Ethel Coté est décédée des suites d’un cancer à l’âge de 66 ans le 16 octobre 2024. Elle a œuvré principalement en Ontario, mais a été honorée à plusieurs niveaux. Au cours des années, elle a été admise à l’Ordre du Canada, à l’Ordre de l’Ontario, a reçu le Grade de Chevalier de la Pléiade – Ordre de la francophonie.
Elle est née en pleine Révolution tranquille au Québec. C’était sans doute déjà un signe que l’engagement occuperait une grande place dans son parcours! Avec un père travailleur social et une mère au foyer, mais engagée dans sa communauté, ses parents ont montré à la jeune Ethel à être ouverte à l’autre.
Au Québec, «très jeune, j’ai été au contact d’étrangers, d’autres cultures», se souvient-elle. L’autre, c’était par exemple l’ex-détenu accueilli à la maison, parce que le père d’Ethel croyait en la réhabilitation sociale.
Puis arrive le déménagement en Ontario à l’âge de 15 ans, à la suite d’une promotion de son père dans la capitale canadienne. Fin des repères, sauf pour la langue à l’école. C’est surtout le début du combat d’Ethel Côté pour faire respecter les droits des francophones.
«Moi, j’étais de la génération où les cours de chimie et de math étaient en anglais.» Quand on a voulu rendre l’école d’Ethel entièrement anglophone, l’adolescente a rué dans les brancards. Élue présidente du conseil étudiant de son école par ses pairs, elle a foncé. «Je donnais des entrevues en anglais au Citizen!»
Mère de famille très jeune, elle a par la suite atteint «le fond du baril», selon sa propre expression. Mais c’est aussi à ce moment-là qu’elle a commencé à s’intéresser aux coopératives d’habitation, aux garderies. «Vous savez, il y a un fond au baril. On remonte. Il y a toujours des solutions. Il ne faut jamais baisser les bras», philosophe Ethel Côté.
De fil en aiguille, cette volonté de toujours s’en sortir et de privilégier l’autonomie l’a amenée à occuper des postes de direction, comme au Conseil de la coopération de l’Ontario (CCO) à la fin des années 1990.

Innovation, passion et coopération avant et après la pandémie
Loin du discours de victimisation, Ethel Côté encourage d’abord et avant tous les organismes à diversifier leurs sources de revenus. Oui, grâce aux subventions, mais les entreprises devraient à son avis s’assurer d’une certaine indépendance financière.
C’est le message qu’elle partage quand elle accompagne, notamment à titre de consultante avec sa boite MécènESS, des organismes ou des groupes de femmes, ici comme en Afrique, qui veulent s’investir entre autres dans l’innovation sociale.
Alors que le confinement actuel favorise beaucoup de formations à distance, c’est un moyen avec lequel Ethel Côté était déjà familière bien avant le coronavirus. À titre de présidente et fondatrice en 2017 de l’Institut social, webinaires, blogues et formations virtuelles font partie de sa programmation depuis le début. On y donne des ateliers destinés à ceux et celles qui veulent développer leur leadeurship collaboratif dans des domaines aussi divers que la culture, le social, l’économie et l’environnement.
S’il y a une chose dont elle est certaine, c’est que la crise actuelle va amener «un éveil du social dans une logique collective. Combien de personnes font maintenant la promotion de l’achat local ; c’est ça qui me fait carburer présentement! On est en train de remettre le système en question.»
Le confinement ne l’arrête pas. Pour preuve, via MécènESS, Ethel Côté offre à distance des ateliers gratuits en innovation et entrepreneuriat social pour les personnes qui veulent développer des projets sortant des sentiers battus ou qui veulent développer une idée ou une entreprise sociale.

La Françoise David de l’Ontario
L’expression la fait sourire. «Je l’ai connue au tout début de sa carrière, à l’époque de la Fédération des femmes canadiennes-françaises. Son discours, taboire! Ça avait tellement de bon sens!»
Si elle partage les valeurs de gauche de l’ex-députée et porte-parole de Québec solidaire, il y a une chose qu’elle n’a pas faite comme Françoise David : l’engagement politique. Peut-être l’aurait-elle fait si elle était restée au Québec. Regrette-t-elle pour autant d’avoir fait sa place en Ontario? Oh que non! «On est super bien ici en francophonie!»
Le développement communautaire a amené Ethel Côté à explorer divers horizons, comme la culture. «Les artistes franco-ontariens nous montrent qu’ils peuvent créer avec un 25 cents divisé en quatre!» D’où son engagement il y a quelques années avec La Nouvelle Scène Gilles Desjardins, espace théâtral situé sur la rue King Edward à Ottawa. Un lieu qui a su innover en regroupant pas moins de quatre compagnies théâtrales.
Elle a appris aussi de Françoise David et de divers mentors que seule, on ne change pas le monde. «Avec l’âge, on se rend compte qu’on a des contacts. On est plus stratégique.»
Y a-t-il des rêves qu’Ethel Côté voudrait encore réaliser? «J’aimerais écrire un livre pour mettre en lumière ce qui se fait de beau dans la communauté. J’aimerais aussi qu’il y ait une université gratuite, accessible à tous et à toutes. Et puis, j’aimerais encore faire de l’accompagnement pour rendre du contenu accessible. Je n’ai pas les millions de Bill Gates, mais j’ai des milliards d’informations dans ma tête et mon cœur à partager!»