Au lendemain du dévoilement du dépassement de la cible en immigration francophone, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) se dit «satisfaite» en entrevue, par la voix de sa présidente, Liane Roy.
En 2003, Stéphane Dion, ancien ministre responsable des Langues officielles au début des années 2000, avait établi la cible d’immigrants francophones en dehors du Québec à 4,4 % pour 2008. Celle-ci avait été atteinte puis dépassée pour la première fois par le gouvernement fédéral en 2023.
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Changement de volonté
Pour Liane Roy, le dépassement récent de la cible s’explique à la fois par un changement dans la volonté politique du gouvernement, un changement de culture gouvernementale, ainsi qu’une meilleure prise en compte des revendications de la FCFA à ce sujet.

Liane Roy se dit confiante quant à l’atteinte de la cible de 10 % d’ici deux ans, mais la FCFA pousse encore pour atteindre un objectif de 12 %, ce qui permettrait de rétablir le poids démographique des francophones hors Québec.
«Ils ont compris qu’il faut mettre des mesures en place. Et qu’on ne peut pas faire du recrutement francophone dans nos régions comme on en fait pour l’immigration en général», ajoute la présidente.
Liane Roy salue ici les Programmes pilotes annoncés par le gouvernement fédéral en 2024, qui disposent d’une «lentille francophone» selon la FCFA, ainsi que l’annonce toute récente de 909 000 $ sur quatre ans pour répondre au besoin de main-d’œuvre dans le Nord de l’Ontario, en liant des réfugiés et des travailleurs qualifiés avec des employeurs locaux.
Si elle reconnait que le travail se poursuit «sur une bonne voie», la FCFA pousse encore pour que le Canada atteigne 12 % d’immigrants francophones en dehors du Québec afin de rétablir le poids démographique des francophones de 1971, qui était de 6,1%.
«C’est inscrit dans la Loi [sur les langues officielles, NDLR] maintenant», rappelle Liane Roy.

Marc Miller a annoncé une série de mesures en faveur de l’immigration francophone hors Québec depuis l’atteinte de la toute première cible de 4,4 %, en janvier 2024.
«Le problème, c’est la rétention»
Pourtant, le ministre fédéral d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), Marc Miller, avait affirmé en novembre à Francopresse qu’une cible de 10 % serait «trop demander» à son ministère, justifiant que l’immigration n’est pas l’unique solution pour rétablir le poids démographique des francophones hors Québec.
«Atteindre les 10% d’immigration francophone n’est pas un problème en soi,. En revanche, le problème, c’est la rétention, c’est de s’assurer que les immigrants [francophones] ont des emplois, des ressources. On veut qu’ils soient bien soutenus, affirme la directrice des communications du bureau du ministre Miller, Aïssa Diop, en entrevue avec Francopresse.
IRCC veut s’assurer que les francophones qui s’installent au Canada aient des ressources pour ensuite augmenter les cibles «au fur et à mesure», souligne encore Aïssa Diop.
Du côté des conservateurs, le député québécois chef de file en matière de Langues officielles, Joël Godin, assure que «c’est un pas», mais «pas la solution magique pour faire en sorte de stopper le déclin français au Canada».
«Si on réduit les cibles [générales en immigration], mais qu’on augmente le pourcentage de francophones hors Québec, celui-ci va diminuer. C’est probablement de la poudre aux yeux pour mettre la table pour une prochaine campagne électorale.»
Les cibles en immigration francophones
Dans son Plan des niveaux d’immigration 2025-2027, le gouvernement fédéral a relevé les cibles en immigration francophone tout en réduisant celles de l’immigration totale.
Les cibles en admissions de résidents permanents d’expression française ont été fixées à 8,5 % en 2025; 9,5 % en 2026 et 10 % en 2027.
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Services en français : «On ne peut pas les financer tous»
Au pays, plus de 250 points de service d’établissement offrent des services en français – parfois partiellement – pour les nouveaux arrivants dans les régions à majorité anglophone.
Les communications du ministre rappellent qu’au pays, «IRCC prévoit d’investir environ 1,2 milliard de dollars pour répondre aux besoins des nouveaux arrivants en matière d’établissement hors Québec».
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Ce financement vise toutefois les services francophones et anglophones. Le chiffre dédié aux francophones hors Québec uniquement n’a pas été communiqué à Francopresse avant de publier cet article.
Par ailleurs, malgré l’assurance d’IRCC concernant sa volonté de fournir des ressources pour accueillir et retenir les immigrants francophones, certains points de services francophones ont essuyé des refus de financement de la part du ministère.
«On a beaucoup de demandes de la part des services d’établissement, répond le bureau du ministre. Il faut qu’on soit honnêtes avec les gens pour dire qu’on va financer des services d’établissement, mais on ne peut pas les financer tous. C’est une question de l’offre présente dans la région.»
L’attachée de presse du ministre Miller assure que, si dans une même région, il y a deux points qui offrent le même type de services en français, il faut faire un choix entre les deux.
De son côté, Liane Roy répond prudemment que l’essentiel est «d’avoir les services adéquats».