le Vendredi 6 juin 2025
le Mardi 1 avril 2025 16:00 Politique

Élection fédérale : Pierre Poilievre promet d’élargir l’accès à l’immersion pour préserver le français

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Pierre Poilievre veut donner l’occasion à un plus grand nombre de jeunes anglophones d’apprendre le français.  — Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse
Pierre Poilievre veut donner l’occasion à un plus grand nombre de jeunes anglophones d’apprendre le français.
Photo : Marianne Dépelteau – Francopresse
FRANCOPRESSE – Le chef conservateur veut donner à plus de jeunes anglophones l’occasion d’apprendre le français. Reste à savoir comment il compte faire tomber les obstacles actuels et s’il accorderait à ce dossier un financement similaire à celui déjà débloqué par les libéraux.
Élection fédérale : Pierre Poilievre promet d’élargir l’accès à l’immersion pour préserver le français
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En conférence de presse le 30 mars dernier, le chef conservateur Pierre Poilievre s’est engagé à «préserver les fonds pour supporter les groupes communautaires francophones, leur permettre d’avoir des activités culturelles et de célébrer les traditions francophones à travers le Canada» s’il est élu premier ministre.

Il a aussi promis d’élargir les programmes d’immersion qui permettent aux jeunes anglophones d’aller étudier au Québec ou ailleurs dans la francophonie canadienne pour apprendre le français.

«C’est en augmentant le nombre de personnes bilingues à travers le Canada qu’on va pouvoir contribuer à la préservation de la langue et créer une plus grande solidarité entre francophones et anglophones en ce qui concerne la préservation de la langue française», a-t-il déclaré.

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Le bilinguisme des anglophones stagne

La présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), Liane Roy, voit la promesse de Pierre Poilievre «d’un bon œil». Elle répond en partie à quelques demandes électorales de l’organisme : augmenter les possibilités d’apprendre le français comme langue seconde partout au pays et établir un plan de croissance pour la francophonie.

Liane Roy rappelle qu’il demeure environ 300 000 ayants droit à attirer dans les écoles francophones. 

Photo : Courtoisie FCFA

«Ça permet justement d’assurer qu’il y ait plus de gens qui parlent français et ça, c’est ce qu’on veut parce qu’on veut avoir un accès plus large aux services en français.»

«C’est une excellente nouvelle d’entendre un leadeur politique au Canada parler d’immersion», affirme de son côté le directeur général de Canadian Parents for French (CPF), Derrek Bentley, en entrevue avec Francopresse. CPF milite pour qu’un plus grand nombre de Canadiens connaissent les deux langues officielles du pays.

Au Canada hors Québec, le taux de bilinguisme français-anglais est passé de 10,3 % à 9,5 % entre 2001 et 2021, selon Statistique Canada. Il était en croissance à Terre-Neuve-et-Labrador, à l’Île-du-Prince-Édouard, au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest.

Les personnes ayant le français comme langue maternelle au Canada affichaient un taux de bilinguisme plus élevé en 2021 qu’en 2001. Parmi les personnes dont l’anglais est la langue maternelle, ce taux est resté stable en 20 ans, se maintenant à 9,0 %.

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Ayant grandi en Alberta où il a eu du mal à vivre en français, Pierre Poilievre a confié en conférence de presse avoir perdu une grande partie de son français. Il a cependant eu l’occasion d’étudier à l’Université du Québec à Chicoutimi et de résider chez une famille du Saguenay.

S’il est élu premier ministre, le chef conservateur souhaite donner des occasions similaires à un plus grand nombre de jeunes anglophones.

Ça leur permet de voyager, de vivre en français dans d’autres milieux et de vivre des «expériences culturelles» francophones, explique Derrek Bentley, le directeur général de Canadian Parents for French (CPF).

Augmenter les transferts d’argent pour l’enseignement du français langue seconde pourrait permettre d’élargir ces occasions, souligne-t-il.

Selon Derrek Bentley, «si on veut plus de gens qui parlent le français au Canada, ça doit passer au moins en partie par ces programmes-là». 

Photo : Canadian Parents for French

«L’argent parle»

D’après Derrek Bentley, l’accès à l’immersion dépend grandement des provinces et des régions. La disponibilité de tels programmes fluctue selon la géographie et la volonté politique.

Un autre enjeu, soulevé par l’Association canadienne des professionnels de l’immersion (ACPI) dans un communiqué en 2021, reste la pénurie de personnel enseignant. Une étude a révélé un manque d’environ 10 000 personnes qualifiées pour enseigner le français langue seconde.

L’éducation est une compétence provinciale, mais comme l’explique Derrek Bentley, «l’argent parle». Le fédéral transfère de l’argent aux provinces pour l’éducation en milieu minoritaire, une «carotte» pour que les provinces investissent en français langue seconde, selon lui.

La question reste à savoir comment le fédéral peut «offrir une plus grande carotte», dit M. Bentley.

À lire ailleurs : Rentrée scolaire et enjeux d’immersion française en C.-B. : un appel aux élus provinciaux (Journal La Source)

Éviter une «bataille»

Si le prochain gouvernement, peu importe l’identité du parti qui le formera, souhaite restreindre les dépenses en général, Derrek Bentley espère que cela n’affectera pas l’éducation en français.

Pour lui, il ne devrait pas y avoir de choix à faire entre prioriser le français langue seconde ou le français langue première : «On ne veut pas que ça devienne une bataille.»

En Colombie-Britannique, en Alberta, en Saskatchewan et à Terre-Neuve-et-Labrador, une plus grande part de cet argent a été affectée à l’apprentissage du français comme langue seconde plutôt qu’au soutien du français comme langue première.

«C’est toujours un risque, affirme Liane Roy. Ça sort de la même [enveloppe fédérale].» Pour éviter les problèmes, «c’est à nous de continuer à en discuter et de faire part des besoins et des défis des communautés francophones et acadiennes […] À la FCFA, on travaille avec le fédéral, mais c’est important aussi que nos membres qui sont dans les provinces puissent faire part de leurs besoins et de leurs inquiétudes».

À lire aussi : De l’immersion à la justice en français dans l’Ouest canadien

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Les autres partis

Dans ses plus récents échanges avec les autres partis politiques, la CPF ressent un accord général sur l’importance de l’immersion. Il faudra toutefois attendre de voir leurs plateformes, car «on n’a pas nécessairement de confirmation à ce point-ci de leur positionnement de l’importance du français langue seconde», explique Derrek Bentley.

Dans sa plateforme électorale de 2021, le Parti libéral du Canada s’était engagé à investir 120 millions de dollars pour améliorer l’accès à des programmes d’immersion française.

Dans son Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028, le gouvernement de Justin Trudeau consacre jusqu’à 242,8 millions de dollars sur quatre ans à partir de 2024-2025 pour soutenir l’apprentissage du français langue seconde à tous les niveaux, ce qui inclut les programmes d’immersion française.

Dans sa plateforme de 2021, le Nouveau parti démocratique (NPD) promettait de bonifier le Plan d’action et de collaborer avec les provinces et territoires «pour améliorer l’enseignement dans la langue de la minorité et en attirant davantage de personnes immigrantes francophones dans toutes les collectivités».

L’immersion n’était pas mentionnée, mais la députée Nikki Ashton, porte-parole du NPD en matière de Langues officielles, avait souligné le manque d’enseignants qualifiés en Chambre des communes, lors de l’étude de la modernisation de la Loi sur les langues officielles, en 2023. Elle évoquait alors le besoin d’investissements ciblés.

Le Parti vert du Canada, alors dirigé par Annamie Paul, proposait en 2021 un financement accru pour les programmes d’immersion en français et de français langue seconde.

Le Bloc québécois ne parle pas d’immersion dans sa plateforme, mais son porte-parole en matière de Langues officielles, Mario Beaulieu, dénonçait en Chambre en 2023 que de larges investissements soient alloués à l’immersion «alors que les écoles par et pour les francophones à l’extérieur du Québec manquent de financement».

Type: Actualités

Actualités: Contenu fondé sur des faits, soit observés et vérifiés de première main par le ou la journaliste, soit rapportés et vérifiés par des sources bien informées.

Montréal

Marianne Dépelteau

Journaliste

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