La course à la direction du Parti libéral du Canada (PLC) prendra fin le 9 mars. La personne élue à la tête de la formation politique deviendra le nouveau premier ou la première ministre du Canada.
Comme dans toute campagne électorale moderne, les réseaux sociaux sont incontournables et cette course à la chefferie ne fait pas exception.
Près de 130 700 dollars de publicités
Depuis le 12 janvier, l’ancien gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, a dépensé environ 130 700 $ de publicités sur l’ensemble des outils de Meta, ce qui inclut Facebook et Instagram.

Karina Gould siège toujours comme députée libérale à la Chambre des communes.
Entre le 10 novembre 2024 et le 7 février 2025, les dépenses publicitaires auprès de Meta de sa principale concurrente, l’ancienne ministre des Finances Chrystia Freeland, affichaient 0 $. Elles atteignent désormais 2 700 $, selon de nouvelles données allant jusqu’au 11 février.
La députée libérale Karina Gould, ancienne leadeure du gouvernement à la Chambre des communes, a pour sa part dépensé 1 800 $ pour de la publicité chez Meta dans les trois derniers mois.
La candidate Ruby Dhalla, qui a été députée libérale de 2004 à 2011, en est à 9 300 $ de publicité achetée auprès de la société depuis le 12 janvier.
Le candidat Frank Baylis, qui a été député libéral de 2015 et 2019, est le seul candidat de la course à ne pas avoir acheté d’espace publicitaire sur les plateformes de la multinationale américaine dans les trois derniers mois.
«Nous ne boycottons pas Meta», indique-t-il dans une réponse par courriel. La publicité sur ces plateformes ne fait «simplement pas partie de notre stratégie de communications».
Toutes ces données sont toutes disponibles sur le site web de Meta.
Des dépenses politisées
L’achat de publicités sur les plateformes de Meta est devenu un sujet sensible depuis que le géant numérique a décidé de bloquer les médias au Canada sur Facebook et Instagram, et ce, en riposte à la Loi sur les nouvelles en ligne qui l’oblige à compenser les médias canadiens pour le partage de leurs contenus.
Le gouvernement fédéral avait alors décidé, en juillet 2023, d’arrêter d’acheter de la publicité à Meta. Il a fait volteface le 23 janvier dernier, quand il a recommencé à en acheter pour des campagnes publicitaires.
Mais ce boycottage de Meta ne s’était jamais étendu aux élus ni à leurs partis. À l’exception du Bloc québécois et de son chef, tous les partis politiques fédéraux principaux (PLC, Parti conservateur du Canada et Nouveau Parti démocratique) ainsi que leurs chefs ont continué à acheter de la publicité.
Le virage à 180 degrés de la part d’Ottawa quant à l’achat de publicité chez Meta a d’ailleurs provoqué une indignation de la part des plus petits médias, qui y voient une contradiction étant donné les efforts actuels du gouvernement à encourager la population canadienne à acheter local, dans le cadre des menaces tarifaires des États-Unis.
Ces médias estiment que le gouvernement pourrait placer de la publicité dans les journaux canadiens plutôt que dans les plateformes d’une entreprise américaine.
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Recommencer le boycottage?
Dans une réponse par courriel, la porte-parole de la campagne de Mark Carney, Emily Williams, écrit que celui-ci «se tient aux côtés des travailleurs canadiens face aux tarifs imposés par Donald Trump». «Il croit que le Canada doit demeurer fort, stratégique et uni dans la défense de ses intérêts économiques.»

La candidate Ruby Dhalla s’engage à revoir le boycottage d’achat de publicités à Meta par Ottawa et la Loi sur les nouvelles en ligne.
Francopresse n’a pas obtenu de réponses plus précises sur son raisonnement derrière l’achat de publicité à Meta.
«Il y a de nombreux Canadiens sur ces plateformes, et je cherche à rejoindre et à établir un dialogue avec le plus grand nombre d’entre eux dans le temps limité de cette campagne électorale», déclare de son côté Ruby Dhalla par courriel.
«Il est essentiel d’être à l’écoute de leurs préoccupations et des problèmes qui les affectent, et la plateforme de Meta est un des outils à notre disposition pour y parvenir.»
«Malheureusement, Meta fait partie des rares plateformes comptant un grand nombre d’utilisateurs canadiens, ajoute-t-elle. C’est pourquoi, en tant que première ministre, je m’engage à revoir la décision actuelle du gouvernement afin de m’assurer que les besoins de nos citoyens et de nos médias sont pris en compte.»
La «décision actuelle» à laquelle fait référence la politicienne est celle prise par Ottawa, en janvier dernier, de mettre fin au boycottage d’achat de publicité sur les plateformes de Meta.
Sans préciser si elle recommencerait le boycottage ou non, Ruby Dhalla s’engage à travailler «avec Meta afin de négocier une entente juste et équitable pour toutes les parties, en particulier pour l’industrie des médias canadiens».
Mark Carney et Frank Baylis n’ont pas accepté de commenter cette décision d’Ottawa ni de révéler leurs intentions de la maintenir ou non s’ils devenaient premier ministre.
Les équipes de Chrystia Freeland et de Karina Gould n’ont pas fourni de réponses aux questions de Francopresse avant la publication de ce texte.
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La Loi sur les nouvelles en ligne en réflexion
Questionnée sur la position de Mark Carney sur la Loi sur les nouvelles en ligne, Emily Williams écrit simplement que «le travail de la ministre [Pascale] St-Onge pour protéger les médias canadiens est important – l’accès aux nouvelles fiables est fondamental pour la santé de notre démocratie».

Si Frank Baylis n’achète pas d’espace publicitaire sur les plateformes de Meta, ce n’est pas pour en faire un boycottage, nuance-t-il.
De son côté, Frank Baylis indique par courriel qu’il «travaille sur une position avec la section 23 de cette loi, qui met à l’abri les plateformes qui partagent du contenu sans compenser les détenteurs des droits».
«Sa position aura comme objectif de bâtir une économie digitale qui est juste pour tout le monde», écrit-il. N’étant pas en mesure d’en dire plus pour le moment, il ajoute vouloir «assurer une compensation juste pour les créateurs de contenu».
Dans son courriel, Ruby Dhalla s’engage à réviser la Loi sur les nouvelles en ligne afin que celle-ci réponde «véritablement aux intérêts de ceux qu’elle concerne le plus et qu’elle réponde aux besoins actuels de nos citoyens et de nos médias».