Depuis 1945, on compte plus d’une centaine de guerres, conflits civils armés, révolutions, putschs et autres guérillas qui ont causé des millions de morts. C’est sans compter les famines, déplacements de population, incarcérations et autres atteintes aux droits de la personne occasionnés par ces guerres.
Autrement dit, nous, les babyboumeurs «Peace and Love», avons radicalement fait mentir notre fameux leitmotiv. Et en ce qui concerne la guerre, les générations suivantes ne sont pas mieux.
Nous en avons même profité! Il y a bien sûr les marchands d’armes qui ont vendu leurs engins de mort à qui mieux mieux, mais il y a aussi tous les chercheurs, journalistes et artistes qui ont écrit, filmé et beaucoup travesti l’horreur — ou la gloire, c’est selon — de ces Corée, Vietnam, Israël-Palestine, Balkans, Chili, Iran-Irak, Afghanistan et j’en passe. Et nous, les autres, en sommes plutôt divertis.
Une seule de ces guerres nous a révoltés : le Vietnam. Mais nous avions deux excuses ; des Nord-Américains y mourraient et nous étions jeunes et naïfs. Assez naïfs, en tout cas, pour croire que la fin de la Guerre du Vietnam marquerait la fin de la guerre dans le monde.
Quant aux autres conflits, ben ça passe à la télévision, c’est loin et ça ne nous touche plus. Pourtant, ça touche notre humanité.
J’en entends déjà qui disent : «Mais voyons, nous Canadiens avons quand même inventé les Casques bleus, la fameuse force de dissuasion et de paix de l’ONU!». Oui, et c’est tout à l’honneur de notre ambassadeur à l’ONU de l’époque, et futur premier ministre, (1963-68), Lester B. Pearson. Mais aujourd’hui, nous sommes forcés de constater que les Casques bleus, c’est mort au Rwanda. Parlez-en au général Roméo Dallaire.
Si je soulève cette question aujourd’hui, c’est bien sûr parce que nous célébrons, avec raison, l’anniversaire de la fin d’une guerre. Mais c’est aussi parce que, dans le monde actuel, nous ne sommes toujours pas à l’abri de cette calamité.
Quand vous entendez les discours va-t-en-guerre économiques de Donald Trump ; quand les médias vous rapportent les désirs d’hégémonie planétaire de Xi Jinping ; quand vous voyez la perversité politique de Vladimir Poutine, vous ne vous inquiétez pas? Moi, si.
Certains diront que ce ne sont que paroles, qu’une petite guéguerre économique entre deux grandes gueules. Ben oui, mais n’oubliez pas que toutes les guerres sont une question d’argent sous une forme ou une autre.
Alors, soyons vigilants. Nous qui vivons en démocratie avons au moins le privilège de voter et de choisir nos dirigeants. Lors de prochaines élections, la paix dans le monde ne sera certainement pas un enjeu. Elle ne l’est jamais… sauf peut-être au Jour de l’an. Pendant les 364 autres jours, c’est à nous de rappeler les millions de morts depuis 1945 et de faire réfléchir nos dirigeants sur cette question de vie ou de mort.
Vous direz peut-être que je suis alarmiste. Nous en reparlerons dans 10-20 ans.
* Titre du premier roman de Roch Carrier paru en 1968.