En entrevue avec Francopresse, le chef du parti néodémocrate, Jagmeet Singh, rappelle que «ce qu’on a vu depuis le début de la pandémie, c’est qu’il y avait des situations horribles dans les centres de soins de longue durée. En Ontario, au Québec, les conditions étaient complètement inexcusables.»
Jagmeet Singh soutient donc la création de normes nationales sur les soins de longue durée : «On a besoin de résumer, d’évaluer et de déterminer quels sont les meilleurs standards, les normes nationales, pour prendre soin de nos ainés.»
Pour le chef néodémocrate, les normes doivent entre autres inclure le nombre d’heures de soins accordées à chaque patient et le nombre d’employés dans les centres de soins. «Les normes doivent toucher toutes les questions de soins et ça doit être exhaustif», précise-t-il.
Des standards relatifs aux conditions salariales sont aussi importants pour le leadeur néodémocrate, qui rappelle que les cas de COVID-19 se sont multipliés dans les centres de soins de longue durée parce que les conditions de travail des préposés aux bénéficiaires les contraignaient à travailler dans plusieurs centres à la fois.
Je suis complètement contre la place des profits dans les soins aux ainés. La preuve montre que les pires conditions étaient dans les centres de soins de longue durée où ils gagnaient des profits.
D’après le leadeur néodémocrate, les soins de longue durée devraient s’inspirer de l’approche de la Loi canadienne sur la santé, où le gouvernement fédéral énonce des principes et livre du financement, afin que les centres de soins de longue durée soient «accessibles, universels et publics».
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Un projet qui ne fait pas consensus à Ottawa
Le porte-parole en matière de santé du Bloc québécois, Luc Thériault, ne voit pas l’intérêt d’imposer des standards fédéraux en soins de longue durée.
«Je pense que le Québec et les différentes provinces sont capables — puisque c’est elles qui donnent les soins, qui ont l’expertise — de se donner elles-mêmes des normes à respecter pour que les choses se rétablissent. Le gouvernement fédéral n’a ni la compétence constitutionnelle ni l’expertise pour faire ça», défend Luc Thériault.
Jagmeet Singh estime qu’il est important de respecter la compétence des provinces, «mais en établissant des normes, on a un outil pour mieux protéger nos ainés. Donc je ne vois pas le problème d’avoir une liste de recommandations pour les meilleures pratiques.»
Pour Luc Thériault, «quand on pointe du doigt les provinces pour ce qui est arrivé dans les CHSLD, il faut faire un examen de conscience et se demander “comment ça se fait qu’on se soit désinvestis à ce point-là?”»
Il mentionne la contribution financière du gouvernement fédéral en santé, qui serait selon lui passée de 50 % à 21 % au cours des 25 dernières années.
Pour Jagmeet Singh, «il y avait un sous-financement historique. Et je nomme les gouvernements fédéraux, et ça inclut les gouvernements libéraux et conservateurs, qui ont coupé les transferts, les financements pour les soins de santé en général.»
Ce que la crise révèle, explique Luc Thériault, c’est l’importance de la prévention :
Quand tu coupes d’année en année, 25 ans en ligne, parce que le gouvernement [fédéral] veut pelleter son déficit dans la cour des provinces, qu’est-ce que vous pensez qui est arrivé? […] Ce qu’on doit faire en termes de prévention, bien ça prend le bord.

Les intentions du gouvernement demeurent nébuleuses
Justin Trudeau rappelait, en conférence de presse le 16 octobre dernier, que «les tragédies qu’on a vues dans nos centres de longue durée ont été terribles ce printemps, et malheureusement on est encore à risque dans cette deuxième vague d’en voir d’autres.»
Du début de la pandémie jusqu’à la fin octobre, 77 % des décès liés à la COVID-19 au Canada ont été observés dans des centres de soins de longue durée.
«C’est la responsabilité de tous les paliers de gouvernement de protéger les Canadiens. Évidemment, le gouvernement fédéral n’a pas la juridiction sur la gestion de nos CHSLD ou de nos centres de longue durée. Mais nous avons une responsabilité de travailler avec les provinces, pour s’assurer que, d’une province à l’autre, on est en train de protéger nos ainés», ajoutait le premier ministre.
Contacté par Francopresse le 10 novembre, le bureau de la ministre de la Santé, Patty Hajdu, a indiqué que «plusieurs gestes ont été posés pour soutenir ceux et celles qui vivent dans ces résidences, mais nous savons qu’il reste encore beaucoup à faire. C’est la raison pour laquelle nous collaborons avec les provinces et les territoires pour établir de nouvelles normes nationales pour les soins de longue durée.»
Au moment de la publication du texte, le bureau de la ministre Hajdu n’avait pas répondu aux demandes de précision de Francopresse.