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le Lundi 25 juillet 2022 7:14 Sciences et environnement

Une Franco-Ontarienne derrière la qualité des images du télescope James Webb

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Le quintuplé de galaxies Stephan’s a été révélé avec plus de clarté par le télescope spatial James Webb. Quatre de ces galaxies sont à environ 290 millions d’années-lumière de la Terre.  — Photo : NASA
Le quintuplé de galaxies Stephan’s a été révélé avec plus de clarté par le télescope spatial James Webb. Quatre de ces galaxies sont à environ 290 millions d’années-lumière de la Terre.
Photo : NASA
LE VOYAGEUR (Sudbury) – Le téléscope spatial James Webb a permis à l’humanité de voyager visuellement dans le temps lorsque la NASA a dévoilé les premières images de haute qualité prises par le satellite fabriqué par une équipe internationale. Assurer que les images soient parfaites était justement le rôle d’une Franco-Ontarienne originaire de Sudbury.
Une Franco-Ontarienne derrière la qualité des images du télescope James Webb
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De 2008 à 2016, Colette Lepage a été la gestionnaire de la salle blanche du Goddard Space Flight Center à Greenbelt, principal centre de la NASA consacré à la recherche scientifique, dans l’état du Maryland. Il s’agit de l’une des plus grandes salles du genre au monde. Le miroir et les instruments du télescope James Webb ont été assemblés et testés en grande partie dans cette salle.

Une salle blanche est une pièce stérile où l’air et l’environnement sont entièrement contrôlés pour éliminer au maximum les particules et la poussière. «Il y a une excellente filtration et un flux constant d’air propre. La majorité repasse dans le système de filtration. L’idée est d’éviter toute contamination moléculaire et de particules provenant de l’extérieur de la salle. Parce que ces deux types de contaminants peuvent nuire aux composantes», explique Mme Lepage.

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Pour illustrer, elle compare avec les traces que les doigts peuvent laisser sur les lunettes ou avec la poussière qui peut s’y accumuler si elles restent trop longtemps sans servir. Les travailleurs qui pénètrent dans la salle doivent aussi suivre un protocole précis et porter un habit de protection.

Des techniciens du centre Goddard de la NASA retirent soigneusement la protection des miroirs du télescope spatial James Webb avant de pouvoir installer les instruments.

Photo : NASA/Chris Gunn

Elle est impressionnée par les images capturées par le télescope et a un degré d’appréciation supplémentaire. «Je suis fière de dire que nous avons très bien fait notre travail, lance-t-elle. En fait, je crois qu’il est encore plus propre que ce qu’ils anticipaient. Alors c’est un énorme bonus pour nous. Espérons que ça donnera les photos les plus claires que l’on pourrait avoir.»

Effectivement, la moindre saleté aurait pu compromettre la clarté des images prises par le télescope et personne n’aurait pu y faire quoi que ce soit après le lancement. Le projet représentait un défi supplémentaire, car le miroir du télescope est à découvert, il n’est pas protégé par une autre structure.

«Quand quelque chose sur lequel vous avez travaillé, qui était vraiment difficile et compliqué, vous apporte ces images et que nous pouvons voir ce que ça rapporte, ça vaut la peine. Ça vaut la sueur, les larmes et le sang que nous y avons mis. Je suis excité de voir ce que l’on verra d’autre, quelles découvertes seront faites.»

Colette Lepage n’est plus responsable de la salle, mais elle continue à servir de conseillère auprès de l’installation.

Les premiers pas au féminin

Colette Lepage

Photo : Chris Gunn

En 1999, «j’ai déménagé aux États-Unis et j’ai commencé à chercher un emploi. Dans le Washington Post, j’ai vu un poste de niveau débutant pour le contrôle des contaminants au centre Goddard de la NASA. Je ne croyais pas vraiment avoir l’emploi, mais j’ai bien fait en entrevue et j’ai obtenu le poste», raconte-t-elle.

Elle a alors gagné beaucoup d’expérience en contrôle des contaminations et en marche de salle blanche, jusqu’à devenir la gestionnaire de la salle du centre Goddard : la Spacecraft System Development and Integration Facility (SSDIF).

«Quand j’ai commencé en tant que gestionnaire, on préparait la dernière mission d’entretien pour le télescope spatial Hubble en 2009», dit Colette Lepage. Le travail sur le télescope James Webb a commencé peu de temps après.

Le nom de l’ingénieure apparait à quelques reprises dans des listes et des articles qui parlent des femmes en génie, en lien avec la tuerie de l’école Polytechnique de Montréal en 1989, où le tireur avait seulement visé des étudiantes.

«Je me suis toujours sentie relativement à l’aise dans un environnement majoritairement masculin. J’ai travaillé avec un groupe de personnes très diversifié, de partout. Je crois que lorsqu’on travaille avec autant de diversité, tout le monde est plus ouvert.» Elle se dit chanceuse d’avoir eu beaucoup d’appui et une expérience largement positive dans le domaine.

Le miroir du télescope James Webb a été entièrement assemblé dans la salle blanche du centre Goddard, sous la direction de Colette Lepage.

Sudbury : du noir au vert

Colette Lepage a grandi dans une famille francophone du sud de Sudbury, près du lac Richard. Elle a fréquenté l’école élémentaire St-Mathieu et est diplômée de l’École secondaire Macdonald-Cartier. Après plus de deux décennies aux États-Unis, elle ne se sentait pas assez à l’aise pour parler en français, alors notre discussion s’est déroulée en anglais.

Colette Lepage devant la réplique d’une fusée Ariane 5, qui a servi à lancer le télescope James Webb dans l’espace.

Photo : Courtoisie

Elle a obtenu un diplôme de technologue en génie chimique du collège Cambrian en 1994. Après quelques années de travail, elle s’est dirigée vers l’Université Lakehead de Thunder Bay pour obtenir un diplôme d’ingénieure chimique.

Le ciel de son coin de la ville, moins affecté par la pollution lumineuse, lui a permis de développer son intérêt pour l’observation des étoiles, dit-elle.

Elle revient de temps à autre dans la région et est heureuse de constater les résultats du processus de reverdissement. «Quand j’ai grandi, ça ne ressemblait pas à ça. C’était difficile pour toute végétation de pousser. Quand je suis revenu après la COVID, je rentrais en ville en voiture et je me disais “C’est tellement vert maintenant”. C’est magnifique.»

Elle a aussi quelque peu participé à l’effort de reverdissement. Entre autres, pendant un emploi d’été au ministère de l’Environnement et de l’Énergie, elle a participé à des activités bénévoles de plantation d’arbres.

«J’adorais faire ça. Il y a surement quelques arbres encore debout que j’ai plantés. Et nous avions quelques arbres de surplus que j’ai ramenés chez mes parents et ils les ont plantés. Ils sont encore là.»