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le Samedi 25 juin 2022 13:00 Actualité

Les Trappistes vivent en paix depuis 120 ans à Rogersville

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Notre-Dame du Calvaire est une communauté fondée en 1902 à Rogersville.  — Acadie Nouvelle : Mario Tardif
Notre-Dame du Calvaire est une communauté fondée en 1902 à Rogersville.
Acadie Nouvelle : Mario Tardif
IJL - RÉSEAU.PRESSE - ACADIE NOUVELLE - Un silence paisible règne au monastère de Rogersville, au Nouveau-Brunswick. Depuis 120 ans, des moines trappistes y vivent en chants et en prières, loin des tumultes urbains.
Les Trappistes vivent en paix depuis 120 ans à Rogersville
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Notre-Dame du Calvaire est une communauté de moines fondée en 1902 et établie à 100 kilomètres au nord de Moncton. Les Trappistes appartiennent à la grande famille cistercienne. Les monastères cisterciens sont avant tout des hauts lieux de prière.

Habillés de leur grand scapulaire, ils étaient quatre à chanter des louanges lors de la prière de 14 h, lundi, à la chapelle de leur monastère à Rogersville. En fait, la communauté compte présentement six moines.

Toujours fidèles au rendez-vous année après année, sept jours sur sept, chaque matin, chacun des six moines se lève vers 3 h 20 pour prendre part aux vigiles à 3 h 40 à la chapelle, suivies de la prière de contemplation d’environ 30 minutes.

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Viennent ensuite le déjeuner, un temps libre pour la lecture divine et les laudes à 6 h 20.

La liturgie est l’une des composantes importantes de la vie monastique. Le moine fait beaucoup de lecture au quotidien.

La messe du jour a lieu à 8 h. Dès 9 h, les moines sont prêts à entreprendre leurs occupations quotidiennes. Parmi celles-ci, un s’occupe du poulailler, un autre est responsable de la comptabilité. Il y a un père qui s’active dans la cuisine et le quatrième voit à l’hôtellerie et à l’accueil.
À 11 h, c’est l’heure de la lecture jusqu’à la prière de la sixième heure du jour appelée Sexte à 11 h 40.

Le père Innocent Ugyeh, responsable du monastère de Rogersville

Mario Tardif — Acadie Nouvelle

Le diner se déroule à partir de midi et est suivi par la prière de 14 h à la chapelle. Les moines retournent ensuite à leurs occupations jusqu’aux vêpres à 17 h 15, suivies d’une prière en silence, et du souper à 18 h.

La journée est complétée par la prière du soir, les complies, à 19 h 40 et qui précèdent le coucher des moines.

«À compter de 20 h, on est prêts à dormir dans le grand silence», exprime le père Innocent Ugyeh. Il est responsable du monastère de Rogersville depuis quatre ans.

«Il y a des gens de l’extérieur qui viennent passer du temps avec nous, prier avec nous pendant quelques jours», explique le père Innocent. Ce sont des évêques, des prêtres, des religieux ou religieuses, ainsi que des laïcs ou monsieur et madame tout le monde.

Le monastère peut accueillir ou héberger jusqu’à 17 visiteurs. Ils viennent parfois de loin, entre autres de l’Ontario ou même des États-Unis, pour se ressourcer ou vivre dans la solitude et le silence.

«Le silence, c’est une valeur très importante pour le moine», affirme le père Innocent.

En fait, les monastères des Trappistes et Trappistines de Rogersville sont les seuls, soit Trappiste ou Bénédictin, dans les provinces atlantiques.

Le père Innocent Ugyeh confie qu’il a toujours voulu devenir moine. Originaire du Nigeria, il est arrivé au Canada en 2008 alors qu’à l’époque le monastère comptait 11 moines. Il se considère encore comme étudiant du français, même s’il a parlé uniquement dans la langue de Molière pendant les 25 minutes de l’entretien.

«C’est parce que j’aime le français, confesse-t-il. Au monastère, c’est le silence. On n’a pas souvent l’occasion de parler, mais je parle quand même. Mes discours sont en français, de même que mes prédications pendant la messe. Les gens apprécient ça», mentionne-t-il.

Lorsqu’il est entré chez les Trappistes au Nigeria en 1987, il ne pensait jamais qu’il serait appelé un jour à venir au Canada, et à diriger un monastère de surcroit. «Non! absolument non!», exprime-t-il en riant.

À 55 ans, le père Innocent est le plus jeune du monastère.

Pourquoi le nom Trappiste?

Au 17e siècle, une réforme importante a assuré une place dans l’histoire pour l’abbaye de la Trappe en France. Par la suite, les moines issus de cette réforme portaient le nom de Trappistes, sous lequel ils sont encore connus.

60 ans de vie monastique

Le père Bède Stockill est pour sa part entré au monastère en 1962 alors qu’il avait 19 ans. Malgré son problème de mobilité, il travaille à la réception de l’abbaye de Rogersville.

«Je fais un peu de lessive commune, chaque semaine. Je lave les habits. Je suis aussi sacristain», ajoute-t-il.

Le Trappiste de 79 ans est originaire de l’Angleterre.

«Depuis ma jeunesse, j’avais l’idée de devenir prêtre. Je suis allé au petit séminaire et après deux ou trois ans, l’idée m’est venue de devenir moine», admet-il.

Cela représente aujourd’hui 60 ans de vie monastique, et il n’a jamais regretté son choix.

«J’ai quand même eu des difficultés. De toute façon, je suis encore là», dit celui qui a précédé le père Innocent en tant que responsable de la maison.

Il y a quelques décennies, les autorités de la communauté avaient besoin d’un supérieur à l’abbaye de Rogersville.

«J’avais travaillé pendant cinq ans comme secrétaire dans l’administration générale de la centrale de l’ordre. C’est moi qui organisais les chapitres régionaux que nous avons tous les trois ans. J’ai fait ça pendant une vingtaine d’années et j’étais connu de toutes les abbayes de l’ordre, spécialement des abbayes du Canada. Alors ils ont suggéré mon nom. C’est comme ça que je suis venu ici», explique le père Bède.

À ce moment-là, il ne savait pas où se trouvait le Nouveau-Brunswick.

À 75 ans, le supérieur de la communauté a présenté sa démission.

«J’avais déjà des problèmes de santé», avoue le père Bède. C’est ainsi qu’il a été remplacé par le père Innocent.

Dans les années 1960, il y a déjà eu 24 moines à l’abbaye de Rogersville. Ce n’est plus un secret pour personne que les nouvelles vocations se font rares. Comment l’expliquer?

«Je n’ai aucune idée, indique le père Bède. Tout ce qu’on peut dire, en général, c’est que le monde actuellement n’aime pas la religion. Les gens ne pensent pas à la religion. Ils n’ont pas de place dans leur vie pour ça. Ils n’en voient pas la pertinence», exprime-t-il.

Il remarque l’absence de jeunes dans les églises. «Si les jeunes ne vont pas à l’église, ils ne vont pas penser à une vocation religieuse ou sacerdotale», fait-il remarquer.

Il croit que la popularité de la religion est actuellement dans le creux de la vague, mais qu’un jour, elle finira par remonter.