le Lundi 14 juillet 2025

La situation est très précaire en ce moment pour le Parti libéral et aussi pour le Nouveau Parti démocratique (NPD). Certains prédisent même que ce sera le Bloc québécois qui formera l’opposition officielle.

Mais si l’impatience des conservateurs, et aussi de leurs électeurs, se comprend, est-ce en soi un argument pour que des élections générales soient déclenchées dès maintenant, c’est-à-dire à un an de la date prévue des prochaines élections?

Dans notre système politique, on ne gouverne pas par sondage. Ce ne sont pas eux qui décident qui doit être à la tête du pays ni quand les élections doivent être déclenchées.

À lire aussi : Peu de francophonie et beaucoup d’élections au menu des partis fédéraux

L’importance des règles électorales

Comme dans toute démocratie digne de ce nom, ce sont les résultats des élections qui désignent le parti politique qui formera le prochain gouvernement.

Le processus électoral fixe à l’avance les règles qui déterminent le vainqueur (est-ce le parti qui a remporté le plus de circonscriptions?, le plus de voix?, un mélange des deux?) ainsi que la durée du mandat du gouvernement.

Au Canada, la Constitution stipule que des élections doivent avoir lieu au plus tard tous les cinq ans. Mais le gouvernement fédéral et les provinces choisissent généralement de réduire la durée des mandats à environ quatre ans.

Est-ce donc dire que le gouvernement devrait avoir la possibilité de gouverner pendant toute la durée de son mandat, peu importe sa popularité ou son impopularité? Dans certains pays, la réponse est oui.

— Geneviève Tellier

C’est le cas aux États-Unis, par exemple. Les élections présidentielles se tiennent tous les quatre ans, le mardi suivant le premier lundi de novembre, sans possibilité de changer la date.

Ainsi un président fortement impopulaire (pensons à Jimmy Carter à la fin de sa présidence) restera en poste jusqu’à la fin de son mandat. Personne ne s’en offusquera : ce sont les règles du jeu.

Appui de la majorité

Au Canada, gagner une élection n’est pas une condition suffisante pour rester au pouvoir, bien qu’elle soit nécessaire.

Dans notre système parlementaire, lorsqu’un parti politique est porté au pouvoir, il doit être capable de compter sur l’appui d’une majorité de députés à la Chambre des communes pour continuer à gouverner, sinon il devra remettre sa démission.

Si le gouvernement est majoritaire, l’appui d’une majorité de députés s’obtient sans difficulté. Il serait vraiment surprenant qu’un gouvernement tombe en raison d’un mécontentement chez ses propres députés.

Mais si le gouvernement est minoritaire, nous entrons alors en période d’incertitude. Le gouvernement doit former des alliances avec d’autres partis ou des députés indépendants, le cas échéant, pour espérer demeurer au pouvoir durant tout son mandat.

C’est évidemment le cas qui nous intéresse ici. Nous avons actuellement un gouvernement fédéral minoritaire, ce qui veut dire qu’une élection peut survenir avant la fin de son mandat. Mais ce ne sont pas les sondages qui décident, mais bien les élus à la Chambre.

Ces députés doivent donc décider ce qui est préférable : appuyer le parti au pouvoir en espérant que ce dernier mettra en œuvre certaines de leurs idées ou s’opposer à ce parti quitte à déclencher des élections hâtives.

Le jeu des alliances

Jusqu’à ce qu’ils mettent fin à l’entente conclue avec les libéraux en aout dernier, les néodémocrates avaient choisi la première voie. Fait assez rare en politique canadienne, ils avaient même négocié une entente de plusieurs années, portant sur plusieurs thèmes.

En moins de trois ans, le NPD a obtenu de nombreux gains : protection accrue pour les travailleurs, programmes de soins dentaires, d’assurance médicaments et d’aide au logement, surtout pour les plus démunis, imposition accrue des institutions bancaires, cibles plus ambitieuses pour combattre les changements climatiques, etc.

Selon une compilation effectuée par Le Devoir en mars dernier, seulement 3 des 27 initiatives négociées dans le cadre de cette entente n’avaient pas été réalisées.

Dans ces conditions, quels nouveaux avantages les néodémocrates peuvent-ils espérer arracher au gouvernement? Aucun qui obtiendrait l’appui des libéraux, semble-t-il.

En déchirant avec grand éclat l’entente qui le liait aux libéraux, Jagmeet Singh a lancé le message qu’il n’avait plus de bonnes raisons de continuer à appuyer les libéraux.

Le Bloc québécois, quant à lui, a essayé de prendre la place du NPD et d’obtenir des concessions du gouvernement libéral au cours des dernières semaines. Il a soumis les deux dossiers qu’il juge prioritaires : la bonification des pensions et la protection du système de la gestion de l’offre.

Mais les libéraux ont montré très peu d’empressement à répondre aux demandes du Bloc. À vrai dire, le Bloc est devenu la cible des attaques des libéraux, qui lui reprochent notamment de «comploter pour la souveraineté du Québec». Dans de telles circonstances, il est difficile de voir comment les deux partis pourraient trouver un terrain d’entente.

Par conséquent, des élections devraient-elles être déclenchées?

Logiquement, oui

Il faut décréter des élections maintenant, car manifestement aucune collaboration ne semble plus possible entre le gouvernement libéral minoritaire et un autre parti de la Chambre.

Il ne faut pas désirer des élections parce que l’opposition officielle le veut (elle le voudra toujours) ou encore parce que les sondages ne sont pas favorables au gouvernement.

Il faut des élections parce que le Parti libéral est maintenant incapable de tisser des alliances qui lui permettraient de compter sur l’appui d’une majorité de députés à la Chambre pour assumer pleinement les fonctions de gouvernement. C’est ainsi que notre système politique fonctionne.

Geneviève Tellier est professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les politiques budgétaires des gouvernements canadiens. Elle commente régulièrement l’actualité politique et les enjeux liés à la francophonie dans les médias de tout le pays.

La motion a été présentée par la ministre de l’Enseignement supérieur du Québec, Pascale Déry, et quatre membres de l’Assemblée nationale. Elle affirme le principe de la laïcité de l’État et la compétence provinciale exclusive en matière d’éducation supérieure pour justifier cette demande.

La représentante spéciale a récemment envoyé une lettre aux directions des établissements d’enseignement supérieur du Canada dans laquelle elle leur suggérait d’embaucher davantage de professeur·es arabes, palestinien·nes ou musulman·es pour enseigner.

Leur absence se fait notamment sentir au niveau de la diversité des points de vue sur les questions liées au pluralisme religieux. 

Selon Amira Elghawaby, la présence de ces professeur·es permettrait aux universités d’aborder la relation du Canada à l’occupation de la Palestine par Israël sous des angles qui demeurent négligés. Les demandes de boycottage d’Israël, qui ont un soutien limité mais réel du milieu universitaire, pourraient aussi faire l’objet d’un examen plus approfondi.

Une autre motion contre la représentante spéciale, déposée le même jour à l’Assemblée nationale, demandait carrément l’abolition du poste de la représentante spéciale du Canada chargée de la lutte contre l’islamophobie. 

Cette motion n’a cependant pas pu passer au vote parce que le parti Québec solidaire s’y est opposé parce que la Coalition Avenir Québec au pouvoir et le Parti Québécois ont refusé un amendement réclamant que le Québec se dote de son propre plan pour lutter contre l’islamophobie.

À lire : La loi 21 et l’Islamophobie 

Un simple prétexte

La seconde motion laisse toutefois voir la véritable cible de la première : non pas Amira Elghawaby ni ses propos, mais bien la lutte contre l’islamophobie elle-même.

Dès 2019, le premier ministre québécois, François Legault, affirmait qu’«il n’y a pas d’islamophobie au Québec». Il avait toutefois dû donner l’impression de se reprendre dès le lendemain, tout en maintenant «qu’il n’y a pas de courant islamophobe au Québec».

Par ailleurs, dès la nomination d’Amira Elghawaby au poste de représentante spéciale en janvier 2023, le gouvernement québécois avait demandé sa démission. C’était alors l’affirmation d’un sentiment antimusulman au Québec, lié à l’adoption de la Loi 21 et aux résultats d’un sondage d’opinion, qui avait choqué certains parlementaires de l’Assemblée nationale. 

Leur riposte avait consisté à accuser Amira Elghawaby d’avoir des sentiments antiquébécois, mettant sur le même pied la simple critique d’une loi avec une peur et une haine pourtant présentes au Canada en général et d’une manière spécifique au Québec. Il y a déjà eu nombre de débats publics et parlementaires, ainsi que l’adoption de lois, sur le sujet.

Il est donc difficile de croire que la demande est une véritable réaction aux propos récents d’Amira Elghawaby. N’oublions pas que le gouvernement fédéral finance plusieurs services universitaires, des programmes de bourses d’études, des programmes de subventions de recherche ainsi que des postes par l’entremise des Chaires de recherche du Canada

Plusieurs de ces services sont accompagnés de directives visant à promouvoir l’équité, la diversité et l’inclusion dans la sélection des candidat·es et à l’embauche. Ces éléments pourraient tout aussi bien être la cible des élu·es du Québec.

Au-delà des lieux communs

Les critiques à l’endroit d’Amira Elghawaby se composent en fait de condamnations et de simples affirmations générales sans référence à des réalités concrètes. 

Par exemple, en 2023, 200 personnalités avaient demandé que son poste soit aboli. L’un de leurs motifs visait l’emploi du terme «islamophobie», qu’elles jugeaient – à tort – être un terme militant. 

Leur lettre présentait plusieurs des lieux communs des discours refusant la lutte contre l’islamophobie. Au contraire de leurs affirmations, dans les discours publics, toute critique de l’Islam n’est pas considérée comme étant islamophobe. 

Nul ne demande que les préceptes de l’Islam soient respectés par les non-musulmans et nul ne demande que toute offense à l’Islam devienne un crime. Par ailleurs, les intégristes musulmans ne sont pas les principaux porte-paroles de l’État canadien sur la question de l’islamophobie. 

La lettre affirmait faussement que la Loi 21 ne viserait pas les femmes musulmanes. Certes, la loi elle-même se présente comme générale, comme doit l’être toute loi. 

Toutefois, son histoire, les circonstances de son adoption, ainsi que les personnes visées ou touchées par son application montrent que, si la loi s’applique bien à toute personne dans une situation d’autorité employée par l’État provincial, elle affecte d’abord et avant tout les femmes musulmanes et ne touche aucunement la grande majorité du reste de la population.

Le besoin de lutter contre l’islamophobie

De tels faux débats et de telles accusations et demandes permettent tout simplement d’empêtrer les processus et d’empêcher les critiques ou la transformation des lois et des institutions. Ils dominent les échanges publics et masquent la réalité en empêchant de la nommer.

Le terme «islamophobie» renvoie pourtant à une réalité concrète. 

Selon la sociologue Jasmin Zine de l’Université Wilfrid-Laurier, en Ontario, l’islamophobie est «une peur et une haine de l’Islam et des personnes musulmanes (et de celles perçues comme musulmanes) qui se traduisent en des actions individuelles et formes idéologiques et systémiques d’oppression qui soutiennent la logique et les motifs de relation de pouvoir spécifiques*.» 

Il ne s’agit donc pas simplement d’une forme de discrimination ni de racisme, bien que des personnes perçues comme arabes soient souvent aussi perçues comme musulmanes et traitées comme telles. 

L’islamophobie touche avant tout aux attitudes à l’égard de la religion. La lutte contre le racisme n’inclut donc pas automatiquement la lutte contre l’islamophobie.

Pour comprendre et agir sur ces actions et sur l’oppression systémique, nous avons besoin d’Amira Elghawaby, de son poste, et de la parole de personnes musulmanes. 

Surtout, nous devons écouter les femmes musulmanes, qui ont diverses façons de vivre leur religion. Ce n’est qu’à partir de leur expérience et de leurs connaissances que nous pourrons mener une lutte contre l’islamophobie.

 

* Traduction libre de la définition incluse dans le livre de Jasmin Zine, Under Siege: Islamophobia and the 9/11 Generation, Montréal, McGill-Queen’s University Press, 2022, page 14.

Jérôme Melançon est professeur en études francophones et interculturelles ainsi qu’en philosophie à l’Université de Regina. Ses recherches portent notamment sur la réconciliation, l’autochtonisation des universités et les relations entre peuples autochtones et non autochtones, sur les communautés francophones en situation minoritaire et plus largement sur les problèmes liés à la coexistence. Il est l’auteur et le directeur de nombreux travaux sur le philosophe Maurice Merleau-Ponty, dont La politique dans l’adversité. Merleau-Ponty aux marges de la philosophie (MétisPresses, 2018).

J’ai dévoré les trois romans ci-dessous en moins d’une semaine, c’est dire combien ils sont captivants. J’ai ensuite eu le plaisir d’en discuter avec les trois auteurs lors du Salon du livre du grand Sudbury, en Ontario. Que du plaisir!

Il s’agit d’abord du roman Le prince africain, le traducteur et le nazi de Didier Leclair, nom de plume de Didier Kabagema, paru aux éditions David et retenu pour le Combat national des livres de Radio-Canada de 2024.

Deux heures avant la fin de l’été de Sébastien Pierroz. Roman paru aux éditions David et finaliste au Prix du livre de la Ville d’Ottawa de 2024.

Finalement Welsford, de Claude Guilmain, un roman publié chez Prise de parole.

Reproduction avec permission

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Le prince africain, le traducteur et le nazi est le dixième roman de Didier Leclair. C’est dire qu’en 23 ans comme auteur, il a appris à manier la plume avec dextérité. Il possède un style coulant qui rappelle les grands écrivains de feuilletons parisiens du XVIIIe siècle.

L’histoire se passe en 1941, dans un Paris occupé par les Allemands pendant la Deuxième Guerre mondiale.

Dès les deux premiers chapitres, Didier Leclair met en scène ses trois principaux personnages. Le prince, Son Altesse Antonio Jose Henrique Dos Santos Mbwafu, est l’héritier d’un petit royaume angolais, le Kongo, autrefois colonie portugaise. Il étudie à Paris, mais en fait, c’est son traducteur, Jean de Dieu N’kuba, qui se présente aux cours en son nom.

Jean de Dieu est le fils d’un tirailleur sénégalais, venu combattre en Europe lors du premier conflit mondial, et d’une mère allemande. C’est d’ailleurs lui qui, le premier, rencontre le nazi, un certain major F. Baumeister.

Baumeister est convaincu que le prince est en réalité un contrebandier qui, avec la complicité de son père, le roi du Kongo, écoule clandestinement des diamants angolais sur le marché européen.

Au fil des pages, nous apprendrons que, là-dessus, il a tout à fait raison. Le problème, c’est que Baumeister veut récupérer les diamants pour son propre compte et au diable le Reich. Il veut cette fortune pour se sauver en Amérique du Sud avec sa nouvelle maitresse.

Un bel imbroglio qui se décline en un chassé-croisé dans Paris et au Portugal. Sans dévoiler la fin, je me contenterai de dire que le héros, c’est Jean de Dieu.

Reproduction avec permission

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Deuxième roman de Sébastien Pierroz, journaliste et producteur au réseau de télévision ONFR+, Deux heures avant la fin de l’été est paru aux Éditions David et a été finaliste au Prix du livre d’Ottawa de 2024. Même s’il n’a pas l’expérience d’un Didier Leclair, Sébastien Pierroz a, comme lui, une plume coulante, journalisme oblige.

Ce roman est un peu plus compliqué que celui de Didier Leclair du fait que l’action s’y déroule en trois temps : 1976, 2001, 2020. Cela ne veut pas dire que la trame est difficile à suivre; Sébastien Pierroz réussit à nous entrainer dans ces trois périodes avec brio.

L’histoire débute en 2020 à Londres où Damien, fils d’une famille de Mongy, village près d’Annecy dans le sud-est de la France, s’est réfugié après la mort «accidentelle» de sa sœur Nadia en 2001.

Dès le deuxième chapitre, on apprend qu’une autre mort, celle de Claudia en 1976, était le résultat d’un viol. Un immigrant algérien, Arezki Hamani, sera trouvé coupable et passera 20 ans en prison.

En 2020, Damien revient à Mongy pour les funérailles de son grand-père. On rencontre sa famille – le frère Adrien, le père, la mère, l’oncle et la tante – qui tient une petite auberge. Dans ces rencontres, on sent bien les non-dits dans cette famille. En fait, dans toute cette petite localité.

Sébastien Pierroz insère même dans l’histoire une jeune Franco-Ontarienne, la journaliste Cristina Tremblay, qui a obtenu un stage au journal local de Mongy. On pourrait penser que l’apparition de ce personnage franco-ontarien est un peu factice, mais Cristina joue un rôle important dans le dénouement.

Reproduction avec permission

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Publié aux Éditions Prise de parole, le roman Welsford, de Claude Guilmain, porte le  nom d’un quartier du nord de Toronto qui a été aménagé dans les années 1960.

Ici encore, l’action se déroule en deux temps : 1969 et 2019. Le personnage principal, François, alias Frank pour les Anglais, est un ancien inspecteur-chef de la police locale. Il est parti en préretraite il y a quelques années, mais est encore consultant pour la police.

En 2019, les nouveaux propriétaires d’une maison de la rue Cassandra du quartier Welsford, qui s’embourgeoise, font démolir la vieille piscine derrière leur maison. Les travailleurs y découvrent un cadavre enseveli sous le ciment.

Or, dans les années 1960, Frank a grandi dans une maison juste en face de celle avec la piscine. Il s’y est baigné avec ses camarades à l’adolescence. Et surtout avec la fille des propriétaires de l’époque, la famille Martella.

Claude Guilmain nous trimbale dans le temps, entremêlant la quête de Frank pour identifier le cadavre et pour trouver le coupable avec des scènes de jeunesse dans ce quartier en plein essor.

Les pages du roman nous font revivre (ou, pour les plus jeunes, dépeignent) la musique et les films des années 1970, le premier alunissage, les soirées au resto de burgers, les premiers émois sexuels, les premiers joints fumés. C’est très bien ficelé.

 

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La grandeur d’un roman se mesure peut-être par le sentiment qu’il laisse chez le lecteur quelque temps après sa lecture. Le mot qui me vient après Le prince africain, le traducteur et le nazi, c’est «libération». Libération dans le sens de libération de Paris, bien sûr, mais aussi la libération d’un jeune immigrant qui déjoue les nazis.

Pour Deux heures avant la fin de l’été, c’est plutôt l’expression «le temps fait son œuvre» qui décrit bien que, tôt ou tard, le bien finit par triompher sur le mal.

Et pour Welsford, c’est «nostalgie». Pour un babyboumeur comme moi, qui a vécu les années 1970, ce roman raconte parfaitement le décor de notre jeunesse.

Trois romans à lire.

Réjean Grenier a travaillé dans les médias pendant 47 ans, comme journaliste, rédacteur principal à Radio-Canada/CBC, éditeur et propriétaire d’un journal et d’un magazine, et éditorialiste. Il a présenté une chronique littéraire sur les ondes de Radio-Canada pendant cinq saisons. Il est un avide lecteur depuis l’âge de 12 ans. Il a grandi dans un petit village du Nord de l’Ontario où il n’y avait pas de librairie, mais il a rapidement appris où  commander des livres. Son type d’ouvrage préféré est le roman puisqu’«on ne trouve la vérité que dans l’imaginaire».

L’environnement a toujours été dans la liste des priorités de Francopresse. Ce qui a mené à la rédaction d’articles et de dossiers autour de ce thème.

Pour notre récent dossier sur l’écoanxiété, nous avons réfléchi à notre propre rôle dans la diffusion de l’information sur les changements climatiques. Notre couverture était-elle trop négative? Contribuait-elle à l’écoanxiété? Avait-elle des angles morts?

Nos questions nous ont menés à Covering Climate Now (CCNow), un collectif international de journalistes créé aux États-Unis en 2019 pour améliorer la couverture de la crise climatique.

Cet été, Francopresse est devenue l’un de leurs partenaires canadiens, rejoignant nos collègues de L’Aurore boréale comme seuls médias francophones de l’extérieur du Québec membres du collectif.

À lire : Écoanxiété : le rôle crucial des médias face à la crise

Des sujets incontournables

Prédire l’avenir avec précision est une tâche impossible. Mais les premières prédictions des scientifiques par rapport à l’accumulation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère – faites il y a déjà quelques décennies – se réalisent devant nos yeux, et ce, de plus en plus souvent. Impossible de les ignorer.

Selon le cofondateur et directeur exécutif de CCNow, Mark Hertsgaard, les médias doivent parler du climat de la même manière qu’ils ont couvert la pandémie de COVID-19 : comme une urgence mondiale.

La francophonie canadienne restera, bien entendu, la raison d’être de Francopresse. Mais cette francophonie est, elle aussi, touchée par l’augmentation de l’intensité des incendies de forêt, les tempêtes, les inondations et la montée du niveau des océans.

Sans oublier que ces catastrophes ont des conséquences sur le territoire, l’économie, la santé mentale et physique des francophones comme des autres.

CCNow encourage aussi à mettre de l’avant les bonnes nouvelles. L’augmentation de la production électrique avec des énergies renouvelables est justement une de ces bonnes nouvelles qui donne un peu d’espoir.

Ce que ça change

Covering Climate Now offre des ressources pour que les journalistes qui s’intéressent aux questions climatiques aient un point de départ à leurs réflexions et leurs recherches.

C’est aussi un réseau d’échanges. Tous les journalistes membres peuvent participer au groupe de discussion où des idées de sujets et des sources sont mises en commun. Où il est possible de poser des questions et d’échanger avec d’autres journalistes, entre autres.

À lire : Quand le cinéma francophone se met au vert

Réchauffement ou changement climatique?

Ne parlait-on pas de «réchauffement climatique» il y a quelques années? Comment en est-on venus à parler de «changements climatiques»?

Les climatosceptiques avancent que ce changement dans le lexique est une preuve que le réchauffement des températures n’existe pas. Qu’il y a encore des jours très froids en hiver!

Ils (toujours difficile d’identifier qui se cache derrière ce «ils» utilisé par les conspirationnistes) ont donc changé le nom pour essayer de nous convaincre sans preuve, clament ces personnes qui mettent en doute ou même réfutent l’existence de la crise climatique.

Pourtant, le changement vient d’un stratège républicain. Dans une note de service secrète de 2002, Frank Luntz soulignait que le président George W. Bush et les républicains étaient vulnérables sur la question climatique. Il a proposé d’utiliser «changements climatiques» au lieu de «réchauffement climatique», parce que c’était «moins effrayant».

Les analyses des discours du président avant et après 2002 révèlent d’ailleurs que le vocabulaire sur la question a effectivement changé.

Dans la communauté scientifique, l’expression «changement climatique» est tout de même plus souvent utilisée, parce qu’elle décrit mieux les effets d’augmentation des extrêmes causés par les gaz à effet de serre.

La notion qu’ils sont «causés par l’humain» y est de plus en plus souvent attachée tandis que «réchauffement climatique» est davantage utilisé pour parler plus spécifiquement de la hausse des températures à la surface de la planète.

Un enjeu de proximité

Il y a d’autres points de comparaison entre la pandémie de COVID-19 et le réchauffement climatique.

Selon les sondages américains de mars 2020, date qui marque l’arrivée de la pandémie sur le continent nord-américain, peu de gens étaient inquiets d’être infectés par la maladie au cours des premières semaines. Mais à mesure que des personnes de leur entourage contractaient le virus, le niveau d’inquiétude grimpait.

Notre anxiété face aux changements climatiques suit la même logique. Tant que notre ville, nos proches ou nous-mêmes ne semblons pas être directement touchés, nous avons l’impression que nous serons à l’abri du pire. Que c’est pour les autres.

Pourtant, le Canada se réchauffe deux fois plus vite que le reste de la planète. Les incendies de forêt des dernières années sont un bon indice que nous sommes tous plus près des effets que nous voulons l’admettre.

Il y a plus d’une route devant nous pour éviter le pire – ou non – et nous adapter. Ces routes mènent parfois à de mauvaises nouvelles, mais de plus en plus souvent à de bonnes nouvelles. Ce sont toutes ces voies que Francopresse explorera.

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En politique, le double standard vestimentaire est aussi tenace qu’une tache de café sur un tailleur blanc.

Alors que les hommes peuvent se fondre dans l’uniformité des costumes sombres, une femme n’a que rarement ce luxe. Le moindre faux pas vestimentaire peut être interprété comme un affront, une excentricité, voire un défi direct aux codes tacites du «boys club», ce réseau informel où les hommes et leurs visions dominent.

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Tenues scrutées, idées éclipsées

Depuis son arrivée sur les devants de la scène politique en 2020, le style vestimentaire de Kamala Harris n’a cessé d’être commenté, notamment pour son affection pour les chaussures de marque Converse. Un détail qui a parfois pris une importance disproportionnée dans la couverture médiatique​, occultant les véritables enjeux de ses campagnes.

Kamala Harris n’hésite pas à porter des souliers confortables, ce qui détourne parfois l’attention de son message. 

Photo : Gage Skidmore – Wikimedia Commons

Au Canada, les choses ne sont pas si différentes. Le Québec a eu son propre «scandale vestimentaire» avec la députée provinciale Catherine Dorion. En 2019, Dorion, connue pour son style décontracté et ses prises de position audacieuses, s’est présentée à l’Assemblée nationale en coton ouaté, ce qui a déclenché un tollé parmi certains collègues qui estimaient que sa tenue n’était pas à la hauteur des attentes pour une députée.

Comme si l’élégance vestimentaire était le critère ultime pour faire de la bonne politique.

Bien sûr, les hommes en politique ne sont pas totalement épargnés par les jugements vestimentaires. Mais la différence est que, chez eux, les faux pas sont moins risqués et moins commentés. Tant qu’ils portent un costume sombre et des chaussures cirées, ils passent sous le radar​. En somme, la société leur pardonne plus facilement.

En politique, on s’attend à ce que les femmes soient sérieuses, mais pas trop. Élégantes, mais pas trop. Féminines, mais pas trop. Cette ligne totalement arbitraire à ne pas franchir est à la fois absurde et frustrante.

Des figures comme Chrystia Freeland, ministre des Finances et vice-première ministre du Canada, ont régulièrement dû jongler avec ces attentes, subissant parfois des critiques pour des tenues «trop simples» ou «trop féminines».

Le débat autour des choix vestimentaires des femmes en politique n’est pas un simple affrontement de gouts, mais bien une manifestation profonde de la manière dont les femmes sont perçues dans les sphères de pouvoir.

Derrière les commentaires sur les tenues des femmes politiques se cache une vision patriarcale et profondément sexiste, qui lie l’apparence à la compétence et la crédibilité.

Un jeu aux règles invisibles

Le résultat de cette inégalité de traitement et de ces règles floues est que les femmes en politique doivent non seulement prouver leurs compétences, mais aussi gérer leur apparence avec une précision quasi chirurgicale. Si elles ne respectent pas les codes vestimentaires implicites, elles risquent de voir leur crédibilité remise en question.

En politique, on s’attend à ce que les femmes soient sérieuses, mais pas trop. Élégantes, mais pas trop. Féminines, mais pas trop… 

Photo : Pavel Danilyuk – Pexels

Dans ce contexte, l’apparence vestimentaire devient un enjeu politique, un espace où se jouent des luttes de pouvoir qui ne concernent pas uniquement les idées, mais aussi la manière dont les femmes peuvent – ou ne peuvent pas – occuper l’espace public.

Le fait d’avoir deux poids, deux mesures en matière vestimentaire sert non seulement à limiter l’expression des femmes dans l’espace public, mais aussi à les renvoyer constamment à leur corporalité, les réduisant ainsi à des objets du regard.

Il est temps que nous arrêtions de juger les femmes politiques sur ce qu’elles portent et que nous nous concentrions enfin sur ce qui compte vraiment : leurs idées, leurs politiques et leur capacité à diriger.

Parce que, franchement, que Kamala Harris porte des Converse ou que Catherine Dorion préfère les cotons ouatés, ce n’est pas cela qui va résoudre les défis auxquels sont confrontées nos sociétés.

Originaire de Belgique, Julie Gillet est titulaire d’une maitrise en journalisme. Militante éprise de justice sociale, voici près de quinze ans qu’elle travaille dans le secteur communautaire francophone et s’intéresse aux questions d’égalité entre les genres. Elle tire la force de son engagement dans la convergence des luttes féministes, environnementales et antiracistes. Elle vit aujourd’hui à Moncton, au Nouveau-Brunswick.

Une affirmation que le chef Nouveau Parti démocratique (NPD), Jagmeet Singh, a répétée ad nauseam lors de son point de presse de la première semaine de septembre.

Sa décision aura pour conséquence immédiate d’ouvrir la voie à la multiplication des motions de censure contre le gouvernement dès la rentrée parlementaire, le 16 septembre. Des motions dont l’issue du vote n’est plus facilement prévisible : le gouvernement tombera-t-il ou pourra-t-il se maintenir au pouvoir?

Cette incertitude s’explique par le fait que chacun des partis aux Communes se demandera, lors de chaque vote, s’il a plus à gagner ou à perdre en provoquant des élections.

Précisons que les trois partis d’opposition – le Parti conservateur, le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique – doivent tous voter contre le gouvernement minoritaire actuel pour le renverser.

Tous les partis politiques vont donc agir comme si la campagne électorale était déjà officiellement lancée.

Surveillez les sondages

En ce moment, les sondages indiquent que seul le Parti conservateur peut s’en tirer avantageusement si des élections avaient lieu maintenant.

Les sondeurs prédisent même une hausse substantielle du nombre de sièges conservateurs à la Chambre des communes. Ce parti réussirait à former un gouvernement majoritaire sans aucune difficulté.

Les sondages laissent aussi entrevoir que le Bloc québécois tirerait bien son épingle du jeu si une élection était déclenchée ces jours-ci. Le nombre de sièges bloquistes pourrait même augmenter à la Chambre des communes. Le phénomène d’engouement que l’on observe partout ailleurs au Canada pour le Parti conservateur ne se produit pas au Québec.

Toutefois, même s’il pouvait compter sur un plus grand nombre de députés, le Bloc québécois perdrait beaucoup d’influence si le prochain gouvernement était majoritaire. Ce qui risque de se produire, si les prévisions des sondages se confirment.

En conséquence, le Bloc québécois y réfléchira certainement à deux fois quand il devra indiquer en chambre s’il appuie ou non les libéraux.

Quant aux libéraux et aux néodémocrates, les deux partis se trouvent dans une position plus que difficile. Actuellement, aucun ne peut espérer former le prochain gouvernement et rien n’indique que les choses vont changer dans un avenir proche.

Depuis maintenant un an, les sondages montrent les uns après les autres que les intentions de vote sont en baisse constante pour les libéraux, alors qu’elles font du surplace pour les néodémocrates.

Ainsi, si les choses ne bougent pas sur le plan des intentions de vote, peut-on raisonnablement penser que le gouvernement libéral survirera aux motions de censure?

La réponse à cette question est fort probablement oui, il survivra encore quelque temps.

Toutefois, les choses pourraient changer. C’est du moins ce qu’espère de tout cœur le chef néodémocrate.

Lorsque Jagmeet Singh «déchire», selon ses propres mots, l’entente avec les libéraux, lorsqu’il justifie sa décision par le biais d’une vidéo qui a toutes les allures d’une publicité de campagne électorale, lorsqu’il hausse le ton et les attaques personnelles envers Justin Trudeau et Pierre Poilievre, il tente de brasser la cage.

Une bonne tactique?

Cette stratégie que Pierre Poilievre utilise lui-même l’a certainement déjà servi. À vrai dire, on peut se demander si, justement, Jagmeet Singh ne s’est pas inspiré des conservateurs en se lançant dans les attaques personnelles contre Justin Trudeau, le traitant notamment de «faible», «d’égoïste» et «d’ami des ultrariches».

Mais ce qui peut produire de bons résultats dans certains cas peut ne pas fonctionner dans d’autres. Le style abrasif de Pierre Poilievre plait à un certain groupe d’électeurs naturellement plus enclins à voter pour les conservateurs.

La même recette ne fonctionnera probablement pas aussi bien pour les néodémocrates. Beaucoup de Canadiens n’aiment pas les campagnes électorales négatives. Celles-ci pourraient même en inciter à ne pas voter, ce qui n’aiderait certainement pas la cause des néodémocrates.

Par ailleurs, beaucoup de Canadiens veulent aussi connaitre les propositions des partis politiques. C’est une chose de dire que ça va mal, ça en est une autre de proposer des solutions convaincantes. Les attaques personnelles ne suffisent pas.

Le NPD saura-t-il convaincre les électeurs que ses propositions sont meilleures que celles des autres partis politiques?

C’est ce qu’il espère, bien évidemment, mais la tâche sera difficile.

Les pieds dans le sable

En fait, le NPD est dans une position délicate. Étant le parti politique fédéral le plus à gauche (j’exclus le Parti vert qui n’est plus réellement dans la course), il peut difficilement se redéfinir.

Se positionner encore plus à gauche, c’est risquer de perdre des appuis, surtout dans un contexte où la santé des finances publiques commence à préoccuper de plus en plus de gens.

S’il se repositionne plus au centre, alors il devra convaincre l’électorat qu’il n’est pas le Parti libéral, ce qui ne serait pas chose aisée. Faut-il rappeler la campagne électorale de 2015? C’est exactement ce qu’avaient fait les néodémocrates, alors dirigés par Thomas Mulcair. Cela avait grandement contribué à la victoire libérale.

Il ne faut donc pas s’étonner si Jagmeet Singh cherche maintenant à présenter Justin Trudeau et le Parti libéral comme étant à droite, voire très à droite. C’est en fait la seule porte de sortie pour le NPD.

Ce sera même le principal message que l’on entendra de la part de Jagmeet Singh au cours des prochaines semaines, des prochains mois. Parce que la campagne électorale est déjà commencée.

Reste à savoir maintenant si les électeurs le croiront, car le Parti libéral a bien montré, au cours des neuf dernières années, qu’il n’était pas un parti de droite.

Geneviève Tellier est professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les politiques budgétaires des gouvernements canadiens. Elle commente régulièrement l’actualité politique et les enjeux liés à la francophonie dans les médias de tout le pays.