Le projet de loi 7 du Québec déposé le 5 novembre à l’Assemblée nationale touche un allié important pour les francophones de l’extérieur du Québec. Il change le statut du Centre de la francophonie des Amériques, le faisant passer d’organisme du gouvernement du Québec à organisme à but non lucratif (OBNL).
Le projet loi supprime également les références au Centre de la francophonie des Amériques dans plusieurs lois québécoises.
Cette formalité pourrait apparaitre administrative uniquement, mais le nom du projet de loi 7 – Loi visant à réduire la bureaucratie, à accroître l’efficacité de l’État et à renforcer l’imputabilité des hauts fonctionnaires – laisse présager d’autres intentions.
Créé par Québec et totalement financièrement dépendant de la province, le Centre devra miser sur des subventions et des sources de financement ne venant plus uniquement de la province.
Contacté par Francopresse, le Centre a redirigé les questions vers le ministère de la Langue française de Jean-François Roberge.
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Le Centre de la francophonie des Amériques a été créé en 2008 par le gouvernement du Québec. Il était jusqu’à présent presque entièrement dépendant de l’État québécois.
Le rôle du Centre est de relier les 33 millions de locuteurs francophones du continent américain.
Jean-François Roberge, ministre de la Langue française au Québec, insiste sur le fait que même si Québec se déleste du Centre de la francophonie des Amériques, Québec reste engagé dans la francophonie canadienne et dans le financement du centre. Photo : Courtoisie
Mutiplier les sources de financement
«Ce nouveau statut va permettre au centre de faire plus de partenariats, de développer davantage son autonomie, puis de recevoir des fonds du gouvernement fédéral, parce que l’ancien statut limitait en quelque sorte le Centre de la francophonie dans son établissement de partenariats», affirme le ministre de la Langue française du Québec, Jean-François Roberge, en entrevue avec Francopresse.
Ce dernier fait valoir que le Centre de la francophonie avait approché le fédéral pour obtenir du financement, sans succès, en raison de son statut d’organisme du gouvernement du Québec, soutient encore le ministre.
Jean-François Roberge se veut rassurant en affirmant que le gouvernement du Québec continuera aussi de soutenir financièrement le Centre. Le financement décroitra progressivement, passant de 2,1 millions de dollars en 2026-2027 à 1,8 million de dollars en 2027-2028.
«Il est vrai que le soutien financier du gouvernement du Québec va être réduit, mais de manière limitée. Je suis convaincu qu’à la fin, le centre sera mieux financé et pourra déployer ses ailes, puis faire davantage que ce qu’il fait aujourd’hui.»
Jean-François Roberge comprend que «certains peuvent avoir des inquiétudes, mais […] il faut voir les opportunités derrière cette transformation-là».
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Martin Théberge, président de la SNA, affirme que beaucoup de questionnements entourent cette nouvelle décision de Québec de moins financer le Centre de la francophonie des Amériques et de lui donner son indépendance.
Québec ne se veut pas «paternaliste»
Le changement de l’organisme gouvernemental en OBNL amène des questions quant à un possible «désengagement» du gouvernement québécois envers la francophonie canadienne et à la francophonie des Amériques, avance le président de la Société nationale de l’Acadie (SNA), Martin Théberge.
En entrevue avec Francopresse, celui-ci contrecarre les arguments du ministre québécois : «Ce n’est pas parce qu’un organisme n’est soudainement plus gouvernemental qu’il pourra aller chercher d’autres financements.»
Jean-François Roberge est catégorique sur ce point : Québec diminue son financement du centre, mais «renforce» la francophonie, car le projet de loi 7 comporte une nouvelle marche à suivre en francophonie canadienne.
Le ministre de la Langue française du Québec sera responsable d’orienter et de coordonner «l’action gouvernementale en matière de francophonie canadienne afin d’en favoriser la vitalité et d’assurer le rôle de premier plan que joue le Québec pour la promotion et la valorisation de la langue française au Canada», lit-on dans le projet de loi.
Le rôle du gouvernement du Québec, ce n’est pas un rôle paternaliste envers les communautés francophones à travers le Canada, observe le ministre. Moi, je nous vois comme un partenaire de premier plan.
Les mandats du Centre ne devraient pas changer, affirme encore le ministre, qui promet une «transition douce», en affirmant que les personnes qui travaillent dans les équipes du Centre actuellement restent à leur poste.
Mais le ministre Roberge remet la question d’éventuels départs entre les mains du Centre : «À terme, il appartiendra à la nouvelle direction d’établir des balises».
Contactée sur ce dossier, la Fédération des communautés francophones et acadienne n’a pas souhaité commenter le dossier.
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