre en danger les acquis des communautés marginalisées.»

«Ces discours-là détournent l’attention des vrais enjeux. […] Chaque fois que quelqu’un de la droite veut parler des droits des personnes trans, parle-lui des changements climatiques, parle-lui de la crise du logement, parle-lui des prix de la bouffe au Canada», suggère-t-il.

«Il est temps de parler de solutions, puis arrêter de parler de toilettes.»

«Antonine Maillet a possiblement créé un mouvement littéraire, c’est trop tôt pour le savoir. Mais elle reste une figure tutélaire de la littérature acadienne dont les legs sont emblématiques», affirme le metteur en scène et professeur au Département de théâtre de l’Université d’Ottawa, Joël Beddows.

Joël Beddows estime que tous les legs d’Antonine Maillet ne sont pas encore connus : «On a besoin de thèses pour analyser la portée et la spécificité de son œuvre.» 

Photo : Rémi Thériault

Le professeur de littérature à l’Université de Moncton, Benoît Doyon-Gosselin, n’hésite pas à évoquer «une pionnière dans la libération de la langue» : «Tout en abordant des thématiques universelles, elle a su se différencier en faisant passer l’oralité acadienne à l’écrit.»

«Elle a été la première à écrire dans la langue acadienne, elle a ouvert la voie et permis à de nouveaux auteurs de s’éloigner du français standard, d’être eux-mêmes», poursuit la professeure retraitée de l’Université de Moncton et spécialiste de l’œuvre d’Antonine Maillet, Marie-Linda Lord.

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De nouvelles maisons d’édition

Lorsque Antonine Maillet écrit son premier ouvrage, Pointe-aux-Coques, en 1958, aucun éditeur n’est présent en Acadie. Elle est obligée de se tourner vers le Québec pour le publier.

«Elle a donné un nouveau souffle à la littérature acadienne peu développée à l’époque», assure Marie-Linda Lord.

Pour Marie-Linda Lord, l’œuvre d’Antonine Maillet a permis de lutter contre l’insécurité linguistique : «Les gens se reconnaissent quand ils entendent La Sagouine, ça les a rendus fiers d’être francophones et acadiens.» 

Photo : Courtoisie

«Les écrivains qui l’ont suivie ont su briser le silence et prendre la parole. Des maisons d’édition se sont créées pour les publier et construire le projet acadien», complète-t-elle.

Les Éditions d’Acadie voient ainsi le jour en 1972, un an après la sortie de la pièce de théâtre d’Antonine Maillet La Sagouine. L’autrice inspire alors de jeunes poètes acadiens, qui reprennent notamment sa thématique de l’identité, abordée dans le monologue Le Recensement, un passage de la pièce.

«Elle est la première à affirmer et promouvoir l’identité acadienne dans la littérature. Il y a un message très fort et encore pertinent de nos jours», relève Marie-Linda Lord.

Quelques années plus tard, en 1979, Antonine Maillet reçoit le prix Goncourt pour Pélagie-la-Charrette. Une consécration, «extrêmement importante pour l’histoire littéraire», qui met également «l’Acadie sur la carte du monde francophone», souligne Benoît Doyon-Gosselin.

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Pas de «descendants pendant très longtemps»

Cette reconnaissance internationale n’a pas empêché l’émergence de certaines critiques. Des auteurs du Nouveau-Brunswick, comme Herménégilde Chiasson ou Gérald Leblanc, reprochent à Antonine Maillet d’être trop «exotisante et passéiste», explique Benoît Doyon-Gosselin.

«Paradoxalement, elle a ouvert beaucoup de portes à la francophonie alors que son univers n’est en rien moderne, appuie Joël Beddows. Elle donne une vision du passé fermée sur elle-même, folklorisée, incapable d’embrasser la modernité occidentale vers laquelle cheminait l’Acadie dans les années 1970.»

«Antonine Maillet n’a pas codifié l’oralité, elle a créé sa langue de fiction, c’est une construction littéraire. Les gens ne parlent pas comme ça», rappelle Benoît Doyon-Gosselin. 

Photo : Courtoisie

«Il n’y a pas de nostalgie, la critique du passé peut s’appliquer au contemporain», nuance Marie-Linda Lord.

À la suite d’Antonine Maillet, le chiac se fait progressivement une place dans la littérature. En 1973, Guy Arsenault publie Acadie Rock, le premier recueil de poésie dans ce dialecte mélangeant du vieux français, du français et de l’anglais. Près de 40 ans après, France Daigle est lauréate du Prix du Gouverneur général pour son roman Pour sûr, qui met lui aussi le chiac à l’honneur.

Pourtant, Joël Beddows estime pour sa part que la dramaturge et romancière n’a pas eu «d’émules et de descendants pendant très longtemps».

«C’est peut-être parce que son oralité était devenue la norme, il n’était plus possible d’explorer d’autres variétés de français. Si on voulait écrire en français plus normalisé ou haïtien par exemple, on n’avait pas le droit d’exister», avance-t-il.

Aux yeux de l’universitaire, le fait que plusieurs dramaturges marchent dans les traces d’Antonine Maillet est très récent. Il cite les Acadiens Emma Haché, Caroline Bélisle et Gabriel Robichaud. «Les figures de l’Évangéline, de la Sagouine et de Sainte-Anne-de-Kent reviennent dans leurs œuvres, ils s’intéressent aux mêmes questions philosophiques», analyse-t-il.

«Elle les a encouragés à pousser la porte de la norme»

Au-delà de l’Acadie, l’influence d’Antonine Maillet s’étend jusque dans l’ouest, où La Sagouine a largement circulé dans les théâtres et salles de spectacle.

«Les livres d’Antonine Maillet ont conscientisé les gens à différentes parlures et accents», affirme Lise Gaboury-Diallo. 

Photo : Courtoisie

«Ça a été mon premier contact avec elle quand j’étais étudiante au secondaire, confirme l’autrice et professeure à l’Université de Saint-Boniface, au Manitoba, Lise Gaboury-Diallo. Ses personnages féminins très forts m’ont beaucoup inspirée.»

Elle mentionne des auteurs comme le Franco-Manitobain Marc Prescott ou le Fransaskois Gilles Poulin-Denis qui «ont osé transcrire du franglais» : «Elle les a encouragés à pousser la porte de la norme, à faire revivre des parlers locaux.»

«On s’intéresse à l’œuvre d’Antonine Maillet dans tout le Canada, car c’est un modèle de réussite d’écrivain francophone en situation minoritaire», considère Marie-Linda Lord.

«On peut dire sans conteste que c’est la maman de la littérature et du théâtre acadiens, dont les œuvres perdureront encore longtemps, mais on ne sait pas si elle aura des enfants», ajoute Joël Beddows.

Quelle que soit la portée de son œuvre, Antonine Maillet a donné confiance à des générations d’écrivains et d’écrivaines dans la variété et les couleurs de leur langue.

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Le Regroupement des éditeurs franco-canadiens et ses partenaires ont dévoilé le nom des lauréates le 21 février, à l’occasion du Salon du livre de l’Outaouais.

Le livre primé de Diya Lim, Éli Labaki et les gouttes de pluie, illustré par Jean-Luc Trudel et publié à la maison d’édition Bouton d’or Acadie, raconte l’histoire d’intégration d’une famille libanaise au Canada. Une façon pour l’autrice jeunesse de partager sa propre expérience d’immigration, puisqu’elle est elle-même née à l’étranger, à l’ile Maurice.

«Je ne suis pas libanaise, mais j’ai été inspirée par mes amies libanaises. Je suis allée vers elles et d’autres femmes libanaises et c’est en allant vers l’autre que l’autre vient vers nous», a-t-elle dit pendant son discours d’acceptation du prix.

Pour Diya Lim, les livres plurilingues permettent aux enfants de différentes cultures «de se sentir plus à l’aise». 

Photo : Julien Cayouette – Francopresse

Son travail de réviseure du programme d’éducation de l’Ontario l’amène à visiter plusieurs classes, et elle constate qu’il y a un besoin grandissant de livres pour enfants écrits en plusieurs langues ou présentant d’autres cultures, confie-t-elle en entrevue avec Francopresse. 

«Ça aide à mieux inclure les élèves et aide les autres élèves qui sont déjà Canadiens, ou qui sont arrivés ici il y a quelques années et qui se sont bien intégrés, à s’ouvrir à d’autres cultures.»

L’intention de l’autrice a été comprise par le jury du Prix Champlain : «En adoptant une vision inclusive et réaliste, [ce livre] parvient à représenter fidèlement les expériences diverses de la société canadienne. C’est une célébration de l’unité dans la diversité», précise le communiqué.

Diya Lim signe des livres pour enfants depuis une quinzaine d’années. Son premier roman jeunesse, Amandine adore la cuisine, a remporté le prix littéraire Henriette-Major de 2011. Elle écrit en fait depuis qu’elle est toute jeune et a déjà beaucoup de titres à son actif.

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Le Prix Champlain a été créé en 1957 par le Conseil de la vie française en Amérique et met tous les ans à l’honneur des artistes littéraires qui, par leurs œuvres, contribuent à faire briller la langue française au Canada ainsi qu’à renforcer les liens entre le Québec et les francophones et francophiles de partout au pays.

Les lauréates de cette année ont été choisies par un jury composé de membres issus de divers horizons professionnels et des quatre coins du Canada.

Volet adulte

Simone Chaput a remporté le volet adulte du Prix Champlain pour son roman Les mangeurs d’ortolans, publié chez Leméac Éditeur. Elle y raconte l’effondrement d’une famille, en apparence, idéale.

Elle n’était pas présente à la remise du prix. C’est son éditeur, Pierre Filion, qui a accepté cet honneur en son nom. Dans les remerciements lus par ce dernier, Simone Chaput déclare : «Le français est ma langue ancestrale. Le français est un pays que j’habite. Sa beauté, sa puissance, ne cesse de m’émerveiller.»

Simone Chaput n’a pas pu accepter son prix en personne, car elle était sur le point d’être grand-mère a dévoilé son éditeur, Pierre Filion. 

Photo : Julien Cayouette – Francopresse

Cette langue, elle la maitrise parfaitement, selon le jury : «C’est un roman écrit par une autrice en complète possession de ses moyens qui joue de la narration, de la profondeur comme d’autres peuvent jouer d’émotions simples et puériles.»

Née à Saint-Boniface, au Manitoba, Simone Chaput a étudié la littérature dans les établissements postsecondaires de sa province, à Toronto et en Europe. De retour chez elle, elle s’est consacrée à l’enseignement et a publié son premier roman, La Vigne arrière, en 1989. 

L’autrice est une habituée des honneurs littéraires. Ses deux premiers romans ont reçu le prix littéraire La Liberté. Elle a déjà remporté le Prix Champlain, en 2014, pour son roman Un vent prodigue, qui lui a aussi valu le Prix des lecteurs Radio-Canada la même année.

 

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L’année 2024 a été la plus couteuse de l’histoire pour les assureurs canadiens. Elle s’est soldée par une facture de 8,5 milliards de dollars. 

D’après les estimations de la firme CatIQ (Catastrophe Indices and Quantification), les évènements climatiques les plus onéreux de l’été 2024 ont été la tempête de grêle de Calgary, les inondations au Québec et dans le sud de l’Ontario, et les feux de forêt de Jasper, en Alberta. À elles seules, ces catastrophes ont couté plus de 7,1 milliards de dollars aux compagnies d’assurance.

Selon Sophie Guilbault, de plus en plus d’assureurs offrent des incitatifs financiers aux propriétaires qui rendent leur maison résiliente aux aléas. Elle évoque l’installation de clapets antirefoulement, de pompes de puisard contre les inondations ou encore de toitures résistantes à la grêle. 

Photo : Courtoisie 

Le total des indemnisations pour les sinistres de 2024 s’élève à plus de dix fois le montant annuel versé entre 2001 et 2010 par les assureurs pour des désastres attribuables à des phénomènes météorologiques extrêmes, détaille Craig Stewart, vice-président, Changement climatique et Questions fédérales, du Bureau d’assurance du Canada (BAC). 

«C’est une année exceptionnelle au niveau des pertes, et la tendance est très clairement à une hausse rapide depuis 2019», confirme la directrice des partenariats à l’Institut de prévention des sinistres catastrophiques, Sophie Guilbault. Cet organisme a été créé par l’industrie canadienne de l’assurance de dommages.

À l’accumulation des risques climatiques s’ajoute l’explosion des couts d’indemnisation, liée à l’inflation, à la croissance de la population et à la concentration de l’habitat dans des zones surexposées aux aléas. 

«La proportion et la densité de la population dans les plaines inondables, le long des côtes ou en lisière de forêts augmentent», appuie Sophie Guilbault.

«C’est un accident historique. Les premiers colons européens ont fondé des communautés près des cours d’eau et, aujourd’hui, on continue de densifier ces communautés alors même que l’on connait les dangers», ajoute le directeur de la recherche en adaptation à l’Institut climatique du Canada (ICC), Ryan Ness. 

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Nouvelles constructions tout aussi menacées

Dans son rapport Des risques à nos portes publié le 6 février, l’ICC appelle les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux à encadrer de façon rigoureuse le développement résidentiel et à favoriser les investissements dans le logement et les infrastructures dans les zones à faible risque. 

En vertu des règles actuelles d’aménagement trop laxistes, environ 10 % des 5,8 millions de nouvelles habitations prévues au Canada d’ici 2030 seraient susceptibles de se retrouver dans des zones inondables, peut-on lire dans l’étude. 

Selon Ryan Ness de l’ICC, il suffirait pour les gouvernements de rediriger un petit pourcentage des nouveaux bâtiments en lieu sûr, loin des risques d’inondations et de feux de forêt, pour prévenir des milliards de dollars de dommages et protéger la population.

Le responsable recommande une révision des programmes d’aide aux sinistrés pour décourager la construction risquée, en rendant inadmissibles à l’aide publique les maisons récemment construites dans les zones les plus à risque.

Environ 10 % des propriétaires en zone à risque sans assurance inondation

En toile de fond se pose la question de la capacité d’assurer les biens et les personnes dans un monde profondément affecté par le dérèglement climatique. 

Craig Stewart explique que la hausse des primes d’assurance des dernières années est due à l’accroissement des dommages causés par les catastrophes naturelles, «mais aussi à l’augmentation des couts de reconstruction depuis la COVID-19». 

Photo : Courtoisie

Car pour assurer, il faut à la fois être capable d’estimer la probabilité qu’un sinistre se produise et pouvoir compter sur le fait que tous les aléas couverts ne surviennent pas simultanément.

«Si les catastrophes naturelles deviennent récurrentes, il arriverait un point critique où l’institution de l’assurance pourrait casser et devenir absolument inabordable», prévient Ryan Ness. 

L’impossibilité de s’assurer est déjà une réalité pour une partie de la population. Selon Craig Stewart du BAC, à l’heure actuelle, environ 10 % des propriétaires au Canada qui sont exposés à un risque élevé d’inondation n’ont plus accès à une assurance contre ce type de calamité. Cela représente quelque 1,5 million de personnes.

«Les assureurs ont préféré se retirer de certaines régions près des rivières ou proches de l’océan, car la probabilité des risques d’inondation ou de submersion marine est rendue trop élevée», explique le professeur de finance à HEC Montréal et rédacteur en chef du Journal of Risk and Insurance, Martin Boyer. 

Craig Stewart craint «que ces cas de figure se multiplient et qu’ils s’étendent à d’autres périls, aux feux de forêt, aux tempêtes, à la grêle».

La possibilité d’être assuré dans les zones à haut risque est de plus en plus compliquée. Ça ne s’est pas trop vu encore, mais il y a toujours une chance que certaines assurances quittent le marché canadien.

— Sophie Guilbault

Martin Boyer se veut pour sa part plus optimiste : «L’assurance va rester. La grande majorité des territoires peut absorber les risques climatiques. C’est seulement un petit nombre d’individus qui vont subir de fortes hausses de primes.»

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Plus de partenariats public-privé

Les compagnies d’assurance intègrent déjà les changements climatiques dans les tarifs appliqués à leurs clients.  

Si les catastrophes naturelles continuent de se multiplier, l’industrie de l’assurance pourrait cesser d’être économiquement viable, prévient Ryan Ness. 

Photo : James Ingram/Institut climatique du Canada

«Elles ont toujours fondé leurs calculs sur les sinistres passés, et non sur les menaces futures. Mais ce modèle ne semble plus fonctionner, relève Craig Stewart. Elles cherchent maintenant à incorporer dans les primes la fréquence et l’intensité des aléas qui augmentent.»

Pour mutualiser les couts, le BAC plaide également en faveur de la création de partenariats public-privé s’appuyant sur la garantie financière de l’État. Craig Stewart évoque une association entre les gouvernements et le secteur «pour fournir une assurance abordable aux Canadiens à faible revenu dans les zones à haut risque».

Dans le monde, la France, le Royaume-Uni, les États-Unis et la Nouvelle-Zélande ont mis sur pied de tels partenariats pour couvrir les inondations, les tremblements de terre ou les feux de forêt. Les assureurs demeurent présents, mais en arrière-plan, l’État subventionne les primes afin qu’elles restent abordables.

Dans le budget fédéral de 2024, Ottawa s’est engagé à ce qu’un programme national d’assurance contre les inondations soit opérationnel dans un délai d’un an, mais pour l’instant rien n’a bougé.

Ce type d’assurance publique coute très cher s’il n’y a pas en même temps de stratégie pour réduire les risques liés au changement climatique.

— Ryan Ness

Afin d’éviter l’issue extrême de l’inassurable, les spécialistes s’entendent sur l’importance d’investir massivement dans la prévention. «Autrement, les assurances deviendront inabordables ou impossibles à obtenir d’ici dix ans», tranche Craig Stewart.

Partir «coute moins cher que de reconstruire»

En juin 2023, le gouvernement fédéral a lancé une stratégie nationale d’adaptation aux changements climatiques, «qui n’a malheureusement que peu progressé», déplore Craig Stewart.

Le professeur Martin Boyer n’est pas favorable à la mise en place de polices d’assurance largement subventionnées par l’État dans les zones les plus exposées : «Il y a un aveuglement de la population, les gens doivent accepter de quitter ces territoires.» 

Photo : Courtoisie

«Malgré les milliards de dollars mis sur la table pour la protection contre les aléas, il y a deux à quatre fois plus de demandes de financement que de fonds disponibles», abonde dans le même sens Ryan Ness.

Faire évoluer les codes du bâtiment, financer la rénovation des maisons afin de les rendre plus résistantes au vent, à la grêle, aux inondations ou aux incendies de forêt, «on connait les solutions techniques. Le défi, c’est la mise en œuvre, bien trop lente», affirme Sophie Guilbault, qui parle d’une «responsabilité partagée» entre les pouvoirs publics et les assureurs. 

Martin Boyer estime carrément que la meilleure solution consiste à inciter les habitants à quitter les territoires les plus à risque. 

«Si l’aléa est certain, les habitants doivent accepter de déménager. Ça coute moins cher que de reconstruire à chaque fois, considère-t-il. L’État les indemnise pour leurs pertes, mais ensuite, ils vendent leur terrain au gouvernement et reconstruisent ailleurs.» 

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Efforts timides d’Ottawa  

«Il n’y a pas assez d’efforts et d’argent mis sur la relocalisation, car c’est un sujet très controversé et émotionnel», poursuit Ryan Ness. 

Sophie Guilbault insiste à cet égard sur le poids du «leadeurship municipal» pour «reconstruire mieux», en particulier durant les «périodes de rétablissement» après une catastrophe naturelle.

Le gouvernement fédéral semble vouloir s’investir davantage sur cette question. Il a récemment revu la façon dont il rembourse les provinces et les territoires après une catastrophe naturelle, en mettant l’accent sur le financement d’initiatives de reconstruction qui tentent d’éviter le même niveau de destruction lors d’un futur désastre. 

À partir du 1er avril prochain, Ottawa offrira de rembourser aux gouvernements locaux jusqu’à 90 % de leurs couts de reconstruction s’ils misent sur la mitigation et l’atténuation. Cela pourrait vouloir dire, par exemple, la reconstruction sur un territoire moins sujet aux inondations. 

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La ministre de Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, a dévoilé le 20 février le rôle que les libéraux envisagent pour la société d’État Radio-Canada et son pendant anglophone, CBC.

La ministre propose que deux comités distincts de programmation soient formés – un anglophone et un francophone – pour que les deux puissent «siéger et opérer indépendamment l’un de l’autre».

Rien de précis pour les francophones en situation minoritaire

En revanche, très peu de détails sur le rôle que pourraient jouer les francophones en situation linguistique minoritaire ont filtré.

Interrogé par Francopresse sur la place des minorités linguistiques dans la nouvelle vision pour de Radio-Canada, le cabinet de la ministre St-Onge n’a pas apporté de précisions, répétant par courriel ce que l’élue avait dit en conférence de presse la veille au sujet de la création des deux comités distincts :

En ce qui concerne les comités de CBC/Radio-Canada, incluant ceux sur la radiodiffusion anglaise et française, leurs opérations relèvent de CBC/Radio-Canada, une société d’État indépendante et responsable de ses propres activités quotidiennes. Cela comprend toutes les décisions relatives au journalisme, à la créativité et à la programmation.

— Bureau de Patrimoine canadien

Le cabinet de la ministre ajoute que «cette proposition comprend également un objectif pour CBC/Radio-Canada d’offrir une couverture des nouvelles locales dans les communautés mal desservies du Canada, y compris les communautés de langue officielle en situation minoritaire.»

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Réaction de la culture francophone

Dans un communiqué, la présidente de la Fédération culturelle canadienne-française, Nancy Juneau, «applaudit les propositions prometteuses de la ministre Pascale St-Onge pour protéger et renforcer l’avenir de CBC/Radio-Canada».

Nancy Juneau rappelle que «les contenus du diffuseur national doivent mieux refléter les réalités des communautés francophones en situation minoritaire. La perspective de nos communautés francophones est fondamentale et doit être davantage prise en compte à tous les niveaux».

Un financement presque doublé

L’un des piliers de l’annonce de la ministre St-Onge portait sur le financement de CBC et Radio-Canada, un enjeu important dans un contexte où le chef conservateur Pierre Poilievre promet, s’il est porté au pouvoir, de sabrer dans l’entité anglophone du diffuseur public, sans toucher à Radio-Canada pour autant.

La ministre, elle, propose plutôt d’inscrire le financement de la Société d’État dans la loi, par le biais de crédits législatifs. Une manière de «sortir du cycle politique du financement de Radio-Canada».

Elle souhaite que le Canada se rapproche de la moyenne dépensée par les États du G7 pour leur diffuseur public, soit environ 62 $ par personne par an et que nous adoptions un système évolutif de financement sur plusieurs années.

Actuellement, le Canada ne consacre que 33 $ par an par personne à son diffuseur public, ce qui le place à l’avant-dernier rang des pays du G7 à cet égard.

On est le plus proche des États-Unis, et je ne crois pas qu’il faut qu’on ait les États-Unis pour référence.

— Pascale St-Onge, ministre de Patrimoine canadien

Elle déplore le rôle des oligarques de la technologie américaine, «Zuckerberg ou Musk, qui contrôlent l’information». Pour elle, dans un tel contexte, «il faut miser sur nos institutions canadiennes».

La ministre St-Onge propose aussi le retrait de la publicité dans les bulletins de nouvelles et les émissions d’affaires publiques sur toutes les plateformes de la société d’État.

Les diffuseurs privés pourraient ainsi tenter d’aller chercher les revenus publicitaires que ne toucherait plus CBC/Radio-Canada. Le montant de ces revenus pourrait atteindre «entre 100 et 200 millions de dollars», a avancé la ministre.

Finalement, les plateformes de diffusion en ligne, Tou.tv et CBC Gem, seraient accessibles à tous gratuitement.

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Indépendance accrue

Le plan libéral prévoit aussi la mise en œuvre de nouvelles normes au sein de CBC/Radio-Canada, comme celle de confier au conseil d’administration la tâche de nommer la présidence-direction générale du diffuseur. Actuellement, cette responsabilité incombe au gouvernement.

Pascale St-Onge veut voir inscrite dans la loi cette nouvelle façon de procéder pour donner plus de confiance au public et «enrayer la perception selon laquelle ce poste est redevable à un gouvernement».

La ministre souhaite aussi que la loi stipule que la société CBC/Radio-Canada est tenue de consulter le public canadien sur les questions de ses priorités et ses stratégies et de produire un rapport à ce sujet.

Le gouvernement propose aussi que la stratégie de Radio-Canada concernant la couverture des Inuits, des Métis et des Premières Nations, publiée en 2024, soit faite en collaboration avec eux, avec un rapport sur les résultats.

Pascale St-Onge a expliqué qu’elle était prête depuis l’automne à déposer un projet de loi plutôt qu’une «vision», comme elle l’a fait le 20 février, mais l’obstruction parlementaire qui règne depuis septembre l’en a empêchée.

«L’opportunité est toujours là, car notre vision est très claire», a-t-elle lancé. Celle qui a annoncé qu’elle ne se présenterait pas aux prochaines élections fédérales s’en remet au prochain chef libéral pour déposer une mesure législative. «Je m’attends à ce que tous les candidats aient un accord avec le type de vision que je propose», a conclu la ministre.

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