le Lundi 4 août 2025
le Jeudi 19 juin 2025 16:00 Libre opinion

Solutions pour répondre à la pénurie de médecins francophones à l’échelle canadienne

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Des solutions existent déjà pour augmenter le nombre de médecins francophones, elles doivent simplement être mise de l’avant.  — Photo : Accuray – Unsplash
Des solutions existent déjà pour augmenter le nombre de médecins francophones, elles doivent simplement être mise de l’avant.
Photo : Accuray – Unsplash
LIBRE OPINION – L’article publié le 19 mai dans Francopresse intitulé Médecins francophones : chronique d’une pénurie; les universités ne forment pas assez de médecins pour combler les besoins» m’a incité à vous informer ou simplement vous rappeler de stratégies à succès qui ont été mises en place il y a quelques années à l’échelle canadienne.
Solutions pour répondre à la pénurie de médecins francophones à l’échelle canadienne
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La première stratégie est la création du Consortium national de formation en santé (CNFS) en 2003. Il a été le résultat d’une des recommandations du comité consultatif des communautés francophones en situation minoritaire (CCCFSM), 2001, de Santé Canada. Je vous propose de lire ce document en entier disponible sur le Web et encore très actuel.

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Je vous présente ici un extrait qui mérite votre attention. «Pour étudier en français dans l’une ou l’autre des disciplines universitaires en santé, les membres des communautés francophones en situation minoritaire doivent souvent se rendre dans une autre ville ou province où est dispensée la formation. Une fois déracinés, peu d’entre eux reviennent dans leur communauté pour exercer leur nouvelle profession. L’autre solution qui s’offre aux francophones en situation minoritaire est d’aller étudier en santé dans l’établissement anglophone le plus près de chez eux. Toutefois, il est rare que, une fois diplômés, ceux-ci exercent leur profession en français et, encore plus rare, qu’ils reviennent dans leur communauté pour y travailler. Des études de l’OMS et de l’Organisation mondiale des collèges nationaux, académies et associations académiques des généralistes et des médecins de famille (WONCA) de même que l’expérience du Partenariat Acadie-Université de Sherbrooke démontrent qu’il y a deux critères de succès pour le recrutement et la rétention des professionnels de la santé, soit la région d’origine du candidat et l’exposition du candidat à son milieu d’origine le plus tôt possible et le plus souvent et longtemps possible au cours de sa formation. Aussi importe-t-il de renforcer la formation des étudiants en français aussi près que possible de leur milieu d’origine, de sorte qu’ils puissent ensuite exercer leur profession dans leur communauté et dans leur langue.»

Les retombées de la création du Consortium national de formation en santé qui regroupe les universités et collèges francophones en milieu minoritaire sont importantes. Le CNFS a augmenté le nombre de professionnels en santé francophones à l’échelle nationale. Le Centre de formation médicale du Nouveau-Brunswick, né de la contribution financière du CNFS (financé via le Programme des langues officielles du Canada) et du gouvernement du Nouveau-Brunswick s’illustre à l’échelle nationale et internationale par le haut taux de rétention de ses finissantes et finissants dans la province du Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse.

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Un groupe qui est demeuré initialement dans l’oubli est les étudiantes et étudiants francophones qui ont choisi d’être formés dans les professions de santé dans les universités près de leur communauté d’origine et qui offrent des formations uniquement en anglais. Ces institutions anglophones évidemment ne font pas partie du CNFS. Une deuxième stratégie fut donc mise en action.

C’est alors qu’en 2014, un comité de travail de l’Association des facultés de médecine du Canada (AFMC) que j’ai eu l’honneur de présider a présenté un projet pour cibler les étudiantes et étudiants francophones et francophiles dans les facultés de médecine anglophones du Canada. Le projet intitulé   «Franco Doc» de l’AFMC a obtenu son financement du Programme des langues officielles du Canada via Santé Canada. Ses objectifs étaient de collaborer avec les facultés anglophones afin : 1 – d’identifier le nombre d’étudiantes et étudiants francophones et francophiles en médecine; 2 – d’identifier leurs besoins de formation en français; 3 – d’offrir des activités de formations complémentaires en français alignées avec les objectifs pédagogiques de leur faculté.

Le projet a été financé à deux reprises pour une période de cinq ans. Les résultats ont été étonnants. Le projet Franco Doc I et II a réussi à identifier une présence en tout temps d’environ 375 étudiantes et étudiants francophones et francophiles dans les facultés de médecine et des sciences de la santé anglophones du Canada. Ceci représente une cohorte francophone équivalente à une faculté de médecine entière. Les étudiantes et étudiants en question ont démontré un fort intérêt de parfaire leurs connaissances et compétences cliniques en français, en particulier en ce qui a trait à la terminologie médicale, et de mieux connaitre les besoins des communautés francophones en situation minoritaire. Plusieurs activités de formation en français ont été mises en place telle que la traduction de modules de formation, des simulations cliniques en français et j’en passe. Cette mobilisation des facultés de médecine autour de l’importance des services de santé en français a permis de tisser des liens avec la Société Santé en français (SSF) et ses réseaux au Canada. L’Association des facultés de médecine du Canada, grâce à son projet Franco Doc, a mis en place des stratégies prometteuses pour l’amélioration de l’intégration des ressources humaines en santé en français.

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Malheureusement depuis 2019, le manque de financement adéquat, l’absence d’une équipe de gestion et de coordination dédiée au projet, le plan d’action de Franco Doc et ses activités ont été grandement réduits. Deux ressources humaines dédiées à ce projet en collaboration avec l’AFMC et la SSF permettraient de réactiver le plan d’actions qui avaient fait preuve d’un énorme succès. Les étudiantes et étudiants francophones et francophiles dans les facultés de médecine avaient clairement exprimé dans la démarche initiale du projet «parce que nous avons choisi de se former près de chez nous en anglais, notre communauté nous oublie».

Je souhaite que les partenaires puissent trouver du financement et les moyens de revigorer cette initiative d’envergure au niveau des facultés de médecine anglophones. La SSF via sa démarche Franco Santé a amorcé l’identification d’étudiantes et étudiants dans les autres disciplines de la santé un peu à l’image de Franco Doc.

Des solutions qui ont fait preuve de succès existent. Il suffit de les réactiver.

Dr. Aurel Schofield, C.M.,CCMF, FCMF
Fondateur et ancien directeur
Centre de formation médicale du Nouveau-Brunswick
Professeur titulaire (retiré), Université de Sherbrooke
Dieppe, N.-B.

Type: Opinion

Opinion: Contenu qui avance des idées et qui tire des conclusions fondées sur une interprétation des faits ou des données émanant de l’auteur.

Dieppe, N.-B.