Marc Miller avait le souhait assumé de revenir au Cabinet, mais il ne se doutait pas que ce serait de cette façon.
«C’est un autre travail pédagogique pour expliquer tous les enjeux de la francophonie, surtout la francophonie hors Québec. Je pense que Marc Miller a une connaissance générale de ces enjeux-là, mais pas aussi précise que ce qu’on aurait souhaité, comme une Ginette Petitpas Taylor [ancienne ministre des Langues officielles, NDRL], par exemple», avance la professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa, Geneviève Tellier.
Marc Miller fait partie de la minorité anglophone du Québec. Il est député de Ville-Marie–Le Sud-Ouest–Île-des-Sœurs, à Montréal, depuis 2015.
Nancy Juneau, directrice de la FCCF, voit d’un bon œil les compétences de Marc Miller pour la francophonie et «donne la chance au coureur» sur le plan culturel.
Apaiser les esprits
Elle souligne toutefois qu’en ramenant Marc Miller au Cabinet, «plusieurs libéraux mécontents du départ de Steven Guilbeault, ceux qui sont surtout plus à gauche au parti libéral», seront rassurés.
La Fédération culturelle canadienne-française (FCCF) affirme que ses membres sont «éternellement reconnaissants» envers Steven Guilbeault, car il a été «très, très aidant pour le milieu pendant la période très difficile [de la pandémie]» commente la présidente de la FCCF, Nancy Juneau.
L’organisme voit l’arrivée de Marc Miller d’un bon œil : «Du côté de la francophonie, on est déjà un peu rassuré parce qu’on sait que M. Miller, alors qu’il était ministre de l’Immigration, a quand même été très à l’écoute […]. On sait qu’il est déjà sensibilisé à certains enjeux de la francophonie. On sent que ça va nous être très utile pour continuer le travail amorcé, notamment les responsabilités augmentées des institutions fédérales en matière de langues officielles.»
Sur le plan culturel, la FCCF affirme ne pas connaitre le parcours du ministre, mais attend de lui qu’il poursuive le travail amorcé concernant CBC/Radio-Canada, notamment avec les 150 millions prévus au budget, afin de renforcer la société d’État.
La FCCF s’attend aussi à qu’il avance sur des enjeux majeurs : la transition et la protection numériques, la découvrabilité du contenu francophone, le développement de l’intelligence artificielle, ainsi que les conditions de travail et d’accès à l’assurance-emploi pour les artistes et travailleurs culturels.
Liane Roy fait confiance au «pragmatisme» de Marc Miller, désormais ministre responsable des Langues officielles, car la FCFA avait une «bonne relation de travail» avec lui lorsqu’il était ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de Citoyenneté Canada (IRCC) entre 2023 et 2025.
La FCFA satisfaite
De son côté, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) s’estime satisfaite de la nomination, du fait de «l’expérience et du pragmatisme» de Marc Miller.
Pour la présidente de l’organisme, Liane Roy, le CV du ministre pourrait servir la francophonie canadienne, car elle affirme en entrevue avec Francopresse qu’il avait été «à l’écoute» pour la hausse des cibles en immigration francophone à l’extérieur du Québec l’an dernier.
Elle va jusqu’à dire que Marc Miller a fait preuve de «courage», car c’est lui qui a mis en place la première politique fédérale en matière d’immigration francophone, avec un programme d’immigration économique spécifique à la francophonie.
«Cette politique n’a pas été suivie de beaucoup de détails […], mais c’est quand même lui qui a eu le courage de mettre ça de l’avant.»
La FCFA attend avec impatience du progrès sur les deux prochains règlements de mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles modifiée – surtout celui sur les mesures positives de la partie VII.
Elle souhaite aussi que le nouveau ministre mette de la pression sur le Bureau du conseil privé du Roi pour que la nomination de la prochaine personne au poste de commissaire aux langues officielles se fasse rapidement.
À lire aussi : La Franco-Ontarienne Kelly Burke pressentie commissaire aux langues officielles
Votre francophonie au bout des doigts
Lisez notre infolettre
les mercredis et samedis
Il faudrait aussi qu’il défende les investissements en matière de langues officielles, parce qu’il y a des compressions budgétaires qui s’en viennent et on veut s’assurer que ça ne handicape pas la capacité du gouvernement de s’acquitter de ses obligations linguistiques
Rappelons que sous Marc Miller, le ministère de l’Immigration avait fait l’objet d’une plainte de la part de l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), qui est membre de la FCFA.
«On est conscients de cet aspect, mais il faut vraiment considérer ça en tandem avec le pragmatisme du ministre et le fait qu’il a de l’expérience et de l’influence. […] On aurait pu se ramasser avec un autre ministre qui ne nous connait pas du tout!», balaie Liane Roy.
De son côté, Martin Normand, directeur général de l’ACUFC, estime que l’histoire est passée depuis que le commissaire aux langues officielles a donné raison à l’ACUFC dans sa plainte.
Il parle en bons termes de Marc Miller comme ministre d’alors : «Nous avions alors senti une écoute et une ouverture dans un contexte difficile. Nous espérons pouvoir reprendre promptement le dialogue avec lui afin de discuter des enjeux pressants qui traversent notre secteur.»
Ses deux autres collègues, Julie Dabrusin et Joël Lightbound, ajoutent seulement un titre en gardant leurs portefeuilles actuels.
La première ajoute la Nature à son portefeuille de l’Environnement et du Changement climatique et le second. Le deuxième, actuellement ministre de la Transformation du gouvernement, des Travaux publics et de l’Approvisionnement, devient lieutenant du Québec à la place de Steven Guilbeault, qui a démissionné la semaine dernière.
