le Samedi 19 avril 2025
le Mercredi 16 avril 2025 15:00 Francophonie

Élection fédérale : quelles promesses pour la culture francophone?

Pourquoi faire confiance à Francopresse.
Alors que le milieu de la culture en situation minoritaire tire la sonnette d’alarme, la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF) presse les partis fédéraux d’agir.  — Photo : Mark Angelo Sampan – Pexels
Alors que le milieu de la culture en situation minoritaire tire la sonnette d’alarme, la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF) presse les partis fédéraux d’agir.
Photo : Mark Angelo Sampan – Pexels
FRANCOPRESSE – À l’approche du scrutin, la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF) presse les chefs de parti de prendre des engagements concrets pour soutenir les arts et la culture en milieu francophone minoritaire. Mais les partis ne participent pas tous de façon égale à la réflexion et aux demandes.
Élection fédérale : quelles promesses pour la culture francophone?
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«Souvent, les arts et la culture sont considérés comme une espèce de dessert dont on peut se passer si on a trop mangé ou si on manque d’argent. Mais dans les communautés en situation minoritaire, c’est un plat de résistance», lâche d’emblée la présidente de la FCCF, Nancy Juneau, en entrevue avec Francopresse.

Protéger et investir davantage dans les arts et la culture : telles sont les deux priorités mises de l’avant par l’organisme francophone dans ses demandes, lancées le 1er avril.

La FCCF réclame une meilleure reconnaissance des artistes et des mesures concrètes pour lutter contre leur précarité. L’organisme demande aussi aux partis fédéraux de garantir un financement stable pour un secteur à bout de souffle.

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Six actions en faveur de la culture francophone

La FCCF propose six «actions concrètes» :

  • Assurer l’accès à la culture francophone et œuvrer à sa découvrabilité numérique;
  • Garantir un financement pérenne des organismes artistiques et culturels;
  • Renforcer le rôle et le mandat national de CBC/Radio-Canada;
  • Développer une charte pour l’éducation artistique en francophonie;
  • Reconnaitre le travail non rémunéré des artistes et leur donner accès au filet social;
  • Augmenter le budget des institutions fédérales en culture.

Manque à gagner

Comme le rappelle Nancy Juneau, le rapport «Éviter le point de rupture» de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA), publié en 2022, fait état d’un important manque à gagner pour les organismes francophones et demande 300 millions de dollars supplémentaires. Un déficit que le Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028 n’est pas parvenu à combler.

Le financement des organismes a augmenté, mais pas à la hauteur des besoins. Donc ce manque-là reste entier et il est plus prononcé dans le secteur culturel.

— Nancy Juneau, présidente de la FCCF

Car, contrairement à d’autres domaines soutenus par plusieurs ministères, celui de la culture dépend quasi exclusivement de Patrimoine canadien, explique Nancy Juneau.

La FCCF réclame aussi une meilleure rémunération des artistes. La présidente cite le cas des artistes visuels, qui consacrent d’innombrables heures à créer en atelier sans être payés.

«Lui ou elle n’auront sa rémunération qu’une fois qu’il ou elle aura vendu son œuvre. […] C’est un peu comme si on ne finançait pas la recherche en sciences», illustre-t-elle.

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Un secteur économique porteur

Selon l’Analyse de l’impact économique de la communauté culturelle canadienne-française en 2022, publiée en 2024, le secteur artistique et culturel de la francophonie canadienne a contribué pour 5,83 milliards de dollars au PIB du Canada en 2022 et généré plus de 36 100 emplois en 2021.

Souveraineté culturelle

Dans un contexte de guerre commerciale, mais aussi culturelle avec les États-Unis, Nancy Juneau rappelle que la francophonie canadienne a une contribution importante à apporter au débat sur la souveraineté culturelle.

La francophonie est un des traits distinctifs de notre pays. C’est ce qui nous distingue, entre autres, des États-Unis. Les arts et la culture sont les véhicules qui viennent nourrir cette identité […] Cela n’aura jamais été aussi important de nous donner les moyens pour continuer à jouer ce rôle-là.

— Nancy Juneau

La présidente de la FCCF veut croire que les demandes des francophones seront entendues au fédéral, comme ce fut le cas dans certaines provinces. Elle évoque le Québec, qui a récemment augmenté son budget à destination des arts, et du Nouveau-Brunswick, qui, «malgré une situation difficile et un déficit anticipé, a quand même augmenté de 2 millions l’enveloppe des arts et de la culture».

La FCCF plaide également pour un renforcement du rôle et du mandat national de CBC/Radio-Canada.

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De gauche à droite : l’animatrice Johane Despins, Steven Guilbeault (Parti libéral du Canada), Martin Champoux (Bloc québécois) et Marwan El-Attar (Nouveau Parti démocratique) lors du débat sur les enjeux culturels organisé à Montréal le 14 avril.

Photo : David Ospina

Que promettent les partis fédéraux?

  • Bloc québécois (BQ)

Le Bloc promet de moderniser CBC/Radio-Canada et de renforcer son rôle de couverture régionale, en particulier pour les communautés francophones hors Québec.

Le Bloc québécois d’Yves-François Blanchet veut faire en sorte que 40 % du financement fédéral en culture soit réservé au contenu francophone. 

Photo : Capture d’écran CPAC

Le parti d’Yves-François Blanchet veut aussi rediriger les revenus de la taxe sur les produits et services (TPS) et la taxe sur les services numériques vers le milieu culturel et offrir des avantages fiscaux à des œuvres mettant en valeur la culture québécoise, francophone et autochtone. Il souhaite en outre soutenir les projets visant la découvrabilité du contenu francophone, comme la plateforme MUSIQC.

Le Bloc entend également bonifier les programmes de subventions pour les arts et faire en sorte que 40 % du financement soit réservé au contenu francophone. Il propose par ailleurs de contraindre Ottawa à consulter le Québec, les communautés franco-canadiennes et les nations autochtones avant d’adopter toute nouvelle règlementation.

Pour le parti du Québec, la culture reste «un investissement» et non une dépense, a répété le député Martin Champoux, lors de l’unique débat en français sur le sujet coorganisé par la Coalition pour la diversité des expressions culturelles (CDEC), à Montréal, le 14 avril.

Il milite aussi pour une réforme de la Loi sur l’assurance-emploi, comme le suggère entre autres la FCCF, et l’étalement des revenus des travailleurs culturels, afin d’atténuer leur charge fiscale.

Le Bloc propose en outre de revoir la répartition des financements fédéraux en fonction des réalités régionales.

  • Parti conservateur du Canada (PCC)

Le parti a choisi de ne pas participer aux deux débats sur la culture (en français à Montréal et en anglais à Toronto, le 16 avril), proposé par plusieurs organismes, dont le CDEC.

Néanmoins, le porte-parole conservateur en matière de langues officielles, Joël Godin, affirme dans une réponse écrite à Francopresse que le parti veut garantir «le maintien du financement pour la culture francophone et québécoise».

De son côté, le chef conservateur, Pierre Poilievre, a réitéré sa promesse de couper le financement de la CBC, mais de bonifier celui de Radio-Canada, afin de continuer à desservir le Québec et les communautés francophones.

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  • Parti libéral du Canada (PLC)

«Protéger le Canada et notre identité, ça passe par protéger notre culture», a déclaré Mark Carney lors d’une annonce le 4 avril, à Montréal, où il a promis d’augmenter le financement de CBC/Radio-Canada de 150 millions de dollars par année.

Mark Carney promet d’augmenter le financement de CBC/Radio-Canada de 150 millions de dollars par année. 

Photo : Capture d’écran CPAC

Les langues officielles et la culture ne seront jamais sur la table des négociations avec les États-Unis, a insisté le ministre actuel de la Culture et de l’Identité canadiennes, Steven Guilbeault, lors du débat en français sur la culture du 14 avril.

Il a défendu le bilan libéral, mettant de l’avant une hausse de 50 % des budgets culturels fédéraux depuis 2015. Le ministre s’engage à réformer le filet social et de faire «tout ce qu’[il] peut» pour augmenter de 140 millions de dollars le financement du Conseil des arts du Canada et celui des programmes de Patrimoine canadien.

  • Nouveau Parti démocratique (NPD)

Pour Marwan El Attar, candidat pour le NPD au Québec, la culture est éclipsée de la campagne électorale. «On préfère parler de pipelines», a-t-il lâché lors du débat coorganisé par la CDEC.

Le parti se dit prêt à accorder au moins 1 % du budget fédéral au secteur. Il propose de fixer la prestation d’assurance-emploi à 60 % du revenu, contre 55 % actuellement. Côté impôt, le NPD est favorable à un étalement des revenus.

Pour financer ces promesses, le NPD veut «aller chercher dans les subventions des compagnies pétrolières» et s’attaquer à l’évasion fiscale, a détaillé Marwan El Attar.

  • Parti vert du Canada (PVC)

Au moment de publier, le Parti vert n’avait pas annoncé son plan pour la culture. Mais il a dit vouloir augmenter le financement des médias et garantir celui de CBC/Radio-Canada.

Type: Actualités

Actualités: Contenu fondé sur des faits, soit observés et vérifiés de première main par le ou la journaliste, soit rapportés et vérifiés par des sources bien informées.

Montréal

Camille Langlade

Cheffe de pupitre

Adresse électronique: