Pour certains jeunes, «l’écoanxiété peut aller jusqu’à de la difficulté à se concentrer à l’école, ne pas faire ses devoirs […], ça peut mener à la dépression, les maux de ventre», déclare Rhéa Rocque, professeure de psychologie à l’Université de Saint-Boniface, au Manitoba.
Les inquiétudes naissent de la peur face à un avenir incertain annoncé par la communauté scientifique et les médias, avec les problèmes climatiques et d’autres défis connexes à l’environnement, comme la justice environnementale, informe la professeure.
Sophia Mathur, jeune militante de Sudbury, en Ontario, demande plus d’actions gouvernementales contre les changements climatiques. Elle constate que ses propres peurs augmentent en observant les effets du réchauffement climatique, qui ne cessent de s’aggraver.
Transformer la peur et la frustration
Pour vaincre les émotions difficiles, il faut apprendre à réguler et à accepter nos différentes émotions qui provoquent de l’anxiété, en essayant de cultiver en même temps des émotions positives, indique Rhéa Rocque.
Parmi les émotions positives, il y a «l’espoir, la motivation d’agir, le sens de la communauté qu’on peut avoir quand on agit», précise-t-elle.
C’est le cas de Sophia Mathur, qui dit avoir transformé sa peur en motivation pour sensibiliser à la fois son entourage sur la question environnementale et encourager les jeunes qui vivent de l’écoanxiété à faire de même.
À lire aussi : L’écoanxiété, entre paralysie et engagement pour les jeunes
Des petits gestes qui font la différence
Justine Bourgeois, étudiante en troisième année en criminologie et en psychologie à l’Université d’Ottawa, voit aussi cette anxiété, si elle reste modérée, comme un moyen de développer une conscience environnementale et faire plus attention à ses comportements.
Depuis son adolescence, Justine Bourgeois s’inquiète de voir la faune et la flore se dégrader. Elle redoute l’avenir des futures générations et craint aussi la mentalité climatosceptique.
Pour soulager son écoanxiété, l’étudiante entreprend des actions au quotidien pour prendre soin de l’environnement qui l’entoure. Pour elle, prendre le temps de faire son triage pour le recyclage, le compost, les déchets et nettoyer sa cour est important.
«Je ne suis pas la seule qui vit là, il y a des animaux qui viennent là, et puis ils ont besoin de la propreté, par exemple. En ramassant les petits dégâts plastiques que je trouve par terre dans ma cour, ça me soulage que je ne vais peut-être pas trouver un animal en train de s’étouffer dessus, par exemple», explique-t-elle.
Il ne faut pas minimiser les petites actions qui ont une répercussion sociale, souligne Rhéa Rocque. D’autres personnes peuvent remarquer le geste et en être inspirées.
Sophia Mathur conseille aussi aux jeunes de faire d’une pierre deux coups en incluant leurs intérêts pour l’environnement à leurs passions. «Je fais de la danse et j’aime danser, et chaque année, avec mon studio de danse, nous organisons un spectacle de collecte de fonds pour l’environnement», raconte-t-elle.
Les jeunes peuvent aussi discuter avec la direction de leur école pour engager une façon efficace d’aider l’environnement, ajoute la militante.
«Et cela ne vaut pas seulement pour les enfants, mais aussi pour les adultes. Je veux dire, parler aux parents de leur travail et de leur lien avec la crise climatique. Mon père est médecin et il a travaillé sur la réduction de l’empreinte environnementale à l’hôpital», illustre-t-elle.
Affronter l'écoanxiété
Découvrez comment des gens transforment leur inquiétude en actions positives.
Une éducation interactive
Le corps enseignant peut également aider les jeunes à mieux vivre leur écoanxiété en les aidant à développer des émotions positives lorsqu’il est temps d’aborder les questions environnementales, explique Rhéa Rocque.
Une activité extérieure peut leur permettre «de tisser leur relation avec la nature et ils vont pouvoir en tirer les bienfaits», précise la professeure.
Justine Bourgeois cite justement son enseignant de sciences à l’école élémentaire, qui était passionné par la nature. Grâce à son exemple, elle a développé un intérêt pour l’environnement dès l’enfance.
«On avait un parc ou une petite forêt en arrière de notre école et il nous amenait là pour nous montrer des choses dans la nature, c’était vraiment interactif», se souvient-elle.
Pour assurer un meilleur apprentissage, Rhéa Rocque encourage aussi les enseignants à adapter les informations sur le réchauffement climatique selon la catégorie d’âge ou de niveau scolaire des jeunes.
Un programme psychoéducatif pour les adolescents
Rhéa Rocque, professeure en psychologie et experte en psychologie de l’environnement, mène actuellement une recherche avec des collègues de diverses universités qui devrait être publiée l’année prochaine.
Ils explorent le développement, l’implantation et l’évaluation d’un programme psychoéducatif de groupe qui fait la promotion de l’adaptation psychologique aux changements climatiques auprès des adolescents.
Pour ne pas se noyer dans une marée de contenus inquiétants, Sophia Mathur suggère aux jeunes d’équilibrer leur consommation d’information pour inclure des nouvelles positives sur le climat.
De son côté, Rhéa Rocque rappelle toutefois que si des jeunes ressentent des symptômes de dépression et sont paralysés en raison de leur écoanxiété, il est indispensable d’aller voir un professionnel pour en discuter.