Il y a un peu moins d’un an, une commission mandatée par le gouvernement présentait un rapport visant à renforcer la Loi sur les langues officielles. Après des mois sans réagir aux recommandations, Blaine Higgs a mis sur pied un comité temporaire composé de huit ministres, d’un député et lui-même afin d’étudier la question. Les Acadiens Daniel Allain et Réjean Savoie font partie du comité. Kris Austin aussi.
Allons droit au but. Kris Austin n’a pas d’affaires dans ce comité, comme il n’aurait pas dû être nommé ministre ni être accueilli à bras ouverts au sein du Parti progressiste-conservateur.
M. Austin affirme appuyer le bilinguisme officiel au Nouveau-Brunswick et soutient n’avoir que des divergences d’opinions sur la façon dont celui-ci est mis en œuvre.
C’est une façon malhonnête pour l’ancien chef fondateur de la People’s Alliance d’exprimer qu’à ses yeux, les Acadiens jouissent de trop de droits linguistiques, que ceux-ci coutent trop cher (il a déjà qualifié le bilinguisme officiel de «gaspillage de fonds publics») et que la majorité anglophone n’est pas traitée de façon équitable.
Kris Austin ne souhaite pas assurer la pérennité de la Loi sur les langues officielles du N.-B. Il veut plutôt voir la province assurer un minimum de services en langue française dans les régions francophones et abandonner toutes ses autres responsabilités linguistiques. Pour arriver à ses fins, il n’hésite pas à propager des mythes et des faussetés.
Kris Austin au sein d’un comité sur les langues officielles, c’est l’Organisation des Nations unies qui permet à la Russie et à la Chine de siéger sur son Conseil des droits de l’Homme et à l’Iran de faire de même sur la Commission des droits de la femme. Honteux et disgracieux.
L’annonce de la nomination de M. Austin a vivement fait réagir. «Totalement dégueulasse», a tranché la Société de l’Acadie du N.-B. Un «gros doigt d’honneur» aux francophones, a décrété la chef libérale Susan Holt. «Un affront», a ajouté la ministre fédérale Ginette Petitpas-Taylor. «Cracher au visage du peuple acadien», a indiqué Jessica Savoie dans sa chronique dans l’Acadie Nouvelle. «Blaine Higgs, l’antifrancophone, se révèle dans toute sa splendeur», a analysé le rédacteur en chef du journal, Gaétan Chiasson, dans son infolettre envoyée le samedi aux abonnés.
Aucune de ces réactions n’est exagérée.
Blaine Higgs, cet ancien du parti antibilinguisme Confederation of Regions, se disqualifie chaque jour un peu plus du privilège de diriger le gouvernement. Nous l’invitons à cesser de nuire à la province qu’il dit aimer et à prendre sa retraite de la politique.
Évidemment, M. Higgs ne démissionnera pas parce qu’il est critiqué dans les médias francophones. Il a depuis longtemps perdu le sens des valeurs. On le voit dans sa décision de transformer en spectacle, lors du discours sur l’État de la province en janvier, l’annonce de sa décision concernant son avenir politique. Il a par ailleurs l’appui de son conseil des ministres, de son caucus et d’une majorité de membres du Parti progressiste-conservateur, y compris les francophones.
Notre déception est grande de voir les ministres Daniel Allain et Réjean Savoie défendre la participation de Kris Austin à ce comité sur les langues officielles. Ne voient-ils pas qu’ils participent à une mascarade? Ne comprennent-ils pas que les dés sont pipés et que Blaine Higgs les traite comme s’ils étaient des Acadiens de service?
Blaine Higgs n’a pas besoin de Kris Austin pour s’assurer d’avoir «des points de vue différents». Il partage déjà les mêmes idées que son collègue et aura de toute façon le dernier mot sur les conclusions de son comité ministériel.
Gouverner le Nouveau-Brunswick, ce n’est pas seulement un travail de comptabilité. Le succès ou l’échec ne se mesure pas selon l’ampleur du surplus budgétaire. C’est aussi travailler à rassembler anglophones, francophones et Autochtones. Blaine Higgs fait exactement le contraire. Il exacerbe les conflits linguistiques et identitaires.
Blaine Higgs n’est pas un premier ministre. Il n’est pas un rassembleur. Il est un diviseur. Sa place n’est pas au sommet de l’échiquier politique de la province. Le plus vite il s’en rendra compte, le mieux le Nouveau-Brunswick s’en portera.