le Samedi 15 novembre 2025

Pour l’année 2023, les Rendez-vous de la Francophonie prennent pour thème «Célébrations». La Journée internationale de la Francophonie porte quant à elle sur «321 millions de francophones, des milliards de contenus culturels».

Certes, de telles occasions de souligner ce qui nous unit auront tendance à s’ouvrir à de multiples interprétations. Toutefois, on peut se demander ce qui est rassemblé par des slogans aussi vastes et au contenu aussi vague.

Ce caractère vague vient peut-être de l’attention qu’on porte à la langue, alors que celle-ci se rattache à tant de situations personnelles et collectives.

Il en va tout autant de la diversité rattachée à la langue et à la francophonie canadienne comme internationale : prise comme valeur, elle se trouve derrière la promotion de la «richesse» et de la variété des contenus et produits culturels de la francophonie.

La diversité comme rideau

Cette diversité a-t-elle un contenu réel? Il existe tant de caractéristiques qui nous distinguent et servent à nous rassembler que célébrer la diversité revient simplement à constater un fait.

Il est tout à fait louable de refuser de définir un groupe par une seule caractéristique ou en relation à une seule norme. On sait toutefois que le mot «diversité» a plutôt tendance à être utilisé comme euphémisme pour parler de diversité culturelle.

Valoriser cette diversité en soi a l’effet de nous détourner des revendications des personnes qui sont reléguées à la diversité (elles en sont «issues») et ainsi montrées comme différentes du groupe majoritaire.

Leurs revendications incluent plutôt la fin des discriminations, l’accès aux emplois et aux postes de prise de décisions et, dans le cas des personnes immigrantes, la capacité à retrouver leur famille plus aisément.

Or trop souvent, la célébration de la diversité est un engagement vague, une idole faite pour meubler les discours, mais trop souvent tenue à distance des actions réelles. La diversité est gérée : on la célèbre, on sensibilise la majorité et on éduque cette dernière – mais les frontières sont maintenues.

Les origines de la Francophonie

Une véritable défense de la diversité des expériences francophones viserait plutôt à démonter les obstacles et défaire les hiérarchies. Nous aurions alors la chance de célébrer ensemble des transformations, des accomplissements, et ainsi maintenir les liens créés dans ces projets communs et solidifier une ouverture à l’autre déjà éprouvée dans des projets communs.

Célébrer, sensibiliser et éduquer ne pourront pas suffire : les limites à une Francophonie sont structurelles et héritées de sa construction.

Lors de sa création, l’ancêtre de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) répondait à la désagrégation de l’Empire français dans la foulée des indépendances des anciennes colonies.

Les ex-colonies visaient à établir une collaboration culturelle et technique pour s’appuyer dans leur développement. Tandis que la France s’opposait d’abord à cette nouvelle union, elle a rapidement décidé d’y prendre une place pour l’orienter à ses propres fins : conserver l’Afrique.

L’OIF sert ainsi de vecteur pour étendre l’influence française (ou encore canadienne) et pour assurer l’accès aux marchés africains, rôle au moins aussi important que celui de contrepouvoir et d’aide mutuelle.

Cette domination extérieure passe notamment par les politiques néocoloniales qui se déploient dans la Françafrique, cet ensemble de pays où la France tente de maintenir le contrôle nécessaire au fonctionnement économique de multinationales françaises.

La francophonie canadienne, quant à elle, s’est bâtie d’une part sur une politique menée par l’Église catholique, où la langue était entremêlée à la religion, aux origines ethniques et à un projet de colonisation par l’agriculture.

D’autre part, elle repose sur une politique d’immigration canadienne qui a longtemps empêché l’arrivée de francophones non blancs. Cette francophonie est par conséquent fortement balisée, comprise en relation à des frontières nationales et religieuses.

Ces structures sont en changement, certes, mais elles ne se déferont pas du jour au lendemain – et surtout pas dans l’ignorance de leur pérennité.

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La Francophonie, un terrain pour l’internationalisme

L’idéal internationaliste est une manière de contrer ces définitions nationales et frontalières de la francophonie, et de donner à celle-ci un contenu engageant.

On trouve cet idéal dans l’engagement de la militante et philosophe communiste Rosa Luxemburg.

Son refus de la politique belliciste à l’aube de la Première Guerre mondiale montrait comment la mise en avant des différences nationales servait à empêcher une transformation du régime économique tout en permettant le maintien des visées impériales.

À la solidarité que les dominants maintenaient entre eux, elle opposait la solidarité possible des classes ouvrières de tous les pays, qui pourraient ensemble transformer les structures économiques qui favorisaient leur exploitation.

Une autre version de cet idéal se trouve dans le panafricanisme, un mouvement social et politique ainsi que culturel et intellectuel qui rassemble les personnes africaines et afro-descendantes dans un projet où les frontières s’estompent.

Il peut s’agir tant d’unir les pays d’Afrique que de créer des réseaux qui permettent de lutter pour se libérer des séquelles de l’esclavage et du colonialisme et de participer aux institutions communes ainsi transformées.

Au Canada, dans un contexte colonial différent, l’internationalisme passe d’abord par une reconnaissance de l’implantation coloniale de la francophonie, puis celle des distinctions nationales et de l’autodétermination des peuples autochtones. De là, une position non paternaliste de solidarité et de collaboration devient possible.

S’inspirer de l’internationalisme

Ces visions internationalistes combinent la lutte contre l’impérialisme et le colonialisme, mais ont également en commun l’idée que les frontières nationales servent avant tout à diviser pour mieux régner.

L’internationalisme peut nous inspirer dans la création de réseaux, dans la transformation de nos organismes, mais également dans notre manière de mettre en valeur la langue française.

Il ne s’agit pas de lui attribuer une valeur en soi, de l’ériger en vecteur de survie de certaines cultures, mais plutôt de créer de nouveaux liens, à l’encontre de ces liens qui existent entre ceux qui maintiennent la domination entre les pays et au sein des communautés.

Le 15 mars, Francopresse est devenu le premier partenaire francophone au Canada à obtenir la Marque Trust de l’organisme The Trust Project, un consortium international d’organismes de presse qui fait la promotion des normes de transparence en journalisme. L’objectif est de permettre au public de faire des choix éclairés en matière d’information.

En d’autres termes, les politiques d’information de Francopresse ont été évaluées par un comité de pairs confirmant que notre média respecte les huit indicateurs de confiance [en anglais seulement] établis comme des normes mondiales de transparence. Ces indicateurs permettent au public de savoir ce qui se trouve derrière un article d’actualité, une analyse ou une chronique.

Consultez les politiques journalistiques de Francopresse

Vous avez le droit de savoir

Nous avons tous vu apparaitre dans nos circuits, bien malgré nous, des informations non vérifiées, des nouvelles incomplètes ou encore mal interprétées, de la réappropriation de textes ou encore des nouvelles modifiées. À un point tel que même les lecteurs les plus aguerris peuvent se faire prendre au piège.

De manière générale, les journalistes respectent un code de déontologie et les politiques d’information de leur média. Ce qui, depuis fort longtemps, confirme leur engagement envers une offre d’information rigoureuse et de qualité. Mais, toutes ces mesures n’ont pas empêché la désinformation de prendre plus de place.

Il fallait donc prendre les grands moyens!

Vous avez le droit de savoir ce que vous lisez. Est-ce un publireportage, un article, une chronique? Vous avez aussi le droit de savoir ce que ces termes signifient. Vous avez le droit de savoir si vous avez affaire à du contenu d’opinion, du contenu commandité ou du contenu journalistique. Vous avez aussi le droit de savoir qui a écrit une nouvelle, pour quelles raisons un texte a été publié et quelle a été la démarche de production.

Pour lutter contre la désinformation, nous nous devons plus que jamais d’être transparents.

Ceci est un éditorial

Par exemple, en ce moment, vous lisez un éditorial, c’est-à-dire un contenu qui représente le point de vue de Francopresse. En cliquant sur la signature du texte, en haut à gauche, vous avez accès à mon profil où vous y trouverez notamment mon parcours professionnel et mes coordonnées. Depuis le 15 mars 2023, tous les contenus publiés sur Francopresse.ca contiennent ces marques de transparence conformément aux indicateurs de confiance de Trust Project. Pourquoi? Parce que vous avez le droit de savoir.

Partout dans le monde plus de 250 médias sont partenaires de Trust Projec. Ils se conforment aux huit indicateurs de confiance et appliquent la Marque Trust.

Tous les sites Web de ces médias contiennent aussi des balises numériques, reconnues notamment par Google, Facebook et Bing, permettant d’identifier des informations fiables provenant de médias dignes de confiance pour leurs utilisateurs. Ils participent ainsi à la lutte à la désinformation.

Et les journaux membres de Réseau.Presse dans tout ça?

Francopresse est unique. Il œuvre en complémentarité et en étroite collaboration avec un réseau de journaux locaux qui desservent les populations francophones en situation minoritaire dans huit provinces et trois territoires.  

Malgré leur enracinement profond et leur proximité avec leurs communautés respectives, ces journaux ont fait face à l’adversité et ont dû déployer des efforts additionnels pour se faire reconnaitre comme des médias à part entière et non des courroies de transmission. En 2017, tous les journaux membres de Réseau.Presse ont unanimement adopté la Charte de la presse francophone en situation minoritaire. Un texte qui définit clairement les grands principes journalistiques qui les guident.

Cette charte a servi de levier afin que les membres de Réseau.Presse adoptent leur propre guide de déontologie et poursuivent leur développement. Le résultat a été concluant : ces journaux locaux jouent un rôle essentiel dans l’essor, la vitalité et l’évolution des communautés qu’ils desservent.

La participation de Francopresse au Trust Project s’inscrit dans cette même foulée. Elle permettra aux journaux membres de notre réseau qui le souhaitent de franchir une nouvelle étape vers une relation de confiance accrue avec leur lectorat.

La zone du «Golden Horseshoe», au bord du lac Ontario, constitue la plus grande aire urbaine du pays et connait la croissance démographique la plus importante d’Amérique du Nord.

Photo : Domaine Public, NASA

La nuit, vus de l’espace, les rivages de l’ouest du lac Ontario brillent comme un réseau de lucioles.

Le quart de la population canadienne se concentre dans la région métropolitaine, qui s’étire d’Oshawa à Niagara Falls, en passant par le Grand Toronto. La zone, appelée le Golden Horseshoe, constitue la plus grande aire urbaine du pays et connait la croissance démographique la plus importante d’Amérique du Nord.

«Cette urbanisation galopante comporte de nombreux risques pour la santé du lac», estime Paul Sibley, professeur à l’École des sciences de l’environnement de l’Université de Guelph, en Ontario. Le scientifique voit l’imperméabilisation des sols comme la première des menaces. 

Les espaces naturels sont artificialisés pour construire des routes, des stationnements, des logements ou encore de zones commerciales. Résultat, les eaux de pluie et celles issues de la fonte des neiges ne s’infiltrent plus correctement dans le sol.

«La totalité de l’eau ruissèle à la surface, en charriant de nombreux produits chimiques toxiques jusque dans le lac», alerte Andrea Kirkwood, professeure de biologie à l’Université Ontario Tech.

Consultez notre dossier «Les Grands Lacs : bilan de santé»

Ashbridges Bay est la principale station d’épuration de Toronto.

Photo : Wikimedia Commons

Bétonisation à outrance

La biologiste cite le sel de déneigement utilisé sur les routes, mais aussi des particules comme le cuivre, le zinc ou le chrome produites par l’usure des freins et des pneus des voitures : «Même si on arrêtait aujourd’hui d’épandre du sel ou d’utiliser nos voitures, il faudrait des décennies pour que ces contaminants accumulés dans le lac disparaissent.»

L’étalement urbain n’est pourtant pas prêt de s’arrêter. En novembre 2022, le gouvernement progressiste-conservateur de l’Ontario a adopté une nouvelle législation qui permettra de construire 1,5 million de logements en dix ans, en libérant des terrains jugés auparavant inconstructibles. 

«Des zones humides lacustres, autour de Toronto notamment, vont être détruites. Elles vont être drainées et céder la place à du béton», dénonce Andrea Kirkwood.

La biologiste rappelle que ces zones humides filtrent une partie de la pollution et jouent un rôle essentiel dans la lutte contre les inondations et l’atténuation du changement climatique. Elles captent en effet de grandes quantités de carbone, régulant ainsi les émissions de gaz à effet de serre.

L’eau que relâchent les stations d’épuration à proximité du lac n’est pas non plus pure comme celle d’une source de montagne. Même après traitement, les millions de mètres cubes rejetés chaque année contiennent encore des molécules nocives pour les milieux aquatiques, comme des résidus de médicaments, dangereux pour la faune.

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Gregary Ford est directeur des programmes relatifs à l’eau de l’organisation environnementale Swim, Drink, Fish.

Photo : Courtoisie

Andrea Kirkwood est professeure de biologie à l’Université Ontario Tech, en Ontario.

Photo : Courtoisie 

Paul Sibley est professeur à l’École des sciences de l’environnement de l’Université de Guelph, en Ontario.

Photo : Courtoisie

Rochelle Byrne est directrice générale de l’association écologiste A Greener Future.

Photo : Courtoisie

Systèmes d’égouts vulnérables

Pour tenter de limiter au maximum les quantités de polluants déversées dans la nature, «les stations d’épuration, notamment les plus anciennes, sont constamment modernisées», assure Gail Krantzberg, professeure d’ingénierie et de politique publique à l’Université McMaster, en Ontario.

Gail Krantzberg est professeure d’ingénierie et de politique publique à l’Université McMaster, en Ontario.

Photo : Courtoisie 

Mais face à l’augmentation constante de la population, les stations d’épuration existantes ne seront pas suffisantes : «Ça va couter des millions de dollars pour réussir à mettre au point des procédés de traitement supplémentaires.»

La question des eaux usées préoccupe d’autant plus la communauté scientifique que les systèmes d’égouts sont vulnérables aux inondations et aux tempêtes, dont l’intensité et la fréquence augmentent à cause du réchauffement climatique. 

Gail Krantzberg explique que dans de nombreuses villes autour du lac Ontario, les eaux usées se mélangent avec l’eau de pluie dans une seule canalisation, avant d’être traitées puis rejetées dans l’environnement. 

Conséquence, en cas de forte pluie, les égouts débordent et des millions de litres d’eau non traitée vont directement dans les cours d’eau et le lac. 

Ces débordements risquent d’arriver de plus en plus souvent et peuvent mettre en danger la population. Des refoulements d’eaux usées peuvent causer des dommages aux habitations, et des bactéries peuvent contaminer l’eau potable.

— Gail Krantzberg

La pollution plastique inquiète également de plus en plus scientifiques et écologistes. On estime que 10 000 tonnes de déchets plastiques pénètrent dans les Grands Lacs chaque année.

Mer de plastique

Melissa De Young est directrice des politiques et des programmes au sein de l’organisation environnementale Pollution Probe.

Photo : Courtoisie

«Le lac Ontario est le plus touché à cause de sa proximité avec de grands centres urbains. On y trouve principalement des microplastiques, d’une taille inférieure à 5 millimètres», précise Melissa De Young, directrice des politiques et des programmes à l’organisation environnementale Pollution Probe.

«Comme les microplastiques mettent très longtemps à se décomposer, leur concentration ne cesse d’augmenter. Les effets sont potentiellement désastreux. Il y a une limite à la pollution que l’écosystème peut absorber», ajoute Rochelle Byrne, directrice générale de l’association écologiste A Greener Future

À lire aussi : Les jours sont comptés pour certains plastiques à usage unique

Alors que le lac Ontario est une source d’eau potable pour plus de 9 millions de personnes des deux côtés de la frontière, tous les acteurs interrogés insistent sur l’urgence de rétablir le lien entre les habitants et le lac. 

Chaque année, on estime que 10 000 tonnes de déchets plastiques pénètrent dans les Grands Lacs.

Photo : Courtoisie

«Dans le passé, on a concentré une grande partie des terrains industriels en bordure de lac, ce qui a physiquement déconnecté les communautés du bord de l’eau. Loin des yeux, loin du cœur», philosophe Gregary Ford, directeur des programmes relatifs à l’eau de l’organisation environnementale Swim, Drink, Fish

«Les gens ne savent pas d’où vient l’eau du robinet et où part ce qu’ils versent dans leurs éviers et leurs douches. Il faut attendre une crise pour qu’ils commencent à s’y intéresser», concède Paul Sibley.

Rochelle Byrne abonde dans le même sens : «Une grande partie de la pollution reste sous l’eau, loin des regards».

Elle se veut cependant optimiste. «Une lente prise de conscience émerge», avance la militante. 

L’association Swim, Drink, Fish y travaille en créant de nouveaux lieux de baignade, ou en mettant sur pied des centres communautaires de surveillance de la qualité de l’eau. 

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L’incertitude qui entoure le prochain Plan d’action pour les langues officielles plonge une grande partie des organismes francophones dans le flou. Un flou qui a notamment couté deux postes à la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF).

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Le Plan d’action est en retard selon Marie-Christine Morin, directrice générale de la Fédération culturelle française du Canada (FCCF).

Photo : Courtoisie

«Devant l’incertitude du Plan qui va être annoncé et s’il y a des sommes supplémentaires ou non, j’ai dû abolir ces postes dans mon équipe dès le 1er avril, lâche Marie-Christine Morin, directrice générale de la FCCF. Je n’ai pas de fonds d’opération pour les payer. Qui sait si je vais pouvoir les réembaucher?» Le Plan en cours (2018-2023) expire le 31 mars 2023.

«Retard» du Plan

«Je pense qu’on peut dire que le Plan d’action est en retard dans la mesure où nous n’avons pas d’assurance quant aux investissements disponibles et accessibles au début de notre année financière, ajoute la directrice. Sans confirmation de financement, c’est difficile de mettre quoi que ce soit en branle de notre côté et d’assurer une continuité de nos activités et services.»

La FCCF demande 75 millions de dollars pour l’ensemble de son réseau, à travers neuf initiatives que l’organisme considère comme essentielles au redressement culturel.

Selon Marie-Christine Morin, s’il n’y a pas de financement supplémentaire, même un maintien des finances ne suffira pas, à cause des hausses de cout dues en grande partie à la pandémie. «S’il n’y a aucune bonification, on va devoir faire avec moins», déplore-t-elle. Autrement dit, perdre deux analystes politiques en poste qui suivent les dossiers politiques d’intérêt pour la FCCF.

Les deux derniers plans d’action ont été adoptés les 28 mars 2013 et 2018. Avant cela, la première reconduction du Plan avait été faite en 2008. La feuille de route pour la dualité linguistique canadienne 2008-2013 avait été déposée en juin 2008, alors que le budget avait été déposé le 26 février.

Bris de service

Même constat du côté de la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF), qui a supprimé un poste. «Nous étions dans l’impossibilité de confirmer la poursuite du financement» justifie la présidente Marguerite Tölgyesi.

Marguerite Tölgyesi, présidente de la Fédération de la jeunesse canadienne-française, affirme que ses membres ressentent l’incertitude liée au Plan d’action pour les langues officielles.

Photo : Guillaume Riocreux - L’Aurore boréale

Cette dernière explique également que les membres de l’organisme font face à des bris de service. «On ne sait pas si la programmation va continuer.»

La direction d’un de ses membres, la Fédération des jeunes francophones du Nouveau-Brunswick (FJFNB), confirme par exemple que le programme de français «Dépasse-toi» a été reconduit jusqu’en juin. Mais après cette date, le flou persiste.

«C’est embêtant, dans un contexte où le Nouveau-Brunswick doit affirmer sa francophonie encore un peu plus fort aujourd’hui», signale Valérie Levesque, directrice générale par intérim de la FJFNB, en référence aux différentes actions du gouvernement Higgs envers les francophones.

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Difficultés de la rétention d’emploi

La directrice générale de l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne (AFFC) souligne de son côté le défi de la rétention, autre enjeu lié à ce contexte d’incertitude. «On n’en veut pas aux employés qui s’en vont vers d’autres emplois, on comprend», fait valoir Soukaina Boutiyeb.

Elle demande à Patrimoine canadien un financement «adéquat», ce qui signifie payer «au moins» les ressources humaines, les loyers des bureaux — «car certains travaillent dans des sous-sols», affirme la directrice — et un financement indexé sur l’inflation postpandémie.

Soukaina Boutiyeb en profite aussi pour glisser qu’il manquait la lentille des femmes francophones dans le dernier Plan, ce qui a empêché le financement de plusieurs de ses organismes membres : «Vous pouvez faire la recherche du mot “femme” dans le document. Il n’y a rien. Nous nous sommes senties totalement oubliées.»

Soukaina Boutiyeb mentionne que la rétention des travailleurs dans son organisme est un autre enjeu lié au financement du prochain Plan d’action.

Photo : Courtoisie AFFC

Un processus parlementaire insécurisant

Dans une déclaration envoyée par courriel à Francopresse, le cabinet de la ministre Petitpas Taylor rappelle que les sommes inscrites dans le prochain Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028 dépendent du budget fédéral 2023, qui sera dévoilé le 28 mars prochain.

«Cela découle du processus parlementaire normal et c’est pour cette raison qu’aucun détail ne peut être divulgué pour le moment. Toutefois, il est important de noter que les sommes qui ont été attribuées lors du dernier Plan d’action sont permanentes et Patrimoine canadien travaille de près avec les organismes sur le terrain pour s’assurer qu’il n’y a pas de bris de service pour ceux et celles qui reçoivent du financement de la part du ministère de Patrimoine canadien», fait valoir le cabinet de la ministre des Langues officielles.

«On comprend certainement le cycle budgétaire. Mais la francophonie a besoin d’être appuyée au-delà des fins d’années financières incertaines pour se développer», renchérit Marie-Christine Morin.

«C’est comme ça à chaque plan d’action, le système est fait comme ça. Ça fait longtemps que ça a été identifié comme un problème systémique. Ce n’est pas rare, mais c’est très insécurisant pour les organismes. C’est encore plus présent à la fin d’un plan et au début d’un autre», commente Liane Roy, présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA).

Un «pont» pour une meilleure transition entre deux plans d’action

Selon Liane Roy, le système autour des Plan d’action est toujours fait en fonction du cycle parlementaire mais cause «inévitablement» de l’insécurité chez les organismes francophones.

Photo : Courtoisie FCFA

La FCFA a relayé ces préoccupations à Patrimoine canadien. Liane Roy tempère toutefois, affirmant que le gouvernement veille à chaque Plan à mettre en place un «pont» ; une transition entre deux Plans.

«Si je me fie aux autres années, ce pont signifie que le gouvernement fédéral reconduit la dernière année du Plan d’action actuel ou reconduit un certain montant pour une partie de l’année et bonifie ensuite, une fois que les budgets ont été [entérinés, NDLR]» détaille Liane Roy.

En outre, tous les organismes nuancent et s’accordent pour dire que la ministre des Langues officielles a été à l’écoute et que le souci du manque d’information et de financement a été soulevé lors des consultations pancanadiennes, qui ont servi à la ministre pour rédiger le Plan d’action 2023-2028.

«Il y a beaucoup d’empathie de la part du bureau de la ministre et beaucoup d’impatience chez eux aussi», assure Marguerite Tölgyesi, présidente de la FJFC.

Pour Brigitte Kropielnicki, directrice générale du Conseil scolaire du Nord-Ouest de l’Alberta, cette entente reste très avantageuse pour les parents. «Au lieu de payer 950 $ [par mois], ils payent autour de 500 $. C’est la moitié des frais. C’est très bien pour les parents, ça leur donne une chance de placer leur argent ailleurs, surtout une famille qui a plus d’un enfant.»

Brigitte Kropielnicki est directrice générale du Conseil scolaire du Nord-Ouest, en Alberta.

Photo : Courtoisie

Le Conseil scolaire gère trois écoles francophones dans le Nord-Ouest de la province, dont une garderie à l’école Nouvelle Frontière à Grande Prairie, depuis 2019. «Avant qu’on ouvre nos portes à Grande Prairie, il n’y avait aucun service de garde en français», rappelle la directrice.

Depuis la mise en place de l’accord fédéral-provincial, le service de garde est plein. «Des familles avaient retiré leurs enfants, surtout pendant la pandémie, car elles n’avaient plus les moyens de payer. Un parent demeurait à la maison.»

La directrice générale explique que «depuis que l’entente est entrée [en vigueur,] il y a des familles qui sont revenues aux services de garde et les parents sont retournés au travail. Cela aide la communauté de Grande Prairie qui en général a besoin d’employés dans tous les secteurs. Ça fait boule de neige positivement.»

Le Centre scolaire du Nord-Ouest explore actuellement la possibilité d’ouvrir une garderie à l’École des Quatre-Vents à Peace River.

L’Accord entre le Canada et l’Alberta sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants prévoit un investissement de 3,8 milliards de dollars entre 2021 et 2026, «ce qui permettra de créer jusqu’à 68 700 nouvelles places en garderie agréée», rapporte le ministère des Services à l’enfance de la province.

«Ce travail comprendra des initiatives ciblées visant à créer des places pour les familles issues de populations diverses et mal desservies, y compris, mais sans s’y limiter, les familles francophones.»

Mais les listes d’attente des garderies ne raccourcissent pas. Selon une étude de la Fédération des parents francophones de l’Alberta (FPFA) et du Conseil de développement économique de l’Alberta (CDEA) présentée le 13 février 2023, il manque de places dans les services de garde francophones de plusieurs zones, y compris à Calgary et à Edmonton.

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Déserts de services francophones

«Plusieurs quartiers de [Calgary et Edmonton] ne comptent aucune place en garderie à temps plein alors qu’un nombre important de francophones y demeurent. Selon nous, il est possible d’agir en y créant un site de garderie aussitôt que possible», peut-on lire dans le rapport.

Mireille Péloquin est directrice générale de la Fédération des parents francophones de l’Alberta (FPFA).

Photo : FPFA

«On a dévoilé que pour six enfants francophones en Alberta, il y a moins d’une place en service de garde. On est extrêmement mal desservis», alerte Mireille Péloquin, directrice générale de la FPFA.

«Il y a des quartiers en Alberta qui sont bien servis, puis il y en a même où on dit qu’il existe des services, mais ce n’est quand même pas adéquat. Il n’y a pas suffisamment de places.» Cela pousse certaines familles à se tourner vers des services anglophones, déplore-t-elle.

Avec ce genre d’étude, la FPFA espère constituer une base de données qui pourrait être utile au gouvernement dans ses futures prises de décisions : «C’est le message qu’on est en train de passer au gouvernement provincial, de leur dire : si vous allez financer, si vous recevez des demandes pour des francophones, voici où sont nos besoins», déclare Mireille Péloquin.

De bons rapports avec le ministère

Selon elle, il faudrait apporter des modifications à l’entente fédérale-provinciale. Pour cette raison, la FPFA essaie de travailler avec le gouvernement albertain. «On croit que si on n’exprime pas c’est quoi nos besoins, c’est difficile pour eux de deviner. On a quand même de bons contacts avec les administrateurs du côté du ministère.»

Car malgré le coup de pouce financier des services de garde à 10 $ par jour, les francophones se trouvent toujours lésés en Alberta.

Il y a beaucoup de déplacements pour un parent qui veut avoir accès à un service de garde en français. Ça demande des ressources supplémentaires. Tandis que pour un anglophone, c’est plus accessible.

— Mireille Péloquin, directrice générale de la FPFA

Même si les frais des services de garde sont les mêmes pour les parents des deux communautés linguistiques, «la subvention va beaucoup plus loin pour la majorité, parce que c’est à côté de chez eux. Pour le francophone qui a la même subvention, mais qui doit traverser la ville, à la fin de la journée, la subvention est moins importante», conclut la directrice générale de la FPFA.

Être Autochtone au sein d’une majorité allochtone, être une personne noire ou de couleur dans un milieu blanc ou être un jeune inquiet de son avenir n’est pas toujours de tout repos. Pour faire valoir son existence et ses droits, il faut souvent montrer beaucoup de détermination et parfois se mobiliser pour manifester.

Luc Turgeon est professeur agrégé à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa.

Photo : Erin Duncan

«Les membres des minorités sont conscients qu’à tout moment, leurs droits peuvent leur être facilement retirés et qu’ils doivent souvent faire des coups d’éclat pour pouvoir se faire entendre», explique Luc Turgeon, professeur agrégé à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa.

Pour lui, les mobilisations les plus marquantes, comme les grandes manifestations, sont le fruit d’inégalités.

Il s’agit de moyens de «dernier recours» : «C’est parce qu’on n’a pas accès, comme les membres de la majorité publique, à des recours plus traditionnels au sein des institutions politiques en place.»

Or, assez paradoxalement, les inégalités peuvent aussi représenter un frein à la mobilisation. «Quand on n’a pas accès à des besoins de base, c’est beaucoup plus difficile de se mobiliser politiquement, observe l’universitaire. Si on doit travailler 60 heures par semaine pour survivre, c’est sûr qu’on n’a pas les mêmes occasions.»

Activisme et écologie

Bill Jones fait partie de ceux qui n’hésitent pas à monter aux barricades. Lauréat du Prix Eugene-Rogers pour l’environnement en 2021, l’ainé de la Première Nation des Pacheedaht en Colombie-Britannique et ancien bucheron milite contre l’exploitation forestière dans cette province depuis plusieurs années.

«Je n’ai pas accordé un grand intérêt à l’activisme écologique jusqu’en 2012, quand je me suis engagé dans ce que nous appelons la lutte de Walbran. Je me suis joint à un groupe appelé les Friends of Walbran et nous avons fait des lignes de piquetage, des barrages routiers, des barricades pendant longtemps.»

En 2020, il a rejoint la manifestation contre l’exploitation des forêts anciennes à Fairy Creek, où il a été confronté à une répression musclée. «Il y a eu beaucoup de violence, d’intimidation et de harcèlement.»

Bill Jones est un ainé de la Première Nation des Pacheedahts en Colombie-Britannique.

Photo : Courtoisie Last Stand for Forests

Il raconte que «l’injonction est arrivée et la police a commencé à intensifier sa violence contre les manifestants, les écogardiens de la forêt, et nous nous sommes retrouvés avec, il me semble, quelque 1100 arrestations et peut-être un millier d’accusations en cours».

Selon lui, cette série d’évènements lui a permis de comprendre l’aspect politique de sa vie. «Tout est politique en ce qui concerne les relations familiales et la résidence. Même votre chat est politique. Vos relations avec vos voisins sont des outils politiques qui seront utilisés pour limiter l’infrastructure politique des réserves [autochtones].»

«[À cause de] l’expérience des pensionnats, la plupart des Premières Nations de ma génération ont appris à se méfier, confie le diplômé de 1959 du Pensionnat indien d’Alberni, sur l’ile de Vancouver. C’est encore une structure des relations raciales au Canada en raison de la connotation politique de ce que veut dire être Indien.»

Militer envers et contre tout

Bill Jones est bien conscient des foudres qu’il s’attire par ses actions. «Je ne suis pas un homme très populaire, et je sens que je suis peut-être même en danger parfois parce que je suis d’avis que nous devons faire les choses un peu différemment si nous voulons sauver les longues luttes pour nos droits et notre liberté qui sont maintenant continuellement bafoués.»

En invitant des manifestants dans le territoire traditionnel de la nation Pacheedaht, Bill Jones a parfois été une épine dans le pied du conseil de bande, qui ne voulait pas de leur présence.

Dans une lettre de 2021, il insiste sur le fait que «les personnes de tous les âges, genres, races, cultures et classes sociales doivent marcher ensemble pour contribuer à la guérison des blessures causées par le colonialisme et la destruction environnementale».

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Et les jeunes dans tout ça?

Olivier Hussein ne craint pas non plus de s’engager sur le plan politique, et ce, malgré son jeune âge.

Originaire de la République démocratique du Congo, il est arrivé à Moncton en 2009. Au Nouveau-Brunswick, il a été bénévole dans plusieurs organismes francophones pour favoriser l’accueil et l’intégration des immigrants et des réfugiés.

Olivier Hussein est un activiste dédié aux luttes des immigrants, des francophones et contre le racisme systémique.

Photo : Facebook Olivier Hussein

«Je pense que c’est ma personnalité, qui je suis en tant que personne, analyse-t-il. Je suis humanitaire, je suis une personne qui connait les différents enjeux qui touchent surtout les personnes racisées. Étant moi-même issu de la communauté racisée, il y a beaucoup d’enjeux auxquels nous faisons face […] beaucoup de barrières systémiques.»

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Selon lui, «ça prend des jeunes qui ont [du] dévouement. Il ne faut pas avoir peur. Je dirais que la peur doit quitter l’esprit de certaines personnes parce que je sais que souvent il y a des jeunes qui ont tendance à avoir la peur de pouvoir aller s’impliquer.»

Olivier Hussein s’est aussi engagé en politique et appelle un plus grand nombre de jeunes à faire de même. «Les jeunes ont cette tendance de pouvoir changer les choses. On le voit notamment au niveau de nos gouvernements, il y a beaucoup de jeunes impliqués. Pourquoi pas aussi voir plus de jeunes ministres?»

Je vais mettre l’accent sur les jeunes issus des communautés racisées, donc les jeunes Noirs, les jeunes Autochtones. Il faut que nos politiques, nos gouvernements, donnent plus d’opportunités à ces jeunes pour pouvoir s’exprimer.

— Olivier Hussein, activiste

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Le militant voit d’ailleurs un lien entre les combats des personnes autochtones, noires et acadiennes : «[La communauté acadienne] a beaucoup milité pour la francophonie, pour avoir le français, pour avoir ce privilège et cette fierté d’avoir la langue française comme deuxième langue de cette province.»

Parler une langue, un geste politique?

«La francophonie, c’est vraiment un combat, c’est quelque chose qui me tient à cœur», poursuit Olivier Hussein.

Michelle Landry, de l’Université de Moncton, est titulaire de la Chaire de recherche au Canada sur les minorités francophones canadiennes et le pouvoir.

Photo : Nigel Fearon Photography

Pour Michelle Landry, professeure de sociologie à l’Université de Moncton, être francophone en milieu minoritaire et vivre en français, c’est déjà devoir faire des choix au quotidien, «que ce soit d’inscrire nos enfants à l’école en français ou de demander un service en français gouvernemental ou dans un commerce ; on ne prend pas la voie la plus facile».

Différentes raisons peuvent motiver une personne à choisir le français en milieu linguistique minoritaire : «Ça peut être des influences familiales, à l’école […] un évènement dans la vie de quelqu’un, une histoire de vie personnelle, des rencontres, des occasions.»

«Il y a toutes les activités aussi qui sont organisées dans la francophonie canadienne, que ce soit les Jeux de la francophonie, les Jeux de l’Acadie, les camps de leadeurship. Il y a toutes sortes d’évènements qui visent à consolider l’identité, mais aussi l’engagement», renchérit la sociologue.

Mais les questions de la francophonie se cachent souvent derrière d’autres causes. «Souvent, les militants, les groupes et autres personnes engagées vont se rendre compte des enjeux de pouvoir au sein même de leur secteur d’intérêt, par exemple, si on remarque qu’il y a peu de services aux femmes dans les régions francophones ou pour les personnes âgées.»

Plus sur la francophonie

La saga en comité parlementaire continue. Après des soucis techniques qui ont duré une heure et 30 minutes sur les deux heures de séance, les députés ont voté mardi pour allonger l’étude du projet de loi C-13 de 6 heures et 30 minutes, soit trois séances et demie de plus. À lire aussi : L’étude de C-13 prolongée dans la douleur

Le vote, qui s’est tenu dans une confusion totale, a mené les membres à voter en faveur de la proposition de la néodémocrate Niki Ashton plutôt que celle du conservateur Joël Godin, qui, en plus de prolonger le nombre de quatre séances, souhaitait débattre de l’usage du français au sein des entreprises privées de compétence fédérale.

Ce débat avait été demandé notamment par Mario Beaulieu dans une motion précédente, qui a été rejetée.

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Mardi, le Syndicat des agents correctionnels du Canada (UCCO-SACC-CSN), qui représente plus de 7 500 agents fédéraux, a dénoncé des «atteintes inacceptables aux droits linguistiques» de la part du Conseil du Trésor.

En février, lors de la première ronde de négociations, le ministère aurait refusé de négocier la nouvelle convention collective dans les deux langues, à moins que l’UCCO-SACC-CSN paie 50 % des frais de traduction simultanée.

Le syndicat a déclaré ne pas être «fermé» à payer, mais aurait préféré avoir été averti, car ils n’ont pas voté leur budget en conséquence.

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Le directeur parlementaire du budget et ses analystes ont soutenu que le ministère d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) avait 65 % d’employés en plus que nécessaire pour traiter les 80 % de demandes de visa émanant du système d’immigration Entrée express.

Photo : Courtoisie

Dans un rapport publié mardi, le directeur parlementaire du budget a épinglé le ministère d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) sur les couts de son système d’immigration Entrée express.

L’objectif de ce système est de traiter 80 % des demandes en six mois, dans l’optique d’accueillir 514 377 immigrants au cours des cinq prochaines années. Le gouvernement doit payer un total net de 48 millions dollars pour Entrée express, qui englobe le traitement, les services avant l’arrivée et les services d’établissement.

«Selon notre analyse, le nombre d’employés à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) devrait être plus que suffisant pour respecter les délais de traitement au cours des cinq prochaines années. Nous estimons qu’IRCC compte un effectif de 65 % supérieur à ce dont il a besoin pour atteindre son objectif au cours du présent exercice», a fait valoir le directeur parlementaire du budget, Yves Giroux, dans un communiqué.

En septembre dernier, dans sa Stratégie visant à accroitre les transitions vers la résidence permanente, le ministre de l’Immigration Sean Fraser avait proposé d’assouplir Entrée express, pour sélectionner davantage d’immigrants, notamment francophones, afin de combler la pénurie de main-d’œuvre dans plusieurs secteurs-clés. Les compétences linguistiques en français font partie des critères de sélection.

Les couts des programmes du système d’immigration Entrée express.

Photo : Capture d’écran rapport DPB

Nomination d’un rapporteur spécial, démission d’un ancien ministre de Justin Trudeau

Sous le feu des critiques depuis les allégations d’ingérence chinoise lors des élections fédérales de 2019 et 2021, Justin Trudeau a annoncé lundi la nomination d’un rapporteur spécial indépendant pour déterminer s’il y a besoin de lancer une enquête publique.

Le premier ministre a affirmé en point presse que la personne nommée pourrait décider qu’au lieu d’une enquête publique, ce pourrait être «une enquête, un examen ou une révision judiciaire».

S’il n’a pas encore indiqué le nom de la personne responsable, le premier ministre a précisé que ce poste serait occupé par un «éminent Canadien» et qu’il respecterait l’issue de sa décision. Justin Trudeau a ajouté que tous les partis participeront au choix du rapporteur spécial.

Le premier ministre n’a pas donné suite aux demandes répétées depuis des semaines du Bloc québécois, du NPD et du Parti conservateur, qui le pressent de lancer une enquête publique. Ces derniers l’ont de nouveau ciblé cette semaine en Chambre à ce sujet.

La présidente du Conseil du Trésor, Mona Fortier, a déposé jeudi les plans ministériels 2023-2024 du gouvernement à la Chambre des communes.

Ces plans indiquent les feuilles de route, les priorités et les axes sur lesquels se concentreront, par thèmes, les ministres et organismes pour l’année à venir.

«Le dépôt de ces plans au Parlement permet aux parlementaires et à la population canadienne de suivre les progrès accomplis dans la réalisation des priorités énoncées et d’être mieux en mesure de demander des comptes au gouvernement sur la manière dont il utilise les ressources pour obtenir des résultats», a indiqué le Conseil du Trésor, par communiqué.

Le plan de Patrimoine canadien pour le ministère des Langues officielles vise à «continuer de moderniser et de renforcer la Loi sur les langues officielles et ses instruments connexes en tenant compte de la réalité particulière du français au Canada, incluant au Québec».

Il vise également la mise en œuvre du nouveau Plan d’action pour les langues officielles, «qui devrait être lancé en avril», selon le Commissariat aux langues officielles et qui couvrira la période 2023-2028.

Marc Garneau, ancien ministre fédéral des Transports du Canada (2015-2021) et des Affaires étrangères(2021) avait participé à la course au leadeurship du Parti libéral contre Justin Trudeau en 2013.

Photo : Facebook Marc Garneau

Le député de la circonscription montréalaise à majorité anglophone de Notre-Dame-de-Grâce–Westmount a annoncé sa démission lors du caucus de députés libéraux, mercredi.

L’ancien astronaute avait marqué l’actualité lors des séances du Comité permanent des langues officielles en se prononçant contre le projet de loi C-13, notamment dans une lettre du 16 février 2023 publiée sur son site.

Avec ses collègues libéraux, Anthony Housefather et Emmanuella Lambropoulos, Marc Garneau était notamment monté au créneau pour défendre la minorité anglophone du Québec contre les propos de Mario Beaulieu du Bloc québécois.

Ce dernier tenait non seulement à ce que la Charte de la langue française du Québec se retrouve dans C-13, mais il refusait aussi de qualifier de minorité les anglophones du Québec.

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Une motion du NPD proposait lundi à la Chambre des communes de conserver et de protéger le système de santé publique et non le privé, comme il est question en Ontario avec le projet de loi du gouvernement Ford. Les libéraux, les conservateurs et le Bloc québécois ont tous rejeté la motion, à 298 voix contre 26.

Peu après, par communiqué, le NPD dénonçait «une volteface des libéraux de Justin Trudeau». Le NPD a souligné qu’en 2021, «Trudeau a promis de mettre fin à toute facturation des soins de santé en appliquant ou en modifiant la Loi canadienne sur la santé et a fait campagne contre le chef conservateur de l’époque, Erin O’Toole, en dénonçant leur plan visant à ce que les sociétés à but lucratif fournissent davantage de soins de santé au Canada.»

C’est en 1910, lors de la conférence internationale des femmes socialistes, que la militante féministe allemande Clara Zetkin propose pour la première fois la création d’une «Journée internationale des femmes».

S’ancrant dans les luttes ouvrières et les nombreuses manifestations de femmes qui agitent alors l’Europe et l’Amérique du Nord, et s’inscrivant dans une perspective révolutionnaire, Clara Zetkin revendique, entre autres, le droit de vote des femmes et la fin des discriminations au travail.

La date du 8 mars n’est pas encore choisie, mais l’objectif est défini : mobiliser les femmes du monde entier lors d’une même journée afin de faire valoir leurs droits. La proposition est approuvée à l’unanimité par les déléguées des 17 pays présents.

Quelques années plus tard, à la suite de la grève des ouvrières de Saint-Pétersbourg, en Russie, la date du 8 mars est finalement retenue.

Il faudra néanmoins encore attendre plusieurs décennies pour que la tradition prenne de l’ampleur.

Au Canada, l’évènement s’inscrit durablement dans les calendriers féministes à partir des années 1960, ce qui correspond à l’avènement du mouvement de libération des femmes.

Cette journée devient dès lors un moment collectif de réflexion et d’action pour les organismes de défense des droits des femmes – et non une nouvelle occasion de vendre rouges à lèvres, soins du visage et chandails à prix réduit, n’en déplaise à certains!

Une grève mondiale des femmes 

Renouant avec les origines ouvrières du mouvement, de nombreux organismes appellent depuis plusieurs années les femmes du monde entier à la grève générale en cette date hautement symbolique.

Ainsi, le 8 mars 2018, inspirées par un mouvement similaire mené en Islande en 1975, des millions d’Espagnoles cessent de travailler. Elles sont bientôt suivies par des Argentines, des Suissesses, des Françaises, des Grecques, des Mexicaines… Partout dans le monde des rassemblements, parfois accompagnés d’arrêts de travail, mobilisent les femmes.

Leur mot d’ordre? «Si nous nous arrêtons, le monde s’arrête.»

Rien n’est plus vrai : les femmes constituent les deux tiers de la main-d’œuvre du secteur public, du secteur communautaire et des soins et services aux personnes.

Elles font tourner les restaurants, les commerces, les hôpitaux et les écoles, tout en assumant la majorité des tâches familiales et en s’occupant des enfants, des personnes âgées et des malades. Qu’elles arrêtent de travailler – qu’il s’agisse d’emplois rémunérés ou non –, et c’est l’ensemble de la société qui s’écroule.

Pourtant, les femmes continuent de subir au quotidien les violences sexistes et sexuelles, en plus des violences économiques que sont les bas salaires, les temps partiels contraints et les mauvaises conditions de travail, d’autant plus si elles sont racisées, porteuses d’un handicap ou immigrantes.

Elles endurent les inégalités structurelles et systémiques existantes causées par le patriarcat, le classisme, le racisme et le colonialisme, tant dans leur vie privée que dans la sphère publique.

Elles payent également le prix fort des crises sanitaire, économique et sociale : selon le rapport de 2022 du Forum économique mondial sur les inégalités femmes-hommes, les écarts ne cessent de se creuser en raison des perturbations causées par la pandémie et la faiblesse de la reprise, portant maintenant à 132 ans le temps nécessaire pour atteindre la parité dans le monde au rythme des efforts actuels.

Construire des solidarités

Ne serait-il pas temps de nous mettre en grève, nous aussi?

Le 8 mars, pour un jour seulement, refusons d’accomplir nos tâches domestiques, de nous occuper de nos familles et de nous rendre au travail.

Utilisons la grève pour bloquer cette société qui nous exploite. Pour refuser un monde qui exacerbe les inégalités et attise les discours haineux.

Construisons des alliances et des solidarités par-delà les frontières.

Réapproprions-nous les espaces publics et les discours.

Plutôt que des fleurs, offrons-nous du temps pour rêver ensemble à un avenir libéré de toute violence.

Julie Gillet est directrice du Regroupement féministe du Nouveau-Brunswick. Ses chroniques dans Francopresse reflètent son opinion personnelle et non celle de son employeur.

Les députés du Comité permanent des langues officielles sont tombés d’accord à l’unanimité à trois reprises, en faveur de causes qu’ont à cœur les communautés de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM), lors de la séance du 10 mars. 

Demandée depuis des années par les organismes francophones minoritaires, la première avancée concerne la négociation de clauses linguistiques pour les CLOSM, lors d’ententes entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux.

La députée néodémocrate Niki Ashton a fait adopter le renforcement des mesures positives pour les minorités linguistiques ainsi que les négociations sur les clauses linguistiques entre le fédéral et les provinces et territoires demandées par plusieurs organismes de défenses des minorités francophones. 

Photo : Courtoisie

Cette proposition de la néodémocrate Niki Ashton a été adoptée à l’unanimité. «Le gouvernement fédéral ne pourra plus oublier les minorités linguistiques du pays [avec cet amendement, NDLR]», a soutenu la députée. 

Néanmoins, son collègue indépendant Alain Rayes a fait remarquer que même avec cette mesure néodémocrate, la négociation des clauses lors d’un accord n’en devenait pas pour autant imposée au fédéral. 

«Il s’agit souvent de la compétence des provinces et territoires, a développé Julie Boyer, sous-ministre adjointe des Langues officielles au ministère du Patrimoine canadien. Toutefois, ça crée une obligation systémique d’en discuter».

Le sujet des clauses linguistiques est sensible notamment pour la Fédération des francophones de Colombie-Britannique (FFCB) qui s’est battue devant les tribunaux contre le gouvernement fédéral à ce sujet.

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Le 2 mars, la Cour suprême a assuré qu’elle refusait d’entendre la cause de la FFCB, ce qui a mis fin à un combat judiciaire de plus d’une décennie. 

Assurer la construction d’écoles pour les minorités linguistiques

Autre amendement d’importance pour les francophones en situation minoritaire : la prise en compte, par les ministères et institutions fédérales, des besoins des minorités francophones ou anglophones de faire construire des écoles sur des terrains immobiliers fédéraux excédentaires.

Du fait de son passé comme surtintendant du Conseil scolaire acadien provincial, le seul conseil scolaire francophone de la Nouvelle-Écosse, Darrell Samson a tenu un discours passionné au moment de déposer son amendement concernant la prise en compte du fédéral des besoins de construction d’écoles des communautés de langue officielle en situation minoritaire. 

Photo : Courtoisie

Le député acadien de la Nouvelle-Écosse Darrell Samson, auteur de cet ajout au projet de loi, a également inscrit avec ses collègues libéraux l’impératif que le fédéral consulte les communautés linguistiques «ou autres intervenants, notamment les conseils et commissions scolaires» sur leurs besoins de construction d’écoles.

«Il y a 600 000 élèves potentiels [d’âge scolaire et admissibles à l’instruction dans la langue minoritaire, NDLR] dans les écoles à travers le Canada. C’est bien beau, mais il y a plus de vingt ans d’attente pour la construction d’écoles. Ils ont le droit à l’éducation, mais n’ont pas de terrain! C’est crucial que le gouvernement fédéral puisse appuyer les minorités sur cette question», a soutenu avec émotion Darrell Samson.

Le député en a profité pour illustrer ce besoin à travers son expérience d’ex-surintendant des écoles du Conseil scolaire acadien provincial, le seul conseil scolaire francophone de la Nouvelle-Écosse.

La proposition libérale a été appuyée par les conservateurs et le NPD, mais pas par le député du Bloc québécois, Mario Beaulieu.

Consensus sur le renforcement des mesures positives

Un autre amendement du NPD a fait l’unanimité sur le renforcement des mesures positives pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire, dans le projet de loi C-13.

Qu’est-ce qu’une mesure positive?

Il n’y a pas de définition exacte, mais l’article 41 de la Loi sur les langues officielles précise trois critères : «[…] Le gouvernement du Canada s’engage :

Ces mesures figurent à la partie VII de la Loi.

Bien que le concept existe déjà à l’article 21 du projet de loi C-13, l’idée de la proposition néodémocrate est d’atténuer les effets négatifs potentiels de certaines de ces mesures, comme dans le cas qui opposait la Fédération des francophones de Colombie-Britannique et le ministère d’Emploi et Développement social Canada (EDSC) en 2021.

Le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, avait illustré par communiqué, dans la foulée de ce jugement : «Les institutions fédérales devront désormais prendre des mesures positives déterminées pour chacune de leurs décisions ou initiatives. Plus particulièrement, elles devront […] prendre des mesures pour pallier les effets négatifs de leurs programmes ou initiatives sur ces communautés.»

«Avec cet amendement, la mesure positive aurait des résultats positifs qui pourraient bénéficier à la communauté minoritaire de façon égale à la majorité», a précisé Julie Boyer, de Patrimoine canadien.

Rétablissement du poids démographique des francophones en situation minoritaire

Les membres du Comité se sont aussi prononcés à l’unanimité sur «le rétablissement et l’accroissement du poids démographique des minorités francophones». Un amendement déposé par la libérale Arielle Kayabaga.

Comme la proposition libérale laissait supposer que le fédéral avait le choix de rétablir ou non le poids démographique, les conservateurs l’ont renforcée en faisant inscrire que le gouvernement devait «assurer  le rétablissement et l’accroissement démographique».

Le Comité permanent reprendra ses travaux le mardi 21 mars, après la semaine de relâche parlementaire.

Sabrina Geremia, vice-présidente et directrice nationale de Google Canada, et Jason J. Kee, gestionnaire des politiques publiques de la société, devaient comparaitre le 7 mars devant le Comité permanent du patrimoine canadien. Mais à cause de soucis techniques, la réunion a été annulée puis repoussée au 10 mars.

Cette convocation est attendue, puisque les dirigeants devront s’expliquer sur la décision de Google de bloquer l’accès à des nouvelles en ligne à des milliers de Canadiens pendant cinq semaines fin février.

Une décision prise en réaction au projet de loi C-18, la Loi sur les nouvelles en ligne, qui déplait fortement aux géants du Web, car le gouvernement canadien les contraint à négocier avec les médias la redistribution des revenus générés par les contenus d’actualités qu’ils repartagent.

La professeure à l’Université Laval Colette Brin soutient qu’il est difficile d’évaluer l’impact réel du blocage de Google à du contenu d’information, mais assure que le monopole de cette firme n’est plus à démontrer et qu’elle doit se «justifier devant le peuple». 

Photo : Courtoisie

«L’idée du projet de loi est de permettre à autant de médias que possible de bénéficier de cette mesure. Il donne aux médias d’information un plus grand pouvoir de négociation. Les plateformes n’aiment pas ça, donc elles résistent, avec toute la force de leurs moyens numériques et juridiques», affirme Colette Brin, professeure titulaire et directrice du Centre d’études sur les médias de l’Université Laval à Québec.

«C’est vraiment prendre les Canadiens en otage», s’est quant à lui indigné le ministre du Patrimoine canadien, également parrain du projet de loi, Pablo Rodriguez, dans une entrevue aux Coulisses du pouvoir.

«Campagne de dénigrement»

Selon Colette Brin, ce blocage représente une «sorte de moyen de pression de Google. […] Ça démontre que Google a beaucoup trop de pouvoir dans notre accès à ce qui se passe dans le monde. Une grande partie des recherches se font par moteurs de recherche […] on n’a plus à démontrer que Google en situation de monopole.»

Pendant la pandémie, Google et d’autres plateformes avaient accepté de mettre de l’avant les contenus scientifiques. «C’était justement pour combattre la désinformation», observe la professeure, qui s’interroge sur la réaction de la population si Google Actualités était amené à fermer au Canada. «Cela m’apparait inconcevable tellement c’est au cœur des activités quotidiennes.»

Pour Colette Brin, des entreprises comme Google et Meta s’opposent au principe du projet de loi C-18 et dès qu’il y a des contraintes financières, s’attèlent à «une campagne de dénigrement».

«Ils se trouvent des alliés au sein des partis d’opposition. En l’occurrence au Canada, le Parti conservateur. Ils ont un argument de libre marché qui, à mon avis, ne tient pas la route. Ça se tiendrait si le marché était dynamique avec plusieurs joueurs alors qu’ici, c’est Google qui a le monopole», décrit la spécialiste.

C’est pourquoi la convocation du 10 mars est très importante selon la professeure ; «pour obliger Google à se justifier devant le peuple».

Colette Brin pense néanmoins que l’on n’apprendra pas «grand-chose», puisque Google a déjà joué cette manche dans d’autres pays, notamment en Australie en 2021. «Ils ne sortiront probablement pas de leur ligne», prévoit-elle.

Les petits médias sans intérêt pour Google

Selon Colette Brin, comme en Australie, le projet de loi C-18 «oblige les plateformes comme Google à négocier avec les médias d’information sur les modalités de redistribution des revenus. Des ententes existent déjà avec les grands médias. Il va falloir qu’elles s’élargissent à d’autres médias qui n’ont pas d’entente.»

C’est le cas de médias locaux dont les équipes et les chiffres d’affaires sont plus petits. «C’est clair que pour Google, les petits médias n’ont pas beaucoup d’intérêt, car ils ne représentent pas de grands marchés», pointe-t-elle.

Elle assure également que les marchés médiatiques d’informations francophones, même au Québec, sont très petits. «Et dans ces marchés-là, le consensus est fort autour du fait qu’il y a un monopole des GAFAM [Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft, NDLR]. Mais vu que leur marché est petit, le pouvoir de négociation l’est aussi. Les experts disent que ce cas nécessite une concertation internationale pour protéger ces petits joueurs. Mais c’est très compliqué sur le plan légal et au niveau de leurs intérêts, qui sont différents.»

Colette Brin rappelle un élément de taille : «Les grandes plateformes ont des ressources financières et une expertise technologique et juridique qui dépasse ceux des plus petits.»