le Jeudi 13 novembre 2025

Plus sur la francophonie

Le Réseau pour le développement de l’alphabétisme et des compétences (RESDAC) organise son premier Sommet national sur l’apprentissage pour la francophonie canadienne, du 4 au 6 mars, au Centre national des arts à Ottawa.

Avec le premier Sommet national sur l’apprentissage pour la francophonie canadienne, le RESDAC veut proposer «un nouveau chapitre en éducation francophone», a déclaré son directeur général, Denis Desgagnés.

Photo : Courtoisie

Selon l’organisme, au Canada, 52 % des adultes francophones en situation minoritaire éprouvent «des difficultés à lire des textes ou à écrire au quotidien dans un cadre fonctionnel», peut-on lire dans le communiqué. «Cela empêche parfois de fonctionner au travail ou dans la vie personnelle.»

Dans cette optique, le RESDAC veut rassembler des acteurs de tout le pays pour «la création d’une communauté apprenante», a lancé mercredi le directeur général de l’organisme, Denis Desgagnés, lors d’une conférence de presse virtuelle.

«Ce que nous proposons vraiment, c’est un nouveau chapitre en éducation francophone», dit-il, ajoutant que l’article 41 (3) de la nouvelle Loi sur les langues officielles reconnait l’apprentissage du français dans les contextes formel, informel et non formel. «C’est maintenant à nous de jouer.»

Le Sommet sera présenté sous le thème «Une envolée sur les compétences pour s’épanouir». Il portera sur deux volets : la mise en commun et l’apprentissage de concepts fondamentaux puis la cocréation d’un nouveau paradigme.

Le campus du Collège Boréal à Sturgeon Falls, dans le Nord de l’Ontario. 

Photo : Archives Le Voyageur

Le gouvernement fédéral a annoncé un investissement de plus de 560 000 dollars pour le Collège Boréal afin de rénover les locaux de son Campus du Nipissing, qui se trouve dans l’École secondaire catholique Franco-Cité, à Sturgeon Falls, en Ontario.

Le secrétaire parlementaire du ministre des Langues officielles et du ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Marc Serré, soutient que ce financement favoriserait la vitalité des francophones en situation minoritaire de la région.

Le Collège pourra, entre autres, «accroitre sa visibilité et le recrutement auprès des étudiants du secondaire [et] augmenter les échanges entre les niveaux d’enseignement secondaire et postsecondaire», rapporte le communiqué de presse.

L’aide a été octroyée par l’entremise du programme Développement de communautés de langue officielle − Éducation dans la langue de la minorité et du Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028.

Marie-Nicole Dubois décerne le prix Kermode au député conservateur Joël Godin pour son implication dans la modernisation de la loi sur les langues officielles. 

Photo : Courtoisie

Le député conservateur de Portneuf–Jacques-Cartier, au Québec, a reçu le prix Kermode de la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (FFCB).

L’organisme a souhaité le remercier d’avoir déposé un amendement demandant des clauses linguistiques dans les ententes fédérales-provinciales dans le projet de loi C-13, devenu la Loi sur les langues officielles modernisée.

«Nous rendons hommage avec ce prix à la solidarité dont il a fait preuve et à sa vision inclusive de la francophonie canadienne», indique la FFCB par communiqué.

Plus de ressources pour les fonctionnaires noirs, baisse de l’inflation et deux années de conflit en Ukraine

La présidente du Conseil du Trésor, Anita Anand, a dévoilé son Plan d’action pour soutenir le personnel noir de la fonction publique. Le dernier budget du fédéral prévoyait 45,9 millions de dollars pour cette démarche.

«Ainsi, près de 50 millions de dollars soutiennent la création et le développement du Plan d’action pour les fonctionnaires noir.e.s visant à mettre en place des programmes de perfectionnement professionnel et des mesures de soutien en santé mentale pour les personnes noires de la fonction publique», explique le communiqué.

Une proposition d’action collective avait été déposée en 2020 auprès de la Cour fédérale par des fonctionnaires noirs pour demander une indemnisation pour la discrimination systémique dans les embauches et le manque de promotions dans la fonction publique fédérale.

Cette demande est en attente d’être certifiée auprès de la Cour fédérale. Mme Anand n’a pas voulu dire s’il pouvait y avoir une entente à l’amiable à ce sujet.

L’indice des prix à la consommation (IPC) a augmenté de 2,9 %, après avoir progressé de 3,4 % en décembre, selon Statistique Canada.

«Le facteur le plus important à l’origine du ralentissement de la croissance de l’inflation globale a été la baisse des prix de l’essence d’une année à l’autre en janvier (-4,0 %) par rapport à décembre (+1,4 %)», soutient l’organisme.

Statistique Canada note effectivement un recul du prix de l’essence de 4 % en janvier après une hausse de 1,4 % en décembre.

Même constat pour les prix à l’épicerie. «Même si les prix dans les épiceries sont demeurés élevés, leur croissance a ralenti d’une année à l’autre en janvier (+3,4 %) par rapport à décembre (+4,7 %).»

Le 24 février marquera le deuxième anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie.

Par ailleurs, le ministre de la Défense, Bill Blair, a annoncé le 19 février un don de plus de 800 drones à l’Ukraine.

Ce financement de plus de 95 millions de dollars provient des 500 millions annoncés par Justin Trudeau lors de sa visite à Kiev en juin 2023.

Anthony Feinstein, professeur de psychiatrie à l’Université de Toronto, a commencé ses recherches sur la santé mentale des journalistes il y a environ 20 ans. Étant l’un des premiers à se pencher sur la question, le chercheur a rapidement attiré l’attention des médias.

Le 11 septembre 2001, la guerre en Irak de 2003, la violence au Mexique… «[Les salles de nouvelles] ont commencé à m’appeler et à demander “que doit-on faire de nos journalistes?”»

«La majorité des journalistes ne sont ni traumatisés ni déprimés et ne souffrent pas de dépendance, dit-il. Mais la minorité qui souffre de syndrome posttraumatique, de dépression ou d’abus de substance souffre plus que la population générale, et c’est surtout celle qui travaille en zone de guerre ou de conflit.»

«Ce n’est pas toi l’histoire»

Maintenant à l’antenne de Radio-Canada, Manon Globensky a été correspondante en zone de conflit à l’étranger, notamment au Kosovo, en Afghanistan, en Irak et au Koweït.

En 2004, elle a couvert le coup d’État en Haïti.

Manon Globensky, dans le nord de la bande de Gaza, en 2018. Elle couvrait les manifestations de la Marche du retour. 

Photo : Courtoisie

«C’était de moins en moins sécuritaire. Le soir, surtout la nuit, il y avait plein d’exactions et d’exécutions sommaires. […] [Les rebelles] sont venus s’installer dans notre hôtel, se souvient-elle. On est toujours seuls dans nos chambres, mais j’avais encore plus ce poids d’être une fille seule dans ma chambre d’hôtel.»

«Avec les rebelles qui buvaient du rhum, qui étaient dopés et qui se promenaient partout avec des machettes un peu rouillées, je me disais que ça n’avait pas de bon sens, qu’on était fous de rester là sans protection.»

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Le risque était aussi très élevé au Liban. Une bombe est d’ailleurs tombée sur un immeuble derrière elle. «J’ai quand même su ce que ça te fait, l’idée d’une bombe qui te tombe dessus. Mais c’est la réalité des gens que tu t’en vas voir aussi.» 

À travers les dangers, la journaliste a toujours suivi cette règle d’or du métier : «Ce n’est pas toi l’histoire.»

C’est cette idée de témoigner. Tu peux faire entendre l’angoisse, la peine, la peur des gens qui sont autour de toi, mais toi, tu n’es pas important. La façon dont je vois mon métier de journaliste, c’est de relayer ce que les gens qui sont sur le terrain ressentent.

— Manon Globensky

Dans le Nord de l’Ontario, loin de la guerre

Après l’attaque, Jimmy Chabot s’est réfugié dans un chalet avec sa famille pendant une fin de semaine.

Photo : Courtoisie

Jimmy Chabot a compris qu’il n’avait pas besoin d’aller très loin pour vivre les dangers du métier. Il y a quelques mois, le fureteur pour Radio-Canada s’est fait attaquer alors qu’il filmait pour un reportage sur l’itinérance et la crise des opioïdes à Timmins, dans le Nord-Est de l’Ontario.

«Dans la vidéo, on voit seulement leurs pieds. Mon but n’était pas d’afficher leur visage», explique-t-il.

Une itinérante s’aperçoit qu’elle est filmée et, mécontente, crie, lui saute dessus et saisit son cellulaire.

«Je me retrouve à deux contre un, relate-t-il. J’ai repris mon téléphone et couru à l’extérieur. J’ai sauté dans le véhicule de deux bons Samaritains, un pickup. Je m’assois sur la banquette arrière, puis la femme est avec son vélo et une clé à molette. […] J’arrive chez nous, je suis un peu sous l’adrénaline, j’ai une partie de la main qui est en sang.»

 Jimmy Chabot, lors d’un reportage. 

Photo : Courtoisie

Le lendemain, en poursuivant son reportage à l’entrée d’un refuge pour itinérants, la dame réapparait. «Elle se met devant tous les itinérants de Timmins et me pointe du doigt.» Elle commence alors à raconter des mensonges sur le fureteur, inventant qu’il avait tenté de la tuer. La police s’en est mêlée et Jimmy Chabot est rentré chez lui.

«Je marche souvent avec ma fille pour aller au bureau […] j’en tremblais. Si bien que pour marcher au centre-ville, il a fallu que j’appelle un taxi. […] Je craignais de marcher, puis de me faire attaquer par-derrière, par sa clé à molette, ou en tournant un coin de rue.»

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Depuis, Jimmy Chabot a consulté une psychologue, a augmenté sa dose d’antidépresseurs et bénéficie d’un plan de sécurité qui inclut un taxi pour se rendre au bureau.

Les mécanismes de défense

«C’est comme si on demandait aux journalistes de ne plus être humain pendant qu’ils font leur travail, d’être “sur le go”, et d’être séparés émotionnellement de [ce] qu’ils partagent», prévient Nafissa Ismail. 

Photo : Faculté des sciences sociales - Université d’Ottawa

Selon Nafissa Ismail, professeure de psychologie à l’Université d’Ottawa, plusieurs journalistes développent ces mécanismes dans le feu de l’action.

«Notre cerveau est capable de, en quelque sorte, éteindre les régions du cerveau impliquées dans les émotions. […] On peut le faire pendant un certain temps, dans un certain type de circonstances, mais à la fin, on est tous humains.»

C’est souvent après coup que le journaliste se rend compte de ce qui lui est arrivé : «On dirait que c’est cette après-pensée qui vient davantage chercher les journalistes émotionnellement et qui continue à causer du stress.»

Manon Globensky a observé cette capacité à faire fi de l’horreur lors de son dernier jour à Tyr, au Liban, en 2006. Elle s’est retrouvée devant des corps récupérés lors d’un cessez-le-feu.

«Un super photographe de La Presse canadienne, Kevin Frayer, prenait des photos des cadavres. Moi j’étais incapable de regarder, raconte-t-elle. J’ai demandé “comment tu fais?” Il dit : “Moi je ne les vois pas. Je ne peux pas les voir, parce que si je les vois, c’est sûr, je les ai dans ma tête. J’ai développé ça, c’est la lentille qui les voit, mais moi je ne les vois pas.”»

«Nous, on finit par partir»

«On réalise, entre autres, à quel point on est bien ici et à quel point on n’a pas de problème au Canada. C’est toujours le choc, quand tu sors de ta zone de conflit et que tu reviens dans ton milieu», souligne Manon Globensky.

Selon Anthony Feinstein, la blessure morale affecte aussi les journalistes qui travaillent au Canada. 

Photo : Doug Nicholson

Anthony Feinstein confirme que le retour chez soi peut être très difficile pour les journalistes, surtout pour ceux qui ont une blessure morale.

«Il s’agit d’un état qui peut résulter du fait d’avoir été témoin, d’avoir perpétré ou de ne pas avoir empêché des actes qui transgressent votre boussole morale», explique l’auteur de Moral Courage : 19 Profiles of Investigative Journalists.

Au Canada, cette blessure se trouve surtout chez les journalistes qui couvrent les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées. Le psychiatre le voit aussi chez ceux qui couvrent les changements climatiques ou qui reviennent de pays en guerre.

«Nous, on finit par partir, laisse tomber Manon Globensky. Eux, ils restent. Donc c’est eux qui comptent, finalement. Mais bon, je ne dis pas qu’il n’y a pas un petit sentiment de culpabilité, même maintenant.»

L’immigration au Canada vise à servir les intérêts du pays et, avant tout, ses intérêts économiques. Les critères de sélection favorisent les personnes immigrantes qui peuvent répondre rapidement aux besoins de main-d’œuvre – même si leurs diplômes ne sont souvent pas reconnus.

Il demeure difficile d’obtenir le statut de réfugié, surtout dans les cas où les candidats et candidates n’ont pas encore eu à quitter leur pays. Et si l’immigration initiale mène à des séparations familiales, de longs délais alourdissent le programme de réunification et posent un poids important sur la vie des familles.

La Politique en matière d’immigration francophone vise elle aussi l’immigration économique et cherche à la diriger vers les communautés francophones en situation minoritaire (CFSM).

Son but premier est de contribuer à la vitalité et à l’épanouissement de ces communautés, ainsi qu’à leur développement, tandis que son but second est d’assurer l’intégration au sein de ces communautés et de veiller à renforcer leur capacité d’accueil.

L’approche actuelle est pensée comme un continuum. Celui-ci est généralement présenté comme passant du recrutement à l’accueil puis à la rétention.

En participant aux efforts d’augmentation du nombre de candidats et candidates à l’immigration et à leur rétention, les CFSM cherchent à convaincre des francophones de s’établir chez elles et à leur offrir des perspectives qui leur permettront de s’y installer plutôt que d’aller ailleurs.

S’il n’est pas surprenant que l’intérêt canadien ou communautaire prime dans les lois et politiques du pays, rien dans cette perspective n’assure que les intérêts et besoins des personnes immigrantes trouveront réponse. Rien ne prévoit non plus que leurs désirs seront satisfaits.

À lire : Immigration francophone : Ottawa dépasse sa cible et annonce de nouvelles mesures

Adopter la perspective des personnes immigrantes

L’initiative Communautés francophones accueillantes a pour objectif de mettre en place des stratégies développées au niveau local afin de retenir les immigrants et immigrantes dans les communautés de petite taille et souvent rurales. L’un des succès de cette initiative semble être son appui direct aux groupes ethnoculturels.

Ce succès devrait montrer l’importance non seulement d’une approche localisée, mais également de la participation des personnes immigrantes déjà établies et actives au sein des CFSM et de la société canadienne.

Toutefois, la Politique en matière d’immigration francophone se concentre sur les liens entre les ministères et avec les organismes communautaires, sans faire une place à celles et ceux qui connaissent le mieux les réalités de l’immigration francophone.

À lire : Régulariser l’immigration au Canada (Chronique)

Permettre aux organismes ethnoculturels de s’outiller

Une étude que j’ai menée avec deux collègues a montré que certains des besoins liés à l’ajustement des immigrants et immigrantes à un nouvel environnement de vie et leurs besoins de participer de manière diverse à la vie communautaire francophone, mais aussi au-delà de la francophonie passent généralement inaperçus.

Nous avons également pu voir qu’en fait, une grande partie de l’accompagnement à l’établissement se fait par les membres bénévoles d’organismes ethnoculturels, qui se concentrent sur l’ajustement à la vie au Canada.

Les organismes ethnoculturels, en organisant des regroupements, donnent la possibilité à leurs membres d’apprendre des trucs et astuces pour répondre à leur nouvelle situation et leur offrent aussi des occasions de se retrouver en compagnie de personnes qui ont de longues expériences de vie similaires.

Ces organismes vont au-delà de ce qui est possible en atelier. En plus de la possibilité de continuer ses pratiques culturelles, ils permettent à ceux et celles qui les fréquentent de bénéficier d’un répit d’avoir à parler une nouvelle langue, à s’adapter aux attentes des autres et à deviner les comportements d’autrui et les codes sociaux. On peut même y obtenir de l’aide pour trouver de nouveaux repères culinaires.

De tels répits sont importants pour se sentir à l’aise et maintenir l’énergie pour s’ajuster et s’habituer à un nouveau milieu.

L’entraide qui a lieu au sein de plusieurs de ces organismes permet par ailleurs aux personnes immigrantes établies de contribuer à l’ajustement des nouveaux arrivants, d’offrir en retour ce qui leur a été donné – le tout, sans les limites imposées par les structures bureaucratiques formelles.

Une telle souplesse est essentielle étant donné que chaque personne a un parcours distinct et doit s’ajuster à différents aspects de la vie en communauté.

Plus encore, des organismes actifs permettent une participation citoyenne. Cette participation peut avoir lieu en leur sein sans que les personnes immigrantes doivent s’adapter à de nouvelles manières de s’associer, de travailler en groupe, d’établir des buts et de poursuivre des objectifs, ou même d’argumenter et d’écouter les autres.

Cette participation aide également les personnes immigrantes à apprendre de celles et ceux qui sont déjà en action dans d’autres organismes communautaires.

De telles occasions de partager sont surtout importantes pour les personnes qui ne sont pas originaires d’Europe, dont les modes de vie diffèrent davantage de ceux de leur communauté francophone d’accueil, pour qui de longues habitudes d’intégration n’existent pas et qui sont moins valorisées.

Les organismes ethnoculturels fournissent également un milieu important pour contrer les pratiques discriminatoires en place au Canada et dans le recrutement, qui pourraient limiter le succès de la nouvelle politique d’immigration francophone.

Une force à maintenir

C’est souvent par le biais des relations que l’on s’inscrit dans une nouvelle communauté. Or, les relations avec la population majoritaire (y compris au sein des CFSM) sont plus difficiles à établir, tant du fait des différences que de la résistance à l’immigration et du racisme qui existent dans nos sociétés.

De la sorte, une part de l’intégration dans un pays d’immigration passe par les groupes ethnoculturels.

Toute personne appartient à plusieurs groupes à la fois et il ne peut être question d’exiger une appartenance première ou exclusive aux espaces francophones.

En reconnaissant l’engagement de ces organismes dans les processus formels d’immigration, on doit toutefois éviter deux risques.

D’abord, il est probable que le gouvernement et des organismes communautaires plus solidement établis servent de gardiens à l’accès au financement et décident des organismes ethnoculturels qui recevront un soutien, ce qui pourrait amener ces derniers à se transformer pour répondre aux objectifs d’autres entités plutôt qu’à ceux qui ont fait leur succès.

Ensuite, le besoin de spécialisation dans l’accueil et l’établissement risque lui aussi de détourner les organismes de leurs forces. L’engagement bénévole qui existe déjà offre tout autre chose que la professionnalisation et il doit être vu comme une force à ne pas abandonner.

Jérôme Melançon est professeur agrégé en études francophones et interculturelles ainsi qu’en philosophie à l’Université de Regina. Ses recherches portent notamment sur la réconciliation, l’autochtonisation des universités et les relations entre peuples autochtones et non autochtones, sur les communautés francophones en situation minoritaire et plus largement sur les problèmes liés à la coexistence. Il est l’auteur et le directeur de nombreux travaux sur le philosophe Maurice Merleau-Ponty, dont La politique dans l’adversité. Merleau-Ponty aux marges de la philosophie (MétisPresses, 2018).

La cuisine canadienne ne se résume pas à un seul plat national. C’est une tout autre histoire qui mijote depuis des siècles derrière les fourneaux des grands chefs et dans l’intimité des foyers.

Pour Nathalie M. Cooke, professeure de littérature anglaise à l’Université McGill, tous les provinces et territoires ont leurs propres produits et techniques de préparation, mais ils n’ont pas développé la même mythologie. 

Photo : Courtoisie

«Nous n’avons pas de cuisine homogène typiquement canadienne, nous avons une cuisine multiculturelle qui s’est développée grâce aux vagues d’immigration successives», précise d’emblée Laurier Turgeon, professeur d’ethnologie et d’histoire à l’Université Laval, à Québec.

«Le Canada n’a pas sa propre haute cuisine. À la place, nous avons un multilinguisme culinaire», renchérit Nathalie M. Cooke, professeure de littérature anglaise à l’Université McGill, à Montréal.

La spécialiste de l’alimentation explique que le Canada a construit sa «fiction d’une cuisine nationale» dans le contexte du multiculturalisme : «Notre cuisine raconte l’histoire de l’altérité et de l’intégration.»

L’alimentation, en effet, n’est jamais figée dans le marbre des traditions : elle combine sans cesse l’ancien et le nouveau, le proche et le lointain, le familier et l’étranger.

Un brassage sans équivalent

«Certains aliments, comme le sirop d’érable, ont développé un statut iconique dans notre mythologie, mais l’art culinaire est comme un langage perpétuellement en train d’évoluer», résume Nathalie M. Cooke.

L’historienne culinaire Fiona Lucas estime également qu’on ne peut plus parler de cuisine traditionnelle canadienne : «Chaque famille a sa cuisine traditionnelle, en fonction de ses origines.»

Le chef albertain JP Dublado, originaire des Philippines, marie les saveurs asiatiques et canadiennes dans ses plats. 

Photo : Courtoisie

Depuis les premiers colons français et anglais, la gastronomie canadienne n’a cessé de s’enrichir et de se métisser. En franchissant les frontières, les immigrés ont apporté dans leurs bagages la culture alimentaire de leur pays d’origine.

Nathalie M. Cooke cite l’influence des immigrants chinois dès le XIXe siècle, mais aussi des Italiens entre 1940 et 1960, ou encore des Vietnamiens à partir des années 1970.

Dans leur sillage, les Canadiens ont découvert de nouvelles saveurs, de nouvelles épices, de nouveaux modes de cuisson. Les nouveaux arrivants, de leur côté, ont abandonné certains savoir-faire, amendé certains rituels, adapté certaines recettes.

Ce brassage sans équivalent se retrouve dans les assiettes du chef albertain JP Dublado, d’origine philippine. Le cuisinier marie les saveurs asiatiques de son enfance avec des produits du terroir albertain.

«Il n’y a pas vraiment de cuisine canadienne, c’est un mélange diversifié de tellement de cultures», souligne-t-il.

À lire aussi : Retrouver ses repères culinaires après l’immigration

Collage de plats régionaux

Pour Laurier Turgeon, l’invention du restaurant chinois à la canadienne témoigne d’un autre compromis inventif entre les traditions du pays d’origine et les rituels du pays d’accueil. Le buffet chinois trouve son origine à Vancouver, vers 1870.

«La cuisine chop suey (la version nord-américaine de la cuisine chinoise) mêle les références identitaires des deux cultures, observe l’ethnologue. Certains plats n’existent même pas en Chine et d’autres sont adaptés aux gouts canadiens.»

«Nous avons une cuisine multiculturelle qui s’est développée grâce aux vagues d’immigration successives», explique Laurier Turgeon, professeur d’ethnologie et d’histoire à l’Université Laval.

Photo : Courtoisie

Malek Batal, d’origine libanaise et professeur de nutrition à l’Université de Montréal, évoque l’humus réinventé à toutes les sauces avec des versions betterave, poivron, jalapéno, qu’on ne trouvera jamais au Liban.

«L’alimentation est un terrain où s’opèrent des jeux d’appropriation et de rapprochement des cultures», analyse-t-il.

Dans ces va-et-vient entre l’ici et ailleurs, la cuisine canadienne est également une mosaïque de plats régionaux : la tarte au beurre (butter tart) de l’Ontario, le bœuf au gingembre de Calgary, le schmoo torte fait de crème fouettée, de caramel et de noix du Manitoba, le fish and brewis à base de morue et de pain dur de Terre-Neuve.

«Les ingrédients locaux disponibles et les différentes poches d’immigration influencent les spécialités des provinces et territoires», considère Malek Batal. Il prend l’exemple des immigrants d’Europe de l’Est qui ont amené les pierogis en Alberta, en Saskatchewan et en Ontario.

«Les différentes régions du pays ont leurs propres produits et techniques de préparation, elles n’ont cependant pas développé la même mythologie», poursuit Nathalie M. Cooke.

La poutine faite de frites, recouverte de fromage en grains et noyées de sauce brune, est l’un des plats canadiens les plus célèbres. 

Photo : Marine Ernoult, Francopresse

Le pâté chinois est un mets originaire du Québec composé de bœuf haché, de maïs et de pommes de terre. 

Photo : Camille Langlade, Francopresse

La tourtière – ou cipaille – est une sorte de pâté à la viande comprenant des pommes de terre, du porc, du veau, du bœuf haché et/ou des viandes sauvages. 

Photo : Julien Cayouette

La cuisine chop suey est un mélange des gastronomies chinoise et nord-américaine. 

Photo : Eli Hodapp, Wikimedia Commons

Les pierogis sont des sortes de ravioles farcies avec des pommes de terre et d’autres ingrédients originaires d’Europe de l’Est. 

Photo : Silar, Wikimedia Commons

La soupe phở au saté est une variation assez récente de la soupe phở vietnamienne traditionnelle. 

Photo : Marine Ernoult, Francopresse

Le fish and brewis est un plat traditionnel de Terre-Neuve composé de morue et de pain dur. 

Photo : Keith Pomakis, Wikimedia Commons

Préparation de la poutine râpée, un plat traditionnel acadien. 

Photo : Sonjaaa, Wikimedia Commons

Se distinguer du Canada anglais

Les Canadiens français sont souvent les premiers à avoir affirmé leur identité culinaire, «pour se distinguer du Canada anglais et ne pas être assimilés», relate Laurier Turgeon.

Il évoque les fèves au lard et la tourtière québécoises, le fricot et la poutine râpée des Acadiens, devenus de véritables emblèmes culturels.

Selon l’historienne culinaire Fiona Lucas, les différences entre les cuisines des Canadiens anglais et français ont tendance à s’estomper. 

Photo : Courtoisie

Les traditions alimentaires des Canadiens anglais ont néanmoins toujours imprégné la gastronomie des francophones. Sous l’influence des colons britanniques, les colons français se sont mis à manger des pommes de terre, jusqu’alors réservées aux animaux. Une nouvelle habitude qui donnera naissance des siècles plus tard au célèbre pâté chinois.

«Il y a toujours eu des différences marquées entre les deux cuisines, mais la ligne est de plus en plus ténue. Les gens et les aliments se sont mélangés», relève Fiona Lucas.

Malek Batal note de son côté une «certaine standardisation des habitudes» à travers le pays avec la multiplication de la restauration rapide à l’américaine où règnent burgers et frites.

Au-delà des couches d’influences successives – française, anglaise, asiatique et, bien sûr, américaine – le premier patrimoine culinaire canadien est celui des peuples autochtones.

À lire aussi : Indice pâté chinois : augmentation généralisée

Révolution culinaire à l’horizon

Une gastronomie à base de gibier, de poissons, de riz sauvage, de baies et d’herbes indigènes reprend de plus en plus de place : aiguilles de sapin baumier, persil de mer, thé du labrador, cerf, lièvre fumé, crabes des neiges, etc.

Malek Batal note une «certaine standardisation des habitudes» à travers le pays avec la multiplication de la restauration rapide à l’américaine. 

Photo : Courtoisie

Une cuisine avec des méthodes de préparation unique de séchage et de fumage du poisson, de cuisson lente dans des boites de bois cintrées.

«La richesse et la diversité de nos produits sont sans limites, notre territoire a un potentiel gigantesque, des variétés folles de végétaux», confirme Laurier Turgeon.

Pendant très longtemps, les Canadiens ont regardé ailleurs, mais l’intérêt renait aujourd’hui pour ce qui est plus près.

«Les Autochtones ont toujours valorisé leur propre cuisine, c’est une question d’identité, mais de plus en plus de chefs non autochtones redécouvrent cette cuisine et s’en emparent», constate Malek Batal.

Le signe, selon Laurier Turgeon, qu’une «grande révolution culinaire» se dessine. À ses yeux, grâce à l’utilisation croissante d’aromates locaux, la cuisine canadienne devient de plus en plus élaborée, riche d’un «gout unique» qui la distingue radicalement des autres gastronomies. Autrement dit, une manière d’affirmer son patrimoine culturel dans l’assiette.

Scandale ArriveCAN, logements en milieu rural et entente en sursis

Dans un rapport déposé lundi, la vérificatrice générale du Canada, Karen Hogan, tient l’Agence des services frontaliers du Canada, l’Agence de la santé publique du Canada et Services publics et Approvisionnement Canada pour responsables de la mauvaise gestion de l’application ArriveCAN.

«Notre audit a révélé des échecs et des lacunes graves dans tout ce que nous avons examiné, a-t-elle soutenu lors du point de presse. La plus inquiétante de nos constatations, c’est que l’Agence des services frontaliers du Canada n’avait pas de dossiers financiers complets et exacts. L’absence de cette information nous a empêchés de calculer le cout précis de l’application ArriveCAN.»

L’application, qui avait été lancée par Ottawa au début de la pandémie, devait couter 80 000 dollars canadiens. Mais la facture s’élève aujourd’hui à plus de 59,5 millions de dollars, estime la vérificatrice générale.

La plus grosse part est allée à l’entreprise GC Strategies, qui a reçu plus de 19 millions de dollars de ce financement dans le cadre de contrats conclus avec le gouvernement.

«Nous nous engageons évidemment à corriger [les erreurs]. J’ai pleine confiance dans la présidente de l’Agence des services frontaliers de prendre toutes les mesures qui s’imposent», a déclaré en mêlée de presse Jean-Yves Duclos, le ministre des Services publics et de l’Approvisionnement du Canada.

Le chef du Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a réitéré son ultimatum devant les journalistes : il est prêt à briser son entente avec le Parti libéral si ce dernier ne dépose pas un projet de loi pour un programme national d’assurance-médicaments d’ici le 1er mars 2024.

«Les excuses, ça suffit, a lancé Jagmeet Singh lors d’une conférence de presse. On a maintenant besoin d’un projet de loi. C’est ce qu’on a forcé les libéraux d’accepter et j’ai dit clairement à Justin Trudeau que vous avez jusqu’au 1er mars pour livrer le projet, sinon il y aura des conséquences.»

Jagmeet Singh menace de briser l’entente avec les libéraux si le gouvernement n’entame pas de projet de loi pour un programme d’assurance médicaments d’ici le 1er mars.

Photo : Chantallya Louis – Francopresse

Selon le chef néodémocrate, avec la fin de cette entente, conclue en 2022, le gouvernement perdrait l’appui des néodémocrates lors de la passation et de l’adoption de projets de loi.

«S’ils brisent l’entente, toutes les conséquences sont sur la table», a ajouté Jagmeet Singh, qui a également sous-entendu qu’une campagne électorale pourrait être déclenchée en 2024.

La ministre des Finances, Chrystia Freeland, a annoncé un financement de 176 millions de dollars pour la construction de logements dans les communautés rurales.

Ainsi, Ottawa a signé des ententes avec plus de «60 petites communautés et communautés rurales» pour la construction de 5300 logements sur trois ans et plus de 51 000 logements au cours des 10 prochaines années dans les communautés rurales au Canada.

Cette annonce, qui s’inscrit dans le Fonds pour accélérer la construction de logements, devrait permettre de réduire les formalités administratives et de construire «plus de 550 000 logements au cours de la prochaine décennie», peut-on lire dans le communiqué

Le gouvernement souhaite aussi attirer plus de «médecins et personnel infirmier nécessaires pour améliorer les soins de santé dans ces régions », explique le communiqué. 

«Le gouvernement fédéral augmente de 50 % le montant de l’exonération du remboursement des prêts d’études pour les médecins et le personnel infirmier qui vont travailler dans ces communautés», explique le communiqué.

Conflit israélo-palestinien, guerre en Ukraine et nominations au Sénat

Justin Trudeau exhorte Israël à ne pas attaquer la ville de Rafah. 

Photo : Camille Langlade – Francopresse

Le premier ministre canadien et ses homologues de la Nouvelle-Zélande et de l’Australie appellent le gouvernement d’Israël à suspendre ses attaques sur la ville de Rafah, située à la frontière avec l’Égypte, où près 2 millions de Palestiniens ont trouvé refuge.

«Une opération militaire à Rafah serait catastrophique, peut-on lire dans la déclaration commune envoyée jeudi soir. […] Nous exhortons le gouvernement d’Israël à ne pas s’engager dans cette voie. Les civils n’ont tout simplement nulle part où aller.»

«La protection des civils est primordiale et constitue une exigence du droit humanitaire international», rappelle Justin Trudeau.

Le premier ministre ne s’était jusque-là pas prononcé sur la décision de la Cour internationale de justice (CIJ) qui exhorte Israël à mettre fin à tout éventuel acte de génocide à Gaza.

«La Cour internationale de justice a été claire : Israël doit assurer l’accès aux services de base et à l’aide humanitaire essentielle et protéger les civils.»

Lors de la 19e réunion du Groupe de contact sur la défense de l’Ukraine aux États-Unis, le ministre de la Défense nationale, Bill Blair, a annoncé un nouveau financement de 60 millions de dollars pour la coalition du Groupe de contact sur la défense de l’Ukraine axée sur les capacités des forces aériennes.

«Les fonds aideront à trouver des fournitures et de l’équipement indispensables liés aux F-16, entre autres, pièces de rechange, postes d’armes, avionique et munitions», rapporte le communiqué.

Bill Blair avait par ailleurs annoncé le mois dernier une enveloppe de 15 millions de dollars pour appuyer l’entrainement des forces militaires ukrainiennes.

Le premier ministre a annoncé la nomination de Manuelle Oudar comme sénatrice indépendante pour le Québec.

Avocate de formation, Manuelle Oudar a travaillé pendant plus de 30 ans dans la fonction publique du Québec.

Elle est présidente-directrice générale de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). «Elle reste active dans sa communauté, comme conférencière ainsi que mentor auprès de jeunes professionnelles et leadeurs qui débutent leur carrière», précise le communiqué.

L’homme d’affaires et entrepreneur torontois Mohammad Al Zaibak a également été nommé la semaine dernière sénateur indépendant pour l’Ontario.

«Il a été très actif dans la promotion du développement social et de la diversité», détaille le communiqué.

Dans l’examen du rapport de l’Initiative du siècle, des fonctionnaires d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) critiquent ses analyses et ses conclusions. Ils remettent aussi en cause l’idée que de hauts seuils d’immigration sont la seule solution aux enjeux démographiques et de main-d’œuvre du Canada.

Une copie de cet examen et des échanges de courriels ont été rendus publics grâce à la Loi sur l’accès à l’information.

L’Initiative du siècle est un organisme inscrit au registre des lobbyistes du Canada depuis 2021 qui défend le scénario d’une population de 100 millions de Canadiens pour l’année 2100.

Elle a été fondée par Dominic Barton, un ex-directeur de la firme McKinsey, à laquelle IRCC a fait appel pour diverses initiatives.

En 2020, le groupe de pression a publié un rapport dans lequel il défend cette cible et dans lequel il étaye ses arguments en faveur de seuils d’immigration élevés.

Rédigé en 2020, selon les échanges de courriels de la même année, l’examen a été envoyé au directeur de la planification des niveaux de migration d’IRCC. Une poignée d’autres directeurs et analystes du ministère ont aussi reçu une copie.

Le gouvernement libéral s’est dissocié des conclusions de l’Initiative du siècle trois ans plus tard, en mai 2023, après que des liens avec le milieu des affaires torontois et la firme McKinsey ont commencé à faire du bruit dans les médias.

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«Pas une analyse rigoureuse»

«Dans l’ensemble, le rapport ne fournit pas une analyse rigoureuse pour étayer le niveau d’immigration suggéré et l’objectif de 100 millions de Canadiens en 2100 comme étant la meilleure option pour le Canada. Bien qu’une longue liste de références soit fournie, elle ne comprend que des ouvrages favorables à leurs arguments», critiquent les fonctionnaires dans leur examen du rapport.

Selon eux, le plan de l’Initiative du siècle soulève des questions sur la «durabilité» de niveaux d’immigration élevés, des hypothèses qui «pourraient ne pas tenir», qui «ne sont probablement même pas vraies» et qui «doivent être examinées attentivement».

Ils contestent notamment l’idée selon laquelle une haute population cause forcément une croissance économique.

Dans le passé, une grande partie de la croissance économique était associée à la croissance de la main-d’œuvre, ce qui n’est peut-être pas le cas dans l’économie du savoir du XXIe siècle.

Les fonctionnaires avancent qu’il n’y a aucune raison de considérer l’augmentation des niveaux d’immigration comme la seule solution à la pénurie de main-d’œuvre due au vieillissement de la population, en partie parce que «les immigrants vieilliront également au Canada».

En proposant d’autres pistes de solutions, ils évoquent des études qui énumèrent les défis liés à l’emploi et au salaire pour les immigrants.

«Si l’on ne s’attaque pas d’abord avec succès aux principaux obstacles à l’intégration des immigrants sur le marché du travail, ce scénario de forte immigration risque fort d’échouer et l’augmentation de l’immigration pourrait être compensée par un taux d’émigration plus élevé.»

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L’Initiative avance que la vaste géographie du Canada lui permet de soutenir une grande population. Or pour les fonctionnaires, cette vision ne tient pas compte du climat et des conditions géographiques du pays.

IRCC tient à rappeler que le gouvernement ne partage pas les objectifs de l’Initiative du siècle. «Ils ne sont pas et n’ont jamais été la politique du gouvernement», assure le bureau du ministre d’IRCC par écrit à Francopresse.

Selon le bureau, le lien établi est un «malentendu» et, avant l’année dernière, «il n’y avait aucune raison pour que les ministres corrigent cette notion, puisqu’il n’y avait aucun malentendu antérieur».

Christopher Worswick fait de la recherche sur l’économie et l’immigration. 

Photo : Courtoisie

Écho des économistes

Le professeur d’économie à l’Université Carleton, Christopher Worswick, confirme que plusieurs économistes partagent les préoccupations de l’examen quant aux niveaux élevés d’immigration.

«Les politiciens et certaines personnes dans la sphère publique parlent des grands avantages économiques de l’immigration, mais les économistes universitaires ne voient généralement pas ces grands avantages.»

Il pense que «les arguments de l’Initiative du siècle sont faibles sur le plan économique».

La littérature scientifique est mitigée sur les questions de croissance économique liée à l’immigration, rapporte-t-il. Que ce soient des questions de produit intérieur brut (PIB) par habitant, de vieillissement de la population ou de marché du travail, plusieurs économistes présentent des résultats différents de ceux de l’Initiative du siècle.

«J’aimerais avoir tort, dit le professeur Worswick. J’aimerais pouvoir dire que l’immigration est à l’origine de toutes ces [apports économiques], mais la littérature est très mitigée.»

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Le gouvernement libéral a pris ses distances

En mai 2023, Sean Fraser, encore ministre d’IRCC, s’est dissocié de l’Initiative du siècle et a indiqué ne pas adhérer à ses conclusions et ne pas partager ses objectifs pour 2100.

«Plutôt que de gérer le dossier de l’immigration de façon sérieuse et responsable, [le gouvernement] le fait de façon idéologique et, à ce moment-là, il évacue tout ce qui pourrait être problématique par rapport à l’immigration», dit le bloquiste Alexis Brunelle-Duceppe.

Photo : Bloc Québécois

Quelques jours plus tard, les libéraux et les néodémocrates ont tout de même fait échouer une motion du Bloc Québécois demandant à la Chambre des communes de rejeter les objectifs de l’Initiative du siècle et au gouvernement de ne pas s’en inspirer pour les seuils d’immigration à venir.

Pour Alexis Brunelle-Duceppe, porte-parole bloquiste en matière d’immigration, malgré la posture des libéraux en mai dernier, les chiffres du gouvernement ressemblent à ceux demandés par l’Initiative du siècle et seraient même plus élevés.

Une posture idéologique selon lui, «parce que l’Initiative du siècle, ça a aussi été bâti par le grand patronat avec des gens comme McKinsey et Dominic Barton».

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Le 1er novembre 2023, le gouvernement a annoncé une cible de 500 000 résidents permanents admis en 2026, un chiffre qui sera stabilisé par la suite. L’Initiative du siècle proposait de continuer à augmenter le chiffre après 2026, pour qu’il soit égal à 1,25 % de la population canadienne.

En préparation d’une récente entrevue pour la troisième édition de l’indice pâté chinois de Francopresse, j’ai eu l’occasion de me replonger dans les données de l’inflation alimentaire.

Après deux ans d’inflation anormalement élevée, il est rassurant de constater que le prix des denrées se stabilise. Nous avons tous pu constater combien une hausse des prix de 10 ou 20 % pouvait faire mal au portefeuille.

Mais un danger drôlement plus important qu’une pandémie ou qu’un conflit à l’autre bout du monde menace le prix de nos aliments et même l’offre : les changements climatiques.

Aura-t-on encore du café au déjeuner?

Le café, le chocolat ou le vin, tels qu’on les connait, sont appelés à disparaitre, ou du moins à connaitre des baisses de production tellement fortes qu’ils pourraient devenir hors de prix.

Ce n’est pas un scénario de science-fiction ni une hypothèse pour le XXIIe siècle.

La hausse des températures dans le monde affecte déjà la production des fruits qui servent à fabriquer le café, le vin ou le chocolat, et il faut s’attendre au cours des prochaines années à voir les prix monter à mesure que les récoltes seront affectées.

Quand on parle de changements climatiques, on fait souvent référence à la hausse moyenne des températures. Selon l’ONU, le monde s’est déjà réchauffé de 1,2 °C par rapport à l’ère préindustrielle et il faut limiter le réchauffement à 1,5 °C pour en éviter les pires effets.

Dans la réalité cependant, les changements climatiques n’entrainent pas une hausse égale et continue des températures, mais plutôt une croissance des évènements météorologiques extrêmes. Pensez par exemple aux feux de forêt qui ont dévasté de grandes régions du pays à l’été 2023.

Les sècheresses, les pluies abondantes, les périodes de canicule exceptionnelles… tout cela affecte les plantes que l’on cultive ou les animaux que l’on pêche ou élève.

Normalement, la nature a un moyen de défense efficace contre des transformations radicales de l’environnement : la diversité génétique. Si une variété de café supporte mal la chaleur extrême, elle finira généralement par disparaitre au profit d’une autre qui est plus résistante.

Or, pour maximiser la productivité des cultures, on a eu tendance à faire exactement l’inverse et à miser sur un nombre très limité de cultivars, ce qui accroit notre vulnérabilité aux changements climatiques.

La vaste majorité du café (Arabica), des bananes (Cavendish) et des avocats (Hass) consommés chez nous et aux quatre coins du monde proviennent d’un seul cultivar.

D’ici 2050, la moitié de toutes les terres où pousse le café aujourd’hui sera impropre à sa culture.

Cette transformation n’arrivera pas du jour au lendemain. On peut supposer que le prix augmentera graduellement à mesure que les changements climatiques affecteront les zones de production en Afrique et en Amérique centrale.

Le Canada est-il prêt à faire face à ces changements?

Le Canada, grâce à sa géographie diversifiée, à son vaste territoire et à l’importance de son industrie agroalimentaire, est moins vulnérable que d’autres pays à l’insécurité alimentaire.

Cela n’empêche pas qu’il y aura d’importantes transformations dans nos pratiques agricoles et dans notre assiette au cours des prochaines années. Une partie de ces changements seront dictés par les prix. Il faudra accepter que certains aliments deviennent inabordables.

La variété à laquelle nous avons été habitués pourrait en souffrir. La vaste majorité des fruits et légumes que nous mangeons sont importés des États-Unis et du Mexique, ce qui nous rend vulnérables aux transformations du climat dans ces pays.

Le prix de certains aliments est aussi déterminé par des marchés mondiaux. L’année dernière, le prix du blé a presque doublé sous la pression combinée de la guerre en Ukraine et des conditions météo extrêmes au Canada. C’était vrai chez nous comme ailleurs.

Déjà, après une hausse modeste des prix au cours des dernières années, nos habitudes de consommation se sont transformées. Les épiceries au rabais sont plus populaires que jamais. Un ménage sur dix au Canada dépend des banques alimentaires pour se nourrir convenablement, presque le double d’il y a cinq ans.

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Ce n’est qu’un début. Il faut se préparer à une hausse des prix de certains aliments bien plus importante dans un avenir rapproché.

Je ne suis pas certain que nous soyons prêts en tant que société à ce choc des prix. Nous avons vécu dans un monde où tout était offert dans nos épiceries et dans nos restaurants.

Nous n’avons pas l’habitude de nous plier à des restrictions ni à une régression de nos conditions de vie. Mais à moins d’une transformation radicale de nos modes de vie, il est peu probable que nos assiettes échappent à l’incidence des changements climatiques.

David Dagenais est journaliste économique indépendant et entrepreneur. Auparavant, il a été journaliste à Radio-Canada après avoir terminé des études supérieures en économie politique à l’UQAM et à l’Université d’Ottawa.

«L’histoire des Afro-Canadiens, c’est d’abord l’histoire du Canada, lance l’historien et écrivain Amadou Ba. Ce n’est pas l’histoire séparée de l’histoire du Canada. Elle fait partie de l’histoire du Canada.»

Une histoire qui commence au XVIIe siècle

Professeur d’histoire à l’Université Laurentienne, en Ontario, Amadou Ba raconte que l’histoire des communautés noires au Canada commence pendant la période esclavagiste, qui a duré plus de 200 ans dans l’Empire britannique, entre 1628 et 1833.

Amadou Ba soutient qu’il faut donner la chance à tout le monde de connaitre, de respecter et de comprendre l’histoire des Afro-Canadiens et leur contribution à la société canadienne. 

Photo : Courtoisie

Au Canada, cette histoire comprend aussi des loyalistes, anciens colons américains qui soutenaient l’Empire britannique lors de la guerre de la Révolution américaine, de 1775 à 1783.

Selon Amadou Ba, environ 50 000 loyalistes ont traversé la frontière canado-américaine. Parmi eux se trouvaient 5000 Afro-Américains, qui se sont installés au Haut-Canada et au Bas-Canada, «et ces gens ont apporté leur cœur à l’édification du pays».

Au Canada, se trouvent aussi des personnes d’ascendance africaine qui ont emprunté le réseau du chemin de fer clandestin pour fuir l’esclavage aux États-Unis et retrouver leur liberté. «Entre 30 000 à 40 000 fugitifs ont trouvé refuge en Amérique du Nord britannique [maintenant le Canada]», peut-on lire dans l’Encyclopédie canadienne.

«Quand ils arrivaient au Canada, c’est vrai qu’ils étaient libres. Ils n’étaient plus des esclaves, précise Amadou Ba. Mais ils ne vivaient pas la liberté. Ils étaient racisés, les écoles étaient [ségréguées], ils n’avaient pas le droit d’aller dans les mêmes hôtels que les autres Canadiens, etc.»

D’ailleurs, la dernière école ségréguée en Ontario a fermé ses portes en 1965 et, en Nouvelle-Écosse, seulement en 1983.

L’Histoire des communautés noires, grande absente des curriculums

«Dans les faits, la majorité des programmes scolaires actuels passent sous silence le racisme envers les personnes noires au Canada, même s’ils s’attardent quelque peu sur les expériences des personnes noires aux États-Unis», peut-on lire dans un rapport de la Commission canadienne pour l’UNESCO (CCUNESCO) publié en aout dernier.

Portrait d’un garçon afro-canadien, 1840-1846. 

Source : Bibliothèque et Archives Canada/Viscountess Falkland Album/e011185574

Par exemple, «les Canadiens savent, qu’il y a eu [de l’esclavage] aux États-Unis, ajoute Amadou Ba, consterné. Ils savent qu’il y en a eu ailleurs, mais ils ignorent qu’il y en a eu dans leur pays».

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Le rapport soutient que les programmes d’études secondaires et primaires «pourraient offrir une représentation plus complète et plus significative» des contributions des Canadiens et Canadiennes d’ascendance africaine.

Le rapport constate que «[l]orsque les enseignantes et enseignants célèbrent le Mois de l’histoire des Noirs en février, le contenu est trop souvent présenté comme distinct et à part de l’histoire du Canada – comme quelque chose à souligner durant le Mois de l’histoire des Noirs, mais qui reste en marge du programme le reste de l’année».

Le rapport intitulé Les communautés noires et l’éducation publique au Canada : Analyse des programmes primaires et secondaires en sciences sociales examine les documents pédagogiques publiés et accessibles pour l’ensemble des provinces et des territoires.

Il est à noter que seuls des documents en anglais ont servi à l’étude. Selon le rapport, «dans la plupart des provinces et territoires, les programmes sont très semblables dans les deux langues».

Selon le rapport, le personnel enseignant reçoit les documents pédagogiques des provinces et des territoires et peut adapter les leçons à sa guise.

Cependant, la majorité du corps enseignant n’a pas appris cette partie de l’histoire canadienne à l’école, à l’université ou dans un programme de formation à l’enseignement.

«[L]es enseignantes et enseignants sont le fruit d’un système d’éducation qui a depuis longtemps ignoré l’histoire des personnes noires. C’est donc dire qu’elles et ils manquent de connaissances et d’aisance pour parler du sujet», peut-on lire dans le rapport.

Une histoire mal représentée

Certaines parties d’histoire qu’on retrouve dans des programmes scolaires sont aussi mal représentées, selon Natasha Henry-Dixon, professeure adjointe d’histoire afro-canadienne au Département d’histoire à l’Université York, en Ontario.

«L’éducation a traditionnellement été encadrée autour de récits particuliers de la colonisation européenne, de la contribution européenne à l’exclusion de groupes particuliers», avance Natasha Henry-Dixon.

Bien qu’elle reconnaisse qu’il existe des initiatives ponctuelles pour encadrer l’enseignement de l’histoire des Noirs, Natasha Henry-Dixon croit qu’il reste encore du travail important à faire en ce sens. 

Photo : Courtoisie

Même si elle reconnait qu’il y a eu des progrès pour pallier quelques lacunes, «certains récits, en lien avec la communauté noire et son histoire, continuent d’être relégués aux marges du récit traditionnel», déplore-t-elle.

Pour Natasha Henry-Dixon, lorsqu’on parle de l’expérience des personnes afrodescendantes au Canada, on met l’accent sur la «bienveillance des Blancs et pas nécessairement sur le fait que les Noirs sont des acteurs historiques».

Même son de cloche chez Amadou Ba, aussi auteur du livre L’histoire oubliée de la contribution des esclaves et soldats noirs à l’édification du Canada (1604-1945).

Selon lui, même si les membres des communautés noires ont apporté beaucoup à l’économie, à la culture et à la société canadienne, «ces gens sont représentés très négativement dans l’histoire du Canada».

«On doit changer les institutions»

«On est dans un système de racisme et colonisation. Si on veut changer, on doit changer les institutions, soutient M. Ba, […, car] les institutions ne représentent pas la démographie du pays.»

De son côté, Natasha Henry-Dixon croit qu’il manque une motivation morale et politique afin de créer un vrai changement. «Nous voyons un financement de projets ponctuels dans différents domaines, mais les changements structurels de politique font toujours défaut.»

Selon le rapport de la CCUNESCO, «un programme plus complet peut être un véhicule de cohésion sociale et de respect des différences raciales, puisqu’il prépare les apprenantes et apprenants à évoluer dans une société et un monde diversifiés sur le plan racial et culturel».

«Une ville accessible à tous n’existe pas au Canada», tranche Heather Walkus, présidente nationale du Conseil des Canadiens avec déficiences.

Victoria Fast souligne le manque de connaissances sur le handicap et les obstacles auxquels sont confrontées les personnes handicapées en ville. 

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Environ huit-millions de Canadiens vivent avec un handicap, soit 27 % des individus de 15 ans et plus, selon les données de 2022 de Statistique Canada.

Ces chiffres ont doublé en dix ans et «vont continuer à augmenter en raison du vieillissement de la population», prévient Victoria Fast, professeure agrégée au Département de géographie de l’Université de Calgary, en Alberta.

Cette population subit chaque jour des problèmes pour se déplacer en ville. «Un banal trajet peut devenir mission impossible. Nous sommes toujours exclus alors que l’accessibilité est un droit humain fondamental», appuie Heather Walkus.

«Nous ne sommes pas capables de participer pleinement à la vie de la société, à cause de l’aménagement urbain qui n’a pas été conçu pour les personnes handicapées», poursuit-elle.

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Contraintes patrimoniales

Si la situation varie d’une ville à l’autre, «toutes les municipalités ont encore beaucoup à faire pour être pleinement accessibles, quelles que soient leur taille et la grosseur de leur population», affirme Victoria Fast.

Melissa Myers explique que les protections patrimoniales peuvent freiner l’essor de villes plus accessibles. 

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«L’enjeu problématique, c’est de mettre à jour les infrastructures existantes, c’est toujours compliqué et cher», complète Paula Negron-Poblete, professeure à l’École d’urbanisme et d’architecture de paysage de l’Université de Montréal.

Dans l’est du pays, les nombreux sites patrimoniaux constituent un défi de taille. Heather Walkus explique qu’il est «administrativement et techniquement complexe» d’adapter des édifices vieux de plusieurs siècles.

«Les protections patrimoniales nous limitent à certains égards», confirme Melissa Myers, conseillère en accessibilité pour la municipalité régionale d’Halifax, en Nouvelle-Écosse.

À l’ouest, les bâtiments relativement plus récents sont «plus faciles à faire évoluer», remarque Heather Walkus.

D’un bout à l’autre du pays, les carences des transports en commun sont également nombreuses. À Toronto, seules 13 des 70 stations du réseau de métro, entré en service en 1954, sont accessibles aux personnes qui vivent avec un handicap.

Les écoles doivent revoir leurs plans

L’Université de Calgary a mené l’an dernier la plus grande recherche sur l’accessibilité au Canada. L’étude a porté sur les quartiers d’affaires de Calgary, de Vancouver et d’Ottawa ainsi que sur 17 municipalités rurales albertaines.

Résultat, 53 % des bâtiments cartographiés à Ottawa sont jugés accessibles, contre 48,5 % à Vancouver. Ce pourcentage tombe à 39 % en région rurale et à 35 % à Calgary.

Les édifices les plus faciles d’accès sont liés à la santé, à la finance et ceux qui abritent des magasins de sport et de vêtements.

«Les bibliothèques représentent le summum de l’accessibilité, même dans les petites zones non urbaines», souligne Victoria Fast, coauteure de l’étude.

À l’inverse, les établissements d’enseignement, de la maternelle au postsecondaire, brillent par leur manque d’accessibilité.

Des lois inefficaces

Pressées d’agir, certaines provinces ont adopté des législations spécifiques, obligeant les villes à élaborer des plans d’accessibilités et à mettre en place des comités.

«Les municipalités ont besoin de plus de soutien pratique et financier», défend Stephen O’Brien. 

Photo : Courtoisie

L’Ontario a promulgué la première loi provinciale sur le sujet en 2005. Le Manitoba lui a emboité le pas en 2013, suivi de la Nouvelle-Écosse en 2017, de la Colombie-Britannique en 2021 et de la Saskatchewan en fin d’année dernière. Des discussions sont en cours dans plusieurs autres provinces.

L’Ontario veut devenir totalement accessible d’ici 2025. La Nouvelle-Écosse, qui a le taux de personnes handicapées le plus élevé du pays, d’ici 2030.

Mais ces lois ne constituent pas nécessairement un gage de réussite. Un rapport, publié en décembre 2023, a révélé qu’il était «pratiquement certain» que l’Ontario n’atteindrait pas son objectif.

«Les municipalités ont besoin de plus de soutien pratique et financier de la province», défend Stephen O’Brien, président de l’Association des gestionnaires municipaux, secrétaires et trésoriers de l’Ontario.

En Nouvelle-Écosse, Melissa Myers évoque également des «contraintes budgétaires» et des «priorités municipales antagonistes», qui freinent les ambitions de la stratégie adoptée par la municipalité d’Halifax en 2021.

«Au-delà des lois, il faut que les élus en fassent une priorité politique avec une volonté d’investir beaucoup d’argent, autrement, rien ne bouge», soutient Heather Walkus.

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Le Canada en villes

Mieux comprendre les réalités des municipalités canadiennes

Méconnaissance du handicap

Aux yeux de Victoria Fast, ce sont les «champions locaux» qui feront la différence : «Si quelqu’un avec un handicap arrive à mobiliser la communauté, les villes repenseront vraiment leur environnement.»

«Nous ne sommes pas capables de participer pleinement à la vie de la société, à cause de l’aménagement urbain qui n’a pas été conçu pour les personnes handicapées», affirme Heather Walkus. 

Photo : Courtoisie

Selon les experts interrogés, la méconnaissance du handicap et des obstacles auxquels sont confrontées les personnes à mobilité réduite expliquent en partie l’inadaptation des villes canadiennes.

«On réduit souvent ces personnes aux utilisateurs de fauteuil roulant. On oublie toutes celles ayant une déficience auditive, visuelle, cognitive ou mentale, déplore Victoria Fast. Pourtant, elles ont aussi besoin d’aménagements spécifiques si elles veulent se déplacer librement.»

Heather Walkus pointe de son côté le manque de formation des planificateurs et des gestionnaires municipaux. «Ils ne savent pas reconnaitre un environnement urbain inadapté et encore moins identifier les endroits et les infrastructures à réaménager en priorité», regrette-t-elle.

Le fédéral entre en action

En 2019, Ottawa a adopté une loi sur l’accessibilité qui s’applique aux institutions fédérales et aux entreprises liées, comme les banques ou les hôpitaux.

L’objectif est d’éliminer d’ici 2040 les obstacles pour les personnes handicapées dans les secteurs de l’emploi, du transport et du logement.

«Le texte régit les questions qui relèvent de la compétence fédérale, ce qui n’est pas grand-chose. Mais, dans certaines provinces, c’est tout de même la première législation explicite sur le sujet», observe la géographe Victoria Fast.

Néanmoins, selon Heather Walkus, l’objectif affiché est encore loin d’être atteint : «Les autorités doivent investir plus d’argent si elles veulent réussir.»

Écouter les personnes concernées

«Les petites municipalités n’ont souvent qu’une poignée d’employés portant plusieurs casquettes», rejoint Stephen O’Brien en Ontario.

Selon Paula Negron-Poblete, rendre accessibles les infrastructures existantes est toujours compliqué et couteux. 

Photo : Courtoisie

Heather Walkus appelle les municipalités à associer davantage les personnes handicapées à toutes les facettes de leur travail, de la conception initiale des projets à la prise de décision finale.

Elle salue à cet égard la multiplication des comités consultatifs sur l’accessibilité. Composés de citoyens handicapés, ils passent au crible tous les plans d’aménagement. «Nous pouvons enfin nous assoir avec les maires, les élus, les ingénieurs pour faire valoir notre point de vue», se félicite la responsable.

Si les villes tardent à se mettre aux normes, les spécialistes sont convaincus qu’elles peuvent faire la différence.

Paula Negron-Poblete rappelle également que s’adapter aux personnes en situation de handicap peut bénéficier à d’autres publics, comme les ainés ou les parents avec poussette.

Le Canada en villes

La série Le Canada en villes propose un regard sur les succès et les défis des municipalités canadiennes.

Plus sur la francophonie

Mercredi matin, la ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social, Jenna Sudds, a annoncé que son gouvernement acceptait l’amendement au projet de Loi sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants au Canada (C-35), proposé par le Sénat en décembre dernier.

Le gouvernement libéral accepte la motion dans le projet de loi C-35 qui garantit le financement à long terme des garderies francophones en situation minoritaire. 

Photo : Chantallya Louis – Francopresse

Jusqu’à cette semaine, le gouvernement de Justin Trudeau refusait de dire s’il appuyait ou rejetait la proposition du Sénat, ce qui avait créé bien des inquiétudes auprès des communautés francophones.

«C’est vraiment une avancée très importante que le gouvernement confirme qu’il acceptera l’amendement, a affirmé la présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA), Liane Roy. Pour nous par contre, il est trop tôt pour crier victoire, parce que le processus législatif n’est pas terminé.»

Du côté de l’opposition, le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique (NPD) ont confirmé leur soutien auprès des journalistes, ce qui devrait donner la majorité à la Chambre des communes lors du vote sur le projet de loi amendé.

Assurance-médicaments, politique en matière d’identité de genre et sanctions contre le Hamas

Mercredi, le chef du NPD, Jagmeet Singh, a annoncé que son parti veut entendre une annonce du gouvernement libéral sur leur programme d’assurance médicaments universel d’ici le 1er mars, sans quoi l’entente avec le Parti libéral pourrait être brisée.

Le gouvernement de Justin Trudeau avait accepté d’adopter d’ici la fin de l’année 2023 une législation en la matière. Les deux partis avaient ensuite convenu d’une nouvelle date butoir, le 1er mars 2024.

C’est quelque chose que nous prenons très au sérieux. Nous n’allons pas le prolonger davantage, nous sommes convaincus que l’assurance médicaments doit être mise en place, nous avons besoin d’une législation et de mesures supplémentaires.

— Jagmeet Singh

De son côté, le ministre de la Santé, Mark Holland, a soutenu qu’un programme universel comme celui-ci implique un facteur financier important.

«Nous ne sommes pas dans une période où nous pouvons simplement nous ouvrir et dépenser une énorme quantité d’argent, a-t-il ajouté aux journalistes. Il y a donc des points de divergence sur des questions comme celle-ci. Mais comme je l’ai dit, nous y travaillons.»

En 2022, le Parti libéral avait conclu une entente avec le NPD afin de demeurer au pouvoir en échange d’avancées sur des programmes tels que l’assurance dentaire et l’assurance médicaments universelle.

Randy Boissonnault s’est montré préoccupé par les décisions politiques de la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith.

Photo : Chantallya Louis – Francopresse

Le ministre de l’Emploi, du Développement de la main-d’œuvre et des Langues officielles, également député d’Edmonton-Centre, en Alberta, s’est présenté lundi à un point de presse pour dénoncer la politique de la première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, en matière d’identité de genre.

La semaine dernière, cette dernière a annoncé la mise en place de politiques qui, entre autres, interdisent les traitements hormonaux et les chirurgies affirmatives pour les enfants de moins de 17 ans.

«Je suis clair ici aujourd’hui avec vous tous : nous devons tuer ce projet de loi avant qu’il n’arrive à la Chambre des députés», a lancé Randy Boissonnault lors d’un point de presse.

Danielle Smith a par ailleurs ouvert cette semaine un bureau dans la capitale nationale. «L’ambassade», inaugurée lundi, est là pour faire avancer «les priorités de l’Alberta sur le terrain, à Ottawa», a-t-elle déclaré lors d’une conférence de presse.

En vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales (LMES), Mélanie Joly, la ministre des Affaires étrangères, a annoncé mardi des sanctions supplémentaires contre des dirigeants du Hamas et du Djihad islamique palestinien impliqués dans l’attaque lancée contre Israël le 7 octobre.

«Ça fait maintenant quatre mois que les attaques terroristes du 7 octobre ont eu lieu, a lancé la ministre en mêlée de presse. Alors, c’est pourquoi, en tant qu’organisation terroriste, le Hamas doit absolument être tenu responsable et c’est pourquoi nous mettons en place ces sanctions.»

«Le Canada prend des mesures décisives pour limiter la capacité du Hamas à recueillir et à utiliser des fonds pour mener de nouvelles attaques contre Israël, explique Affaires mondiales Canada dans un communiqué de presse.

Selon le même communiqué, c’est la première fois que le Canada invoque le Règlement de la (LMES) contre un «acteur non étatique».

Suppressions de postes chez Bell et 28 millions pour lutter contre le vol de voiture

Bell Canada Entreprises (BCE) annonce la suppression de 4800 emplois, soit 9 % de ses effectifs. Il s’agirait de «la plus grande initiative de restructuration de l’effectif en près de 30 ans», indique la compagnie dans un communiqué.

Selon BCE, cette restructuration permettra d’économiser entre 150 à 200 millions de dollars par année.

Bell Média prévoit en outre de céder 45 de ses 103 stations de radio régionales, principalement situées au Québec, en Ontario, en Atlantique et en Colombie-Britannique.

«Malgré que Bell Canada a eu des allègements de 40 millions de dollars pour les aider à faire leurs bulletins de nouvelles de la part du CRTC, des allègements règlementaires de leurs obligations, ils choisissent aujourd’hui de couper dans les bulletins de nouvelles et de vendre 45 stations de radio. Ce qui est extrêmement décevant», déplore la ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, en mêlée de presse le jour même.

Je réagis à cette triste nouvelle, a ajouté la ministre. Je dis que nous avons déjà donné et fait beaucoup de travail pour aider ces sociétés de radiodiffusion. […] Nous espérons que ces grandes entreprises tiendront leur part du marché.

— Pascale St-Onge

Cette nouvelle survient moins de deux mois après l’entrée en vigueur de la Loi sur les nouvelles en ligne, qui oblige la compagnie Google à verser 100 millions de dollars canadiens par année en compensation financière aux médias canadiens pour la diffusion de leurs nouvelles en ligne.

Le ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, a annoncé une enveloppe de 28 millions de dollars pour lutter contre l’exportation de véhicules volés.

«Grâce à ce nouveau financement, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) aura davantage de capacités de détecter et de fouiller les conteneurs renfermant des véhicules volés», peut-on lire dans le communiqué.

Selon le ministère, le vol de véhicules est un enjeu qui prend de l’ampleur dans l’ensemble du pays, principalement en Ontario et au Québec, et qui peut impliquer le crime organisé.

Par ailleurs, Ottawa a accueilli jeudi des représentants des différents paliers de gouvernements, de l’industrie et des forces de l’ordre, dans le cadre du Sommet national pour lutter contre le vol de véhicules.