Fin 2021, début 2022, les pêcheurs ont appris la fermeture de la pêche printanière au hareng et au maquereau, qui a normalement lieu vers la fin du mois d’avril. «C’est une décision à laquelle on ne s’attendait pas. Ça a été un choc», dit Paul Gallant, secrétaire de l’association des pêcheurs du comté de Prince.

Bruce Palmer, propriétaire du resto/marché de poissons situé sur le quai de Summerside, s’entretient avec le premier ministre Justin Trudeau.
Le choc initial passé, les pêcheurs s’inquiètent maintenant de l’avenir du stock. «Ça fait sept mois que la décision a été prise et on ne sait toujours pas ce que Pêches et Océans propose comme plan de gestion, pour rétablir la ressource. On ne veut pas que ça fasse comme la pêche à la morue, qui est fermée depuis 25 ans», ajoute le pêcheur.
Assis directement en face du premier ministre Justin Trudeau, Paul Gallant a reproché à Pêches et Océans de prendre des décisions sans consulter les pêcheurs, même lorsque ces derniers sont directement concernés. L’une de ces décisions concernait la Première Nation de Lennox Island, qui aurait eu la permission de venir installer 750 trappes dans les eaux que fréquentent les pêcheurs de Baie Egmont et de Cap-Egmont. «Quand on a su cela, on a tout de suite été contre.»
«Au fil des années, on a réduit le nombre de pêcheurs pour que ceux qui restent fassent une meilleure vie, tout en donnant une chance au homard. 750 trappes, c’est comme ajouter trois pêcheurs d’un coup», dit Paul Gallant, comme un autre exemple de décisions qui sont prises sans consultations avec les pêcheurs.
Une autre préoccupation des pêcheurs concerne le flétan et le quota insuffisant alloué aux pêcheurs de l’Île-du-Prince-Édouard. Auparavant, a expliqué Paul Gallant, le quota du flétan était global, puis vers 2007, le quota disponible a été divisé par province, sur la base de l’historique des débarquements. «Cela a désavantagé les pêcheurs de l’Île et des maritimes en général. Lorsque le quota était global, c’est vrai qu’on en pêchait moins que dans le Nord-du-Québec et à Terre-Neuve, mais c’est simplement parce que le flétan arrive plus tard ici, lorsque le quota global était presque rempli. Ce n’est pas parce qu’il y avait moins d’intérêt pour cette pêche. Ce qui nous dérange, nous, les pêcheurs, c’est aussi que lorsque Pêches et Océans alloue de nouveaux quotas, il continue de les répartir selon l’historique de capture d’avant 2007. On n’a donc pas la chance d’augmenter nos chiffres ni de faire de l’argent avec cette pêche», ajoute Paul Gallant.

Kale Palmer, jeune pêcheuse, discute avec le premier ministre Justin Trudeau. Dos à la caméra on voit Francis Morrissey et Paul Gallant.
À la table avec Paul Gallant et le premier ministre, il y avait Kale Palmer, jeune pêcheuse, propriétaire de son entreprise qui a fait sa toute première saison sur la côte nord de l’Île au printemps. Elle a parlé avec le premier ministre de quelques dispositions dans la règlementation concernant les femmes qui pêchent qu’elle considère discriminatoire. «Le premier ministre a dit qu’il ferait enlever ces barrières», a indiqué Paul Gallant.
Ce dernier s’inquiète de ce qu’il adviendra du métier de pêcheur si jamais le homard connait de mauvaises années, comme celles que les pêcheurs ont connues dans le passé. «Vraiment, il reste juste le homard. La pêche au hareng et au maquereau est coupée, on n’a pas assez de quotas de flétan pour que ça vaille la peine. Et le flétan est un des poissons qui mangent les petits homards», craint Paul Gallant. Il suggère ainsi qu’augmenter le quota pour le flétan à l’Île-du-Prince-Édouard permettrait du même coup de réduire la prédation sur les homards. «Ils ont laissé les phoques devenir trop nombreux et là, ça devient pareil avec le flétan, un poisson qui peut aller jusqu’à 200 livres», rappelle le pêcheur.