D’abord approché par la municipalité à l’automne dernier, le gouvernement fédéral a collaboré avec le gouvernement du Nunavut et la Ville d’Iqaluit pour trouver une solution à long terme aux problèmes d’approvisionnement en eau de la capitale.
Pendant près de 60 jours durant l’automne, les résidents d’Iqaluit n’ont pas pu boire l’eau de robinet après la découverte de carburant dans le système de traitement d’eau. En janvier, la station d’épuration a dû refermer lorsqu’on a à nouveau découvert du carburant dans l’eau.
L’investissement, réalisé par l’entremise du Fonds d’atténuation et d’adaptation en matière de catastrophes (FAAC) d’Infrastructure Canada, fournira à la Ville d’Iqaluit les ressources nécessaires afin de trouver une solution à long terme pour garantir l’approvisionnement, le stockage et la distribution d’eau potable.
Un communiqué précise que «[c]e projet améliorera le réseau d’approvisionnement en eau d’Iqaluit grâce à l’excavation et à la création d’un nouveau réservoir adjacent au lac Geraldine, et améliorera également le réseau de distribution d’eau de la Ville. Le nouveau réservoir tirera l’eau de l’une des deux sources additionnelles à long terme, offrant ainsi la capacité requise pour répondre aux besoins croissants de la population et pour soutenir la croissance économique. Les infrastructures nouvelles et modernisées seront conçues et réalisées de manière à atténuer les effets actuels et futurs des changements climatiques».
L’impact des changements climatiques
À l’heure du réchauffement climatique, les Iqalummiut doivent composer à la fois avec la fonte du pergélisol et avec l’épuisement des sources d’eau. Ils doivent ainsi relever d’importants défis en matière d’approvisionnement, de stockage et de distribution d’eau potable.

Le 1er avril, les autorités fédérales et du Nunavut se sont réunies pour faire l’annonce d’un investissement majeur destiné à la réforme du système d’eau à Iqaluit.
Le document d’information Vue d’ensemble de la pénurie d’eau à Iqaluit, publié le 31 mars 2022 et que Le Nunavoix a pu consulter, mentionne à ce sujet qu’avec la fonte progressive du pergélisol, les infrastructures d’approvisionnement en eau se déplacent avec le sol, ce qui entraine des bris de conduites d’eau.
À cela s’ajoutent les modèles prédictifs, qui indiquent que les précipitations ne seront plus suffisantes pour remplir le réservoir de manière naturelle dans les années à venir.
Selon Aleksey Cameron, gestionnaire des communications et du service à la clientèle à la Ville d’Iqaluit, les collectivités de l’Arctique doivent tenir compte des répercussions des changements climatiques dans leur planification municipale. Ainsi, elles doivent trouver un équilibre entre le besoin de croissance et les réalités de l’évolution des conditions environnementales.
«Dans le cas de la Ville d’Iqaluit, au cours des dernières années, le manque de précipitations pour recharger le réservoir d’eau potable et le déplacement des conduites en raison de la dégradation du pergélisol, combinés à une croissance accrue [de la population], ont causé une pénurie d’eau», résume Aleksey Cameron.
L’annonce de l’investissement du fédéral a été accueillie favorablement sur le territoire. Aleksey Cameron déclare être «ravie et reconnaissante» que le gouvernement fédéral ait annoncé le financement de ce projet, qu’elle considère essentiel pour assurer une source d’eau durable aux Iqalummiut.
Le premier ministre du Nunavut, P.J. Akeeagok, partage également cet enthousiasme, soutenant que l’accès à une eau salubre et propre est un droit dont chacun devrait pouvoir profiter : «La Ville d’Iqaluit se développe très rapidement et notre infrastructure d’approvisionnement en eau doit être mise à jour pour suivre l’augmentation de la population. Les mises à jour de l’infrastructure de l’eau de la Ville sont également essentielles alors que nous sommes confrontés au changement climatique dans l’Arctique, ce qui a inévitablement un impact sur nos systèmes existants», affirme-t-il.
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Soutenir la croissance d’Iqaluit
En plus d’offrir une solution à long terme aux problèmes chroniques d’approvisionnement, de stockage et de distribution d’eau à Iqaluit, cet investissement aura des retombées au niveau économique.

Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé l’investissement lors d’une conférence de presse le 1er avril.
«L’amélioration de l’approvisionnement en eau devrait permettre de réduire considérablement les pertes économiques et d’atténuer les effets négatifs des pénuries d’eau sur les facteurs déterminants de la santé de la collectivité. Cela permettra également de construire davantage de logements à Iqaluit afin de répondre aux besoins existants et de loger la population en pleine croissance de la Ville», déclare Zoltan Csepregi des relations avec les médias pour Infrastructure Canada.
Le logement fait d’ailleurs partie des principales priorités identifiées par le gouvernement du Nunavut : «Les investissements dans l’infrastructure d’approvisionnement en eau d’Iqaluit permettent au gouvernement du Nunavut de travailler avec nos partenaires pour remédier à nos pénuries de logements. Sans répondre à nos besoins en eau, nous ne pouvons pas construire plus de logements dans la Ville», soutient P.J. Akeeagok.
Actuellement, Iqaluit est durement frappée par la pénurie de logements. Selon le Rapport sur le logement dans le Nord 2020 de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), le taux d’inoccupation y était de 0,2 % il y a deux ans, comparativement à 3,7 % à Whitehorse (Yukon) et 4,2 % à Yellowknife (Territoires du Nord-Ouest).
D’après le recensement 2021, la population d’Iqaluit serait composée de 7429 habitants – une baisse de 4 % par rapport à 2016 qui ne correspond pas à ce que le maire d’Iqaluit affirme constater sur le terrain. Le réservoir actuel peut soutenir une population de 10 000 habitants.
La ville d’Iqaluit et Infrastructure Canada en sont actuellement à finaliser l’entente de financement avant d’amorcer d’autres étapes vers la réalisation du projet.
«La Ville entreprendra une consultation finale sur le choix de la source d’eau dans les prochains mois. Une fois la décision finale sur la source prise, le travail de conception se poursuivra. Le projet sera mis en œuvre selon une approche progressive et devrait être achevé en quatre ans», conclut Aleksey Cameron.