Le plastique est un problème «économique, social, et environnemental», selon Steven Guilbeault, ministre du Patrimoine canadien. «Chaque année, les Canadiens jettent plus de trois-millions de tonnes de déchets plastiques, d’une valeur de 8 milliards $», a-t-il affirmé en conférence de presse le 7 octobre.
Le ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Jonathan Wilkinson, a expliqué que des versions alternatives des produits ciblés existaient déjà et étaient largement disponibles. Les mesures ne s’appliqueront que vers la fin de 2021 afin de respecter le processus de révision règlementaire, qui exige des consultations publiques.
«Ces six articles à usage unique ont plein d’alternatives qui ne sont pas faites en plastique, donc ça devrait être un changement facilement opérable dans les habitudes des citoyens, des commerçants et des restaurateurs», selon Catherine Houbart, directrice générale du Groupe de recommandations et d’actions pour un meilleur environnement (GRAME).
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Une décision surprenante
Le biologiste Tony Walker, professeur à l’École des ressources et de l’environnement de l’Université Dalhousie, se dit surpris que le gouvernement soit allé de l’avant avec ce projet d’interdire les plastiques jetables dans le contexte de la pandémie, alors que plusieurs gouvernements à travers le monde ont mis de tels projets en suspens.
Il estime qu’il s’agit d’une conséquence directe de la décision de la Chine, il y a deux ans, de cesser d’importer des déchets plastiques en provenance des pays développés.
«Plusieurs pays ne savaient pas trop quoi faire avec, et ils ne disposaient certainement pas des capacités de recyclage nécessaires. Donc cela a mis en branle des stratégies de réduction du plastique [à usage unique] à travers le monde.»
Le professeur Walker observe qu’il y a eu quelques mentions de mousses de polystyrène pendant la conférence de presse, en raison de leur présence dans les récipients alimentaire. Or, ajoute-t-il c’est un type de plastique très peu recyclé, à cause de son très grand volume par rapport à son poids, et du faible cout des produits neufs.
Il faudrait donc interdire, selon lui, toutes les utilisations de mousse de polystyrène, pas seulement son emploi dans les récipients alimentaires.
Aller au-delà de l’interdiction des plastiques à usage unique
Le ministre Wilkinson a aussi annoncé que le gouvernement mettrait en place des mesures pour faire la promotion d’une économie circulaire des plastiques, qui favoriserait la réduction, la réutilisation et le recyclage de ces produits.
Mais il rappelle qu’il y a des obstacles majeurs au recyclage du plastique : «Nous sommes inondés de tellement de différents types de plastiques. Si vous pensez aux emballages d’épicerie, oui, ça garde la nourriture fraiche ; mais ils sont difficiles à démêler après usage. […] On a besoin d’une standardisation [des emballages plastiques], pour que les plastiques puissent être clairement identifiés lorsqu’ils entrent dans la chaine de recyclage.»
Pour Catherine Houbart, directrice du GRAME, le gouvernement devrait aller plus loin.
«Au-delà de limiter l’usage de matériel en plastique jetable, il faut carrément limiter l’usage de matériel jetable. Il faut tout le temps privilégier les contenants réutilisables le plus possible. À cet égard, j’ai hâte de voir plus d’initiatives gouvernementales pour favoriser l’utilisation de contenants réutilisables», comme un système de consigne pour les contenants chez les détaillants et les restaurateurs.
Une piste de solution, selon Tony Walker, passerait par la «responsabilité élargie des producteurs», qui vise à transférer les couts du recyclage aux compagnies qui produisent des polymères exotiques.
Le document de consultation sur la gestion des déchets du plastique publié par le gouvernement comporte d’ailleurs des propositions sur la responsabilité élargie des producteurs.
Pour Tony Walker, «il n’y a pas qu’une seule solution à ce problème envahissant. Nous avons tellement de plastique dans nos vies, nous l’utilisons tout le temps et pour toutes sortes de choses.»
La solution doit passer par l’industrie, par les corporations, par la règlementation et «aussi par les consommateurs, qui doivent prendre des décisions environnementales informées», conclut-il.