Gérée par la Kitikmeot Heritage Society, l’entreprise sociale Kaapittiaq, dont le nom signifie «bon café» en inuinnaqtun, se donne comme mission de renforcer la culture et les communautés inuites grâce à l’entrepreneuriat dirigé par les Autochtones.
Incorporée en 2018, l’entreprise a pour logo un grain de café évoquant les motifs traditionnels des vêtements inuinnait. Chaque année, 75 % des profits de Kaapittiaq sont utilisés pour créer des programmes faisant la promotion de la culture, de la langue et du savoir inuits.
La langue inuinnaqtun — le fondement de la culture inuinnait — compte moins de 600 locuteurs courants. Selon la plupart des estimations, c’est une langue qui aura disparu dans moins de deux générations. La disparition de l’inuinnaqtun précipite la perte de connaissances, de relations et d’engagements avec le monde qui sont uniques sur le plan culturel. [trad.]
Source : Uqarluta/Let’s Speak Inuinnaqtun!
L’entrepreneuriat autochtone au cœur de l’entreprise
Kaapittiaq travaille en collaboration avec des Inuits urbains et ruraux et permet aux jeunes de renouer avec leur culture. La priorité de cette entreprise est de développer l’entrepreneuriat autochtone.
«Pour ce faire, nous essayons de trouver des modèles commerciaux qui correspondent mieux aux communautés autochtones et qui soutiennent leurs propres priorités. L’une des façons d’y parvenir consiste à former et embaucher directement des employés autochtones et à créer une chaine d’approvisionnement qui donne la priorité à d’autres entreprises autochtones», décrit Brendan Griebel, gestionnaire des collections et des archives à la Kitikmeot Heritage Society et bénévole à Kaapittiaq.
L’entreprise est associée au Café Vasquez situé à San Francisco, au Pérou, qui achète ses grains de café auprès de producteurs autochtones de la région. Dans le cadre de cette collaboration, les producteurs savent où vont leurs récoltes et sont également au fait de la mission sociale de Kaapittiaq, ce qui leur apporte un sentiment de fierté.
Sa propriétaire et directrice, Erci Vasquez, soutient que «Café Vasquez était extrêmement enthousiaste à l’idée de s’associer à Kaapittiaq et aux avantages que cela apporterait aux deux cultures autochtones. Savoir que les bénéfices iraient directement au soutien de la culture inuite plutôt qu’au bénéfice net de l’entreprise était un gros bonus. Faire partie de cela avec un groupe aussi fort de personnes passionnées par leur culture, comme nous le sommes par la culture péruvienne, était un excellent mélange».
Quant au processus de torréfaction et d’emballage, il est réalisé à Barrie, en Ontario, par l’entreprise Beaver Rock Roastery.
Son président, Dan Saso, affirme que «collaborer avec nos amis du Nord nous permet de mieux comprendre leur culture, mais nous offre également l’opportunité de redonner à cette communauté et de les aider à maintenir la culture et le patrimoine, ce qui est en fait un facteur clé de notre programme commun». Il précise que les sacs d’emballages du café ont été conceptualisés par un designer de la communauté autochtone.
Pour le moment, il est impossible pour Kaapittiaq de procéder au processus de torréfaction à Cambridge Bay. Brendan Griebel explique que la compagnie a «estimé que cela ajouterait environ 8 $ en frais d’expédition pour chaque livre de café vendue».
«Nous recherchons des moyens innovants de nous associer à d’autres entreprises, c’est-à-dire des navires de croisière ou des cargos, pour nous aider à réduire les couts d’expédition vers le Nord. Mais pour l’instant, nous ne pouvons nous permettre de rôtir que dans le Sud», ajoute-t-il.
Redonner aux communautés
Les trois quarts des profits générés par Kaapittiaq servent à créer des programmes pour promouvoir la culture, la langue et le savoir inuits. L’entreprise affirme soutenir les communautés locales afin qu’elles retournent à des façons de vivre plus indépendantes, et ce, tout en prenant soin de la terre.
En 2020 par exemple, les profits de Kaapittiaq ont permis la mise sur pied du projet «Uqarluta/Parlons inuinnaqtun!», qui vise à soutenir le renouveau de la culture inuinnait et la revitalisation de l’inuinnaqtun.
Cette langue, qui compte moins de 600 locuteurs courants, pourrait disparaitre dans moins de deux générations selon certaines estimations. Ce programme a permis aux participants de communiquer de 12 à 15 heures par semaine en inuinnaqtun lors d’activités de la vie quotidienne.
Bien que les communautés du Nunavut soient priorisées au moment de se procurer le café de Kaapittiaq, les produits de l’entreprise sont également vendus au détail partout au Canada et un travail est effectué auprès de restaurants et de magasins canadiens afin de faciliter l’accès.