Les superlatifs ne manquaient pas, à un tel point qu’il a aussi dû modérer les attentes. Il nous prévenait donc qu’il n’y aurait toutefois pas de grandes surprises.
Le ministre avait raison. Il y a très peu de surprise dans ce budget. Beaucoup de mesures qui y sont présentées avaient déjà été annoncées, comme la baisse d’impôt pour les particuliers, le programme Maisons Canada et les investissements substantiels en défense.
Ce que propose le budget fédéral
Les nouvelles initiatives, car il y en a quand même, s’inscrivent dans la continuité des déclarations faites par le premier ministre depuis qu’il est devenu chef du Parti libéral. Le gouvernement annonce de nouvelles sommes pour trois grands secteurs qu’il semble chérir : le logement, les infrastructures et la défense.
Le budget présente aussi des mesures pour encourager les entreprises privées canadiennes à diversifier leur marché et à être plus compétitives et plus productives. On apprend toutefois qu’il privilégie les incitatifs fiscaux pour y parvenir.
Le gouvernement va récompenser les entreprises qui adoptent certains comportements, comme investir rapidement pour augmenter leur capacité de production. Celles qui le feront paieront moins d’impôt.
On élimine aussi certaines failles qui permettaient à des entreprises de se soustraire à l’impôt canadien.
Le budget met aussi l’accent sur les minéraux critiques et les infrastructures de transport. Encore une fois, rien de bien nouveau.
On se doutait que le gouvernement n’allait pas proposer d’ambitieux programmes environnementaux. Le budget le confirme.
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S’agit-il alors d’un budget réellement «générationnel»? …
Si on analyse le budget en fonction de son impact sur différentes générations, oui, on peut affirmer qu’il s’agit d’un budget générationnel. Les dépenses prévues aideront surtout les futures générations.
Le nouveau Fonds pour bâtir des collectivités fortes, par exemple, doté d’un budget de 51 milliards de dollars pour les 10 prochaines années, permettra de financer de nombreux projets qui auront une longue durée de vie. Comme des installations portuaires, des routes, des parcs, des centres communautaires et sportifs, etc.
Mais ce seront aussi les générations futures qui paieront la note. La plupart des projets seront financés par des emprunts. Les contribuables de demain devront donc payer les intérêts sur la dette et, le cas échéant, rembourser cette dette ou encore la refinancer.
… et d’un budget «transformationnel»?
Par contre, il ne s’agit pas d’un budget «transformationnel». On ne change ni la structure industrielle du pays ni le rôle du gouvernement fédéral dans l’économie canadienne.
Son principal objectif est de créer un environnement propice au développement des affaires par le biais de la fiscalité. Pour le gouvernement, le Canada doit devenir un pays plus attrayant pour faire des affaires que les autres pays.
Pour atteindre ce but, le premier ministre Carney ne propose que des mesures qui ont déjà été utilisées par le passé. On diminue les impôts – par le biais de crédits d’impôt – pour encourager les entreprises à produire plus et mieux et ainsi créer des emplois et de la richesse.
En fait, le budget de Mark Carney ressemble beaucoup aux budgets qu’avaient présentés avant lui Stephen Harper, Jean Chrétien ou Brian Mulroney.
Ces autres budgets avaient-ils réussi à transformer l’économie canadienne? Tous ces premiers ministres avaient l’ambition de le faire, mais peu ont réussi. Notre économie a été de tout temps et est encore de nos jours une économie très dépendante des marchés étrangers, surtout des États-Unis.
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Un premier ministre en manque d’imagination?
Après avoir lu le budget du gouvernement Carney, on reste sur notre faim. Le premier ministre nous avait promis beaucoup de choses en campagne électorale. Il nous promettait notamment une nouvelle ère de prospérité économique inédite. Bref, un vaste plan «transformationnel».
Cependant, on ne voit aucun signe suggérant que le gouvernement envisage sérieusement cette transformation.
Pourtant, une telle transformation serait possible. Ne pourrait-on pas, par exemple, mettre la lutte aux changements climatiques au cœur de nos priorités? En conciliant à la fois la protection de l’environnement, les énergies vertes et la croissance économique?
Mark Carney a été l’émissaire spécial du secrétaire général des Nations unies pour le financement de l’action climatique. On sait qu’il connait très bien ce dossier et aurait des suggestions à faire à ce sujet.
Cette transformation pourrait aussi être industrielle. Pourquoi ne pas créer une ou quelques industries proprement canadiennes?
Dans sa plateforme de 2025, le Parti libéral s’engageait notamment à bâtir un réseau de construction automobile «100 % canadien». Pourquoi alors ne pas proposer un plan détaillé pour mettre en œuvre ce réseau, sachant dans quelle position difficile se trouve actuellement l’industrie canadienne?
On pourrait aussi s’attaquer à la transformation de nos ressources naturelles. Nous n’en transformons qu’une très faible proportion en produits de consommation et en produits industriels ici au pays. Le temps n’est-il pas venu de changer nos façons de faire et ainsi créer un marché qui dépendrait moins des exportations de matières premières?
Bref, plusieurs pistes auraient pu être explorées.
Avec son premier budget, le premier ministre Carney avait l’occasion de démontrer à la population canadienne qu’il arrivait avec de nouvelles idées, ambitieuses et… transformatrices. C’est certainement ce que les Canadiens et Canadiennes espéraient.
Ce n’est malheureusement pas ce qu’ils et elles ont eu.
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