le Samedi 24 mai 2025

Parce que notre perception de l’inflation est plus importante que la réalité. Après trente ans de stabilité des prix, la forte inflation des dernières années a marqué nos esprits.

Grâce au recul des prix du pétrole, l’inflation est retombée à des niveaux normaux depuis plusieurs mois déjà. La Banque du Canada prévoit que l’inflation moyenne sera de 2,5 % en 2024, tout près de sa cible de 2 %.

Mais ce n’est pas ce à quoi l’on s’attarde quand on va à l’épicerie. Il importe peu de savoir que la livre de beurre coutera (seulement) 8,25 $ en décembre 2024 par rapport aux 8,00 $ actuels. Tout le monde se rappelle que la livre de beurre coutait 6,00 $ avant la pandémie.

L’inflation sur 4 ans

Normalement, l’inflation se calcule sur une période de douze mois. On compare les prix d’aujourd’hui par rapport à ce qu’ils étaient à pareille date l’an dernier. Les plus récentes données de Statistique Canada nous apprennent que les prix ont augmenté en moyenne de 3,1 % sur un an en novembre.

Mais si l’on prend un pas de recul et que l’on regarde l’inflation depuis quatre ans, on prend toute la mesure de la croissance des prix. Le portrait est frappant.

De 2020 à la fin de 2023, l’inflation moyenne a été de 16 % au pays. C’est autant en quatre ans que pendant toute la décennie 2010.

Le prix de certains produits de base a cru encore davantage. Le cout des aliments a augmenté de 21 %, tout comme celui du logement.

Ces données sont des moyennes qui cachent cependant d’importants écarts. Certaines villes ou certains types de logements ont connu des augmentations de prix beaucoup plus importantes, alors que dans d’autres régions les prix ont été plus stables.

Les propriétaires qui renouvèlent leur hypothèque en ce moment subissent de plein fouet l’augmentation des taux d’intérêt, alors que ceux qui renouvèleront seulement dans 24 ou 36 mois seront épargnés par ces hausses.

Le pouvoir d’achat s’est maintenu

Cela peut paraitre surprenant, mais en moyenne, les salaires ont augmenté plus rapidement que l’inflation depuis quatre ans. La hausse moyenne de la rémunération hebdomadaire a été de presque 17 % au cours de cette période, soit environ 1 % de plus que l’inflation.

La pénurie de main-d’œuvre a permis aux travailleurs de nombreux secteurs de négocier de généreuses augmentations. 

Ce portrait dissimule cependant une sombre réalité : quand on connait une hausse aussi rapide et inégale des prix et des salaires, peu de gens correspondent à la moyenne. Les écarts sont importants.

Pour ceux dont les salaires n’ont pas augmenté, pour ceux qui doivent se trouver un nouveau logement et qui voient que le prix d’un appartement équivalent à celui qu’ils occupent a doublé, pour ceux qui peinent à se nourrir adéquatement, les moyennes n’ont aucune importance.

Ces personnes ont véritablement perdu de leur pouvoir d’achat, et leur situation s’est empirée. C’est ce qui compte.

Même pour ceux dont le pouvoir d’achat s’est maintenu, la forte variation des prix peut leur donner l’impression que leur situation économique s’est détériorée. Peu importe que les prix n’augmentent presque plus depuis six mois, ils se rappellent très bien que les prix étaient beaucoup plus bas avant la pandémie.

Le ralentissement de l’économie affecte notre perception

Le ralentissement de l’économie qu’on connait à cause de la hausse des taux d’intérêt aggrave cette perception négative. On entend parler de récession possible en 2024 dans les médias. Le discours autour de l’économie est négatif.

Pourtant, malgré un ralentissement de l’économie et une forte croissance de la population en 2023, l’emploi n’en a pas trop souffert. Le choc aurait pu être bien pire.

Il s’est créé plus de 500 000 emplois au Canada en 2023. C’est énorme. Malgré cela, le taux de chômage a augmenté; il est passé de 5 % à 5,8 % depuis un an. C’est parce que le Canada connait une vague sans précédent d’immigration qui fait en sorte que davantage de personnes se cherchent un emploi.

Mais dans le contexte où la banque centrale a donné un coup de frein en augmentant les taux directeurs dix fois en quinze mois et où l’on se remet d’une crise inflationniste, l’économie canadienne est étonnamment résiliente.

Malgré tout, on l’entend, les gens sont inquiets.

Les chroniqueurs et les analystes économiques auront beau dire que l’inflation est jugulée, que l’économie se porte bien dans les circonstances, cela ne changera probablement rien à la perception négative des gens qui ont connu une hausse des prix inégalée depuis quarante ans.

En politique comme en économie, les perceptions sont souvent plus importantes que les faits.

Notice biographique

David Dagenais  est journaliste économique indépendant et entrepreneur. Auparavant, il a été journaliste à Radio-Canada après avoir achevé des études supérieures en économie politique à l’UQAM et à l’Université d’Ottawa.

Accroissement du nombre de conflits dans le monde

Retenons en premier lieu l’éclatement d’un nouveau conflit au Soudan qui, comme bien souvent dans le cas des conflits en Afrique, est largement passé sous le radar de la communauté internationale.

Or, cette guerre fait des ravages parmi une population civile déjà l’une des plus pauvres au monde. Les probabilités d’un nouveau génocide au Darfour sont par ailleurs élevées.

Et malheureusement, je ne vois pas de piste de sortie du conflit de si tôt.

Premièrement parce que les généraux qui se font la guerre ont trop à perdre.

Deuxièmement parce que les interférences étrangères, les enjeux autour des ressources du Soudan et le fait que tout le monde vend allègrement des armes aux deux parties font en sorte qu’en fin de compte peu de monde a intérêt à ce que cette guerre s’arrête.

C’est donc un conflit qui risque de s’enliser, comme vont continuer à s’enliser les conflits dans la région du Sahel. Maintenant que les juntes militaires sont bien installées au Mali, au Burkina Faso et au Niger, on s’aperçoit qu’elles se trouvent fort dépourvues dans leur lutte contre les groupes terroristes djihadistes.

En second lieu, la guerre menée par Israël contre la population gazaouie a ouvert un deuxième grand front. Jamais depuis 1945, le monde n’avait connu autant de guerres interétatiques. Et des guerres qui sont menées en faisant fi des conventions internationales, que ce soit à Gaza ou en Ukraine.

Ce manque de respect pour le droit international n’est pas sans lien avec l’affaissement de la démocratie.

Polarisation et populismes

Cela semble inéluctable, année après année, on assiste à la montée des partis d’extrême droite, désormais aux manettes du pouvoir dans des pays comme l’Italie, la Finlande et la Suède.

Mais l’on voit aussi et surtout, des partis de droite traditionnels qui se droitisent à la vitesse grand V, pensant ainsi éviter la casse, même si depuis 20 ans, tous les cas de figure ont démontré que c’était une tactique perdante.

Ce recul marqué de la démocratie, en Europe en particulier, a deux effets majeurs sur le vieux continent. Tout d’abord, ces partis sont tous eurosceptiques et cela pose un véritable défi pour l’avenir de l’Union européenne.

Ensuite, ce sont des partis qui sont proches de la Russie, puisqu’ils sont financés par celle-ci, et donc qui rechignent à soutenir l’Ukraine dans sa résistance à l’envahisseur russe.

Cette frilosité des Européens à appuyer militairement et financièrement l’Ukraine est en grande partie responsable de l’échec de la controffensive ukrainienne cet été.

En attendant, la Russie a réussi à reconstituer ses stocks de munitions et donc à marquer des points sur le terrain. Elle a également réussi à diviser durablement les scènes politiques des États européens et à réactiver en sous-main les tensions dans l’ancien espace yougoslave qui est de nouveau au bord de l’implosion.

Cette polarisation et cette montée des populismes affectent également les Amériques, que ce soit chez nous au Canada, chez nos voisins du Sud ou encore en Argentine.

Si les alternances politiques qui ont eu lieu dans plusieurs pays sud-américains signifient bel et bien un enracinement d’un principe démocratique de base, ces sociétés n’en demeurent pas moins profondément divisées.

Pour s’en convaincre, il suffit de prendre le Chili qui, après avoir élu pour la première fois un président de gauche, Gabriel Boric, a élu une nouvelle assemblée constituante à majorité de droite nostalgique de Pinochet.

Dans ces conditions, il s’avère bien difficile de gouverner et d’entamer des réformes permettant de régler les problèmes socioéconomiques. Comme un effet d’engrenage, cela crée du ressentiment et donc des divisions et des votes désespérés pour des hurluberlus du type Javier Milei.

Montée de la pauvreté et incertitudes économiques

Même la Chine dont tout le monde annonçait que 2023 serait la grande année se trouve engluée dans des problèmes économiques structurels notamment concernant son marché immobilier (eh oui, il n’y a pas qu’au Canada!).

Les États, tous aux prises avec des taux d’inflation élevés ont mis en place des politiques monétaires et économiques pour lutter contre la hausse des prix. Or, avant d’éventuellement porter des fruits, ces politiques ralentissent l’économie et font mal aux portemonnaies des citoyens.

Et là encore, on observe un effet d’engrenage : des taux de croissance en berne signifient moins d’emplois et donc moins de personnes qui sortent de la pauvreté, moins d’enfants iront à l’école, ce qui fait qu’ils ne pourront donc pas améliorer le sort économique de leur famille. Ils seront plus vulnérables aux tactiques de recrutement des groupes armés, ce qui favorisera la multiplication des conflits. 

Aurélie Lacassagne est politicologue de formation et doyenne des Facultés de sciences humaines et de philosophie de l’Université Saint-Paul à Ottawa. Elle est membre du Comité de gouvernance du Partenariat Voies vers la prospérité.

Photo : Guillaume Lamy

Les dix lauréats de 2023 rejoignent ainsi la longue liste de quelque 80 artisans de la francophonie canadienne précédemment inscrits au palmarès annuel des dix personnalités influentes de la francophonie canadienne dressé par Francopresse.

«Les lauréats ont des parcours inspirants qui témoignent de l’ampleur des efforts et de l’engagement qu’ils consacrent à assurer la pérennité et le rayonnement des communautés francophones partout au pays», commente Martin Normand, directeur de la recherche stratégique et des relations internationales à l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne et président d’honneur du Palmarès Francopresse de 2023. Il a lui-même été lauréat au Palmarès de 2022.

Des membres de l’équipe de Francopresse et des représentants des journaux membres de Réseau.Presse ont déterminé qui s’inscrirait dans le Palmarès final, s’appuyant sur les candidatures soumises par les journaux membres de Réseau.Presse, de Saint-Jean de Terre-Neuve à Whitehorse.

Photo : Louise Tanguay

Rose-Aimée Bélanger (Ontario)

Rose-Aimée Bélanger a passé les 50 dernières années à créer du beau. Chaque biographie qui circule rappelle que la sculptrice a renoué avec l’art à l’aube de la cinquantaine, après avoir élevé une famille nombreuse. Son envolée tardive et sa discrétion n’ont cependant pas été un frein à une carrière internationale. De son studio lumineux d’Earlton, dans le Nord de l’Ontario, elle a créé des dizaines de femmes, ses «femmes rondes», qu’elle représente amoureuses, au repos ou à la cueillette de petits fruits, toujours dans des poses qui évoquent la douceur et la chaleur. Ses plus connues sont les «Chuchoteuses», trois femmes absorbées par leur conversation, installées sur un banc du Vieux-Montréal. Rose-Aimée Bélanger a souligné son 100anniversaire de naissance en juillet en dévoilant une nouvelle œuvre dans une galerie de Banff, quelques mois avant de rendre son dernier souffle.

Photo : Louise Tanguay
Photo : Louise Tanguay
Photo : Louise Tanguay
Photo : Courtoisie

Luc Bussières (Ontario)        

Depuis 25 ans, Luc Bussières se consacre à la vitalité de l’éducation universitaire dans le Nord de l’Ontario. À titre de recteur de l’Université de Hearst, poste qu’il occupe depuis 2017, il a chapeauté l’indépendance de l’établissement et joue un rôle déterminant dans la réflexion – très active – sur l’avenir de l’éducation postsecondaire en Ontario français. Le legs de Luc Bussières s’étend au-delà de l’année qui s’achève ou de son mandat de recteur. Toujours soucieux de la pérennité de l’offre universitaire à Hearst, Kapuskasing et Timmins, il a été l’un des maitres d’œuvre de la transformation de l’établissement en participant à la mise en place d’un modèle peu commun d’enseignement par bloc.

Photo : Courtoisie

Trèva Cousineau (Ontario)

Trèva Cousineau est une figure de proue de la francophonie ontarienne. Aujourd’hui établie dans la région d’Ottawa, elle influence l’ensemble de la francophonie ontarienne et canadienne depuis 50 ans. Elle n’en est pas à un honneur près. En décembre 2023, elle a été l’une des sept personnes nommées membres honoraires du Centre de la francophonie des Amériques. Dans les dernières années, elle a aussi été reçue à l’Ordre de la Pléiade et à l’Ordre de la francophonie des Amériques. Enseignante, diététiste et administratrice à la retraite, cette lève-tôt demeure fortement engagée dans son milieu. À l’heure actuelle, Trèva Cousineau siège à plusieurs comités locaux, régionaux et nationaux; elle est notamment présidente du Conseil sur le vieillissement d’Ottawa.

Photo : Courtoisie

Olivier Hussein (Nouveau-Brunswick)

L’engagement d’Olivier Hussein dépasse largement les frontières de Dieppe, où il habite. Arrivé au Canada comme réfugié en 2009, le Congolais d’origine milite depuis plusieurs années pour la diversité et l’inclusion. Ses causes? L’immigration francophone, l’intégration communautaire des immigrants et des réfugiés et l’engagement communautaire des jeunes, en particulier des jeunes racisés. En 2023, il a pressé la Ville de Fredericton de renforcer les relations avec l’Afrique francophone afin de stimuler l’immigration. Il a aussi été nommé ambassadeur du Canada au Salon de la Diaspora africaine, une plateforme qui s’intéresse au développement de l’Afrique. Il y a présenté un atelier sur l’importance du bénévolat dans l’intégration professionnelle des jeunes de la diaspora.

Photo : Courtoisie

Leslie Larbalestrier (Yukon)         

Dans le cadre de ses fonctions à la Garderie du petit cheval blanc de Whitehorse, Leslie Larbalestier a dû relever le défi du manque de personnel. Étant passée elle-même par le parcours de l’immigration, elle est en mesure d’appuyer, comprendre et épauler efficacement les nouveaux arrivants francophones qui s’installent au Yukon. En collaboration avec Jocelyne Isabelle, elle a développé une trousse d’accueil, participe activement à la recherche de logements et organise des activités sociales qui visent l’intégration des personnes immigrantes à la culture franco-yukonaise. Elle-même originaire de la Belgique, elle s’assure que l’expérience d’immigration des autres soit la plus plaisante possible. Par son approche très humaine, elle a une incidence concrète sur les nouveaux arrivants et un effet majeur sur la francophonie de Whitehorse. En février 2023, la garderie où elle travaille a reçu le prix Connexion employeurs Réseau de Développement Économique et Employabilité du Canada (RDÉE) pour son engagement envers les personnes immigrantes au Yukon.

Photo : Valérie Charbonneau

François Larocque (Ontario)

Avocat et professeur franco-ontarien, François Larocque participe activement à la recherche sur les enjeux linguistiques et à la défense des droits linguistiques de la minorité francophone au Canada. Titulaire de la Chaire de recherche sur la francophonie canadienne en droits et enjeux linguistiques, renouvelée en 2023, il agit aussi comme conseiller dans les grandes causes linguistiques et auprès du milieu associatif et communautaire. Il a notamment contribué à faire figurer les minorités linguistiques dans le projet de loi sur l’apprentissage et les services de garde (C-35) et s’est engagé dans la réforme de la Loi sur les services en français de l’Ontario et la Loi sur les langues officielles du Canada.

Photo : Ivanoh Photo

Jean-Marie Nadeau (Nouveau-Brunswick)

Jean-Marie Nadeau a joué un rôle capital dans le débat entourant le changement de nom de l’Université de Moncton. Tout a commencé par une lettre ouverte, publiée en février 2023, dans laquelle il revendiquait que l’Université de Moncton soit renommée «Université de l’Acadie»; Robert Monkton, qui a donné son nom à l’établissement, a été l’un des maitres d’œuvre de la déportation des Acadiens. Militant de longue date, il a mobilisé l’Acadie et la francophonie canadienne et a provoqué un débat d’idées. L’établissement a rejeté le changement de nom en décembre, mais qu’à cela ne tienne : il demeure un co-porte-parole très actif et déterminé du Comité citoyen pour le changement de nom de l’Université de Moncton. Soulignons par ailleurs que Jean-Marie Nadeau a consacré sa vie à la cause acadienne et à la cause syndicale.

Photo : Nicole Romanoff

Alexis Normand (Saskatchewan)

L’année 2023 «est un beau cru» pour l’autrice-compositrice-interprète jazz-folk et réalisatrice fransaskoise Alexis Normand. Son documentaire «Assez French» a mis en lumière le lien entre sa famille exogame et le français et il a été sacré meilleur film franco-canadien aux Rendez-vous Québec Cinéma. Elle a été porte-parole des Rendez-vous de la Francophonie 2023, au cours desquels son documentaire a été projeté. Toujours en 2023, elle a lancé son troisième album solo, «Mementos», un acte de validation de son identité linguistique dans le contexte anglodominant de la Saskatchewan. Elle a aussi mené une campagne dans les réseaux sociaux pour faire tomber les préjugés à l’égard des accents et lutter contre l’insécurité linguistique.

Photo : Charlène d'Entremont

Natalie Robichaud (Nouvelle-Écosse)

Natalie Robichaud porte plusieurs chapeaux : elle est directrice générale de la Société acadienne de Clare, vice-présidente du comité organisateur du Congrès mondial acadien 2024, réalisatrice et étudiante à la maitrise. Le jury du Palmarès a remarqué son souci pour la préservation du patrimoine local et acadien. À titre de directrice générale, par exemple, elle cherche depuis longtemps à comprendre, avec ses collègues, pourquoi au juste la Baie Sainte-Marie regorge de talents. En résultent plusieurs initiatives, comme la transcription et l’archivage de l’œuvre de musiciens. Natalie Robichaud travaille aussi à la réalisation d’un documentaire sur l’histoire de la musique de Clare et le retour des contes dans la région. La première du documentaire, produit par l’Office national du film, est espérée pour l’été 2024, soit pendant le Congrès mondial acadien.

Photo : Marianne Dépelteau - Francopresse

Marguerite Tölgyesi (Yukon)

Si l’engagement jeunesse avait un visage, il aurait celui de Marguerite Tölgyesi. Depuis 10 ans, elle s’investit dans la cause francophone et pour la jeunesse. Elle a entrepris son parcours bénévole au comité Jeunesse Franco-Yukon, dont elle a été présidente, avant de s’engager au sein de la Fédération de la jeunesse canadienne-française, d’abord à titre de vice-présidente puis de présidente. En 2023, on a pu la voir sur plusieurs plateformes, portant une trentaine de cocardes, pour montrer l’étendue des possibilités inhérentes à l’engagement citoyen. À 25 ans, elle demeure engagée dans divers organismes. Elle a notamment voyagé en Tunisie pour l’Organisation internationale de la Francophonie. Marguerite Tölgyesi siège au conseil d’administration de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) et œuvre comme gestionnaire, Jeunesse pour l’Association franco-yukonaise.

Sans l’objectif commun de pouvoir offrir une perspective nationale aux lecteurs des journaux locaux francophones, Francopresse n’existerait pas.

L’histoire commence en 1988 avec Yves Lusignan, le tout premier journaliste embauché par l’Association de la presse francophone (APF) qui a lancé le service de nouvelles à partir de zéro.

«J’avais un bureau, évidemment vide, un téléphone à brancher. Et ensuite, il a fallu débuter quelque part», se souvient celui qui a dû établir tous les contacts nécessaires pour faire connaitre ce nouveau service .

Pour Sylviane Lanthier, ancienne rédactrice en chef de La Liberté au Manitoba, l’apport de ce service était important pour le réseau.

«Évidemment, on trouvait ça important d’avoir un service de presse qui pouvait servir tous les Franco-Canadiens qui étaient dans tous les territoires et toutes les provinces qui pouvait acheminer de l’information, et faire des textes que les journalistes locaux ne pouvaient pas faire», indique celle qui fut également membre du conseil d’administration de l’APF.

La fondation du service de nouvelles

Pour en savoir plus sur les origines du service de nouvelles, consultez la vidéo ci-dessous, dans laquelle on retrouve Yves Lusignan, premier journaliste à Francopresse, Sylviane Lanthier, ancienne rédactrice en chef de La Liberté et Marcia Enman, directrice générale de La Voix acadienne, à l’Île-du-Prince-Édouard.

L’évolution technologique

Au cours des 35 dernières années, la technologie a transformé la transmission de l’information à tous les égards.

Du télécopieur au courrier électronique, les artisans de la presse écrite francophone ont dû adapter leurs méthodes de travail.

Marcia Enman, qui œuvre pour La Voix acadienne depuis 1978, se souvient de la machinerie qu’il fallait utiliser pour publier un journal à chaque semaine.

«Nous autres, on avait des grosses machines. Ça s’appelait des CompuGraph. C’était une grosse dactylo. Beaucoup plus gros qu’un ordinateur. Il y avait des liquides dans ça. On tapait un texte et quand ça sortait, il fallait coller ça sur des pages de montage, etc.»

«Ensuite, est arrivé le miracle d’Internet», se souvient Yves Lusignan qui a travaillé au service de nouvelles de l’APF pendant près de quinze ans. L’APF, se souvient-il, a été très rapide pour faciliter la connexion à Internet des journaux membres de son réseau.

«On était assez en avance pour ça, tellement que je me rappelle, qu’un journaliste de Radio-Canada à Ottawa était venu au bureau faire un reportage sur cette merveille qu’on appelait Internet», raconte Yves Lusignan avec le sourire.

Consultez les témoignages de Marcia Enman, Yves Lusignan, Étienne Alary, ancien journaliste de Francopresse et directeur intérimaire au journal Le Franco, en Alberta, et Odette Bussière, directrice du journal Le Goût de vivre dans la région de Simcoe, en Ontario.

Francopresse est né

Au fil du temps, le service de nouvelles de l’APF est devenu Francopresse. En 2009, le premier site Francopresse.ca était mis en ligne pour diffuser ses contenus dans toute la francophonie canadienne.

Dans un souci de donner une plus grande visibilité aux nouvelles locales d’un peu partout au pays, Francopresse est aussi devenu une plateforme de diffusion des nouvelles produites dans les journaux membres de Réseau.Presse.

«Le fait de pouvoir avoir accès à Francopresse et avoir accès à des articles qui se consacrent à cette francophonie canadienne, c’est essentiel, c’est incontournable», estime Étienne Alary, directeur intérimaire du journal Le Franco, en Alberta.

Pour Odette Bussière, directrice du Goût de vivre, dans la région de Simcoe, en Ontario, Francopresse a contribué au rapprochement des francophonies au pays.

«Avec tout ce qui est couvert à partir de Francopresse, avec toute l’information qu’on peut obtenir, c’est comme si le pays n’est pas aussi grand qu’avant. […] On se rend compte que même si on ne vient pas nécessairement de la même province ou du même territoire, on finit par connaitre les francophones d’un bout à l’autre. Ça permet ces liens-là entre les diverses communautés.»

Un impact francophone

Consultez les témoignages de Yves Lusignan, Odette Bussière, Syliane Lanthier, Étienne Alary et Marcia Enman.

Aujourd’hui, Francopresse compte une équipe de journalistes solide, installée dans quatre provinces; une équipe engagée pour qui le journalisme de qualité est une priorité.

Vous l’avez sans doute lu ou entendu quelque part. Le mercredi 29 novembre dernier, le Comité international olympique a annoncé ouvrir un «dialogue ciblé» avec la France pour les Jeux olympiques d’hiver de 2030.

Une manière polie d’annoncer que, sauf catastrophe majeure, les Alpes françaises succèderont à Milan et à Cortina d’Ampezzo, villes italiennes hôtes de l’édition de 2026.

Sans doute échaudés par les nombreux déboires que connait l’organisation des Jeux olympiques de Paris 2024, les Français n’ont pas sauté de joie en apprenant la nouvelle. Ils risquent de s’en mordre les doigts, car c’est peut-être bien une des toutes dernières fois que la France pourra accueillir cette prestigieuse compétition hivernale.

À lire aussi : Les Jeux olympiques, oui, mais à quel prix?

En aout dernier, une étude a montré qu’avec un réchauffement de la planète de + 3 °C, 91 % des stations de ski européennes seraient menacées de fermeture d’ici 2100.

En France, où près de 150 stations font déjà partie de l’histoire ancienne, skier dans les Pyrénées pourrait devenir quasi impossible vu que 98 % des stations sont en danger.

En première ligne, les athlètes internationaux ont déjà dû faire évoluer leur pratique. Terminés les stages estivaux sur les glaciers alpins. L’Amérique du Sud est devenue la nouvelle destination privilégiée pour leurs entrainements de présaison.

Déjà limitées dans le temps, les compétitions annuelles sont, elles, de plus en plus incertaines. Si cette saison ce sont les chutes de neige et les fortes rafales qui les ont mises à mal, l’hiver dernier, c’était les températures anormalement élevées en Europe entre mi-décembre et mi-janvier qui ont entrainé des annulations en cascade.

À tel point que plusieurs athlètes, dont la vedette féminine américaine de ski alpin Mikaela Shiffrin, ont appelé la Fédération internationale de ski et de snowboard à faire plus d’efforts en faveur de l’environnement.

À tel point aussi que le biathlète français Quentin Fillon Maillet a dû ressortir ses skis à roulettes, qu’il n’utilise normalement que l’été, pour pouvoir s’entrainer lors de la période de Noël dans le massif du Jura.

Quelques arpents de neige… en moins

Si les canons à neige parviennent parfois à sauver les meubles, personne n’est dupe.

De plus en plus de compétitions de ski de fond se déroulent sur de minces pistes enneigées, dont la blancheur tranche singulièrement avec le reste du décor, presque printanier.

On se souvient aussi des controverses entourant les derniers Jeux olympiques d’hiver, qui se sont disputés à Pékin en 2022, dans une zone géographique qui ne reçoit que 3 cm de neige par année. Le monde à l’envers.

Au Canada, la problématique est plus difficile à saisir. De façon contrintuitive, certains chercheurs ont montré que le réchauffement climatique va de pair avec une hausse des chutes de neige, en raison du déplacement de l’air arctique vers le sud.

Une autre étude québécoise de 2019 prédit que les stations de ski vont devoir s’adapter d’ici 2050, parce que la saison risque d’être réduite de 10 à 20 jours et la longueur des pistes de 20 à 30 %.

Des athlètes de Nouvelle-Écosse ont témoigné l’hiver dernier de leurs difficultés à s’entrainer sur leurs terres et ont dû voyager au Nouveau-Brunswick ou au Québec pour se préparer convenablement.

«Nos centres de ski n’ont pas été en mesure de fabriquer assez de neige et de recevoir suffisamment de neige naturelle pour construire des parcours convenables», expliquait à Radio-Canada Alex Ryan, l’entraineur-chef de l’équipe provinciale de style libre et directeur technique de Planche à neige Nouvelle-Écosse.

Du ski au milieu du désert

Rassurez-vous néanmoins, le génie humain est en train de trouver la parade pour que nous puissions continuer à skier en toute tranquillité.

Puisque la neige se raréfie dans les régions où elle abondait historiquement, allons donc dans les pays où elle n’existait pas!

Vous avez surement entendu parler de la plus grande piste de ski intérieure, qui se situe dans un centre commercial de Dubaï? Et bien, ça a donné des idées au voisin saoudien, qui va accueillir les Jeux asiatiques d’hiver de 2029.

Oui oui, vous avez bien lu, des épreuves de ski, de planche à neige et de patins vont se dérouler dans un pays désertique, aux températures élevées, même si elles sont parfois légèrement négatives dans les montagnes du Nord-Est (mais les précipitations y sont faibles).

Pour cela, le pays du Golfe, qui ne se refuse rien, prévoit de construire une mégalopole futuriste nommée Neom, moyennant des centaines de milliards de dollars.

Tout cela n’est pas vraiment au gout de Greenpeace, qui dénonce un projet dangereux pour les écosystèmes de la région.

Polluer pour contrer les effets du réchauffement climatique, c’est le serpent qui se mord la queue. Skions donc dans la péninsule arabique. Cela nous permettra, dans quelques années, d’assister au Paris-Dakar dans les Rocheuses canadiennes.

Timothée Loubière est journaliste pupitreur au quotidien Le Devoir. Avant de poser ses valises au Québec en 2022, il était journaliste sportif en France, notamment au journal L’Équipe.

Sur les réseaux sociaux, à la télévision et dans les journaux : des images de bébés morts et des corps empilés, des fake news, des stratégies médiatiques parfaitement huilées. La terreur envoyée directement dans nos rétines, qui nous empêche de réfléchir, de réagir.

L’ignorance, face à la complexité d’un conflit qui s’étale depuis 75 ans, qui nous empêche de prendre position. Par peur de mal dire, de mal faire, de mal comprendre. L’envie de laisser ça aux autres, à ceux et celles qui connaissent les enjeux, qui les maitrisent.

Mais nous ne pouvons rester sans rien dire, sans rien faire. Nous ne pouvons être complices.

Le 7 octobre dernier, Israël sombrait dans l’horreur. En l’espace de quelques heures, 1200 civils sont massacrés par le Hamas, aidé par d’autres groupes, dans les kibboutz frontaliers de Gaza.

Les représailles ne se font pas attendre : le gouvernement israélien lance une vaste offensive militaire sur l’enclave palestinienne.

Deux mois plus tard, les bombes continuent de pleuvoir. Près de 18 000 Gazaouis ont été tués depuis le début des hostilités, dont plus de 5 000 enfants. On estime à 50 000 le nombre de personnes blessées, et plus de 3 000 personnes sont portées disparues, probablement ensevelies sous les décombres.

Plus de la moitié de la population vit actuellement dans des tentes et autres abris de fortune.

Les tirs ciblent également les hôpitaux et les infrastructures vitales, tels que les routes, les réservoirs d’eau et les moyens de transport, ce qui a pour conséquences de priver la population de ses droits les plus élémentaires.

N’ayons pas peur des mots

Bien entendu, l’attaque du Hamas est impardonnable. Les crimes contre l’humanité perpétrés le 7 octobre, et notamment les violences sexuelles commises sur des femmes israéliennes, doivent être sanctionnés. Le recours au viol comme arme de guerre est une ignominie sans nom.

Mais nous assistons aujourd’hui à l’extermination pure et simple du peuple palestinien par les forces israéliennes. À ce qu’il nous faut nommer un génocide.

Nous pouvons à la fois condamner fermement les actes du 7 octobre et soutenir le peuple palestinien. Les deux positions ne sont pas antagonistes.

Bien au contraire, il est de notre devoir de rappeler que ces combats sont intrinsèquement liés : la libération des femmes et des minorités est indissociable de la libération des peuples opprimés.

Nous ne pouvons nous libérer du patriarcat sans renverser les systèmes coloniaux, capitalistes et suprématistes blancs du monde entier.

Voilà plus de sept décennies que la population palestinienne endure et résiste avec une détermination sans faille à l’occupation de ses terres et à la violation constante de ses droits fondamentaux.

Ces violations comprennent des déplacements forcés, des arrestations arbitraires, des restrictions sévères à la liberté de mouvement et un accès limité à l’eau potable et aux soins de santé.

Tout cela sous le regard complice de la communauté internationale.

Ne restons pas les bras croisés

Les décennies de tensions, de guerres, d’occupation et de revendications territoriales ont créé un cycle de violence difficile à rompre et ont mené aux conditions idéales du drame qui se joue sous nos yeux.

Nous ne pouvons plus aujourd’hui détourner le regard.

Nous devons exiger un cessez-le-feu absolu et la libération des otages israéliens et palestiniens.

Nous devons nous mobiliser et intervenir de toutes les manières dont nous en avons le pouvoir collectif, que ce soit par le boycottage des entreprises qui soutiennent Israël ou en tenant les personnes que nous portons au pouvoir responsables de leur absence de réaction.

Partout dans les rues, les mobilisations se multiplient. Rejoignons-les. Unissons nos voix.

«Je ne suis pas libre tant que n’importe quelle autre femme est privée de sa liberté, même si ses chaines sont très différentes des miennes», écrit la poétesse et militante féministe américaine Audre Lorde.

Nous ne serons jamais libres tant que la Palestine ne le sera pas. Agissons, maintenant.

Originaire de Belgique, Julie Gillet est titulaire d’une maitrise en journalisme. Militante éprise de justice sociale, voici près de quinze ans qu’elle travaille dans le secteur communautaire francophone et s’intéresse aux questions d’égalité entre les genres. Elle tire la force de son engagement dans la convergence des luttes féministes, environnementales et antiracistes. Elle vit aujourd’hui à Moncton, au Nouveau-Brunswick.

Cette fois-ci, il s’agit de la société CBC/Radio-Canada, forcée de faire des économies substantielles au cours des prochaines années. Son budget annuel de 2 milliards de dollars doit être amputé de 125 millions de dollars (soit plus de 6 % de ses dépenses).

Pour y parvenir, la société d’État a choisi de réduire ses effectifs, abolissant 800 postes, soit 10 % de sa main-d’œuvre.

On s’attendait à de mauvaises nouvelles. On sait que le secteur télévisuel est en pleine transformation au Canada et que la concurrence des gens du Web (Netflix, Amazon, Apple, Disney, etc.) est féroce. Cette transformation ne touche pas uniquement le milieu télévisuel du divertissement, mais aussi celui de l’information.

On le comprend donc, l’univers médiatique traverse une période de turbulence importante.

Il est encore trop tôt pour savoir ce qui résultera de ces changements, mais plusieurs observateurs sont préoccupés par ce que l’avenir semble nous réserver. Aurons-nous encore des productions qui répondent à notre culture? De l’information de qualité, qu’elle soit régionale ou internationale?

Égalité ne signifie pas équité

Mais ce qui est tout aussi troublant dans la décision de CBC/Radio-Canada, c’est qu’encore une fois on ne prend pas au sérieux l’inégalité des chances et des moyens entre les deux communautés linguistiques du pays.

Les compressions toucheront en parts égales les secteurs français et anglais de l’organisation. Appelée à justifier cette décision, la présidente-directrice générale de CBC/Radio-Canada, Catherine Tait, affirmait que «tous les secteurs sont mis à contribution. Nous sommes une seule et même organisation».

Voilà le problème. Les organisations canadiennes bilingues sont incapables de fournir des services en français adéquats.

Nous le voyons dans le secteur de la santé (est-il nécessaire de rappeler les réformes de Blain Higgs au Nouveau-Brunswick?), dans le secteur de l’éducation (pensons à l’Université Laurentienne en Ontario, au campus Saint-Jean en Alberta), du transport (Air Canada, les aéroports) et maintenant dans celui des médias.

Un idéal révolu?

Il est temps de se demander si l’idéal du bilinguisme peut encore être défendu au Canada.

Au départ, les organisations bilingues étaient perçues comme un moyen d’aider les communautés linguistiques minoritaires. Il s’agissait alors de tirer profit de la mise en commun de ressources. Grâce aux économies que font les grandes organisations, on pouvait ainsi mieux répondre aux besoins des communautés minoritaires.

Toutefois, la situation s’est renversée du tout au tout.

Maintenant, on ne protège plus les communautés linguistiques minoritaires. On les met à contribution pour régler les problèmes de la majorité linguistique.

C’est exactement ce qui se passe actuellement à CBC/Radio-Canada. Le public anglais délaisse le diffuseur public, alors qu’il existe encore un public fidèle pour le secteur français.

Par exemple, pour la télévision généraliste, la part de marché de l’auditoire de CBC était de 4,4 % en 2022, en deçà de la cible qui lui avait été fixée, comparativement à 23,2 % pour Radio-Canada, ce qui est supérieur aux prévisions. On observe les mêmes tendances pour la radio.

Pourtant, les réductions seront les mêmes dans les deux secteurs linguistiques. Par exemple, des 500 employés affectés à la production qui perdront leur emploi, 250 œuvrent dans le secteur français et 250 dans le secteur anglais.

On demande donc à Radio-Canada de contribuer à l’assainissement budgétaire des programmes de la CBC.

Comment régler le problème?

Avant tout, il faut revoir le financement de CBC/Radio-Canada.

Certains pourraient penser que c’est une mauvaise idée, car en finançant davantage la société d’État, on n’encourage pas celle-ci à être à l’écoute des demandes du public. C’est un argument valable.

Par contre, est-ce qu’un diffuseur public doit plaire au plus grand nombre? La réponse est justement non.

Les diffuseurs publics existent pour offrir des services que ne peuvent pas ou ne veulent pas offrir les diffuseurs privés, soit parce qu’ils sont trop chers, soit parce qu’ils ne sont pas rentables financièrement. Ceci se traduit donc par l’élaboration d’une programmation qui cible les petits marchés ou encore qui coute très chère à produire.

Le prix à payer

Voilà ce qui devrait être le mandat de Radio-Canada. Mais sommes-nous prêts à payer le prix de ces services?

Quand on compare le financement canadien à celui d’autres pays, on constate rapidement que la réponse est non.

Une étude publiée en 2021 dans The International Journal of Press/Politics montre que le Canada n’est certainement pas un premier de classe. Selon les calculs des auteurs de l’étude, le financement public de CBC/Radio-Canada s’élève à 26,51 $ US par habitant par année (soit environ 36,00 $ CAN), comparativement à 142,42 $ en Allemagne, 110,73 $ en Norvège, 101,29 $ en Finlande, 93,16 $ au Danemark et 89,15 $ en Islande.

La France et le Royaume-Uni, deux pays avec lesquels on aime bien se comparer, versent un financement annuel par habitant de 75,89 $ US et 81,30 $ US respectivement, soit trois fois plus que le Canada.

Si on ne faisait que doubler le financement actuel versé à CBC/Radio-Canada, ce qui ne permettrait certainement pas de hisser le Canada parmi les pays les plus généreux ni même d’atteindre les budgets français et britanniques, la société d’État ne serait plus déficitaire.

Elle pourrait même fonctionner sans obtenir d’autres revenus, comme ceux de la publicité et des abonnements.

De plus, si on décidait de verser un montant un peu plus élevé dédié spécifiquement à la production des services en français, Radio-Canada pourrait devenir indépendante et ainsi faire ses propres choix.

Lorsqu’il a modernisé la Loi sur les langues officielles, le gouvernement fédéral avait reconnu explicitement la nécessité d’adopter une approche asymétrique pour protéger les intérêts des minorités linguistiques.

C’est l’usage du français qui est menacé au pays, pas celui de l’anglais. Il serait temps que le gouvernement fasse le même exercice de réflexion à propos de son diffuseur public.

Le gouvernement devrait sérieusement envisager de créer une entité entièrement libre de faire ses propres choix en fonction des intérêts de la minorité francophone de tout le pays.

Geneviève Tellier est professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les politiques budgétaires des gouvernements canadiens. Elle commente régulièrement l’actualité politique et les enjeux liés à la francophonie dans les médias de tout le pays.

L’enjeu de cette conférence est pourtant clair. Les gaz à effet de serre mènent au réchauffement climatique et celui-ci mène à des désastres écologiques, des pertes de territoire, des déplacements, des dépossessions, des conséquences affreuses pour la santé et pour les droits de la personne, ainsi que des morts – sans compter les couts économiques.

À lire aussi : Climat : crise et catastrophe (Chronique)

La COP28, ou 28e Conférence des Parties, rassemble les pays qui ont adhéré à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques lors du Sommet de la Terre à Rio en 1992. Cette convention crée les conférences annuelles et encadre leur gouvernance.

Toutefois, les effets de ces conférences sont limités.

Malgré certains résultats encourageants et la prise de conscience populaire qui a suivi, le protocole de Kyoto signé en 1997 et qui émane des COP3 à COP6 est vu depuis longtemps comme un échec.

Il en va de même pour l’Accord de Paris, signé en 2015 (COP21).

Tandis que les émissions de gaz à effet de serre devaient diminuer de 43 % avant 2030, les plans d’action en place ne permettraient qu’une diminution de 2 %.

Et encore, ce ne sont que des objectifs (insuffisants), et le progrès réel du Canada demeure encore bien en deçà de ses visées.

Outre le fait que les engagements ne sont pas respectés, les critiques formulées à l’endroit des gouvernements mondiaux sont nombreuses.

La justice environnementale

Depuis la COP1 de 1995, ces rencontres ont également été le terrain d’un affrontement entre les pays responsables du réchauffement climatique et ceux qui en souffrent le plus.

Avec les principes de précaution, de responsabilités communes et différenciées, et du droit au développement, la Convention-cadre reconnait déjà la justice comme un enjeu central de la question climatique.

Les changements climatiques toucheront évidemment les générations futures, mais ils ont déjà des conséquences grandissantes dans le monde.

Les pays en développement sont les plus affectés par ces changements, alors même qu’ils en sont les moins responsables.

Si leur transition vers de nouvelles technologies est appuyée par un important «fonds vert», la gouvernance de l’extraction des minéraux nécessaires à ces technologies, son incidence sur les populations locales, et la distribution des profits qui en découlent demeurent des enjeux de taille.

Un accord a déjà été signé pour la mise en place d’un fonds pour venir en aide aux pays qui subissent des pertes et dommages attribuables aux changements climatiques.

Toutefois, ce fonds est pour l’instant d’un total d’environ 400 millions $ US. Le Canada s’est engagé à y verser 16 millions de dollars, tandis qu’à lui seul il a dépensé 4,5 milliards de dollars canadiens pour l’achat d’un pipeline en 2019.

Démocratie et lobbying

Les COP sont l’occasion pour plusieurs ONG de contribuer à la discussion avec leurs connaissances fondées sur des perspectives expertes, pour plusieurs en relation au bien public. Des organisations militantes avec moins de moyens manifestent également près du site de la conférence.

Mais il s’y trouve aussi des lobbyistes employés par les compagnies d’énergie fossile. Les journalistes de la plateforme Heated estiment qu’au moins 600 d’entre eux participent à la conférence.

Depuis 2003, 7 200 accréditations ont été accordées à de tels lobbyistes, ce qui a mené le Canada à restreindre (sans pour autant bannir) leur présence à son pavillon de la COP28.

À l’échelle planétaire, ces lobbyistes ont pour mandat d’empêcher les mesures qui nuiraient aux profits des compagnies productrices d’énergie fossile, comme celles responsables des émissions de gaz à effet de serre.

Au Canada, ces lobbyistes ont une influence sur les politiques et objectifs des grandes initiatives gouvernementales et ils freinent l’action liée au changement climatique.

Ce qui se passe à la COP28 est encore plus grave : le président de la conférence, le sultan Ahmed Al Jaber, est ministre de l’Industrie et des Technologies avancées des Émirats arabes unis – mais aussi PDG de la compagnie pétrolière émiratie ADNOC.

L’octroi de l’organisation de la COP28 à Dubaï a souvent été critiqué.

Al Jaber aurait cherché à se servir de la conférence pour tenir des discussions commerciales autour de son exportation de gaz naturel liquéfié et pour détourner l’attention de l’inaction sur les énergies fossiles. Il voudrait utiliser les investissements dans l’énergie renouvelable comme écran, tout en améliorant l’image des Émirats arabes unis.

Il a par ailleurs déclaré que la sortie des énergies fossiles ne donnerait pas de résultats appuyés par la science – ce qui est faux – avant d’affirmer qu’il avait été mal interprété, mais en changeant son message.

Non pas des solutions, mais une volonté

On connait les accords et les solutions nécessaires. Les négociations et accords signés dans les premiers jours montrent la tenue de discussions sur la réduction du méthane, ainsi qu’un regain d’intérêt pour l’énergie nucléaire, mais également le refus persistant de toute sortie des énergies fossiles.

Toute initiative qui ne passe pas par la sortie des énergies fossiles – soit une élimination de celles-ci et non une réduction – ne réussira pas à contrer un réchauffement climatique de 1,5 degré et risque plutôt de nous amener à une augmentation de 3 degrés.

De tels changements de direction et la prise de responsabilité collective qui les accompagne ne seront possibles que par la démocratisation et un souci de la justice.

En diminuant l’influence des compagnies qui ont tout à perdre de cette direction, il deviendra plus facile de faire passer à l’avant-plan la volonté de changement de voie des citoyens et citoyennes non seulement des pays les plus touchés par les changements climatiques, mais de l’ensemble de la planète.

Jérôme Melançon est professeur agrégé en études francophones et interculturelles ainsi qu’en philosophie à l’Université de Regina. Ses recherches portent notamment sur la réconciliation, l’autochtonisation des universités et les relations entre peuples autochtones et non autochtones, sur les communautés francophones en situation minoritaire et plus largement sur les problèmes liés à la coexistence. Il est l’auteur et le directeur de nombreux travaux sur le philosophe Maurice Merleau-Ponty, dont «La politique dans l’adversité. Merleau-Ponty aux marges de la philosophie» (Metispresses, 2018).

Avant d’entamer mon décompte de 2023, il me serait impossible de ne pas rendre hommage à Karl Tremblay, chanteur des Cowboys Fringants, emporté par un cancer à la mi-novembre.

Même si le groupe a surtout tourné au Québec et en Europe, il a tout de même touché le cœur de plusieurs Franco-Canadiens et sa musique a occupé et continue d’occuper une place sur plusieurs stations de radio francophones hors Québec.

Les chansons des Cowboys, que ce soit Ti-cul, Les Étoiles filantes, Sur mon épaule ou encore L’Amérique pleure pour ne nommer que celles-là, savent apporter un moment paisible dans notre journée.

Tous, d’un bout à l’autre du pays et au-delà, nous avons été touchés par la voix réconfortante de Karl Tremblay, une voix dont le charisme nous rappelait celle d’un grand frère, d’un ami, d’un confident. Cette voix ne sera jamais oubliée.

Sur mon épaule

10e position : Rien qu’un animal, Matt Stern

Pour amorcer ce top 10, je vous propose le premier opus francophone de l’auteur-compositeur-interprète Matt Stern, natif de Montréal, maintenant établi dans la communauté francophone de Victoria, en Colombie-Britannique.

Cet artiste de l’Ouest canadien, nous captive avec Rien qu’un animal, un album pop urbain, qui a du panache et qui se termine sur un air funk pour nous faire danser. La fluidité des orchestrations est remarquable. De la bonne pop.

Rien qu'un animal
Album : Rien qu’un animal

9e position : Enfiler mes bottes, Émilie Landry

Dans son troisième opus francophone, la jeune autrice-compositrice-interprète Émilie Landry, originaire du Nouveau-Brunswick, nous invite à découvrir son monde personnel, plus intérieur.

L’album est rempli de superbes textes, qui nous interpellent autant que les musiques country folks. Ce produit est gage d’une belle maturité, qui saura captiver l’auditeur.

J’mérite mieux
Album : Enfiler mes bottes

8e position : Un monde de dissonances, Sirène & Matelot

Avec ce disque, le groupe Sirène & Matelot nous donne un rendez-vous magique. Ce duo d’auteurs-compositeurs-interprètes de l’Île-du-Prince-Édouard, composé de Patricia Richard et Lennie Gallant, est tout en sobriété.

Des musiques folks bien fignolées servent de toile de fond à des textes magnifiques, qui nous racontent la vie dans toutes ses nuances. La réalisation de l’album, signée Davy Gallant, sait mettre en valeur le duo.

Un monde de dissonances
Album : Un monde de dissonances

7e position : Tavernier, Claude Cormier

Le Madelinot Claude Cormier fait un retour sur disque avec Tavernier. Cet artiste, qui en est à son 8e opus, réussit encore une fois à séduire ses admirateurs et à en charmer de nouveaux.

Avec des musiques tantôt entrainantes, tantôt berçantes, il nous livre encore des textes puissants qui nous captivent mot après mot. Son timbre de voix est toujours aussi réconfortant après plus de 20 ans de carrière.

C’est pas d’main la veille
Album : Tavernier

6e position : Les Fils du père, Les Gars du Nord

La sixième place revient à un des super groupes acadiens de l’heure, Les Gars du Nord. Leur album Les Fils du père est une bombe d’énergie contagieuse, réalisé par deux des sept membres du groupe, Jean-Frédéric Lizotte et Wilfred LeBouthillier. Ce dernier a d’ailleurs coécrit les musiques et textes avec un autre membre, Danny Boudreau.

Les paroles sont solides et nous transportent dans le monde des pêcheurs, de la mer et des souvenirs. Dès le début du disque, nous sommes envoutés par la puissance des musiques et des voix.

Les hardes cirées
Album : Les Fils du père

5e position : À boire deboutte, Salebarbes

Au cinquième rang, on retrouve l’autre super groupe de l’Acadie, Salebarbes. Le quintette, qui a reçu les Félix de la Chanson de l’année et du Spectacle de l’année – Variété et réinterprétation, nous propose une formule gagnante, mais encore plus contagieuse.

Avec À boire deboutte, les cinq auteurs-compositeurs-interprètes nous offrent un album solide, entrainant et captivant, qui montre bien tout le plaisir qu’ils ont à partager leur art avec le public.

Gin à l’eau salée
Album : À boire deboutte

4e position : For The Giving / Sans rien donner, Aleksi Campagne

Avec un nom connu dans l’univers musical franco-canadien, Aleksi Campagne nous propose un album double des plus prenants, For The Giving/Sans rien donner.

Dix chansons en versions anglaise et française. Un opus pop, folk, aux arrangements très orchestraux. L’artiste montréalais nous ensorcèle avec sa voix unique et ses prestations profondes qui nous amènent ailleurs. On se laisse aisément séduire par la richesse de chaque chanson.

Encore une autre journée
Album : For The Giving / Sans rien donner

3e position : Sous la fourrure, Squerl noir

Mon top 3 débute avec une autre belle découverte, qui a été lancée à la fin d’aout. L’auteur-compositeur-interprète d’Ottawa David Robquin, alias Squerl noir, a su trouver les musiques parfaites pour accompagner des mots justes, afin de réussir à interpeler des auditeurs en quête de fraicheur auditive.

La réalisation de Sous la fourrure est d’une pureté exceptionnelle, ce qui en fait un produit hors du commun. L’album s’accompagne d’un livre du même titre, qui est à la fois une réflexion sur la création artistique, mais aussi un recueil de textes revenant sur le processus de création du disque.

Irrationnels
Album : Sous la fourrure

2e position : Boréale, Mimi O’Bonsawin

Depuis presque 10 ans, Mimi O’Bonsawin ne cesse d’émerveiller avec sa musique. L’artiste franco-ontarienne abénaquise partage sa culture et ses origines autant dans la langue de Molière que celle de Shakespeare.

Elle nous offrait en octobre Boréale, un album entièrement en français. Avec une voix presque divine, des musiques profondes aux accents autochtones, Mimi O’Bonsawin nous plonge dans la richesse de son âme et nous raconte le duel entre ses cultures franco-ontarienne et abénaquise. On sent toute la fierté de ses origines.

Dis-moi ce que tu vois
Album : Boréale

1e position : Maison vent, Willows

Mon coup de cœur de la francophonie musicale canadienne pour cette année est aussi un rendez-vous avec la culture autochtone et métisse.

Geneviève Toupin évolue sur la scène musicale franco-canadienne depuis 14 ans, mais c’est en 2014 qu’elle nous a présenté son alter ego, Willows. Cette année, elle nous a épatés avec un album qui rendait hommage à ses origines mitchif.

Maison vent est un rendez-vous des plus attendrissants, où l’auteure-compositrice-interprète franco-manitobaine nous dévoile toute sa richesse et la fierté de ses racines. Tel un diamant pur, son timbre de voix vient nous caresser à la moindre note. Elle nous livre un petit bijou des plus généreux, avec 14 chansons, qui nous dévoilent tous son univers.

Je reviens toujours
Album : Maison vent

Le top 10 de 2023 est une autre belle preuve que la francophonie musicale est bien vivante. Je tends maintenant l’oreille vers 2024, afin de découvrir d’autres chefs-d’œuvre à vous faire connaitre.

Bonne écoute et bonnes découvertes musicales.

Marc Lalonde, dit Lalonde des ondes, est chroniqueur musical depuis plus de 25 ans au sein de la francophonie musicale canadienne et animateur de l’émission radiophonique Can-Rock. Il se fait un malin plaisir à partager cette richesse dans 16 stations de radio de tout le pays chaque semaine.

Le 19 novembre dernier, les Argentins ont élu à la magistrature suprême Javier Milei. Politicien libertarien et populiste, il nous ferait presque regretter son acolyte Bolsonaro au Brésil. Le 22 novembre, lors des législatives, les Néerlandais portaient en tête du scrutin l’extrême droite de Geert Wilders, qui a recueilli 25 % des suffrages contre 11 % en 2021.

Un phénomène mondialisé                                         

L’un des éléments qui nous permettent de saisir l’une des causes profondes de cette montée des populismes est le fait qu’elle s’observe sur tous les continents.

Que ce soit en Amérique du Sud avec Milei et Bolsonaro; en Amérique du Nord avec Trump – toujours aussi haut dans les sondages – et Poilievre; en Europe, où la liste serait trop longue à dresser; en Asie avec l’indéboulonnable Modi en Inde ou Marcos Junior aux Philippines; jusqu’en Afrique, où une série de coups d’État a propulsé aux manettes du pouvoir des caporaux aux discours simplistes pour ne pas dire simplets.

L’aspect mondialisé du populisme démontre le rôle clé joué par un système ultracapitaliste débridé, qui non seulement accroit toujours et encore plus l’écart entre le 1 % et le reste de la planète, mais qui en plus le fait en toute impunité et avec un culot effronté.

Sans honte ni vergogne

Un culot inégalé donc. Parce que non contents de s’en mettre plein les poches alors qu’ils demandent sans cesse aux petites gens de se serrer la ceinture, les rares bénéficiaires et artisans des systèmes populistes dévastateurs humilient.

Comment le personnel infirmier et le personnel enseignant du Québec, qui sont payés des clopinettes, pourraient-ils ne pas se sentir humiliés alors qu’en pleine négociation, le gouvernement annonce fièrement son intention de dépenser sept-millions de dollars pour deux matchs préparatoires de hockey d’une équipe américaine?

Comment les Franco-Ontariens pourraient-ils ne pas se sentir humiliés alors que des copains du gouvernement, dont certains sont parties prenantes du fiasco de l’Université Laurentienne, balancent un rapport inepte nous intimant d’oublier nos institutions francophones acquises récemment après des décennies de lutte?

Il n’y a jamais d’argent pour les services de santé, le logement, la transition écologique, l’éducation, mais les gouvernements de par le monde n’hésitent pas une minute à subventionner à coups de milliards les grandes compagnies pétrolières et retenir les services-conseils prétendument indispensables de la firme McKinsey.

Ce sans-gêne constant de la part des gouvernants pousse les citoyens vers les leadeurs populistes.

Il y a quelque chose de pourri au royaume du capitalisme ultralibéral que l’on ne retrouvait pas dans le capitalisme il y a un siècle quand les grands chefs d’entreprise se gardaient une petite gêne, même s’ils se frottaient les mains discrètement devant les boucheries de 1914-1918 qui faisaient accroitre leurs profits.

Le creusement des inégalités

La pandémie a mis en lumière comment les malheurs des uns (enfin de la plupart) faisaient le bonheur de (quelques-)uns. Le 1 % a accru ses richesses alors que des dizaines de millions de personnes ont glissé dans la pauvreté.

Depuis, l’envolée des prix de l’immobilier conjuguée à des taux d’intérêt à la hausse et à une inflation élevée fait en sorte qu’un nombre croissant de personnes des classes moyennes décrochent et rejoignent le lot des précaires.

L’ascenseur social qui avait fonctionné pendant les Trente Glorieuses est en panne.

Il est beaucoup plus difficile pour les deux dernières générations de vivre une mobilité sociale positive. Même la très conservatrice Organisation de coopération et de développement économiques le reconnait dans divers rapports.

Alors forcément cela est source de frustrations énormes pour toutes les générations. D’où un ras-le-bol généralisé, qui se traduit par une sanction électorale des élites politiques traditionnelles.

Selon Statistique Canada, «[l]’écart de la valeur nette entre les patrimoines les plus élevés et les plus bas a augmenté de 1,1 point de pourcentage au premier trimestre de 2023 par rapport au même trimestre un an plus tôt. Il s’agit de l’augmentation la plus rapide jamais enregistrée pour ces estimations, qui remonte à 2010». 

Un soutien irrationnel aux populismes

Une chose demeure frappante quand on regarde les intentions de vote des citoyens en faveur des candidats populistes : l’irrationalité.

Qu’est-ce à dire? Tout simplement que ces personnes vont voter pour des candidats qui, loin de résoudre leurs problèmes, ne feront que les aggraver.

Trump n’a pas remis la classe ouvrière blanche au travail. Marine Le Pen, née dans une famille bourgeoise, ayant habité dans un château, ne sait pas ce qu’est le dur labeur. Pierre Poilievre a été élu député à 25 ans et depuis a écumé les maroquins ministériels et les bancs de la Chambre. Comment pourrait-il savoir ce qu’est le quotidien des travailleurs canadiens?

Si l’on veut combattre le populisme, il ne s’agit donc pas de continuer à prendre les électeurs pour des imbéciles, mais de commencer par les respecter; de s’attaquer réellement aux grands problèmes socioéconomiques; d’arrêter les collusions et corruptions entre petits amis; et de mettre en place un système fiscal juste permettant de réduire les inégalités.

Aurélie Lacassagne est politicologue de formation et doyenne des Facultés de sciences humaines et de philosophie de l’Université Saint-Paul à Ottawa. Elle est membre du Comité de gouvernance du Partenariat Voies vers la prospérité.