Un sondage maison mené en ligne par Francopresse du 11 au 28 mars 2025 auprès de 601 francophones en situation linguistique minoritaire partout au pays montre que le Parti libéral du Canada (PLC) arrive en tête de leurs intentions de vote (54,5 %).
Le parti de Mark Carney se classe bien loin devant le Nouveau Parti démocratique (NPD), qui récolte 26,4 % des intentions, le Parti conservateur du Canada (PCC) 7 % et le Parti vert du Canada (PVC) 2,9 %.
Même en tenant compte de la proportion de personnes indécises (7,4 %), les résultats indiquent que le PLC a la faveur d’une majorité de francophones en milieu minoritaire.
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Trajectoire des appuis par rapport à 2021
Selon les données, 57,3 % des francophones qui ont répondu au sondage ont déclaré avoir voté pour le PLC en 2021, 16,5 % pour le NPD, 9,4 % pour le PVC et 7,7 % pour le PCC.
Le PLC était ainsi déjà le parti largement privilégié par l’ensemble des francophones en milieu minoritaire aux dernières élections fédérales, un résultat qui se reflète dans les intentions de vote de 2025.
La confiance accordée au PCC par les répondants se maintient aussi au même niveau : 7,7 % en 2021 et 7 % en 2025.
Par contre, le PVC perd des appuis – de 9,4 % en 2021, ceux-ci ont chuté à 2,9 % en 2025. Le NPD en a peut-être profité, puisqu’il a grimpé de 16,5 % des votes déclarés à 26,4 %.
Les chiffres – avec les biais que comporte le sondage (voir la méthodologie à la fin du texte) – présentent un fossé entre le PLC et le PCC chez les répondants. Pour l’ensemble de la population, ces deux partis sont ceux qui récoltent toujours le plus d’appuis et qui sont en conséquence susceptibles de former le gouvernement.
Or, le PCC arrive en troisième ou même en quatrième place des préférences de répondants, ce qui pourrait indiquer que ces communautés ne se reconnaissent pas dans les valeurs et les candidatures proposées par ce parti.
Contrecourant francophone dans l’Ouest
La préférence pour le PLC se fait sentir dans toutes les régions du pays. Comme le montre le graphique ci-dessus, le PLC récolte plus de la majorité des intentions de vote des répondants dans l’Ouest (54,9 %) en Ontario (54,8 %), et en Atlantique (51,6 %).
À certains égards, les résultats de l’Ouest, qui comprennent les données de la Colombie-Britannique, de l’Alberta, de la Saskatchewan et du Manitoba, présentent le caractère distinct des francophones – largement minoritaires – par rapport au reste de la population dans cette région.
En effet, l’Ouest est généralement d’allégeance conservatrice, comme en témoignent plusieurs sondages et les résultats d’élections antérieures, mais les francophones de cette région ont plutôt déclaré qu’ils entendaient voter pour le PLC ou encore le NPD (31,8 %), bien avant le PCC (5,6 %).
C’est en Atlantique que le PCC peut espérer les meilleurs résultats chez les francophones (13,4 %). Cette région est aussi celle où le Parti vert (16,2 %) pourrait obtenir la plus grande proportion de votes des francophones minoritaires au pays.
Tendances par tranche d’âge
Si le PLC se situe au premier rang des intentions de vote des francophones de 35 ans et plus, le tableau ci-contre montre que les jeunes (18 à 34 ans), eux, préfèrent le NPD (64,3 %) selon les données recueillies.
Aussi, ce groupe délaisserait le PVC (2,7 % en 2025 contre 18,5 % en 2021) et n’aurait guère acquis plus d’affinités pour le PCC (3,2 % en 2025 c. 2,6 %) dans les quatre dernières années.
La tranche des 35-64 ans demeure celle qui est la plus favorable au PCC, même si le soutien qu’elle exprime à ce parti fléchit légèrement, passant de 15,4 % en 2021 à 10,9 % en 2025. Inversement, son appui au PLC se raffermit; il s’établissait à 53,4 % en 2021 et atteint 67 % en 2025.
Le groupe le moins fidèle au PLC est celui des 65 ans et plus. Plus de quatre ainés sur cinq (82,5 %) avaient voté pour ce parti en 2021, mais à peine trois sur cinq (59,6 %) ont l’intention de faire de même en 2025. Presque le quart des personnes de cette tranche d’âge (23,2 %) entendent maintenant voter pour le NDP, un parti auquel seulement 8,4 % d’entre elles avaient accordé leur vote en 2021.
Raisons et méthodologie du sondage
Le manque de données sur les francophones en situation minoritaire au Canada – incluant leurs intentions de vote – a poussé Francopresse à vouloir effectuer un sondage dans la perspective de l’élection fédérale du 28 avril 2025.
Mené du 11 au 28 mars 2025, celui-ci a été diffusé en majeure partie par l’entremise des réseaux sociaux des journalistes et des journaux membres de Réseau.Presse, qui sont présents dans les communautés francophones de partout au pays à l’extérieur du Québec.
L’Ontario est surreprésenté dans les données, tandis que les trois territoires ont dû être retirés des analyses par région en raison du trop petit nombre de réponses.
Bien entendu, toutes les données provenant du Québec ont aussi été exclues, puisque l’objet du sondage était de dégager les intentions de vote des francophones en contexte minoritaire. Une surreprésentation du NPD dans l’Ouest est aussi à noter.
Enfin, il faut noter qu’une série de facteurs, dont le mode subjectif de diffusion du sondage, l’attente du débat des chefs ou encore la victoire de Mark Carney à la tête du Parti libéral l’avant-veille du lancement du sondage, ont pu influer sur les résultats.
Même si le sondage ne peut prétendre être représentatif de toute la population francophone en situation minoritaire au Canada, il permet tout de même de dégager certaines grandes tendances.
Un débat sur les enjeux francophones s’est déroulé mardi soir entre cinq candidats : Martin Champoux du Bloc Québécois, François Choquette du Nouveau parti démocratique (NPD), Joël Godin du Parti conservateur du Canada (PCC), Steven MacKinnon du Parti libéral du Canada (PLC) et Jonathan Pedneault du Parti vert du Canada (PVC).
Animé par Mathieu Nadon, chef d’antenne du Téléjournal Ottawa-Gatineau de Radio-Canada, en partenariat avec Réseau.Presse et Francopresse, la rencontre a cristallisé certaines tensions entre les cinq partis, notamment sur des enjeux comme les places en garderies, l’immigration francophone, les ainés, le postsecondaire ou encore l’avenir des médias francophones.
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Les libéraux ont dévoilé leur plateforme électorale samedi, où la question des contretarifs douaniers a pris toute la place.
Donald Trump aurait réaffirmé sa volonté de faire du Canada le 51e État des États-Unis, lors du dernier appel au premier ministre, Mark Carney, ce que ce dernier n’avait pas dit aux Canadiens.
Tarifs américains : Le parti prévoit de réduire les couts du commerce intérieur jusqu’à 15 % et d’injecter 5 milliards de dollars dans un Fonds pour la diversification de corridors commerciaux. Il compte aussi supprimer la semaine d’attente pour accéder à l’assurance-emploi si des Canadiens et des Canadiennes perdent leur poste en raison des tarifs américains.
Impôts : Le paiement des impôts sur le revenu et sur la TPS/TVH serait reporté temporairement pour les entreprises. Un Fonds de réponse stratégique de 2 milliards pour le secteur automobile est aussi envisagé. Le PLC a annulé la hausse du taux d’inclusion des gains en capital et propose de réduire le taux d’imposition de 15 % à 14 % sur la première tranche de revenus imposables.
Budget : Du côté du budget, le parti équilibrerait les dépenses de fonctionnement en trois ans, tout en maintenant des déficits dans les investissements. Il réduirait les dépenses publiques, réévaluerait les programmes via l’intelligence artificielle et limiterait la taille de la fonction publique.
Les libéraux n’ont pas dévoilé de mesure pour faire face à l’inflation.
Le chef de l’opposition, Pierre Poilievre, a dévoilé son cadre financier un jour après la fin du vote par anticipation.
Pierre Poilievre a dévoilé sa plateforme électorale mardi, soit un jour après la fin du vote par anticipation.
Taxes et impôts : Le taux d’imposition serait réduit de 15 % à 12,75 % et le PCC s’engage à tenir un référendum en cas de hausse des impôts.
Le PCC promet d’annuler huit taxes et impôts pour que les entreprises génèrent davantage de revenus. Une manière de remplir les coffres de l’État à hauteur de 53 milliards de dollars par la stimulation économique. Dans ce montant, plus de 12 milliards proviendraient de la création de logements.
Inflation : Pour contrer l’inflation, le parti veut notamment supprimer l’indexation de la taxe sur l’alcool et la ramener au niveau de 2017, date de la mise en place de la hausse indexée.
Fonction publique : Pour le budget, le PCC veut appliquer la règle d’un dollar d’économie pour chaque dollar supplémentaire dépensé, en réduisant les fonctionnaires par attrition, la bureaucratie, les consultants (gain de 10,5 G$), les aides sociales aux entreprises et l’aide étrangère. Il souhaite aussi supprimer l’exigence d’avoir un diplôme universitaire pour accéder à la plupart des postes de la fonction publique fédérale.
Le chef du NPD, Jagmeet Singh, a effectué une deuxième visite à Winnipeg au Manitoba, mercredi et jeudi, tout comme le chef libéral Mark Carney.
Si le NPD vise l’équilibre budgétaire, il ne se priverait pas d’emprunter pour aider les familles.
Impôts : Le montant personnel de base non imposable augmenterait pour atteindre 19 500 $, mais chuterait à 13 500 $ pour les personnes gagnant un salaire de plus de 177 882 $. Aucune prestation ne serait accordée aux personnes qui gagnent plus de 235 632 $.
Taxes : Les néodémocrates proposent d’abolir de façon permanente la taxe fédérale sur les produits et services (TPS) pour plusieurs dépenses courantes, comme les factures de chauffage résidentiel, les services Internet et cellulaires, les couches et vêtements pour enfants et les plats à emporter. Cette initiative couterait 4,5 milliards de dollars.
Le parti souhaite aussi plafonner les prix sur des produits alimentaires de base, comme les pâtes, les légumes surgelés et les préparations pour nourrissons, en imposant une taxe sur les profits excessifs réalisés par les grandes chaines d’alimentation.
Contretarifs : Le NPD supprimerait la TPS sur les voitures fabriquées au Canada. Il lancerait les «Emprunts de la Victoire», des obligations non imposables à 3,5 % sur 5 ou 10 ans, destinées à financer les infrastructures publiques. Des tarifs viseraient les véhicules Tesla et les entreprises américaines seraient exclues des contrats fédéraux tant que les tarifs douaniers ne seront pas levés. Les recettes tirées des représailles tarifaires serviraient à appuyer les travailleurs.
Yves-François Blanchet a critiqué Mark Carney pour avoir «manipulé la vérité» des propos de Trump sur le 51e État, lors du plus récent appel entre les deux chefs d’État. P
Tarifs américains : Le Bloc demande une aide directe aux industries forestières et de l’aluminium et propose une subvention salariale pour aider les entreprises affectées par les tarifs américains à garder leurs employés.
Le parti promet de déposer un projet de loi pour assurer la protection de la gestion de l’offre et contraindrait Ottawa à obtenir l’accord du Québec sur le texte préliminaire des accords avec les États-Unis. Le Québec souhaite des exceptions pour le Québec dans la réponse aux tarifs.
Impôts : Le Bloc supprimerait la TPS sur les biens de seconde main et demanderait un rapport d’impôt unique géré par le Québec.
Inflation : Pour faire face au cout de la vie, le Bloc veut doubler le crédit de TPS lorsque l’inflation dépasse la cible de la Banque du Canada, qui se situe entre 1 % et 3 % et le verser mensuellement. Le parti contiendrait aussi les taux d’intérêt des cartes de crédit.
Côté budget, le parti rejette les conditions fédérales liées aux transferts aux provinces.
Le cochef Jonathan Pedneault a affirmé lors du débat sur les enjeux francophones que des «obstacles systémiques (avaient eu lieu) au niveau de l’obtention des visas sous les conservateurs et les libéraux».
Tarifs américains : Les Verts veulent former un front commun avec d’autres démocraties et coordonneraient des représailles avec le Mexique. Ils réévalueraient le commerce avec la Chine, taxeraient les pétrolières américaines au Canada et interdiraient certaines importations alimentaires et pharmaceutiques des États-Unis. Les contrats publics iraient en priorité aux fabricants canadiens.
Impôts : Les Verts n’ont pas encore proposé de mesure pour assumer le cout de la vie. En revanche, ils proposent de supprimer l’impôt fédéral pour les faibles revenus et augmenteraient le montant personnel de base à 40 000 $.
Un impôt de 1 % serait imposé sur les avoirs de plus de 10 millions $, 2 % sur ceux excédant 50 millions $ et de 3 % sur ceux dépassant 100 millions $.
Enfin, le PV souhaite réduire le budget du Cabinet du premier ministre de 10 millions à 1 million $.
Tarifs américains : Le PPC propose de renégocier l’entente de libre-échange nord-américain pour répondre aux tarifs : la gestion de l’offre serait révisée.
Inflation : Le parti réduirait la cible de l’inflation de la Banque du Canada de 2 % à 0 %.
Taxe : Le PPC abolirait la TPS au profit des provinces en fonction de l’équilibre budgétaire, après l’élimination du déficit, et supprimerait l’impôt sur les gains en capital en réduisant le taux d’inclusion à 0 %.
En février dernier, la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) affirmait que le Canada a le potentiel de construire bien plus de logements qu’il ne le fait actuellement.
Mais elle rappelle aussi que le processus prend du temps : pour répondre aux besoins actuels et rendre des habitations accessibles aux ménages à revenu faible ou moyen, il pourrait encore falloir patienter jusqu’à 30 ans.
Voici une liste non exhaustive des principales mesures proposées par les partis fédéraux sur cet enjeu.
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Le Bloc québécois poussera le fédéral à revoir sa définition de «logement abordable» pour qu’il tienne compte des marchés des différentes régions.
En plus de demander dans sa plateforme électorale un transfert sans condition au Québec de toutes les sommes investies en logement, le Bloc québécois promet de travailler à augmenter la proportion de logements hors marché à 20 %.
D’une pierre deux coups, le parti d’Yves-François Blanchet propose d’utiliser plus de bois québécois dans la construction, ce qui permettrait notamment de soutenir l’industrie forestière présentement menacée par les tarifs douaniers américains.
Le Nouveau Parti démocratique (NPD) se donne lui une cible de 3 millions de nouveaux logements au Canada en cinq ans. Pour y parvenir, il propose de former 100 000 travailleurs supplémentaires et de remplacer le Fonds pour accélérer la construction de logements par une stratégie nationale permanente de 16 milliards de dollars.
Or, Radio-Canada a effectué une vérification de ce plan et a conclu qu’il serait irréalisable. Cette cible dépasserait la capacité nationale en matière de construction de logements.
Mark Carney veut créer une nouvelle entité nommée «Maisons Canada». Celle-ci devait s’appeler «Bâtir Maisons Canada», mais des critiques ont poussé les libéraux à changer le nom.
Le Parti conservateur du Canada (PCC) veut accélérer la construction de logements, notamment en éliminant les barrières bureaucratiques municipales. Les villes qui ne réussiront pas à construire 15 % de logements supplémentaires par an se verront retirer leur financement fédéral à hauteur de l’écart constaté dans les objectifs. Celles qui atteignent l’objectif se verront récompensées par des primes.
Le Parti libéral du Canada (PLC) souhaite, quant à lui, doubler le rythme de construction de nouveaux logements en dix ans. Parmi les moyens proposés : accélérer l’approbation de permis et la construction grâce aux nouvelles technologies, élargir l’accès à la formation liée aux métiers de la construction et assouplir les règles de zonage.
Dans sa plateforme, le Parti vert du Canada (PVC) consacre cinq pages au logement. En matière de construction, il met surtout l’accent sur les logements hors marché, pour lesquels il propose d’éliminer la taxe sur les produits et services (TPS) appliquée aux matériaux de construction. Le parti souhaite également développer la construction de logements «adaptés aux changements climatiques».
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Selon la SCHL, environ 95 % des habitations au Canada sont des logements de marché, ce qui veut dire que leurs loyers correspondent aux prix du marché et ne sont pas nécessairement abordables en fonction de la capacité de paiement des Canadiens et des Canadiennes.
Jagmeet Singh mise beaucoup sur la protection des locataires dans ses messages liés au logement.
Lors du débat des chefs en français, Yves-François Blanchet a parlé de baisser la spéculation sur la valeur des maisons. En misant sur le logement étudiant, le logement social, le logement abordable, il a rappelé qu’il existe des moyens de faire «des offres à bon marché».
Le NPD promet de son côté de construire 100 000 logements à loyer contrôlé d’ici 2035. Pour ce faire, il réserverait 100 % des terrains fédéraux constructibles. «On ne vend pas notre terrain fédéral, on le garde et on construit du logement abordable, 100 % de logement abordable», a précisé Jagmeet Singh lors du débat.
Le PCC s’engage à vendre 15 % des 37 000 immeubles du gouvernement fédéral pour les transformer en logements abordables. Il souhaite aussi éliminer la TPS sur la construction de logements locatifs pour stimuler leur développement.
Le Parti vert veut construire des maisons adaptées aux changements climatiques.
Pour le logement abordable, les libéraux s’engagent à soutenir les petits constructeurs à but non lucratif afin d’augmenter l’offre disponible. Ils parlent d’adopter une «approche communautaire» dans laquelle sera doublé le nombre de logements communautaires à but non lucratif et de logements coopératifs.
Le PVC veut tripler le nombre de logements sociaux en sept ans. Investir dans le logement abordable est l’une des grandes lignes de son plan. «Tout logement financé par des fonds publics restera abordable en permanence», lit-on dans leur plateforme.
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Au menu bloquiste : serrer la vis aux flips immobiliers (technique qui consiste à acquérir un bien à prix réduit, à le rénover et à le revendre rapidement pour faire des profits), faciliter l’acquisition de bâtiments fédéraux par de petits organismes, rembourser la TPS sur les maisons neuves pour les premiers acheteurs. Ces derniers se verraient aussi octroyer «une aide fédérale majeure» pour leur mise de fonds si le Bloc québécois réussit à convaincre Ottawa.
Pour les premiers acheteurs, le parti propose aussi d’abolir la TPS sur les services liés à l’achat d’une propriété, comme ceux fournis par les notaires.
Le NPD rendrait l’achat d’une propriété résidentielle (sauf à but récréatif, comme un chalet) par des investisseurs étrangers définitivement interdit. Le parti souhaite par ailleurs faciliter l’accès à la propriété pour «les familles de travailleurs et de la classe moyenne», notamment en accordant des prêts hypothécaires à long terme et à faible intérêt.
Pierre Poilievre veut faciliter la construction de logements en s’attaquant à «la bureaucratie municipale».
Les conservateurs veulent éliminer la taxe de vente sur les maisons neuves d’une valeur de moins de 1,3 million de dollars, afin que les acheteurs aient des paiements hypothécaires plus petits et de stimuler la construction de nouveaux logements.
Les libéraux promettent d’éliminer la TPS sur l’achat d’une première maison lorsque celle-ci vaut moins d’un million de dollars. Une réduction partielle de la taxe est prévue pour les maisons dont le prix se situe entre 1 et 1,5 million de dollars.
Comme le NPD, le PVC propose d’interdire de façon permanente l’achat des propriétés résidentielles au Canada par des intérêts étrangers. Il veut aussi supprimer la TPS sur les logements construits dans une optique d’accession abordable à la propriété. Des organismes comme Habitat pour l’humanité travaillent en ce sens.
Le débat a réuni à Ottawa des représentants des cinq principaux partis politiques.
Pendant une heure, ils ont débattu d’un grand nombre de sujets : seuils d’immigration, santé et places dans les garderies bien entendu, mais aussi fonction publique, traduction, médias, commissaire aux langues officielles, financement des petits établissements universitaires, ayants droit, réconciliation avec les communautés autochtones (et gouverneure générale), etc.
Alors que toute notre attention est accaparée par la question de l’incertitude économique et des relations commerciales avec les États-Unis, le Canada est pourtant confronté à d’autres défis, à commencer par la question de la protection, si ce n’est de la survie, des communautés francophones partout au pays.
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Un débat très animé
Le moins que l’on puisse dire c’est que ce débat a été très animé.
À plusieurs reprises, les candidats parlaient en même temps, ne se gênant pas pour interrompre leurs adversaires ou pour parler plus longuement que le temps qui leur avait été alloué.
Le débat sur la francophonie a été animé, mais en fin de compte, les réponses à chaque question livraient plus une promesse similaire des beaux jours à venir.
La vivacité des échanges pourrait donner l’impression que les choses vont mal et il faut y remédier le plus rapidement possible. D’ailleurs, n’est-ce pas ce que l’on entend lorsque l’on parle de francophonie au Canada? La population francophone est en déclin. L’offre des services en français aussi. Des communautés disparaissent.
Pourtant je n’ai pas perçu que les partis politiques partageaient ce sentiment d’inquiétude, pour ne pas dire d’urgence. J’y ai plutôt vu un large consensus.
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Une réponse à tout
Si on leur avait posé la question «Trouvez-vous que les choses vont bien en matière de francophonie?», je pense bien que tous les candidats, peu importe leur affiliation politique, auraient plutôt répondu oui.
Car les réponses fournies à la plupart des questions étaient essentiellement les suivantes : oui, il y a des défis, mais on fait des efforts qui vont éventuellement donner des résultats.
Oui, des seuils d’immigration francophone sont difficiles à atteindre, mais on s’améliore et on y parviendra. On va même les augmenter.
Oui, l’offre et la qualité des services de santé et d’éducation laissent à désirer, mais soyez patients, car la main-d’œuvre s’en vient. D’autant plus que l’on va atteindre nos seuils d’immigration.
Oui, le bilinguisme dans la fonction publique fédérale et l’offre de services publics posent problème, mais les règlements internes du gouvernement qui seront bientôt adoptés vont transformer la situation. En plus, on aura un nouveau commissaire aux langues officielles qui aura plus de «mordant» (le mot est revenu souvent lors des échanges).
Oui, on est d’accord, l’intelligence artificielle ne peut pas remplacer des traducteurs, alors on va faire les ajustements nécessaires en donnant plus de ressources.
Oui, plusieurs médias francophones risquent de devoir cesser leurs activités bientôt, mais on est en train de mettre au pas les géants du Web.
Oui, la survie des petites universités est en péril, mais le financement sera éventuellement au rendez-vous.
Bref, toutes les réponses fournies par les candidats reprenaient essentiellement le même argument : il manque actuellement d’argent et de ressources humaines (la main-d’œuvre), mais on va investir plus et ça donnera des résultats.
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du point de vue de la francophonie canadienne.
Si les choses étaient aussi faciles…
Mais ce raisonnement est profondément fallacieux. À répéter sans cesse que les problèmes se résorberont lorsqu’il y aura plus d’argent, on confine d’emblée les communautés linguistiques les plus vulnérables à être dans une position perpétuelle de demandeurs. Elles sont ainsi à la merci du bon vouloir des bailleurs de fonds.
Mais ça fait des années que les communautés linguistiques minoritaires demandent ces ressources, sans obtenir de réels résultats.
La solution n’est tout simplement pas là. Elle passe par une refonte des modèles de gouvernance. Les francophones doivent avoir une place dans les centres de décisions, là où les véritables enjeux font l’objet de discussions.
Ils doivent, par exemple, être présents dans les conseils d’administration des établissements de santé, du milieu scolaire – de la petite enfance à l’université –, et rendre compte de leurs actions aux communautés qu’ils représentent.
Ils doivent pouvoir se prononcer et même approuver les choix du diffuseur public (Radio-Canada) et pour les autres médias (le CRTC), aussi sur les orientations de la fonction publique (que ce soit à propos du commissariat aux langues officielles ou des décisions du secrétariat du Conseil du trésor, l’employeur de la fonction publique fédérale).
Bref, la francophonie canadienne doit être traitée comme un décideur de politiques publiques de plein droit.
Si on devait s’en convaincre, il n’y a qu’à observer l’influence qu’a eue la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) durant le débat. À de nombreuses reprises, ses propositions ont été mentionnées par les candidats. Voilà qui illustre bien l’importance de recevoir des avis des communautés francophones.
À une exception près, aucun parti n’a présenté de telles solutions lors de ce débat. L’exception a été le Bloc québécois, qui a rappelé que les décisions concernant l’avenir du français au Québec devaient être prises par le gouvernement du Québec et non par le gouvernement fédéral.
Cette solution n’aidera évidemment pas les communautés francophones hors Québec.
Commencer par donner l’exemple
Par ailleurs, tous les partis politiques ont manqué une excellente occasion de faire preuve de leadeurship sur l’enjeu de la gouvernance lors du débat.
Aucun des candidats n’était un francophone hors Québec.
Sans enlever aucun mérite aux candidats qui ont participé à ce débat (ils ont tous un CV impressionnant), on ne peut s’empêcher de penser qu’il existe d’excellents candidats francophones de l’extérieur du Québec qui auraient pu prendre part à un débat sur des enjeux qui les touchent directement.
Le débat était le fruit d’une collaboration entre Radio-Canada, les médias écrits membres de Réseau.Presse et Francopresse, qui ont participé à l’élaboration des questions.
Geneviève Tellier est professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les politiques budgétaires des gouvernements canadiens. Elle commente régulièrement l’actualité politique et les enjeux liés à la francophonie dans les médias de tout le pays.
Publiée en 2014 dans The British Journal of Politics and International Relations, l’étude en question se penche sur les commentaires et la couverture médiatique entourant la nomination de Mark Carney comme gouverneur de la Banque d’Angleterre.
Les chercheurs, Chris Clark et Adrienne Roberts, démontrent que Mark Carney est présenté «comme un superhéros sexy et élégant de la banque centrale, capable de stimuler l’économie britannique grâce à ses pouvoirs monétaires magiques».
Ce narratif, selon eux, contribue à normaliser la domination masculine en économie et en finances. La gouvernance de Mark Carney aurait aussi contribué «à faire taire et en partie à reproduire les schémas d’inégalités de genre dans le secteur financier».
Retournons au début.
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Depuis janvier, on entend que Mark Carney ne possède ni le charisme ni la beauté de Justin Trudeau. Pourtant, lors de son passage à la Banque d’Angleterre, il était surnommé le George Clooney du monde bancaire.
Mark Carney en 2011, alors qu’il était encore gouverneur de la banque du Canada.
Plusieurs articles de presse faisaient référence «à la personnalité charmante du “nouveau gouverneur tiré à quatre épingles” qui aurait une ressemblance frappante à George Clooney», écrivent les auteurs dans leur étude.
M. Carney a été décrit tour à tour comme une «“idole de cinéma” dotée de qualités messianiques, un “banquier rockstar” et un “père de quatre enfants qui joue au hockey et qui a étudié à Harvard et à Oxford”», ajoutent-ils.
Les politologues citent un article de The Standard de 2013, dans lequel un haut fonctionnaire du Trésor avait témoigné : «Mark Carney incarne “le parfait homme de Davos”».
«À chaque fois qu’un grand sourire blanc marquait les traits indéniablement séduisants de Carney, les députés – tous adultes – semblaient presque rougir», écrivait The Independant.
Et dans The Guardian, Mark Carney décroche le titre de «jeune prince». «Le prince» est, par coïncidence, aussi le titre d’un livre sur Justin Trudeau, écrit par le journaliste canadien Stephen Maher.
Les auteurs de l’étude citent, entre autres, un texte écrit par nulle autre que Chrystia Freeland.
La ministre canadienne actuelle des Transports et du Commerce intérieur – dont la démission des postes de ministre des Finances et de vice-première ministre a fait couler beaucoup d’encre – a longtemps été journaliste.
«Ces commentaires [sur son physique, notamment] normalisent le sex appeal masculinisé de Carney auprès de ses collègues, mais ils naturalisent aussi la dominance des hommes en finances», lit-on dans l’étude. Photo : Julien Cayouette – Francopresse
En 2013, Mme Freeland écrivait pour l’agence de presse Reuters. Elle publie dans le New York Times un article sur l’arrivée de Mark Carney à la tête de la Banque d’Angleterre intitulé «Banker Steps Into the Role of Superhero» [Un banquier entre dans le rôle de superhéros].
Elle parle notamment des «pouvoirs financiers magiques» de M. Carney et de son «charisme de vedette».
Douze ans plus tard, Chrystia Freeland l’a affronté dans la course à la chefferie du PLC, a perdu et a fini par rejoindre le cabinet du nouveau premier ministre. Mark Carney est également le parrain du fils de Chrystia Freeland.
«Alors que les banquiers centraux ont longtemps été dépeints comme de vieux sages qui sont des “oracles” cartésiens, responsables et indépendants, le récit entourant Carney allie de manière exceptionnelle ces traits avec ceux du charme et de l’esprit», écrivent les chercheurs.
L’étude met de l’avant deux idéaux types de la masculinité à partir desquels est analysé le narratif entourant M. Carney : la «masculinité bourgeoise traditionnelle» et la «masculinité d’affaires transnationale». L’ancien gouverneur aurait des caractéristiques des deux catégories.
Les années qui ont mené à la crise financière de 2008 étaient teintées d’une masculinité caractérisée par une «prise de risque dictée par la testostérone», commentent les politologues. Il y avait donc besoin d’une figure plus «conservatrice et paternelle pour reprendre le contrôle de la folie financière», suggèrent-ils.
Traduction d’un tableau présenté dans l’étude de Chris Clark et d’Adrienne Roberts. Ces idéaux types ont été développés par une poignée de théoriciens.
«Construire des narratifs pour présenter quelqu’un comme le prochain gouverneur de la Banque [d’Angleterre], c’est déjà s’inscrire dans un discours qui vient naturaliser les caractéristiques associées aux hommes et aux femmes», explique l’économiste et professeure associée à la retraite de l’Université Laval Sylvie Morel.
«Ce sont des mythes», ajoute-t-elle. Les crises et la manière dont on les a gérées «ne sont pas réductibles à des comportements individuels». «L’entrée dans la crise, par exemple, n’est pas réductible aux folies d’une masculinité d’affaires transnationale. […] C’est structurel.»
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L’étude conclut aussi que la manière de gouverner de Mark Carney a «contribué à créer un système financier qui accentue les inégalités» économiques entre genres.
D’abord, parce que c’est ce qui arrive généralement lorsque les intérêts de la finance privée influencent l’élaboration de politiques financières. Les chercheurs rappellent ainsi le passage de M. Carney à la banque d’investissement Goldman Sachs.
L’étude cite Andrea Leadsom, qui était député au Parlement britannique et qui avait dit en 2013 que Mark Carney est «assurément ennuyeux malgré son allure de vedette de cinéma».
«Il est difficile de documenter de manière explicite les liens entre Carney et ses anciens collègues de Goldman Sachs, mais selon un ancien banquier d’investissement, la firme jouit d’un pouvoir mondial et de relations influentes sans égal, dont elle tire pleinement parti», écrivent-ils, en citant le livre How Goldman Sachs Came to Rule the World.
Ensuite, parce que Mark Carney «dépolitisait» l’économie. La logique est la suivante : M. Carney misait, selon eux, sur une vision indépendante, neutre et technocratique de l’économie et des finances. Or, ces domaines ne sont pas neutres, car ils ont des incidences souvent disproportionnées sur les femmes. La neutralité de Mark Carney ignorait donc la réalité pourtant genrée de l’économie.
Et enfin, parce que Mark Carney réglait la crise financière d’une manière qui renforce certaines inégalités, par exemple en menant une politique monétaire centrée sur la stabilité des prix et le contrôle de l’inflation, des décisions qui peuvent aggraver les inégalités entre genres, soulignent les politologues.
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«Mark Carney joue beaucoup de sa crédibilité actuellement, il se veut rassurant. On fait beaucoup valoir son expérience, son expertise. Il y a tout le narratif de la rationalité», fait remarquer Sylvie Morel sur l’arrivée de l’ancien banquier à Ottawa, en 2025. «On l’amène un peu comme un sauveur.»
En même temps, il joue de l’autre idéal type lorsqu’il dit : «Je suis capable de montrer de gros bras, je suis capable de parler à Trump, de l’affronter.»
Mark Carney tomberait donc toujours dans les deux idéaux types.
Contrairement à 2013, Mark Carney est désormais engagé dans la vie politique et en campagne électorale : il est scruté. «Il recueille les critiques, observe-t-elle. On dit qu’on ne le connait pas vraiment, qu’il n’est pas clair sur ses actifs financiers […], les histoires avec Brookfield, son incohérence sur la loi 96.»
La glace a très rapidement été brisée par François Choquette (Nouveau Parti démocratique), qui n’a pas hésité avant d’interrompre Steven MacKinnon (Parti libéral du Canada) pour lui rappeler qu’il reste de nombreux besoins à combler en matière de garderies francophones.
Aucun parti n’a expliqué clairement comment ils combleraient ces besoins. M. MacKinnon a simplement répondu que si réélus, les libéraux garantiraient des places francophones en garderie.
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Joël Godin a assuré que le Parti conservateur du Canada augmentera l’immigration francophone hors Québec à 20 %, sans toutefois donner d’échéance pour atteindre cette cible.
Sur le financement du postsecondaire francophone, Joël Godin (Parti conservateur du Canada) a promis de la «prévisibilité» aux établissements. Son adversaire libéral a vanté le Plan d’action pour les langues officielles (PALO) 2023-2028, mais n’a annoncé rien de nouveau pour le secteur.
M. Choquette a insisté sur le fait qu’il fallait tenir compte des établissements de petite taille, comme l’Université de Hearst et l’Université de l’Ontario français. Martin Champoux (Bloc québécois) a rappelé que l’éducation est de compétence provinciale, et que le fédéral devrait «équiper» les provinces.
L’éducation n’était que l’échauffement.
Le cochef du Parti vert du Canada, Jonathan Pedneault, a profité de cette invitation pour dénoncer un manque d’action libéral en matière de francophonie.
«Il y a une richesse culturelle que moi, en tant que Québécois, je découvre maintenant dans mon rôle de politicien fédéral. J’aimerais que chaque Québécois soit au courant des luttes, des pérégrinations des francophones à travers le pays», a déclaré Jonathan Pedneault.
«En quoi c’est suffisant?», a-t-il demandé deux fois plutôt qu’une à M. MacKinnon, qui vantait le PALO de 1,4 milliard de dollars. «C’est insuffisant», a ajouté François Choquette, qui souhaite bonifier les fonds octroyés aux organismes francophones.
Attaquant le bilan libéral en matière de bilinguisme et estimant lui aussi que la bonification du PALO par les libéraux était insuffisante, Joël Godin stipule que pour protéger le français, «c’est très simple» : «On va nommer une gouverneure générale qui parle français. On va permettre de comptabiliser tous les ayants droit dans le recensement.»
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M. MacKinnon a aussi été questionné sur la disparition du titre de ministre des Langues officielles dans le Cabinet ministériel formé par le nouveau chef libéral et premier ministre du Canada, Mark Carney, en mars dernier. Ce à quoi il a répondu : «Steven Guilbeault est le ministre des Langues officielles» et «tout sera à refaire après les élections».
Steven MacKinnon a défendu le bilan de son gouvernement et affirme que l’intégration des immigrants francophones reste une «priorité».
M. Guilbeault est responsable des Langues officielles, mais le portefeuille ne figure pas dans son titre : ministre de la Culture et de l’Identité canadiennes, Parcs Canada et lieutenant du Québec.
Steven MacKinnon a également essuyé des critiques concernant les récentes compressions annoncées au Bureau de la traduction. Selon lui, le Bureau doit être conservé et l’intelligence artificielle doit aussi en faire partie, mais avec un encadrement humain.
L’IA «n’a pas sa place dans la fonction publique de cette manière-là», a rétorqué Jonathan Pedneault. «Il faut protéger [le Bureau de la traduction], pas le couper.»
Martin Champoux s’est aussi positionné contre l’intégration de l’IA au Bureau, évoquant le besoin de «talents humains». «On est loin d’être prêts à laisser [à l’IA] autant de place pour des sujets aussi importants. Ce serait une grave erreur.»
Questionné sur les compressions prévues par son parti dans la fonction publique, Joël Godin a promis que le cadre financier conservateur «n’indique aucune coupure au niveau des organismes de langue française». Pour ce qui est des fonctionnaires, il y aura une réduction par attrition, mais surtout, une demande de «résultats», affirme le candidat.
Martin Champoux a affirmé que le Bloc québécois était un allié des francophones en situation minoritaire et affirme que couper le financement de CBC sans toucher à Radio-Canada est une «lubie».
Et lorsque Jonathan Pedneault a accusé les conservateurs de vouloir couper dans le postsecondaire francophone, M. Godin a indiqué que cela était faux et qu’il fallait contrer l’antisémitisme. Il faisait ici référence à la condition que le Parti conservateur veut imposer au financement des établissements postsecondaires : l’application des normes de l’article 2 de la Charte sur la liberté d’expression.
Joël Godin estime aussi qu’il est possible de définancer CBC et de protéger sa jumelle francophone, une proposition dénoncée par tous ses adversaires. Les quatre autres candidats ont réitéré leur soutien envers Radio-Canada et les médias locaux francophones.
Pour les autres médias en milieu minoritaire, M. Choquette veut d’ailleurs bonifier l’Initiative de journaliste local (IJL). M. Pedneault aimerait quant à lui voir plus de contenu francophone hors Québec à la «télévision nationale».
Martin Champoux en a profité pour rappeler que la Loi sur la diffusion continue en ligne est présentement devant le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) et occasionnera «des résultats tangibles pour la participation des géants du numérique au contenu canadien et en matière de découvrabilité du contenu francophone».
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Les journaux francophones en milieu minoritaire ont participé au débat par la voix du rédacteur en chef du Nunavoix, Brice Ivanovic. Les verts et le NPD ont promis plus d’investissements.
Dans sa plateforme électorale, le Parti libéral promet une cible d’immigration francophone hors Québec de 12 % d’ici 2029, un objectif que le chef conservateur Pierre Poilievre a qualifié de «raisonnable» lors d’une conférence de presse la semaine dernière. Malgré ce compliment, les conservateurs ne donnent pas de cible dans leur plateforme.
Néanmoins, Joël Godin a annoncé lors du débat que les conservateurs iraient jusqu’à 20 % d’immigration francophone, mais a refusé de dire pour quelle année.
Pour les ainés, François Choquette mise sur les soins de santé à domicile, et ce, en français. Il propose une augmentation des transferts en santé pour ce faire.
M. MacKinnon a de son côté vanté la cible de 12 % promise par son parti, tout en prétendant que c’était la demande de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA). Mais comme l’a rectifié Martin Champoux, celle-ci demandait 12 % dès 2026.
M. Choquette a reconnu le besoin de cibles plus ambitieuses, mais n’a pas eu le temps de détailler les promesses néo-démocrates en la matière. Jonathan Pedneault a reconnu le besoin d’augmenter l’immigration francophone, mais il n’a pas non plus donné de cible.
Un prochain commissaire aux langues officielles sera bientôt nommé, et François Choquette demande que des consultations soient menées en prévision. Il espère aussi qu’il s’agira d’«une personne qui va avoir du mordant».
Joël Godin a quant à lui rappelé que le commissaire attend toujours un décret dans le cadre de la modernisation de la Loi sur les langues officielles. Il a demandé à M. MacKinnon une échéance pour le dépôt de ce décret, mais n’a pas obtenu de réponse.
Ce débat est le fruit d’une collaboration entre Radio-Canada, Les médias écrits membres de Réseau.Presse et Francopresse, qui ont participé à l’élaboration des questions du débat.
Radio-Canada, Réseau.Presse et Francopresse ont organisé un débat en français sur les enjeux qui préoccupent toujours la francophonie canadienne, comme l’éducation et l’accueil des immigrants et immigrantes, pour n’en nommer que deux.
Martin Champoux du Bloc québécois, François Choquette du Nouveau Parti démocratique, Joël Godin du Parti conservateur du Canada, Steven MacKinnon du Parti libéral du Canada et Jonathan Pedneault du Parti vert du Canada répondront aux questions.
«Nous estimons que 2,4 millions de ménages ont actuellement des besoins impérieux en matière de logement, et nous projetons que 2,6 millions de ménages en auront d’ici 2027», écrivait le directeur parlementaire du budget dans un rapport en décembre 2024.
Ottawa a sabré dans le financement du logement social vers le milieu des années 1990, laissant ainsi plus de place au privé, raconte Louis Gaudreau.
«Il y a cette idée que si on est dans une crise du logement aujourd’hui, c’est parce qu’on n’a pas suffisamment construit», rappelle le professeur à l’École de travail social de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Louis Gaudreau. Mais construire des logements que personne ne peut se payer ne règle aucune crise, dit-il.
Au Québec, par exemple, le taux de construction était élevé au début des années 2000. L’enjeu de l’abordabilité ne se réglait pas pour autant. «C’est parce qu’on a privilégié des produits résidentiels – au départ, c’était le condo, qui était axé sur la propriété – qui n’étaient pas là où les besoins se font le plus sentir», prévient le chercheur.
Le Québec a ensuite vu apparaitre des tours d’appartements à louer, mais où les loyers sont chers. Le logement abordable est tombé aux oubliettes.
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Revenir en arrière?
Maya Kambeitz est présidente-directrice générale de Norfolk, une association qui fournit du logement communautaire à Calgary, en Alberta. Elle remarque un désinvestissement de la part d’Ottawa dans ce type de logement et dans des fournisseurs comme Norfolk.
Pourtant, entre les années 1950 et 1970, le gouvernement fédéral investissait dans des fournisseurs de logements communautaires pour les aider à construire et à acquérir de vieux bâtiments.
On s’est tellement concentrés sur la construction qu’on a perdu de vue les logements qui occultent naturellement sur le marché. Lorsque vous ne permettez pas au secteur du logement communautaire de jouer un rôle dans l’acquisition de certains de ces bâtiments mis en vente, ce sont des investisseurs privés qui achètent.
«Le privé, et c’est sa job, cherche à maximiser ses profits. Donc il augmente les loyers, poursuit Maya Kambeitz. Nous, on n’a pas cet incitatif à faire du profit.» Avec son maigre budget annuel, Norfolk ne peut pas compétitionner avec le privé et ce sont les Canadiens à faible revenu qui paient le prix.
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La clé, selon Louis Gaudreau, reste le financement des logements sociaux. Comment trouver cet argent? La France, le Danemark et l’Autriche ont des modèles de financement intéressants, considère-t-il.
Une étude de ces trois modèles a été réalisée en 2023 par la Fédération des OSBL d’habitation de Montréal (FOHM). Au Danemark, par exemple, pour ce qui est du logement social, «on a entièrement nationalisé le secteur des prêts hypothécaires», remarque le professeur.
Vienne, la capitale de l’Autriche, est une vedette en matière de logement abordable. Le professeur et directeur de l’Institut d’infrastructure de l’Université de Toronto, Matti Siemiatycki, explique que le gouvernement autrichien a joué un grand rôle dans la construction de logements, qui sont apparus sous diverses formes.
Plus de 60 % de la population viennoise habite en logement social qui échappe à la logique du profit. La ville prélève une taxe spécifique pour alimenter ses programmes d’habitation et elle noue des partenariats avec des organismes sans but lucratif depuis les années 1970.
Quand Matti Siemiatycki a visité Tokyo il y a deux ans, il a été saisi par la densité. «Une densité construite de manière tellement différente que chez nous… Ce n’est pas haut et étalé comme nous, se souvient-il. Il y a des bâtiments de 10 à 30 étages à perte de vue.»
«On retrouve de grands bâtiments sans stationnement souterrain, ajoute-t-il. C’est quelque chose qui rend la construction de logement chère, de creuser un stationnement souterrain.» Le secret : la capitale japonaise a un système de transport public étendu, permettant aux gens d’habiter loin des grands centres sans être pénalisés.
Le transport est le revers de la médaille en matière de logement, et des villes en Asie ont réussi à rendre le logement abordable en partie en le densifiant et en veillant à ce que tous les ménages ne soient pas obligés de posséder une voiture.
L’État joue un grand rôle dans le logement à Singapour. Il possède une grande part des terrains, fournit du logement social et octroie des subventions pour l’achat de logements. Une société d’État se charge de la coordination du système, allant de la construction à l’attribution de logements. Le cout des logements est ainsi contrôlé.
Les logements sociaux appartiennent d’ailleurs souvent à ceux qui y habitent, car le gouvernement vend des baux emphytéotiques de longue durée, généralement de 99 ans.
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Leçons canadiennes
Selon Matti Siemiatycki, au Canada, la Colombie-Britannique mène la danse en matière de politiques de logement. «Elle est contrainte en termes d’espace, parce qu’elle est enclavée entre océan, montagnes et frontières. Elle a mis de l’avant des mesures ambitieuses, surtout autour du rôle du secteur public.»
En augmentant la densité au sein des mêmes terrains, les habitants peuvent se servir des services existants, comme les épiceries ou les bibliothèques. C’est le pari que fait la ville d’Edmonton.
Lorsque le premier ministre provincial, David Eby, a annoncé le programme BC Builds en 2024, il a avoué s’être inspiré de Vienne et Singapour. En mobilisant des terrains sous-utilisés, possédés par des gouvernements, des communautés et des organismes à but non lucratif, l’objectif est d’aligner les couts avec des revenus moyens.
La capitale albertaine fait beaucoup jaser, affirme Matti Siemiatycki. Elle a récemment révisé ses règles de zonage afin de permettre des logements plus denses.
«Pendant longtemps au Canada, on a limité de grandes parties de nos villes à des logements unifamiliaux. C’est alors très difficile de densifier, explique M. Siemiatycki. Le zonage change, non pas pour permettre des gratte-ciels de 20 étages, mais plutôt ce qu’on appelle la densification douce. Souvent, on permet un duplex ou un triplex, par exemple.»
Edmonton a aussi commencé à faire appel à des technologies, dont l’intelligence artificielle, pour automatiser et accélérer l’approbation de permis de construction.
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«Nous voulons avant tout favoriser le maintien à domicile des personnes âgées pour qu’elles continuent à vivre en français et à recevoir des soins et des services dans leur langue», affirme le président de l’Association des Francophones de l’âge d’or de l’Île-du-Prince-Édouard (FAOÎPÉ), Claude Blaquière.
En Ontario, Michel Tremblay aimerait que davantage de fonds fédéraux soient alloués aux associations d’âge d’or.
L’organisme insulaire est l’une des onze associations membres de la Fédération des ainées et ainés francophones du Canada (FAAFC). À l’occasion de l’élection fédérale, la FAAFC a publié un document de 12 pages intitulé Agissons maintenant!, qui présente les revendications des 50 ans et plus.
La FAAFC réclame notamment la mise en place d’une politique nationale sur le vieillissement. En mai, des États généraux sur le vieillissement auront lieu à Moncton, au Nouveau-Brunswick. Plus de 250 ainés francophones seront consultés pour identifier les éléments à inclure dans cette politique. Un livre blanc sera alors rédigé et présenté au gouvernement fédéral.
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«Ça prend une politique intersectorielle pour garder les ainés en santé chez eux, avec des relations sociales», assure le directeur général de la Fédération des ainés et des retraités francophones de l’Ontario (FARFO), Michel Tremblay.
Ça nous donnera un cadre législatif important. À partir de là, d’autres lois et règlements pourront être promulgués, et ça permettra d’exercer plus de pression pour obtenir des services et des programmes en français.
L’Acadien insiste sur le besoin de «changer d’approche» afin de répondre adéquatement au défi du vieillissement. Depuis 2016, la population âgée de 65 ans et plus dépasse celle des enfants de moins de 14 ans. En 2023, près de 19 % de la population canadienne avait 65 ans ou plus, et ce chiffre pourrait atteindre plus de 23 % d’ici 2030.
«Plutôt que d’envoyer les plus âgés dans des foyers ou des hôpitaux anglophones, il faut investir dans les soins à domicile, estime Claude Blaquière. C’est moins de stress pour les ainés, et ça coute beaucoup moins cher.»
Éric Lefol dénonce l’absence de maison de retraite francophone en Saskatchewan et plaide pour la construction de petites unités pouvant accueillir une dizaine de personnes exclusivement en français.
Aujourd’hui, d’après la FAAFC, seulement 17 % du budget fédéral de la santé est consacré aux soins à domicile, contre par exemple 80 % dans les pays scandinaves.
«Nos ainés se retrouvent dans des maisons de retraite anglophones et on les perd, poursuit le directeur général de l’organisme Vitalité 55+ en Saskatchewan, Éric Lefol. À cause de ça, pas mal d’entre eux se sentent isolés et intimidés et développent des problèmes de santé mentale.»
Le Fransaskois exige par ailleurs plus de financements pour les services d’aide à domicile : «S’occuper des soins de santé, c’est essentiel, mais c’est insuffisant. Si l’on veut qu’une personne en perte de mobilité reste chez elle, il faut l’aider à faire le ménage, la cuisine, à tondre le gazon, à pelleter la neige.»
Quelle que soit la province, les responsables dénoncent le manque criant de services en français, en particulier dans le domaine de la santé.
C’est de compétence provinciale, mais le fédéral transfère de l’argent aux provinces. Ottawa doit donc augmenter les sommes réservées aux soins de santé en français et préserver les clauses linguistiques lorsque les ententes de financement bilatérales sont négociées.
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Pouvoir être soigné chez soi implique également de vivre dans un logement adapté à ses besoins. À cet égard, la majorité des ainés habite dans des maisons «trop grandes à étage qui ne sont plus fonctionnelles», selon Michel Tremblay.
À l’Île-du-Prince-Édouard, Claude Blaquière constate de la même manière que la plupart des personnes âgées avec des problèmes de mobilité demeurent «souvent seules et isolées, en milieu rural, loin des grands centres».
«Mais elles ne peuvent malheureusement pas déménager, car elles ne trouvent pas de logements plus petits à des prix abordables», déplore Éric Lefol.
La FAAFC demande ainsi la construction de davantage de logements abordables adaptés. Pour les représentants du secteur, encourager les ainés à retourner sur le marché du travail constitue un autre enjeu clé.
Prendre sa retraite ne veut pas dire nécessairement arrêter de travailler ou de s’engager, on a besoin de se sentir utiles à la société. Il faut rester occupés mentalement et physiquement, avoir des projets, continuer à sociabiliser, c’est ce qui nous maintient en vie quand on vieillit.
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Favoriser l’employabilité des ainés, «ne serait-ce que quelques heures par semaine», reste également une manière de «pallier l’actuelle pénurie de main-d’œuvre dans les communautés francophones en situation minoritaire», considère Claude Blaquière.
À l’Île-du-Prince-Édouard, Claude Blaquière assure que «des emplois à temps partiel» intéressent les ainés, à condition de ne pas être «pénalisés au niveau des impôts».
«Ça doit néanmoins se faire selon des conditions précises et flexibles, au rythme des ainés, en fonction de leur emploi du temps, de leurs compétences, de leurs envies», précise-t-il, avant d’évoquer des postes de suppléants dans l’enseignement.
La FAAFC suggère notamment la mise en place d’un programme «Ainés Canada au travail», sur le modèle de Jeunesse Canada au travail.
Michel Tremblay appelle pour sa part à inciter financièrement les employeurs à embaucher des personnes âgées : «Avec leur expérience, les plus vieux peuvent aussi devenir des mentors pour les plus jeunes, c’est un atout pour une entreprise.»
Les enjeux des ainés francophones en situation minoritaire étant «complètement invisibles» durant cette campagne électorale, selon les mots d’Éric Lefol, les organismes tentent d’agir au niveau local et de sensibiliser les candidats dans leur province respective.
«On multiplie les rencontres, on leur envoie des sondages», détaille Claude Blaquière.
Le Fransaskois Éric LeFol dénote, lui, «un manque d’intérêt des candidats» : «On sent de l’impatience quand en on parle, ça ne semble pas une question d’importance pour eux.»
Pour le moment, seul le Bloc Québécois a proposé des incitatifs fiscaux pour les ainés qui choisissent de rester sur le marché du travail. De son côté, le Parti conservateur du Canada a annoncé que les ainés pourraient gagner jusqu’à 34 000 dollars non imposables.