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le Mercredi 6 février 2019 19:00 Actualité

Création d’une Assemblée nationale acadienne : La Société nationale de l’Acadie n’embarque pas

Pourquoi faire confiance à Francopresse.
Daniel LeBlanc est l’instigateur et le gestionnaire de Nation Prospère Acadie, la société sans but lucratif responsable du projet d’Assemblée nationale acadienne.  — Photo : avec l’autorisation de Daniel LeBlanc
Daniel LeBlanc est l’instigateur et le gestionnaire de Nation Prospère Acadie, la société sans but lucratif responsable du projet d’Assemblée nationale acadienne.
Photo : avec l’autorisation de Daniel LeBlanc
Francopresse. Un nouvel organisme réveille le projet d’autonomie acadienne dans l’Atlantique. Mais la Société nationale de l’Acadie, fondée en 1881 pour défendre les droits, ne voit pas la nécessité de créer une telle assemblée nationale.
Création d’une Assemblée nationale acadienne : La Société nationale de l’Acadie n’embarque pas
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Alors que le déclin du mouvement souverainiste se confirme au Québec, un nouvel organisme réveille le projet d’autonomie acadienne dans l’Atlantique. Il se donne deux ans pour définir la gouvernance d’une Assemblée nationale acadienne (ANA) et pour consulter la population. Mais selon la Société nationale de l’Acadie, fondée en 1881, il n’y a pas d’appétit pour cette démarche.

« C’est une initiative qu’on va suivre de près, estime la présidente de la Société nationale de l’Acadie (SNA), Louise Imbeault. Que des gens choisissent d’examiner une autre proposition, c’est tout à fait légitime, mais ça ne correspond pas à une volonté des (huit) groupes qu’on représente (dans les quatre provinces). On a plus besoin de concertation qu’une autre structure. »

La réaction générale du leadeurship ne démonte pas Daniel LeBlanc, l’instigateur de Nation Prospère Acadie, la société sans but lucratif responsable du projet d’ANA. « C’est une démarche citoyenne et on a consulté les organismes. Ils ont des mandats assez remplis.

« Quand on est financé par les gouvernements, il y a des sensibilités lorsqu’on parle d’autonomie politique. On a conclu que c’était à l’avantage de tous de poursuivre avec une démarche parallèle. »

Inquiétudes par rapport au statuquo

Depuis les années 1970, les diverses tentatives pour définir un modèle de gouvernance acadienne n’ont pas abouti, note le porte-parole. « L’Acadie est en suspens depuis cette période, mais le sentiment national est encore là, soutient-il. Il y a des inquiétudes par rapport au statuquo. »

La démarche a été lancée avant les élections de l’automne dernier au Nouveau-Brunswick, marquées par la défaite d’un gouvernement dominé par des Acadiens. C’était bien avant la décision de Fredericton de couper le financement d’un évènement d’envergure prévu pour 2021 à Moncton/Dieppe.

À ce propos, Daniel LeBlanc cite les paroles de l’ancien ministre et ombudsman Bernard Richard, coprésident (avec l’avocat Pierre Foucher) de la Commission sur la gouvernance du nouvel organisme, lors de sa nomination. « Les Jeux de la Francophonie ont été proposés par les Acadiens et ce sont les anglophones qui ont décidé de les annuler. C’est l’exemple d’un manque. Peut-être que les Acadiens vont reconnaitre les limites de leur pouvoir. »

« Je n’ai pas vu de manque »

Louise Imbeault rétorque : « Je n’ai pas vu de manque quelque part. Les personnes engagées dans les structures acadiennes ont les mains pleines à faire avancer les dossiers. C’est la même chose pour la SNA, on est pleinement engagé dans l’avancement du peuple acadien. »

La présidente rappelle le mandat de concertation de la SNA pour les communautés acadiennes de l’Atlantique et le rôle des membres porte-parole, responsables de la représentation politique dans chacune des provinces.

« Nos membres s’occupent de parler à leurs gouvernements respectifs, étoffe-t-elle. Mais est-ce qu’on a besoin d’une autre association politique? Personne à ma connaissance dans les organismes n’a montré d’appétit pour ça. »

Louise Imbeault reconnait toutefois que l’idée d’un organisme plus politique revient périodiquement. « La base en a discuté, mais quand vient le moment de décider, ce n’est pas ce qui est retenu. »

Photo : compte Twitter SNA

Une équipe qui joue sur la défensive?

Daniel LeBlanc tire une tout autre conclusion. « Notre observation de la situation, c’est que l’Acadie joue défensivement. On est là pour défendre les droits et on a le droit d’aller en cour. Mais si je fais l’analogie avec le sport, on sait qu’une équipe ne gagne pas en jouant défensivement. Il faut aussi avoir un plan offensif.

« Notre démarche est de trouver une façon de prendre contrôle de la glace et de marquer des buts, avec des succès dans les régions. On veut faire ce projet en collaboration avec les Premières Nations et les communautés anglophones avec qui on partage le territoire. »

Il faut faire face à la réalité, selon lui. « Le mouvement souverainiste au Québec s’est essoufflé sans atteindre son but. Ce fut un combat qui a créé des divisions et la solution avancée est le bilinguisme. » La Loi sur les langues officielles n’aurait toutefois pas protégé les communautés minoritaires ni produit une société bilingue.

« Le constat est qu’il faut probablement aller chercher d’autres outils pour permettre aux Acadiens de s’épanouir. » Les fondateurs de l’ANA proposent une forme d’autonomie régionale.

Une recherche suivie d’États généraux

Daniel LeBlanc précise le projet : « Une administration acadienne disposerait de divers pouvoirs pour veiller aux intérêts propres du peuple acadien habitant le Canada atlantique, en matière d’aménagement du territoire, de développement économique régional, d’immigration, de culture ou de protection du patrimoine. »

Que veut le peuple? Le nouvel organisme a réuni un groupe de chercheurs pour alimenter la réflexion des commissions. Des consultations sont prévues en aout prochain au 6e Congrès mondial acadien.

La Commission de l’ANA ne sera pas seule à sonder les congressistes : la SNA sera également sur les lieux. « Que des chercheurs s’intéressent à cette réflexion, concède Louise Imbeault, c’est fort utile. Mais la SNA est déjà en train de le faire avec l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques. »

L’Institut situé à l’Université de Moncton aurait déjà entamé une étude sur l’état de la situation en vue d’un rapport en 2020. Cette recherche serait « probablement suivie d’États généraux, informe la présidente. Ça fait partie du plan d’action de la SNA. »

L’Acadie, qui c’est?

Selon l’ANA, l’Acadie est le foyer du peuple acadien au Canada atlantique, descendants des premiers colons européens à s’établir dans la région. Elle compte quelque 300 000 Acadiens sur environ 30 000 km2 et une importante diaspora. L’Acadie comprend le nord et l’est du Nouveau-Brunswick, des régions de l’Île-du-Prince-Édouard et de la Nouvelle-Écosse ainsi qu’une communauté à Terre-Neuve-et-Labrado.

La réaction de Frédérick Dion de l’Association francophone des municipalités du Nouveau-Brunswick

« Au moment où, plus que jamais, il est important d’être vigilant et de se serrer les coudes, une partie de l’élite acadienne rêvasse à un nouveau/vieux projet recyclé de gouvernance politique de la ‘Grande Acadie’. Misère. L’art de diviser nos forces et d’épuiser nos maigres ressources. On est bon là-d’dans par moments. » Source : compte Twitter de Frédérikc Dion, 1er février

La Commission de l’ANA, c’est qui?

Outre deux membres du Bureau de direction de l’organisme, l’avocat Michel Cyr et l’ancien sous-ministre Roger Doucet, les participants aux travaux sont les sociologues Michelle Landry et Mathieu Wade, le politicologue Christophe Traisnel, l’historien Léon Thériault, l’avocat Réjean Aucoin et la chroniqueuse Rosella Melanson.

L’adhésion de la chroniqueuse Rosella Melanson

« Qui n’a pas besoin de réfléchir tranquillement à des moments donnés, surtout lorsqu’on ne vit pas le grand bonheur parfait? J’appuie les organismes nationaux que nous avons, et ce n’est pas un commentaire sur leur pertinence. Le travail de l’Assemblée pourrait être utile à tous, pour alimenter notre conception de l’Acadie et nos options. »