le Mardi 16 septembre 2025

Ironiquement, les médias de langue minoritaire sont peut-être mieux servis par la décision de Google d’utiliser l’exemption à la Loi sur les nouvelles en ligne. Parce que c’est le seul endroit dans la Loi où les parlementaires ont pensé aux médias des minorités linguistiques.

La Loi sur les nouvelles en ligne prévoit en effet la demande d’une exemption. L’article 11 donne le droit à un «intermédiaire de nouvelles numériques» – comme un moteur de recherche ou un réseau social – de demander une exemption à la Loi s’il respecte certaines conditions.

L’une de ces conditions stipule qu’il doit avoir conclu des accords qui «assurent qu’une partie importante des médias d’information des communautés de langue officielle en situation minoritaire en bénéficie et [que les accords] contribuent à [la] viabilité [de ces médias]». Très gentil… à moitié.

Loi sur les nouvelles en lignes

Le projet de loi C-18, devenu la Loi sur les nouvelles en ligne, contraint les entreprises qui servent d’intermédiaire entre les producteurs de contenu en ligne – comme les médias – et les lecteurs ou auditeurs à négocier des compensations financières avec les producteurs.

Afin de ne pas être assujetti à cette Loi et de ne pas devoir indemniser les médias d’information pour leur contenu, Meta bloque depuis aout 2023 les nouvelles sur Facebook et Instagram au Canada.

Pour éviter de négocier des accords d’indemnisation avec des dizaines d’entités, Google demande une exemption à la Loi et, en échange, l’entreprise remettra 100 millions de dollars à un seul groupe, qui sera ensuite responsable de redistribuer cette somme aux médias.

Labyrinthe juridique

Le critère de protection des médias de langue minoritaire figure dans le processus d’exemption qu’invoque Google – et certainement créé à la demande de l’entreprise –, mais nulle part ailleurs dans le texte de la Loi.

Puisqu’ils ne sont pas expressément mentionnés dans les critères d’admissibilité de la Loi elle-même, très peu de médias de langue minoritaire auront la possibilité de négocier une entente avec les plateformes en ligne, notamment parce qu’ils doivent répondre à un autre critère, soit celui d’employer au moins deux journalistes.

La plupart des journaux et radios communautaires en milieu minoritaire ne comptent pas deux journalistes.

Selon le Consortium des médias communautaires de langues officielles en situation minoritaire, à l’heure actuelle, 96 % des médias qu’il représente ne sont pas admissibles à une indemnisation selon la Loi. Cette proportion pourrait peut-être descendre à 85 % si l’on compte les journalistes recrutés à l’aide de l’Initiative de journalisme local (IJL).

À lire : Entente Google : les médias de langues minoritaires sur leurs gardes

Pourtant, les médias autochtones sont mentionnés explicitement dans la section sur l’admissibilité de la Loi. Ils ne sont pas tenus d’avoir deux journalistes.

Pourquoi des médias qui produisent du «contenu de nouvelles d’intérêt public qui est axé principalement sur des questions d’intérêt général et qui rend compte d’évènements actuels, y compris la couverture des institutions et processus démocratiques» dans une langue officielle en situation minoritaire n’ont-ils pas droit au même statut distinct?

Sont-ils protégés par la Loi sur les langues officielles? Le temps que la question fasse l’objet d’un débat, il sera trop tard.

En d’autres mots, si Google n’avait pas demandé d’exemption, la Loi ne forcerait pas le géant américain à discuter avec les médias francophones en milieu minoritaire, ou les entités qui les représentent, s’ils ne respectent pas tous les autres critères d’admissibilité.

Il fait noir dans le tunnel

Malgré la précision dans le processus d’exemption, les médias de langue minoritaire ne savent pas encore s’ils seront inclus dans la distribution des 100 millions de dollars de Google en raison des critères d’admissibilité.

Les médias communautaires de langue minoritaire attendent de voir s’ils auront une place au sein du Collectif canadien de journalisme (CCJ), l’organisation choisie par Google pour distribuer l’argent. 

Le CCJ sera fort probablement sympathique à ces médias, puisqu’il a été créé par des petits médias et des médias communautaires.

L’admissibilité des médias de langue minoritaire à la somme promise par Google reste tout de même un mystère. Est-ce que l’obligation d’avoir deux journalistes s’applique ou non à l’exemption? C’est une exemption à la Loi après tout! Sinon, est-ce que le CCJ sera plus souple dans l’interprétation de la Loi?

Il est certain que l’argent de Google ne règlera pas tous les problèmes des médias. De fait, Patrimoine canadien s’attend à ce que les petits médias reçoivent environ 17 000 $ par journaliste. C’est loin de couvrir un salaire.

De plus, si aucun éclaircissement n’est fait dans la loi ou le règlement, les mêmes questions pourraient revenir dans cinq ans, lorsque l’entente entre Google et le CCJ viendra à échéance.

À lire : Les angles morts de l’Entente Google

Impossible aussi de savoir quels autres défis pendent au bout du nez des médias canadiens.

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications poursuit ses audiences publiques pour la création du cadre règlementaire de l’application de la Loi.

Il doit encore déterminer quels autres «intermédiaires de nouvelles numériques» pourraient être assujettis à la Loi. Est-ce que ces derniers demanderont une exemption comme Google ou est-ce qu’ils couperont l’accès aux médias d’information au Canada, comme l’a fait Meta?

En attente de réponses, les médias de langue minoritaire retiennent leur souffle.

Ils suffoquent.

Au début d’octobre, j’ai eu l’occasion de me rendre en Louisiane pour aider la jeune équipe du Louisianais à lancer son média numérique francophone. Les membres de l’équipe du journal se donnent le mandat d’écrire en français louisianais – et ils y tiennent – pour assurer la pérennité de leur langue et de leur culture.

Ils vont même plus loin en faisant paraitre certains articles en créole louisianais. L’article Ki çé Kouri-Vini? est le premier texte publié entièrement dans cette langue sur le site du journal.

L’article s’amorce ainsi : «Ent 1791 é 1815, dê mil zimmigran ki sòr ansyin kolonni-la de Sin-Doming, ça yé pèl Ayiti ojòddi, té rivé endan Lalwizyàn.» Vous comme moi, en lisant à voix haute, pouvons comprendre qu’entre 1791 et 1815, deux-mille immigrants de l’ancienne colonie de Saint-Domingue, qui s’appelle Haïti aujourd’hui, sont arrivés en Louisiane.

Choisir de publier en français et créole louisianais est un geste d’affirmation clairement indiqué dans la mission du journal :

«Le français louisianais est un dialecte régional du français, porteur d’une culture forte et rassembleuse, mais aussi immergé dans une mer anglophone qui menace sa survie. […] Le Louisianais met également en valeur le créole louisianais, une de nos langues patrimoniales, en couvrant des histoires sur la communauté créolophone ou en rédigeant des articles en créole louisianais.»

À lire aussi : Aux États-Unis, la francophonie n’a pas dit son dernier mot

Symbole d’une résistance

La réalisation de ce projet montre la résilience, ou plutôt la résistance, du peuple cajun au cours du dernier siècle.

En 1812, lors de son annexion aux États-Unis, la Louisiane était le seul État américain où l’anglais n’était pas la langue de la majorité. Le français est même demeuré langue majoritaire jusqu’en 1940.

Mais, en 1921, la nouvelle constitution de la Louisiane stipulait que l’anglais devenait la seule langue d’usage enseignée à l’école publique, interdisant ainsi l’enseignement du français, du créole et des langues autochtones. C’était le début d’une lente assimilation.

Cent ans plus tard, malgré ces tentatives d’assimilation, la Louisiane compte environ 200 000 personnes qui parlent le français ou le créole.

Aujourd’hui, les Franco-Louisianais ont leur journal, mais ils ont aussi leur chaine de télévision, Télé-Louisiane, et ils ont accès à des programmes en français à l’Université de la Louisiane.

Cent ans plus tard, des parents font des pieds et des mains pour fonder des écoles d’immersion française où l’on y enseigne le français de la Louisiane. Aujourd’hui, il y aurait 5 000 enfants qui apprennent la langue de leurs ancêtres.

Tout ça existe parce que des gens ont le désir profond de pouvoir vivre dans leur langue et leur culture et parce qu’ils se donnent les moyens de le faire.

À lire aussi : il y a 100 ans, le français subissait l’omerta en Louisiane

Parler français sans s’excuser

Au-delà des institutions officielles, le français se vit aussi en communauté et sans jugement.

Pendant mon court séjour à Lafayette, j’ai rencontré des gens natifs de la région qui renouent avec la langue de leurs parents ou de leurs grands-parents. Au cours de ces conversations, personne ne s’est excusé de ne pas parler «un français sans faute».

Ils ont cette fierté de pouvoir parler une langue qui trouve racine dans leur histoire, dans leur identité. Ils sont conscients qu’elle a évolué dans une direction bien à elle, qu’elle est différente du français normatif. Mais qu’importe, ils vont de l’avant et parlent français, point final.

On est loin du «sorry, my French is not good enough» qui s’entend trop souvent au Canada.

L’identité franco-louisianaise ne passe pas que par la langue. En fait, savoir s’exprimer en français n’est même pas un prérequis. L’identité s’exprime par la culture, la musique et la cuisine ; elle passe par la danse, le zydeco et le gombo. C’est là la recette secrète pour gagner le cœur des gens.

Contrairement à ce que nous vivons ici, le français de la Louisiane n’est pas politisé. Il ne divise pas. La langue et la culture se vivent par choix et surtout avec plaisir.

Nous devons nous inspirer de cette fierté et ignorer le jugement d’autrui, cesser de nous empêcher de reconnecter avec qui nous sommes, et nous exprimer sans nous excuser.

* Les segments de ce texte produits avec l’assistance d’un robot conversationnel sont clairement identifiés.

Fonction d’autocorrection de notre téléphone cellulaire, application de traduction automatique d’un texte en ligne, assistant virtuel personnel comme Alexa prêt à nous faire jouer notre chanson préférée. Nous utilisons tous l’intelligence artificielle (IA) dans notre quotidien, parfois même sans le savoir.

L’IA est utile, elle améliore notre efficacité. Elle semble aussi nous rendre plus «intelligents» en nous permettant d’accéder à des connaissances et des méthodes de travail qui étaient réservées jusqu’alors à des experts. Il suffit d’une recherche rapide pour comprendre que le métier de journaliste est l’un des plus menacés par l’arrivée de l’IA, plus précisément, l’IA générative.

L’IA dite «traditionnelle» permet d’automatiser des tâches ou d’exécuter des opérations comme la traduction ou des calculs complexes. L’IA générative, comme son nom l’indique, génère des contenus à partir de gigantesques bases de données. Elle a la capacité de créer notamment de l’audio, des images, des vidéos et des textes de toutes sortes, dont des articles journalistiques. Ses capacités sont immenses.

À lire aussi : L’intelligence artificielle, une odyssée vers l’inconnu

Distinguer le vrai du faux

Heureusement, les médias dignes de confiance sont plutôt prudents dans l’intégration de l’IA générative dans leur salle de rédaction.

À titre d’exemple, le Los Angeles Times utilise depuis quelques années le robot Quakebot pour rédiger des articles dans les minutes suivant un tremblement de terre. Le texte est ensuite soumis à un secrétaire de rédaction – en chair et en os –, qui jugera si l’article mérite d’être publié. Dans l’affirmative, par souci de transparence, le journal y ajoutera une mention précisant qu’il a été généré par une intelligence artificielle.

Malheureusement, de «prétendus médias» utilisent l’IA générative pour produire des articles d’apparence journalistique. Ces textes comportent une fausse signature et sont publiés sans vérification des faits.

Certains médias ont même l’audace de publier un «guide de déontologie» et une «politique d’information» sans déclarer qu’aucun être humain n’assure la validité des données derrière la machine. L’audience n’y voit que du feu.

Et pourquoi des médias agissent-ils ainsi? Simplement pour empocher des revenus publicitaires.

Ces producteurs malveillants de contenus réussissent à se faufiler dans les moteurs de recherche, sur les réseaux sociaux et participent activement à la mésinformation et à la désinformation.

En plus du contenu écrit, il ne faut pas oublier que des systèmes d’IA générative réussissent à produire de l’hypertrucage [deepfake], c’est-à-dire une création ou une altération numérique de contenu visuel, audio ou vidéo usurpant l’identité d’une personne.

En février dernier, le premier ministre du Canada a d’ailleurs fait l’objet d’un hypertrucage dans une fausse entrevue avec l’animateur américain Joe Rogan.

À lire aussi : Quelle place pour la francophonie canadienne dans l’intelligence artificielle?

Occasion à saisir avec prudence

L’intelligence artificielle offre une tonne d’outils qui facilitent la vie des journalistes. Que ce soit des outils de transcription d’entrevues, de traduction de documents, de compilation de statistiques et j’en passe. Somme toute, des outils qui permettent de gagner du temps et d’automatiser les tâches peu stimulantes.

Mais l’IA ne peut pas remplacer, du moins encore, la sensibilité du journaliste. Elle ne permet pas d’interpréter un silence dans une entrevue ou encore d’aller chercher l’émotion chez un interlocuteur. Elle ne parvient pas non plus à s’adapter à une audience cible et ne tient pas compte du contexte culturel comme le font nos journaux locaux par exemple.

Par curiosité, j’ai demandé au robot conversationnel Chat GPT (consultez la conversation complète) de déterminer les risques de l’utilisation de l’IA générative en journalisme. Il est arrivé à la liste suivante :

  1. Diffusion de fausses informations
  2. Perte de confiance [envers les médias]
  3. Biais algorithmique (reproduction de préjugés)
  4. Remplacement des journalistes
  5. Perte de créativité et de perspectives humaines
  6. Utilisation abusive par les gouvernements ou les acteurs malveillants (propagande)
  7. Protection de la vie privée

Une liste plutôt juste.

En fait, le robot conversationnel a repris essentiellement les mêmes points soulevés dans les divers documents publiés sur la question qui se trouvent assurément dans sa base de données.

Chat GPT y va aussi d’une sage mise en garde puisée dans ses multiples sources : «Il est important de noter que les risques associés à l’IA générative dépendent de la manière dont elle est utilisée et règlementée.» Entendons-nous que nous y avions pensé nous aussi.

Le temps est venu pour les médias de mettre la guerre des clics de côté et de travailler avec les élus et les citoyens pour baliser l’utilisation de l’IA en information. Une action qui s’inscrit dans la lutte à la désinformation, qui met à risque plus que jamais nos démocraties.

En aout dernier, des associations et des grands médias de partout dans le monde, ont signé une lettre ouverte réclamant une intervention des États afin de règlementer l’usage de l’IA. Même si les signataires se déclarent en faveur de l’utilisation de l’IA, ils réclament de «protéger le contenu qui alimente les applications d’IA et maintenir la confiance du public dans les médias qui promeuvent les faits et alimentent nos démocraties».

Se sensibiliser pour mieux s’informer

Que nous le voulions ou non, nous sommes tous ensembles dans cette aventure devant l’intelligence artificielle. D’une part, les gouvernements ont la responsabilité de légiférer, pour assurer une utilisation à bon escient de l’IA, notamment en information.

D’autre part, les médias professionnels, déjà confrontés à cette réalité, doivent s’imposer des balises d’utilisation des nouvelles technologies et mettre à jour leur politique d’information et leurs lignes directrices en matière de transparence, d’éthique et de déontologie pour maintenir le lien de confiance avec leur audience. Un média se doit d’être transparent dans tous les aspects de son travail.

En tant que consommateurs d’information, votre jugement importe.

Dans un monde où l’information nous parvient par algorithmes, par processus de référencement et par popularité de l’émetteur, vous êtes l’ultime rempart contre la désinformation.

Pour ce faire, il faut se sensibiliser au travail journalistique et il faut faire de la sensibilisation. Une bonne compréhension citoyenne du journalisme et des médias solidifiera nos démocraties.

«Abonnez-vous à notre infolettre!» Voilà le message que placardent les médias canadiens partout sur les réseaux sociaux depuis quelques semaines. Leur objectif est de continuer à vous rejoindre quand les géants du Web auront retiré votre accès aux nouvelles canadiennes.

Meta a d’ailleurs parti le bal le 1er août en commençant à retirer les nouvelles canadiennes sur ses plateformes Facebook et Instagram. Un acte contre l’adoption de la Loi concernant les plateformes de communication en ligne rendant disponible du contenu de nouvelles aux personnes se trouvant au Canada, qui oblige les géants du Web à payer les médias canadiens pour les contenus qu’ils partagent. 

Google a aussi brandi la menace et a annoncé le retrait des nouvelles provenant de médias canadiens lorsque la loi entrera en vigueur, soit en décembre 2023. 

Le désaccord entre les géants du Web et le gouvernement canadien nous force, en tant que citoyen, à réfléchir à la transformation lente mais constante de nos habitudes de consommation de l’information au cours des dernières décennies. 

En une génération seulement, nous sommes devenus des consommateurs d’information passifs.

L’humain est une créature d’habitude

Nos habitudes de consommation de l’information ont changé de façon radicale. Quand j’étais plus jeune, le journal se lisait encore strictement sur papier et le téléjournal n’était qu’à la télévision. Puis est venue la révolution numérique qui a bouleversé nos habitudes.

Racontons l’histoire en accéléré : fin des années 1990, Internet arrive dans nos foyers, rapidement les premiers sites Web des médias apparaissent. En 2004, nous devenons amis sur Facebook et en 2010, tout le monde s’informe en ligne et sur les réseaux sociaux. C’est moderne, c’est révolutionnaire, c’est facile. Entre les photos du petit dernier de la voisine et le gâteau au chocolat du beau-frère, nous avons le sentiment d’avoir accès à des nouvelles. 

L’information venait à nous sans effort, nous nous sentions mieux informés. Mais tout cela a eu un effet pervers et nous sommes devenus un peu plus paresseux. 

Aujourd’hui, la plupart des journaux sont disponibles en ligne. Tristement, ils sont même de plus en plus nombreux à ne plus imprimer. Et pour ce qui est du téléjournal, nous pouvons le regarder au moment qui nous convient le mieux.

Champ libre aux fausses nouvelles?

Selon le plus récent Digital News report, 48 % des francophones de 35 ans et plus et 39 % des 18-34 ans ont utilisé Facebook au Canada pour s’informer dans la semaine précédant l’enquête. YouTube et Instagram figurent aussi parmi les sources importantes d’information chez les 18-34 ans.

Au fil des années, les médias ont investi temps et argent pour que leurs nouvelles soient mieux classées dans les recherches sur le Web et pour être plus visibles sur les réseaux sociaux.

Le retrait des nouvelles canadiennes sur Meta et Google ne se fera pas sans heurts. Les temps seront difficiles ; pour les médias certes, mais surtout pour les citoyens. 

Que verrons-nous à la place des nouvelles des médias canadiens sur Meta et sur Google? Des nouvelles américaines? Des commentaires provenant de soi-disant journalistes? Des fausses nouvelles, du moins, plus que d’habitude?

C’est inquiétant!

Les intentions du gouvernement étaient bonnes derrière l’adoption de la Loi sur les nouvelles en ligne. Vouloir redonner des revenus publicitaires aux médias canadiens est une ambition louable. Mais la réalité à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui est loin de rendre service à la presse et aux citoyens.

À moins que le fédéral ne réussisse à élaborer des règlements qui conviendront aux géants du Web, ce qui semble peu probable, la disparition des nouvelles canadiennes sur Meta et Google aura des répercussions importantes sur la société canadienne. Du moins, le temps que nous reprenions de saines habitudes d’information.

Nous avons tenu pour acquis, voire surestimé, le rôle du Web dans notre consommation de l’information. Maintenant que le risque de perdre ces sources est réel, il est temps que tout le monde prenne ses responsabilités. 

Le gouvernement doit faire sa part. Idéalement, trouver un terrain d’entente avec les géants du Web. Mais surtout, il devra donner davantage de moyens aux médias pour leur permettre d’améliorer la diffusion et la découvrabilité de leurs informations. 

Les médias, même si les temps risquent d’être difficiles, devront persévérer et faire ce qu’ils savent faire de mieux, informer.

Et nous, nous avons le devoir de ne plus être paresseux. Notre société mérite d’avoir des citoyens informés pour protéger sa démocratie.

De toute manière, Facebook n’a jamais été une bonne façon de s’informer.

Abonnez-vous donc à vos journaux !  

La pauvreté d’information et le désert médiatique se définissent par l’absence de médias qui couvrent les institutions communautaires ou la faible couverture journalistique des divers enjeux qui touchent une communauté ou une région.

Les institutions communautaires renvoient notamment aux conseils municipaux, aux conseils scolaires, aux établissements d’enseignement ou aux associations qui représentent divers intérêts pour les collectivités.

Les médias locaux rapportent bien sûr les changements d’horaire de la collecte des ordures, l’augmentation des impôts fonciers ou le changement de nom d’une école. Ce sont là des informations d’intérêt public qui ont une incidence directe sur le quotidien d’une collectivité.

Mais les médias locaux ont aussi un important rôle de chien de garde, un rôle trop souvent mésestimé. Ils surveillent les décisions et actions des institutions de proximité pour veiller à ce qu’elles s’acquittent en bonne et due forme de leur devoir de transparence et de leur obligation de rendre des comptes aux citoyens ou aux administrations gouvernementales.

C’est souvent grâce au travail de journalistes locaux que la population découvre, par exemple, que la personne à la tête de la municipalité a accordé un contrat faramineux à un membre de sa famille.

Sans la présence de journalistes sur le terrain, ce genre de situation peut passer sous silence et laisser une trop grande liberté d’action aux élus.

Moins de médias, moins de couverture journalistique

En tant que francophones vivant en contexte minoritaire, nous nous retrouvons souvent dans une zone de pauvreté de nouvelles ou dans un désert médiatique.

Pourquoi? Les médias francophones en milieu minoritaire sont moins nombreux que leurs contreparties anglophones. Aussi, ils ont souvent moins de ressources ; c’est une réalité avec laquelle même Radio-Canada doit composer.

Et, c’est un secret de Polichinelle que le francophone en contexte minoritaire est généralement bilingue et s’abreuve aussi d’informations en anglais.

La couverture des institutions locales est d’ailleurs souvent assurée par les médias anglophones, vu qu’ils sont plus nombreux. En revanche, la perspective journalistique francophone risque de passer sous le tapis.

Par exemple, s’il est question d’octroyer des fonds municipaux à une activité destinée aux francophones, il est probable que le journaliste d’un média anglophone ne traite pas de la nouvelle parce qu’elle ne s’adresse pas à la majorité de son lectorat. Voilà à quoi peut ressembler la pauvreté de nouvelles.

Comprenons-nous bien, ce n’est pas par manque de volonté de la part de votre journal ou de votre radio s’il y a des zones ou des thèmes qui ne sont pas couverts. Tout est une question de ressources humaines et financières.

Les journalistes locaux sont souvent des hommes-orchestres et des femmes-orchestres. En plus de produire des textes journalistiques – ce qui n’est déjà pas une mince affaire  –, ils doivent souvent assumer d’autres tâches, comme la mise en ligne des articles, les publications dans les médias sociaux et la parution de l’infolettre.

Pour accomplir toutes ces tâches, les journalistes doivent parfois sacrifier la couverture de certains évènements. Après tout, il n’y a que 24 heures dans une journée… même pour les journalistes les plus dévoués.

Les citoyens font partie de la solution

L’une des clés du succès en journalisme est d’avoir un réseau de contacts. Ces personnes-ressources jouent souvent un rôle officiel auprès d’une institution. Elles permettent au journaliste de confirmer des informations ou de faire le point sur divers dossiers.

Cependant, dans le respect de leurs compétences, ces personnes livrent rarement des informations en dehors du discours officiel de l’institution qu’elles représentent.

C’est ici que la population entre en jeu. L’information ne se fait pas à sens unique, c’est-à-dire du média vers le citoyen. Le citoyen est un observateur important de l’actualité locale et prête mainforte aux journalistes.

Vous l’ignorez peut-être, mais vous êtes sans doute déjà une sentinelle de l’information locale.

Les journalistes n’ont souvent pas la possibilité de sillonner continuellement toute la région à laquelle ils s’adressent – surtout s’il s’agit d’une province ou d’un territoire en entier – et d’entretenir constamment leurs réseaux de contacts.

Parfois, ils doivent se rabattre sur les réseaux sociaux, comme les divers groupes Facebook, pour savoir ce qui se passe en dehors de leur zone de mobilité.

Il s’agit d’une façon de développer un réseau de contacts et de profiter de vos yeux et de vos oreilles pour savoir ce qui se passe dans votre coin du monde.

Mais l’engagement citoyen dans le monde de l’information peut aller encore plus loin. Vous pouvez prendre le téléphone, envoyer un courriel et communiquer directement avec les journalistes.

Étant des bêtes de nature curieuse, ils vont porter attention à ce que vous avez à raconter. Ils iront enquêter, poser des questions et finiront peut-être par écrire un article. Par un simple geste, vous aurez, à votre façon, participé à la vitalité de l’information locale.

Finalement, vous faites partie de la solution pour assurer la couverture journalistique en français.

Le 15 mars, Francopresse est devenu le premier partenaire francophone au Canada à obtenir la Marque Trust de l’organisme The Trust Project, un consortium international d’organismes de presse qui fait la promotion des normes de transparence en journalisme. L’objectif est de permettre au public de faire des choix éclairés en matière d’information.

En d’autres termes, les politiques d’information de Francopresse ont été évaluées par un comité de pairs confirmant que notre média respecte les huit indicateurs de confiance [en anglais seulement] établis comme des normes mondiales de transparence. Ces indicateurs permettent au public de savoir ce qui se trouve derrière un article d’actualité, une analyse ou une chronique.

Consultez les politiques journalistiques de Francopresse

Vous avez le droit de savoir

Nous avons tous vu apparaitre dans nos circuits, bien malgré nous, des informations non vérifiées, des nouvelles incomplètes ou encore mal interprétées, de la réappropriation de textes ou encore des nouvelles modifiées. À un point tel que même les lecteurs les plus aguerris peuvent se faire prendre au piège.

De manière générale, les journalistes respectent un code de déontologie et les politiques d’information de leur média. Ce qui, depuis fort longtemps, confirme leur engagement envers une offre d’information rigoureuse et de qualité. Mais, toutes ces mesures n’ont pas empêché la désinformation de prendre plus de place.

Il fallait donc prendre les grands moyens!

Vous avez le droit de savoir ce que vous lisez. Est-ce un publireportage, un article, une chronique? Vous avez aussi le droit de savoir ce que ces termes signifient. Vous avez le droit de savoir si vous avez affaire à du contenu d’opinion, du contenu commandité ou du contenu journalistique. Vous avez aussi le droit de savoir qui a écrit une nouvelle, pour quelles raisons un texte a été publié et quelle a été la démarche de production.

Pour lutter contre la désinformation, nous nous devons plus que jamais d’être transparents.

Ceci est un éditorial

Par exemple, en ce moment, vous lisez un éditorial, c’est-à-dire un contenu qui représente le point de vue de Francopresse. En cliquant sur la signature du texte, en haut à gauche, vous avez accès à mon profil où vous y trouverez notamment mon parcours professionnel et mes coordonnées. Depuis le 15 mars 2023, tous les contenus publiés sur Francopresse.ca contiennent ces marques de transparence conformément aux indicateurs de confiance de Trust Project. Pourquoi? Parce que vous avez le droit de savoir.

Partout dans le monde plus de 250 médias sont partenaires de Trust Projec. Ils se conforment aux huit indicateurs de confiance et appliquent la Marque Trust.

Tous les sites Web de ces médias contiennent aussi des balises numériques, reconnues notamment par Google, Facebook et Bing, permettant d’identifier des informations fiables provenant de médias dignes de confiance pour leurs utilisateurs. Ils participent ainsi à la lutte à la désinformation.

Et les journaux membres de Réseau.Presse dans tout ça?

Francopresse est unique. Il œuvre en complémentarité et en étroite collaboration avec un réseau de journaux locaux qui desservent les populations francophones en situation minoritaire dans huit provinces et trois territoires.  

Malgré leur enracinement profond et leur proximité avec leurs communautés respectives, ces journaux ont fait face à l’adversité et ont dû déployer des efforts additionnels pour se faire reconnaitre comme des médias à part entière et non des courroies de transmission. En 2017, tous les journaux membres de Réseau.Presse ont unanimement adopté la Charte de la presse francophone en situation minoritaire. Un texte qui définit clairement les grands principes journalistiques qui les guident.

Cette charte a servi de levier afin que les membres de Réseau.Presse adoptent leur propre guide de déontologie et poursuivent leur développement. Le résultat a été concluant : ces journaux locaux jouent un rôle essentiel dans l’essor, la vitalité et l’évolution des communautés qu’ils desservent.

La participation de Francopresse au Trust Project s’inscrit dans cette même foulée. Elle permettra aux journaux membres de notre réseau qui le souhaitent de franchir une nouvelle étape vers une relation de confiance accrue avec leur lectorat.