le Dimanche 11 mai 2025
le Vendredi 8 novembre 2019 15:19 Actualité

Semences du patrimoine : l’homme qui plantait des semences

Pourquoi faire confiance à Francopresse.
  Photo : Roxanne Lormand, avec l’autorisation du journal Agricom
Photo : Roxanne Lormand, avec l’autorisation du journal Agricom
Vous vous souvenez de L’homme qui plantait des arbres? Dans ce magnifique film d’animation de Frédéric Back, tiré du récit de l’écrivain français Jean Giono, un homme, Elzéard Bouffier, plante, dans une terre aride, des semences. Il les avait auparavant précieusement triées et gardées. Elles donneront des chênes. Un organisme canadien, Semences du patrimoine, a compris le message d’Elzéard.
Semences du patrimoine : l’homme qui plantait des semences
00:00 00:00

Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le 20e siècle aura vu disparaitre environ 75 % des ressources phytogénétiques. Dans son document Produire plus avec moins, la FAO décrit ces ressources — c’est-à-dire la diversité des plantes cultivées et des plantes sauvages — comme jouant «un rôle central dans le développement de l’agriculture et de l’amélioration des aliments». Les gènes qui proviennent de variétés plus traditionnelles permettent d’avoir des plantes plus résistantes aux insectes par exemple.

Sentant venir ce déclin génétique, il y a 38 ans, des jardiniers canadiens «ont décidé de prendre action et de sauvegarder le plus de variétés possible, en les rendant disponibles aux autres via un réseau pancanadien», explique Lyne Bellemare, la coordonnatrice du volet francophone de l’organisme Semences du patrimoine.

Depuis, des jardiniers amateurs, des producteurs de semences, des chercheurs, des agriculteurs, bref des passionnés «provenant d’un bout à l’autre du pays» protègent «la biodiversité des semences du Canada en les cultivant et en les partageant avec d’autres», comme l’explique le site de Semences du patrimoine.

En début d’année, l’organisme publie un catalogue contenant une multitude de légumes, de fruits, de fleurs, de fines herbes, et de céréales. Plus de 2 000 variétés! Et selon Semences du patrimoine «un tiers de ces variétés n’est disponible dans aucune compagnie nord-américaine.»

L’un des objectifs de l’organisation est donc de rendre accessibles les semences patrimoniales. Il ne s’agit pas de vendre, il s’agit d’échanger.

Vous avez dit patrimonial?

Mais au fait, qu’est-ce qui détermine qu’une semence est patrimoniale par rapport à une autre qui ne l’est pas? La réponse de Lyne Bellemare est particulièrement éclairante. «Une variété de légumes patrimoniale est premièrement une variété à pollinisation libre. C’est-à-dire qu’elle est reproductible et sans brevet. Pour les semences anciennes, ou patrimoniales, on s’entend en général pour dire que ce sont des semences de 50 ans ou plus. Elles ont donc été cultivées par une famille ou par un agriculteur qui a conservé ses propres graines pendant 50 ans et plus.»

Il y a fort à parier que des semences typiques à l’Ontario voire aux agriculteurs franco-ontariens se retrouvent dans le catalogue, selon Mme Bellemare. Car autrefois, «chaque région développait ses variétés adaptées au biotope local, au sol, aux maladies et aux gouts des habitants!»

Le patrimoine contre Monsanto

Si, à priori, Semences du patrimoine n’est pas vraiment destiné aux grands producteurs maraichers en raison des petites quantités échangées entre les membres, peut-on tout de même se demander si les semences patrimoniales sont plus résistantes aux maladies que celles vendues par des multinationales comme Monsanto? «La réponse est dans la question», affirme sans ambages la coordonnatrice francophone. «Si l’on prend une variété et qu’on la reproduit année après année, elle acquerra une résistance et s’habituera aux conditions de culture, toujours dans une certaine limite.»

En protégeant ainsi les semences du terroir grâce à son vaste réseau, Lyne Bellemare estime que Semences du patrimoine répond à un besoin essentiel en agriculture : «une semence doit être accessible et cultivée selon nous pour se garder en vie.»

Consultez le site du journal Agricom