Pendant plusieurs années, les gouvernements qui se sont succédé n’ont pas toujours pris conscience de l’importance des investissements publicitaires et de la mécanique derrière ses achats.
Au Québec, le gouvernement a passé un décret en février 1995, promettant d’investir 4 % annuellement au sein des médias communautaires québécois. Cet ajout a permis une plus grande équité envers la population, permettant la diffusion de message publicitaire dans l’ensemble des régions pour que les résidents des villes et des régions puissent avoir accès à ses messages d’intérêt public.
Au sein du gouvernement fédéral, il n’existe aucune mesure de la sorte et les Canadiennes et Canadiens, de partout au pays, se sont retrouvés avec des budgets publicitaires profitant à des entreprises étrangères, provoquant une sortie des capitaux au lieu de créer des emplois et des services dans nos communautés.
Cette mesure d’établir un seuil minimum de l’investissement publicitaire gouvernemental vers les médias communautaires de partout au pays devrait s’imposer sur la scène fédérale.
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C-18 manque de sens pratique
Le gouvernement Trudeau semble impuissant, sans véritable plan, ni de connaissance du terrain.
Le projet de loi C-18 est un bel exemple. Le principe derrière cette loi est noble, mais la belle naïveté de croire qu’un tel projet allait rapidement et concrètement se mettre en place provient d’une déconnexion totale du terrain. Oui, il y a eu des concertations, mais l’idée du gouvernement Trudeau manquait visiblement d’un sens pratique et d’une vision des conséquences.
Tout en restant solidaires du principe derrière C-18, nous constatons que le gouvernement n’avait pas pensé aux conséquences que peuvent avoir des médias locaux et sa population qui a souvent besoin de l’information rapidement, dans des situations d’urgence, telles que des inondations ou des feux de forêt.
Nous avons salué le gouvernement fédéral et certaines provinces ainsi que certaines municipalités d’avoir décidé d’arrêter d’investir dans Meta, mais il y a eu un manque de planification pour la suite. Chaque jour, les stations de radios communautaires au pays reçoivent des commentaires de la part de leurs auditeurs et lecteurs qui demandent pourquoi les médias ne sont plus sur Facebook et Instagram. Les stations ont des messages en ondes, mais de là à avoir à expliquer continuellement C-18, démontre toute la faiblesse du plan.
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Campagne de sensibilisation urgente
Nos deux associations, représentant 65 stations de radio au pays, demandent plus que jamais qu’une campagne de sensibilisation auprès de la population soit mise en place.
Nos deux associations ont d’ailleurs eu des conversations avec des députés de partout au Canada, qui questionnent eux-mêmes leurs actions. «On a peut-être agi trop rapidement», nous disent certains. À preuve, à voir certains partis politiques et élus à continuer à investir argent et temps dans les plateformes de Meta, on se retrouve avec des réflexes qui perdurent. Certains élus préfèrent encore continuer à nourrir Facebook que de communiquer avec leurs médias locaux qui, pourtant, représentent l’intérêt du public.
Les stations de radio communautaire sont devenues, dans les dernières années, des producteurs importants de nouvelles locales autant à la radio que par l’écrit grâce au Web. Les plateformes de Meta permettaient de rendre le contenu plus accessible, surtout lorsqu’il y avait des situations d’urgence climatique.
À la veille de la menace de Google d’imiter son collègue de Meta, il est plus que temps que le gouvernement fédéral se penche sur des actions et les moyens à prendre. Nos collectivités francophones hors Québec et les communautés de partout au Québec veulent continuer à s’entendre et à avoir accès à de l’information de proximité.
Soyons tous conséquents, prenons les actions qui s’imposent.
Fondée en 1991, l’Alliance des radios communautaires du Canada (ARC du Canada) regroupe 28 radios communautaires de langue française en situation de minorité au pays. L’Association des radiodiffuseurs communautaires du Québec (ARCQ) a été fondée en 1979 et compte 37 membres. Les stations membres de ses deux associations emploient près de 600 employés avec un chiffre d’affaires de plus de 30 millions de dollars et un auditoire combiné dépassant largement le 1 00 000 d’auditeurs chaque semaine, selon les données et plus récentes études de StatsRadio.
Pour le Centre canadien pour mettre fin à la traite des personnes, l’annonce récente des prochaines cibles en immigration est une «occasion manquée» de mettre en place les mesures nécessaires afin d’accroitre la protection des migrants.
Le 1er novembre, le ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté (IRCC), Marc Miller, a annoncé l’objectif d’admettre 500 000 résidents permanents en 2025. Un chiffre que le gouvernement souhaite stabiliser à partir de 2026.
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«Au cours de la dernière année, nous avons travaillé en étroite collaboration avec nos partenaires et le gouvernement pour identifier les lacunes et les défis du système d’immigration du Canada. Le but de cette invitation était d’avoir des mesures pour protéger des nouveaux arrivants, des étudiants internationaux et des survivants de la traite des personnes, y compris des travailleurs, travailleuses migrants», déplore Aziz Froutan, gestionnaire des communications du Centre.
Aziz Froutan est déçu de voir les lacunes en matière de protection des migrants.
«Il y avait des plans et des recommandations envoyés vers le gouvernement, et malheureusement, il n’a pas considéré toutes les recommandations, mesures et actions soulignées par les organismes qui travaillent avec les victimes et les survivants de la traite des personnes», se désole-t-il.
Parmi les éléments manquants, il note les questions des permis fermés, du regroupement familial et de l’accès à un statut permanent.
Les Nations Unies grondent le Canada
Plus tôt en septembre, Tomoya Obokata, rapporteur spécial des Nations unies sur les formes contemporaines d’esclavage a déclaré que «les programmes de travailleurs étrangers temporaires du Canada sont un terrain propice aux formes contemporaines d’esclavage».
Selon lui, le Canada doit régulariser le statut des travailleurs migrants étrangers et mettre fin au système fermé des permis de travail.
Ce système a d’ailleurs perturbé le rapporteur qui l’accuse de rendre les travailleurs migrants «vulnérables aux formes contemporaines d’esclavage, car ils ne peuvent pas dénoncer les abus subis sans craindre d’être expulsés».
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Potentielle hausse de traite
Alors que les Nations Unies recommandent que le Canada améliore l’accès à la résidence permanente pour tous les migrants, la stabilisation prévue en 2026 aurait l’effet inverse d’après des experts.
Mylène Coderre-Proulx effectue des recherches sur l’immigration.
Cette stabilisation ne vise pas l’immigration temporaire, dont les chiffres ont atteint des records cette année. «Si on a plus de nouveaux arrivants, surtout des étudiants et étudiantes internationaux et des travailleurs et travailleuses migrantes, et qu’on n’a pas pris les mesures nécessaires, on va avoir plus de problèmes [d’exploitation]», s’inquiète Aziz Froutan.
L’accès restreint à la résidence permanente préoccupe aussi Mylène Coderre-Proulx, doctorante en développement international à l’Université d’Ottawa. Elle rappelle que plusieurs demandeurs de statut permanent se trouvent déjà sur le territoire canadien.
Un statut temporaire reste un statut précaire, souligne-t-elle. «La résidence permanente pour motifs humanitaires, c’est souvent la dernière voie qu’il reste pour sécuriser un statut.»
Si on continue de connaitre un taux de croissance élevé d’immigration temporaire et qu’en parallèle, on gèle les seuils d’immigration permanente, bien là on précarise une population migrante sur notre territoire, peu importe le statut.
Pour illustrer la précarité d’un statut temporaire, Mylène Coderre-Proulx prend l’exemple d’un employeur lié à un permis fermé abusif.
«[Le travailleur] rencontre quelqu’un qui lui promet un nouvel emploi, de s’occuper de démarches d’immigration permanente et de faire venir sa famille, amorce-t-elle. Le travailleur quitte son emploi et la personne peut lui extorquer de l’argent en disant qu’elle s’occupe de ses démarches d’immigration alors que ce n’est pas le cas. Elle peut saisir ses documents d’identité, son passeport. On arrive tranquillement dans une situation de traite.»
Des promesses qui datent
C’est sur toutes les personnes temporaires et sans statut «que repose le fonctionnement de tout un pan de l’économie, mais on ne leur reconnait pas les mêmes droits fondamentaux qu’à n’importe quel autre citoyen», a dénoncé le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI) dans un communiqué le 3 novembre, en réaction à l’annonce du gouvernement.
Pour le CTI, restreindre l’accès à la résidence permanente sans améliorer les conditions des résidents temporaires les vulnérabilise et les améliorations en ce sens tardent à voir le jour.
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Le CTI dénonce l’absence dans le plan du gouvernement d’annonce relative à l’abolition du permis fermé, «pourtant réclamée par nombre d’organisations communautaires et syndicales».
Malgré les recommandations venant de plusieurs intervenants comme les Nations Unies et Amnistie internationale d’abolir ce type de permis, le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a statué qu’il ne le fera pas, lors d’une réunion du Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration (CIMM) le 7 novembre.
Marc Miller est ouvert à l’idée d’assouplir le permis fermé.
Il a toutefois reconnu que des changements devaient être apportés et a indiqué que son département cherchait des façons pour permettre des changements d’emplois plus rapides pour ceux possédant un permis lié à un employeur spécifique.
«Rien sur la régularisation des personnes sans papier, malgré la promesse faite par Justin Trudeau il y a vingt-trois mois», argüe aussi l’organisme.
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La «promesse» faite par le premier ministre fait quant à elle référence à la lettre de mandat de 2021 de l’ancien ministre de l’Immigration dans laquelle il lui était demandé de «poursuivre l’exploration de moyens de régulariser le statut des travailleurs sans papiers qui contribuent aux communautés canadiennes».
La lettre de mandat de Marc Miller, ministre de l’Immigration depuis juillet 2023, n’est pas encore connue.
«Il y a des points positifs»
Néanmoins, Aziz Froutan reconnait «des points positifs» au sein de la nouvelle stratégie du gouvernement libéral.
«Il y a un plan pour aider et pour protéger des étudiants·tes internationaux en leur donnant des informations sur le système d’immigration au Canada […] On a vu que le gouvernement essaie d’avoir un groupe consultatif des survivants de l’immigration ou des gens ayant des expériences vécues.»
Quant aux propos de Marc Miller sur l’assouplissement du permis fermé, Aziz Froutan déclare, dans un courriel, que le Centre «est heureux de constater que le ministre est ouvert aux réformes désespérément nécessaires. Toutefois, une action est nécessaire immédiatement».
«Le gouvernement doit sortir le Canada de sa dépendance à l’égard du Programme des travailleur·euses étrangers temporaires. Cela ne signifie pas fermer la porte au travail migrant. Cela signifie plutôt développer une stratégie fondée sur les droits qui donne la priorité à l’équité, à la justice et à l’égalité des chances.»
Alexandra Bolduc, directrice du Salon du livre de Vancouver en Colombie-Britannique, et Liette Paulin, directrice générale du Salon du livre de Dieppe au Nouveau-Brunswick, partagent leur vision et leurs défis. Elles parlent de leur amour de la littérature et de leur rôle de passeuses de culture.
Francopresse : Quel rôle jouent les salons du livre dans les communautés francophones en situation minoritaire?
Liette Paulin : Dans un contexte où il y a peu, voire pas du tout de librairies francophones, les salons constituent la principale porte d’entrée vers la littérature en français. Le public peut avoir accès aux ouvrages, les voir, les toucher, parler également avec les écrivains et écrivaines. Ce sont tout simplement des indicateurs de la vitalité de la culture franco-canadienne.
Liette Paulin explique que le Salon du livre de Dieppe accorde une grande place aux scolaires dans sa programmation, avec plus de 200 activités organisées dans les écoles et les bibliothèques.
Alexandra Bolduc : Ce sont comme des librairies ambulantes. Ils participent à la création d’un bassin littéraire dynamique, d’une culture francophone par-delà des frontières provinciales. C’est fondamental pour préserver la langue et donner une légitimité à notre culture.
Ce sont également des évènements rassembleurs qui permettent de faire connaitre et rayonner les auteurs et leurs œuvres d’un bout à l’autre du pays. Chaque année, on s’attèle à faire venir des auteurs et des maisons d’édition de toute la francophonie canadienne, de l’Ouest, mais aussi de l’Ontario et de l’Acadie. Les écrivains peuvent ainsi se retrouver, partager leurs réflexions et développer un sentiment d’appartenance commune.
Quel public fréquente les allées de vos salons?
Alexandra Bolduc : Notre public est très divers, mais le salon attire de nombreuses familles. Le volet jeunesse est d’ailleurs très important pour nous, c’est au cœur de notre mandat. La graine de la lecture et de la littérature doit se planter dès le plus jeune âge.
À cet égard, il est essentiel que les références des enfants soient des livres de leur milieu, écrits par des auteurs locaux. Ainsi, ils pourront développer un imaginaire local francophone.
Nous avons également de nombreuses écoles qui viennent nous rendre visite et nous essayons d’embaucher des auteurs pour qu’ils animent des activités pour les jeunes.
Liette Paulin : Nous accordons également une grande place au niveau scolaire. Nous offrons plus de 200 activités et animations dans les écoles et les bibliothèques. De nombreux auteurs vont dans les salles de classe pour donner aux jeunes le gout de la lecture.
Très souvent, on revoit ces élèves dans les allées du salon : ils s’assoient par terre et commencent à lire avant même d’avoir acheté l’ouvrage. C’est tout ce qu’on veut voir. Quel que soit ce qu’ils lisent, c’est bénéfique pour leur alphabétisation.
Les défis sont plus grands avec les adolescents de 12 à 17 ans. C’est souvent à cet âge-là qu’on les perd, car leur vie à l’extérieur des murs de l’école est en anglais et les écrans occupent beaucoup de leur temps. On doit se mobiliser avec les éditeurs et les organismes communautaires pour les récupérer.
Êtes-vous confrontées à des difficultés financières?
Liette Paulin : C’est un défi de conserver un nombre d’animations constant et de bien rémunérer nos auteurs, car les financements n’augmentent pas aussi vite que les couts. Depuis la pandémie, les couts de transport ont particulièrement explosé. Résultat, certains distributeurs et maisons d’édition ne viennent plus. Par chance, nous avons plus de 50 bénévoles qui nous aident pour l’organisation.
Alexandra Bolduc est entourée de Vanessa Léger (autrice) et Louis Anctil (éditeur des Éditions du Pacifique Nord-Ouest). Selon la directrice du Salon du livre de Vancouver, les salons répondent à un besoin essentiel de culture des communautés francophones en situation minoritaire.
Alexandra Bolduc : Les salons du livre sont souvent remis en question à cause de leur cout élevé. Oui ça coute cher, mais ça ne devrait pas rentrer en ligne de compte. Ces manifestations répondent à un besoin essentiel de culture au sein de nos communautés.
À Vancouver, nous avons un petit budget, nous sommes constamment à la recherche de fonds fédéraux et provinciaux. Hormis trois salariés, c’est une équipe de bénévoles qui porte l’organisation à bout de bras. En tant que jeune évènement, ce n’est pas évident de s’insérer dans l’industrie du livre, on doit démontrer notre valeur. Heureusement, le Regroupement des Éditeurs franco-canadiens (REFC) nous aide depuis le début.
Les salons du livre de l’Ouest ont besoin du soutien de tout le monde, des éditeurs, mais aussi des distributeurs pour acheminer les ouvrages jusqu’ici. Si l’on veut que la culture perdure, il faut créer des ponts.
Je reste confiante. En cinq ans, nous avons gagné des assises solides et nous sommes bien implantés dans le paysage. Nous sommes devenus un évènement attendu autant par le public que par les auteurs.
Les propos ont été réorganisés pour des raisons de longueur et de cohérence.
Négocier pour assurer la paix
Mona Paré, professeure titulaire à la Faculté de droit, section de droit civil, à l’Université d’Ottawa et experte en droit international, juge que «le droit international a un rôle beaucoup plus important aujourd’hui qu’il l’avait au début du XXe siècle et avant, parce qu’il s’est énormément développé».
Depuis la signature de la Charte des Nations unies en 1945, le droit international interdit l’usage de la force lors de conflits entre différentes entités en relations internationales.
Selon Mona Paré, professeure à l’Université d’Ottawa, la paix «ne veut pas seulement dire l’absence de conflits».
«L’emploi de la force inclut l’agression armée, c’est à ça qu’on penserait en premier. Mais il y a aussi d’autres manières comme les menaces d’emploi de la force, des représailles […], l’occupation militaire d’un territoire qui n’est pas le nôtre, la violation de frontières ou de lignes de démarcation internationale», informe-t-elle.
La Charte des Nations unies préconise plutôt la conclusion pacifique d’accords entre des États membres opposés par un conflit.
D’ailleurs, tous les États membres des Nations unies doivent s’engager à respecter ce traité et à privilégier différents modes de résolution de conflits, comme la médiation, l’arbitrage, les tribunaux arbitraux et la négociation, indique Mona Paré.
Les États optent souvent pour la négociation, ce qui permet d’atteindre un consensus, rapporte la professeure. «Ça ne veut pas dire évidemment que les négociations réussissent toujours, […] mais lorsque les négociations échouent, ça ne veut pas dire qu’on doit arrêter là non plus.»
Le 19 décembre 2016, l’Assemblée générale Nations unies a adopté une déclaration sur le droit à la paix.
Depuis, «on demande que les États éliminent les menaces de guerre, qu’ils abandonnent le recours à la force dans les relations internationales», détaille Mona Paré, professeure titulaire à la Faculté de droit à l’Université d’Ottawa.
La fin justifie-t-elle les moyens?
S’il est évident de soutenir la paix, «les moyens de l’atteindre divisent tout le monde», souligne Melchior Mbonimpa, professeur émérite en philosophie à l’Université de Sudbury, en Ontario.
«Les philosophes n’ont pas une définition de la paix qui leur serait commune. Ils ont beaucoup abordé la question par divers angles d’attaque», ajoute-t-il.
Le professeur Melchior Mbonimpa dresse un tableau chronologique de la définition de la paix selon divers grands penseurs :
Le philosophe italien Machiavel (1469-1527) voit la paix comme l’absence de guerre. Pour l’Anglais Hobbes (1588-1679), la paix n’est pas naturelle pour l’homme et donc elle doit être imposée. Le courant des Lumières définira ensuite la paix comme une absence de conflit entre les religions, mais le Prussien Kant (1724-1804) avancera que la paix est un phénomène plus considérable qu’une absence de conflit.
«Il n’y a pas de consensus sur la notion de la paix» pour les philosophes, explique Melchior Mbonimpa, professeur à l’Université de Sudbury.
Pour Melchior Mbonimpa, il n’est pas possible de parler de paix sans aborder la question de la guerre. «Quand on est surs que faire la guerre ça va causer moins de dégâts que de ne pas la faire, il faut la faire. Il y a des moments où la paix à tout prix n’est pas bonne.»
Le philosophe prend l’exemple de l’invasion militaire du Cambodge par le Vietnam en 1978 pour mettre fin au régime communiste et violent des Khmers rouges dirigés par Pol Pot, qui a conduit au génocide de deux-millions de personnes entre 1975 et 1979.
«Le Vietnam a décidé d’intervenir parce que le voisin était en train de décimer sa population [des Vietnamiens résidaient au Cambodge]. C’était une manière de sauver le reste, ce qu’il laissait de la population», explique le professeur.
Cela dit, «il ne faut pas non plus prendre des canons pour tuer des mouches», nuance-t-il.
Comprendre les violences pour construire la paix
La psychologie de la paix ne se limite pas à comprendre la violence des guerres. Elle s’intéresse aux divers aspects de celles-ci, comme les rapports sociaux, la structure, la culture, l’individu.
Selon Adelheid Nicol, professeure titulaire au Collège militaire royal du Canada à Kingston, en Ontario, plusieurs facteurs ne permettent pas d’instaurer la paix, notamment la violence épisodique et intermittente qui comprend les agressions entre les personnes, qu’elles soient verbales, psychologiques ou physiques, «ainsi que des formes organisées de violence entre États, telles que la guerre, le génocide, le terrorisme».
«La paix peut être définie, étudiée au niveau de l’individu, du groupe, de la culture et de la structure», indique Adelheid Nicol, du Collège militaire royal du Canada.
Moins connue, la violence structurelle adopte une forme indirecte et continue dans le temps. Elle existe dans le système politique des États, ce qui entraine des conflits, explique Adelheid Nicol.
Selon elle, «les pratiques discriminatoires, l’inégalité des revenus, les préjugés, le sexisme intégré dans le mode de fonctionnement des organisations, des gouvernements» sont autant d’exemples de violence structurelle.
Pour éviter la violence et les guerres dans la société, il faut assurer une bonne gestion des conflits en favorisant les discussions pacifiques, estime Adelheid Nicol.
D’ailleurs, il est possible de distinguer des types de paix : la paix négative, qui tente de trouver des moyens efficaces pour éviter les guerres, et la paix positive, qui se focalise sur la réduction de tout risque de conflit, en améliorant les structures de la société, informe Adelphie Nicol.
Le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a débattu jeudi de l’article 8 du projet de loi sur l’apprentissage et les services de garde (C-35), très attendu chez les francophones.
L’amendement proposé par le sénateur René Cormier visait à assurer le financement des services de garde en contexte minoritaire à long terme.
Ce dernier précise que : «Le gouvernement du Canada s’engage à maintenir le financement à long terme des programmes et services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, notamment ceux destinés aux peuples autochtones.»
Le sénateur René Cormier a proposé un amendement pour ajouter à la fin de cette phrase la mention «et aux communautés de langue officielle en situation minoritaire», ou CLOSM, qui désignent les francophones hors Québec et les anglophones au Québec.
«Certes, les ententes bilatérales conclues avec les provinces et territoires prévoient actuellement du financement envers les CLOSM, mais nous ne pouvons en aucun cas prendre cela pour acquis», a défendu le sénateur indépendant du Nouveau-Brunswick.
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Tout engagement qui n’est pas codifié dans une loi demeure précaire. Les gouvernements changent, les lois restent.
Un «outil» devant les tribunaux
«Les CLOSM ne demandent pas un privilège, elles demandent d’être bien outillées sur le plan législatif afin que leur droit puisse être respecté partout au Canada», a tenu à souligner René Cormier en comité.
Pour la sénatrice Lucie Moncion, l’amendement devait assurer un financement «non pas par le fédéral, mais par tous les paliers de gouvernement, sur une longue période».
«C’est extrêmement important parce que le gouvernement fédéral met des choses en place et ensuite, quand on arrive au niveau provincial ou territorial, c’est là où le mécanisme change souvent et c’est là où […] les droits des minorités linguistiques sont brimés», a-t-elle déclaré.
L’histoire des francophones au Canada, c’est la réalité de devoir se battre constamment pour nos droits. Le sénateur Cormier a une pile d’exemples. […] Partout nous sommes devant les tribunaux parce que le Parlement n’a pas assuré la protection du droit des minorités dans la loi.
Or, tous membres du comité ne l’ont pas entendu de cette oreille.
Un amendement non nécessaire?
Pour la sénatrice Rosemary Moodie, cet amendement n’est pas nécessaire, car le projet de loi contient déjà des dispositions qui protègent les CLOSM dans l’article 7 portant sur les principes directeurs. Celui-ci mentionne les enfants «issus des minorités linguistiques francophones et anglophones» et la Loi sur les langues officielles.
La sénatrice ontarienne va plus loin en disant que l’ajout demandé par le sénateur Cormier pourrait porter préjudice. «En adoptant cet amendement, il y aurait des inquiétudes et des préoccupations de la part de certaines provinces et certainement de la part des peuples autochtones et des autres communautés. C’est un problème qu’on créerait là où il n’y en a pas actuellement.»
Cheri Reddin, directrice générale du Secrétariat de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants autochtones, a quant à elle rappelé l’absence de référence aux langues autochtones dans le projet de loi.
René Cormier s’est dit extrêmement mal à l’aise de voir des groupes et minorités mis en opposition.
Cette conversation est extrêmement importante pour l’avenir, pour nos relations avec les peuples autochtones et les minorités linguistiques de ce pays. Le gouvernement ne doit pas nous diviser, d’aucune façon que ce soit. On doit être solidaire.
«On ne demande pas davantage de financement, on demande que le financement soit maintenu. C’est là au cas où il y ait des affaires devant les tribunaux. C’est un outil, c’est tout. C’est la seule chose qu’on demande», a martelé le sénateur.
Un oubli «dangereux»
Un outil nécessaire, estime François Larocque, avocat et professeur titulaire au programme de common law français de la Faculté de droit de l’Université d’Ottawa.
Pour l’avocat François Larocque, l’absence de mention des minorités linguistiques à l’article 8 du projet de loi créée une ambigüité dommageable.
En octobre dernier, il avait d’ailleurs recommandé au comité de reconnaitre les CLOSM dans l’article 8.
La mention des CLOSM dans les principes directeurs de l’article 7 ne garantit pas une protection totale, notamment devant les tribunaux, selon lui.
«Lorsqu’il s’agit des droits linguistiques, les cours judiciaires vont regarder ce que le texte dit. Si le texte est silencieux à l’égard des CLOSM, les cours vont inférer qu’il s’agit là de l’intention du Parlement», a-t-il assuré en entrevue avec Francopresse.
Pour lui, il était primordial de faire figurer les CLOSM dans l’article 8, déterminant dans ce texte de loi.
«Ça vient créer une brèche, un argument très fort pour un gouvernement qui dit : “non, on n’a pas d’obligation de créer des financements parce que dans l’article 8, l’article déterminant de cette obligation-là, on est silencieux à l’égard des cas.”»
On a décidé de maintenir l’incohérence et ça, c’est problématique et c’est dangereux.
Où sont les langues officielles?
Il rappelle en outre que le projet de loi C-35 devait aussi s’inscrire dans la continuité de la nouvelle Loi sur les langues officielles. Or, il remet selon lui en question le sérieux de l’engagement pris par le gouvernement.
«Dans la loi sur les langues officielles, le gouvernement s’est pourtant engagé à prendre des mesures positives pour soutenir l’éducation des CLOMS de la petite enfance au postsecondaire.»
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Jean-Luc Racine regrette le manque d’engagement de la part du gouvernement fédéral.
«Grande déception»
L’amendement, soutenu par la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) et la Commission nationale des parents francophones (CNPF), a finalement été rejeté par le Comité, à 7 votes contre 4, et une abstention.
En entrevue avec Francopresse, Jean-Luc Racine n’a pas caché pas sa «grande» déception. «C’est la seule demande qu’on avait au Sénat.»
Mais le directeur général de la CNPF relativise. «On a quand même gagné, parce que quand le projet de loi a été présenté, il y avait zéro mention sur les langues officielles.»
Pour lui, l’amendement engageait les gouvernements dans le cas de nouvelles ententes. «Là, il n’y a rien de sûr.»
Plus sur la francophonie
L’inclusion des droits des minorités linguistiques dans le projet de loi C-35 relatif à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada a animé les discussions en comité sénatorial jeudi.
La proposition d’amendement au projet de loi C-35 du sénateur René Cormier a été rejetée au Comité sénatorial des affaires, des sciences et de la technologie.
Le sénateur René Cormier a demandé l’ajout d’une référence aux communautés de langue officielle en situation minoritaire à l’article 8, portant sur le maintien du financement à long terme des programmes d’apprentissage.
L’amendement a été rejeté à 7 contre 4, et une abstention.
Les membres du comité s’opposant à l’amendement ont notamment souligné que d’autres clauses du projet de loi protégeaient les droits des minorités linguistiques, jugeant ainsi que la modification n’était pas nécessaire.
Pour le sénateur Cormier, sa proposition visait strictement à maintenir le financement pour les minorités linguistiques. «Si ça ne se retrouve pas ici [dans le texte de loi] les communautés n’auront pas d’outils pour se battre pour leurs droits», a-t-il affirmé pendant le comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de la technologie.
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Semaine nationale de l’immigration francophone
Marc Miller réaffirme qu’une cible en immigration francophone atteignable en 2o24 permettrait une révision à la hausse pour les années subséquentes.
Le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a reconnu l’importance de l’immigration francophone au Canada lors du lancement de la 11e édition de la Semaine nationale de l’immigration francophone organisée par la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA).
La semaine dernière, les organismes francophones ont manifesté leur déception à la suite de l’annonce des nouvelles cibles en immigration francophone. L’immigration francophone à l’extérieur du Québec passera de 6 % à 8 % entre 2024 et 2026. La cible de 4,4 %, établie en 2003, a été atteinte pour la première fois en 2022.
«Ces cibles, à la fois ambitieuses, réalistes et atteignables, témoignent de l’engagement du Canada à renforcer la vitalité des communautés francophones en situation minoritaire, à soutenir les besoins en main-d’œuvre partout au pays et à contribuer au rétablissement du poids démographique des francophones», a indiqué le ministre dans une déclaration publiée lundi.
Conscient de la déception des francophones, Marc Miller a précisé préférer miser sur une cible atteignable en 2024 pour possiblement l’augmenter les années suivantes.
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Par ailleurs, le ministre a octroyé mercredi un financement de près de 85 000 dollars à l’Université de l’Ontario français (UOF) pour appuyer la mise en place de l’Observatoire en immigration francophone au Canada. L’observatoire va notamment de produire de nouvelles données sur l’immigration francophone.
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Division persistante sur la taxe carbone et demande de fonds d’urgence pour les médias
Le Parlement a rejeté lundi une motion conservatrice réclamant l’élargissement de l’exemption de la taxe carbone sur le chauffage au mazout à tous les types de chauffage résidentiel.
La proposition néodémocrate de suspendre la taxe sur le mazout a été défaite en Chambre.
Seul le Nouveau Parti démocratique (NPD) a appuyé la motion. «C’est un vote contre la proposition des libéraux qui divise, a indiqué le chef du NPD, Jagmeet Singh en conférence de presse lundi. On n’appuie pas l’approche des conservateurs qui n’ont pas de plan pour faire face à la crise climatique.»
Les conservateurs et les néodémocrates avancent que la suspension de la taxe sur le mazout offre un avantage aux provinces de l’Atlantique (où le mazout est une source de chauffage importante), créant ainsi une division.
La contreproposition du NPD d’éliminer la taxe de vente sur les produits et services sur toutes les formes de chauffage domestique a été défaite mercredi à la Chambre des communes.
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«On demande que le gouvernement prenne des mesures immédiates et des mesures d’urgence pour nos médias d’information. La proposition du Bloc est un montant de 50 millions [comme] fonds d’urgence», a déclaré mardi Martin Champoux, porte-parole bloquiste en matière de Patrimoine.
Le bloquiste Martin Champoux réclame 50 millions de dollars en fonds d’urgence pour les médias.
Alors que la crise des médias persiste au pays, le gouvernement est toujours en négociation avec Google dans l’application de la Loi sur les nouvelles en ligne (C-18) qui vise à forcer ces géants numériques à indemniser les médias pour partager leurs contenus.
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Selon Martin Champoux, le montant demandé équivaut à trois mois des revenus dont auraient bénéficié les médias si C-18 était adopté. La loi doit entrer en vigueur dans son intégralité le 19 décembre prochain.
Le Bloc Québécois demande aussi au gouvernement de convoquer sans délai des états généraux sur l’avenir des médias.
La ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, n’a pas fermé la porte à l’idée. «On regarde ce qu’on peut faire pour le moment», a-t-elle indiqué en mêlée de presse mardi.
Le gouvernement égyptien autorise les Canadiens à rester dans le pays pour une durée maximale de 72 heures.
Évacuation des Canadiens de Gaza et des mesures de sécurité au Canada
En date de jeudi, 107 Canadiens avaient quitté Gaza mardi pour se rendre vers le poste frontalier de Rafah, en Égypte, selon Affaires mondiales Canada (AMC).
«Ils ont été rencontrés du côté égyptien de la frontière par des diplomates canadiens. Ils vont être éventuellement acheminés au Canada en toute sécurité», a expliqué la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, dans une publication vidéo sur X, mardi.
Le premier groupe de Canadiens a quitté Gaza. Notre équipe de fonctionnaires les a accueillis du côté égyptien de la frontière et leur apporte un soutien. pic.twitter.com/1ekZJDP5OI
— Mélanie Joly (@melaniejoly) November 7, 2023
Israël a aussi consenti à faire des pauses quotidiennes de bombardement de quatre heures dans certaines zones de la bande de Gaza, selon une annonce des États-Unis survenue jeudi.
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Le gouvernement fédéral ajoute 5 millions de dollars pour la sécurité des communautés vulnérables aux crimes haineux.
«De récents évènements internationaux ont conduit des communautés du Canada à craindre, à juste titre, pour leur sécurité», a indiqué le ministre de la Sécurité publique, Dominic LeBlanc, lundi.
Le financement servira à protéger et renforcer la sécurité de centres communautaires, de lieux de culte et d’autres institutions.
Mercredi en mêlée de presse, Justin Trudeau a lancé un appel au calme face à la hausse de tensions liées au conflit Hamas-Israël qui ont lieu en sol canadien. «On voit une hausse d’antisémitisme qui est terrifiante», a-t-il constaté, en citant notamment des commerces juifs menacés de violence.
«Ce n’est pas qui nous sommes comme Canadiens», a-t-il poursuivi. «La montée d’islamophobie que l’on voit dans le pays et dans le monde est aussi inacceptable.»
Stéphane Cormier, président du REFC, explique que les éditeurs tentent de s’adapter à un milieu en pleine transformation, avec des contenus littéraires qui se morcèlent.
Les quinze maisons d’édition francophones hors Québec, dont la première est née en Acadie en 1972, ont un «capital symbolique immense», estime Lucie Hotte, professeure titulaire au Département de français de l’Université d’Ottawa.
«Nous sommes là pour que la parole des francophones en situation minoritaire existe, qu’elle soit transmise, entendue et écoutée», souligne Stéphane Cormier, président du Regroupement des Éditeurs franco-canadiens (REFC) et codirecteur général des Éditions Prise de parole, en Ontario.
D’une côte à l’autre, le processus est toujours le même, quelle que soit la maison d’édition. Des comités de lecture passent au tamis tous les manuscrits reçus, à la recherche de la perle rare, des écrits les plus prometteurs.
«À l’image de la francophonie canadienne, le profil des écrivains en herbe est très divers», observe Stéphane Cormier.
«On reçoit des centaines de propositions par an d’auteurs acadiens de notre région, mais aussi du reste de la francophonie canadienne, et même de toute la francophonie internationale», poursuit Marie Cadieux, directrice générale des Éditions Bouton d’Or Acadie, au Nouveau-Brunswick.
Manque de relève
Bien souvent, les manuscrits retenus sont loin d’être aboutis et nécessitent de longs mois, voire des années d’édition avant d’être publiables. «Pour amener un texte à son plein potentiel, c’est une course de fond qui prend du temps et de l’expertise», confirme Stéphane Cormier.
Marie Cadieux, directrice générale des Éditions Bouton d’Or Acadie, insiste sur le grand travail d’accompagnement dont ont besoin les jeunes auteurs francophones.
«On a un grand travail d’accompagnement à faire, car nous n’avons pas de pépinière de talents», renchérit Marie Cadieux.
Les éditeurs interrogés mettent en cause le manque de programmes en études et en création littéraire dans les universités francophones en situation minoritaire. «Nos jeunes auteurs évoluent dans un milieu universitaire plus pauvre», tranche Stéphane Cormier.
Un avis que partage Lucie Hotte. Elle cite le cas de l’Ontario, où seule l’Université d’Ottawa offre encore des cours de littérature franco-ontarienne.
La chercheuse constate également un manque de relève chez les romanciers.
«Les maisons d’édition publient moins d’ouvrages de création littéraire que par le passé.»
Selon Lucie Hotte, en 1998, plus de 80 % des écrits publiés par les Éditions Prise de parole en Ontario étaient des romans. En 2022 ce chiffre est tombé à 29 %. De même, les romans ne constituent plus qu’un quart des publications des L’Interligne, maison d’édition franco-ontarienne.
L’union fait la force
«On a surtout du théâtre et de la poésie», remarque Laurier Gareau, président des Éditions de la nouvelle plume en Saskatchewan.
Le rapport à la lecture, «plus complexe», selon Stéphane Cormier, explique le succès de ces styles littéraires chez les francophones en situation minoritaire. «Ce sont des arts de l’oralité que l’on peut voir et écouter sur scène. Ça permet à des francophones de famille, mais de culture bilingue, d’accéder à la littérature en français», considère-t-il.
Une fois publiés, les livres doivent tisser leur histoire hors des murs de leur maison d’édition.
Lucie Hotte, chercheuse à l’Université d’Ottawa, constate un manque de relève chez les romanciers francophones en situation minoritaire.
Face au faible nombre de librairies francophones et à des collections réduites dans les bibliothèques, les éditeurs doivent faire preuve de créativité pour rejoindre les lecteurs. «Il y a de la compétition entre les maisons, c’est un défi de se faire une place sur le marché», relève Lucie Hotte.
En 1989, les éditeurs francophones en situation minoritaire ont néanmoins réussi à s’entendre au sein du Regroupement des éditeurs franco-canadiens (REFC). À l’époque, l’objectif était clair : accéder aux vitrines québécoises.
Avec son large bassin de locuteurs de langue française, le Québec constitue un marché de choix. Les Éditions Prise de parole vendent ainsi la moitié de leurs ouvrages dans cette province et ne réalisent qu’un peu plus d’un tiers de leur chiffre d’affaires en Ontario.
Rayonnement à l’international
Les maisons d’édition vendent également leurs ouvrages en ligne partout au Canada, sur des sites comme leslibraires.ca. «Nous sommes particulièrement solidaires des libraires indépendants, car ce sont les plus sensibles à nos collections», précise Stéphane Cormier.
Les éditeurs diffusent même certaines de leurs publications aux États-Unis, grâce à un service mis sur pied par le REFC : l’impression à la demande. Un libraire, n’importe où aux États-Unis, peut déclencher l’impression d’un livre commandé par l’un de ses clients et le réceptionner dans les 48 heures.
«Ça nous permet de faire des économies, en limitant les structures de distribution qui coutent très cher en frais de transport et d’entreposage», se félicite Stéphane Cormier, qui parle de plusieurs dizaines de milliers de ventes de l’autre côté de la frontière. Ce système sera bientôt disponible pour l’Europe francophone.
Les maisons d’édition ne se limitent pas au papier, elles misent aussi sur les formats numériques et audios. Leurs livres sont ainsi nombreux à se retrouver sur le catalogue en ligne de la Bibliothèque des Amériques.
Habitudes de lecture bouleversées
Le REFC aide actuellement ses membres à développer les livres numériques, enrichis de fonctions d’accessibilité, notamment pour les malentendants ou les personnes souffrant de dyslexie.
«On s’adapte à un milieu en pleine transformation avec des habitudes de lecture et des contenus littéraires qui se morcèlent», affirme Stéphane Cormier.
En Acadie, Marie Cadieux estime, de son côté, que l’audio ne remplacera jamais le papier.
Il y a un certain engouement, mais c’est loin d’être rentable, les couts de production sont trop élevés, et il faut voir comment faire la jonction avec le gout pour la lecture.
Susciter ce plaisir de lire est un autre cheval de bataille des éditeurs francophones en situation minoritaire. Le REFC mène un nombre incalculable d’activités de sensibilisation dans les salles de classe et les bibliothèques, collabore avec nombre d’enseignants et d’organismes de promotion de la lecture.
«Dans un contexte où l’offre culturelle en anglais est pléthorique, on doit surinvestir beaucoup de temps et d’argent pour créer des habitudes de lecture dès le plus jeune âge et les maintenir», insiste Stéphane Cormier.
Quelles que soient les difficultés, les maisons d’édition n’ont jamais cessé de se battre pour que la littérature franco-canadienne continue à exister.
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C’est le premier ministre britannocolombien de l’époque, Gordon Campbell, qui a instauré cette mesure environnementale en 2008. Pourtant rien n’indiquait jusqu’alors qu’il était un ardent défenseur de l’environnement.
Il était à la tête du Parti libéral de la Colombie-Britannique, un parti connu pour ses positions de centre-droite, pour ne pas dire de droite. Il avait réduit les impôts, éliminé le déficit de la province, notamment en sabrant dans les dépenses, et il appuyait sans réserve le libre-échange.
Avant de se lancer en politique provinciale, il avait été maire de Vancouver. Là aussi, il était davantage connu pour ses réalisations économiques qu’environnementales.
Bref, l’environnement ne faisait pas partie de ses priorités.
Un leadeurship assumé
Pourtant, la lutte aux changements climatiques deviendra une cause personnelle pour le premier ministre.
Gordon Campbell raconte qu’un voyage en Chine en 2006, durant lequel il a été témoin des ravages causés par la pollution, lui a fait prendre conscience de l’importance d’agir pour lutter contre les changements climatiques.
En moins d’un an, une nouvelle taxe – la taxe carbone – allait être annoncée, adoptée et mise en œuvre dans la province.
À l’automne 2007, le gouvernement Campbell fait part de son intention d’adopter cette taxe. Les détails seront dévoilés lors du budget de février 2008. La nouvelle taxe entrera en vigueur rapidement, en juillet 2008.
Durant toute cette période, le premier ministre a travaillé à expliquer sa réforme à la population et aux milieux d’affaires ainsi qu’à mobiliser l’ensemble de son conseil des ministres pour faire avancer cette initiative.
Bien que l’opinion publique et les milieux d’affaires aient été favorables à la lutte au changement climatique, la taxe sur le carbone a néanmoins suscité des inquiétudes.
Le gouvernement a eu cependant le bon instinct de mettre en place une taxe «fiscalement neutre». Cette idée viendra des consultations menées avec divers groupes.
Les revenus supplémentaires obtenus par la taxe carbone sont donc remis aux contribuables, principalement par des baisses d’impôt. Ce faisant, le gouvernement ne pourrait pas être accusé de percevoir plus d’argent auprès des contribuables.
Mais il y a quand même eu de l’opposition. Les habitants des régions éloignées étaient particulièrement préoccupés par les couts supplémentaires que pourrait engendrer cette nouvelle taxe.
Ces inquiétudes étaient non fondées, mais elles ont été appuyées par le Nouveau Parti démocratique de la Colombie-Britannique qui, dans la foulée, pensait pouvoir réaliser des gains électoraux.
Il a échoué. Gordon Campbell et le Parti libéral ont été réélus en 2009, et la taxe sur le carbone est toujours en vigueur aujourd’hui dans cette province.
Les leçons à tirer
L’histoire de la taxe carbone de la Colombie-Britannique est intéressante, car elle offre plusieurs éléments de réflexion pour comprendre les effets de la récente décision du gouvernement Trudeau de suspendre temporairement l’application de sa taxe carbone sur le mazout, un combustible très polluant.
Le premier de ces éléments est le fait qu’une taxe n’est jamais populaire. C’est d’ailleurs pour cela qu’elle fonctionne. Si on veut modifier le comportement des consommateurs, il faut s’attaquer aux prix.
Une taxe carbone augmente donc le cout d’utilisation de biens qui provoquent des dommages environnementaux. On espère ainsi que les consommateurs seront sensibles à cette augmentation de prix et modifieront leurs comportements en conséquence.
À cause de son impopularité, une taxe sur le carbone doit être mise en œuvre avec un plan d’acceptabilité sociale. Les libéraux fédéraux n’ont jamais réussi à convaincre la population qu’ils en avaient un.
Est-ce qu’ils auraient pu faire mieux? L’exemple de la Colombie-Britannique semble dire que oui.
Deuxièmement, il est important de présenter un plan de lutte au changement climatique qui est susceptible de produire les effets désirés.
Plusieurs études faites depuis l’instauration de la taxe carbone en Colombie-Britannique ont rapidement montré que celle-ci a mené à une réduction des émissions de gaz à effet de serre tout en préservant la croissance économique.
La taxe carbone fédérale existe maintenant depuis 2019, mais on peine à en voir les retombées. Les émissions de gaz à effet de serre continuent à augmenter au pays.
Les causes de cette augmentation sont nombreuses, mais comme le notait récemment le commissaire à l’environnement et au développement durable, plusieurs questions subsistent quant à l’atteinte des cibles de réduction des émissions. Bien des Canadiens, ne voyant pas de résultats tangibles, pourraient ainsi se demander si la taxe carbone est vraiment une bonne idée.
Troisièmement, Gordon Campbell avait fait preuve d’un très grand leadeurship. La lutte au changement climatique était devenue sa priorité. Ses actions l’ont démontré.
Jusqu’à tout récemment, le Parti libéral du Canada faisait de la protection de l’environnement l’un des piliers de son programme. Mais en décidant de ne pas défendre bec et ongles sa taxe sur le carbone, c’est-à-dire en permettant des exceptions, Justin Trudeau a semé le doute.
Ce gouvernement est-il encore prêt à se porter à la défense de l’environnement? Ce ne semble plus être le cas.
Une fédération ingouvernable?
Il existe cependant une très grande différence entre la Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral.
Gordon Campbell était à la tête d’une province qui compte environ cinq-millions d’habitants, alors que Justin Trudeau dirige un État de 40 millions d’habitants regroupant dix provinces, trois territoires et des milliers de municipalités.
Gouverner une fédération peut devenir rapidement très complexe, surtout lorsqu’il s’agit d’établir des consensus entre les différentes régions du pays.
En faisant une exception pour le mazout, Justin Trudeau vient peut-être tout simplement nous dire qu’un programme national de lutte aux changements climatiques est impossible à mettre en œuvre au Canada.
Cependant, si nous croyons à la faisabilité d’une action concertée de toutes les provinces et tous les territoires, ce serait à nous de le dire, à Justin Trudeau et à tous les autres chefs de parti politique.
Geneviève Tellier est professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les politiques budgétaires des gouvernements canadiens. Elle commente régulièrement l’actualité politique et les enjeux liés à la francophonie dans les médias de tout le pays.
Le lancement est survenu moins d’une semaine après l’annonce du ministre de l’Immigration, Marc Miller, d’une nouvelle cible progressive en immigration francophone à l’extérieur du Québec, de 6 à 8 % de 2024 à 2026. Une nouvelle qui a déplu bien des organismes francophones.
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Un retour sur les cibles en immigration francophone
Présent lors de l’évènement, le ministre Marc Miller s’est exprimé devant une quarantaine de participants. Il s’est dit être conscient de la déception ressentie face aux nouvelles cibles.
Plusieurs Franco-Canadiens ont témoigné de leurs expériences réussies en tant que nouveaux arrivants au Canada. De gauche à droite : Diana Ombé, Hortense Mvuemba, Jean Mohsen Fahmy et Moustapha Amraoui.
«Je préférais quelque chose d’ambitieux, mais de réaliste, a-t-il affirmé. Si j’ai la conviction, dans un an, qu’on peut atteindre le 6 %, avec tous les mécanismes en place, je serais même prêt et même ouvert à réexaminer ces cibles.»
Marc Miller est d’avis que l’immigration joue un rôle important pour soutenir la vitalité des communautés francophones en situation minoritaire.
Dans cette optique, il a soutenu que le «rétablissement du poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire demeure une priorité absolue pour [lui] et pour [son] gouvernement».
Avec la modernisation de la Loi sur les langues officielles, qui vise l’égalité réelle des langues officielles du Canada, il a ajouté que son ministère «adoptera une politique en matière d’immigration francophone contenant des objectifs, […] des cibles et des indicateurs en vue de contribuer à la vitalité, à la prospérité accrue des communautés francophones pour ma génération et pour les générations à venir».
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«Il y a encore beaucoup de travail à faire»
Le directeur général de la FCFA, Alain Dupuis, souhaite que cette Semaine célèbre les bons coups des communautés francophones lorsqu’il a trait à l’immigration.
«Je pense qu’on a fait beaucoup de travail dans les dernières années pour justement augmenter le nombre de services aux personnes immigrantes francophones», a-t-il déclaré en entrevue avec Francopresse.
Le ministre de l’Immigration, Marc Miller, a réitéré son souhait de travailler avec la FCFA pour assurer une immigration francophone hors Québec prospère.
Plusieurs Franco-Canadiens venant de divers pays ont d’ailleurs pris la parole lundi, dans le cadre d’un panel pour témoigner de leur expérience et leur réussite en tant qu’immigrants d’expression française.
«[On veut] célébrer l’impact, la contribution des personnes immigrantes, que ce soit de nouveaux arrivants […] ou des gens qui contribuent à notre communauté depuis 10 ans, 20 ans», a souligné Kimberly Jean Pharuns, directrice en immigration francophone auprès de la FCFA.
Cependant, Alain Dupuis est conscient des défis qu’il reste à relever pour contrer le déclin démographique des francophones hors Québec et assurer une «immigration grandissante, ou la francophonie sera aussi en train de croitre».
«Il y a encore beaucoup de travail à faire pour créer les systèmes nécessaires pour qu’on puisse recruter et accueillir un plus grand nombre de personnes à l’avenir», a-t-il dit.
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L’employabilité pour assurer la rétention
Selon le directeur, avec la pénurie de main-d’œuvre qui sévit partout au pays, l’emploi, «ce n’est pas ce qui manque».
Il admet d’ailleurs qu’il manque 12 000 enseignants de langue française hors Québec dans les écoles francophones ou d’immersion, et 9 000 places en garderies francophones.
«Donc c’est sûr qu’il y a de l’emploi. Il y a de l’emploi dans des domaines importants et cruciaux pour la vitalité du français, a-t-il assuré. […] Mais les systèmes en ce moment ne reconnaissent pas suffisamment les diplômes et les acquis des jeunes. Je pense que c’est le cœur de la rétention, ça passe par l’emploi.»
Pour Alain Dupuis, il est donc important de miser sur la reconnaissance des acquis et des expériences pour s’assurer que les nouveaux arrivants trouvent un emploi «dans nos communautés».
«Zik, c’est vraiment une espèce d’odyssée de toutes les couleurs dans le monde de la musique», résume Mehdi Cayenne, l’animateur espiègle de cette série signée Moi & Dave.
Chaque épisode explore un thème entourant le quatrième art, à base de saynètes, de références historiques ou scientifiques et d’effets audiovisuels en tous genres.
Tel un Ulysse du petit écran, l’artiste franco-ontarien a pu «avoir des amis formidables, se marier avec un dinosaure, manger du popcorn à n’en plus finir, parler avec un monstre fait en compost». Sans oublier d’accorder une entrevue à l’influenceur «WAM», ou Wolfgang Amadeus Mozart pour les intimes.
«C’est toujours une aventure extraordinaire», confie-t-il. Une œuvre «kaléidoscopique», pour reprendre ses mots.
Le coréalisateur de la série, Simon Madore, évoque de son côté un «bazar musical», où rire et pédagogie font bon ménage. «C’est important de savoir mêler l’éducation et le divertissement.»
Intéresser les jeunes à l’heure de TikTok
«On cherchait à faire une émission qui était à la fois éducative, mais on voulait que les jeunes ne s’en rendent pas compte. C’est pour ça qu’on essaie d’instaurer un peu plus de folie, un peu d’humour dans le contenu.»
Et de surcroit, la série cherche à susciter l’intérêt des jeunes en français.
«Mes deux adolescents habitent Toronto. Ils parlent en français, mais la langue anglaise a un peu ce côté-là un peu plus “cool” ou du moins le français n’est pas nécessairement la langue la plus attrayante pour ces jeunes-là parce que la majorité du contenu qu’ils vont regarder est en anglais», remarque, lucide, Simon Madore.
«Mon autre défi, c’était justement de pouvoir apporter à du contenu francophone quelque chose d’intéressant, qui allait les accrocher.»
Il n’y a pas beaucoup de contenu francophone pour les adolescents. Même en anglais, au niveau éducatif, il n’y a pas beaucoup d’options et on se retourne toujours vers les TikTok de ce monde et je ne suis pas convaincu que c’est la façon la plus enrichissante pour nos adolescents. Donc j’espère que TFO et d’autres chaines vont essayer de renforcer un peu ce créneau-là.
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«C’est important pour notre culture minoritaire de continuer à avoir des contenus en français. Ça, c’est primordial, et l’éducation est aussi un domaine tellement important quand vient le temps de s’épanouir comme culture», poursuit Simon Madore.
«On a eu la chance d’être nommé aux Gémeaux récemment. Ce n’est effectivement pas un milieu nécessairement facile dans lequel entrer pour une production hors Québec, ajoute Mehdi Cayenne. Le fait que Zik soit invité dans la même sphère, ça en dit beaucoup sur le travail qui a été mis là-dedans.»
Francophonie minoritaire
Si l’émission met à l’honneur la francophonie, elle accueille aussi des intervenants anglophones.
«C’est aussi bien de garder en tête qu’on est en situation minoritaire et puis l’anglais, il y en a partout et les accents, il y en a partout, donc on ne cherchait pas à uniformiser l’émission comme étant complètement francophone», nuance Simon Madore. Les langues autochtones sont également au générique.
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La deuxième saison de Zik comprend 10 épisodes de 11 minutes, sur le site TFO.org et sur la chaine TFO tous les vendredis soir à 19 h 30.