« Enfin, une bonne nouvelle! » sommes-nous tentés de crier à tous les vents. Depuis quelques semaines, les médias communautaires peuvent envisager des jours meilleurs. Patrimoine canadien financera des stages dans les journaux et radios en situation linguistique minoritaire.
Il s’agit d’un répit longtemps attendu dans toutes les communautés francophones du pays.
Il faut bien l’admettre, c’est un ciel d’automne depuis plusieurs années.
Il y a un an CKRP, la radio de Falher/Rivière-la-paix en Alberta quittait les ondes. D’autres en arrachaient et en arrachent encore comme on le dit familièrement : Plamondon, toujours en Alberta, Gravelbourg en Saskatchewan, Yellowknife dans les Territoires du Nord-Ouest, Iqaluit au Nunavut et Penetanguishene en Ontario. Quelques-unes vivent aussi dans la misère en Nouvelle-Écosse.
On peine aussi à boucler les fins de mois dans les journaux. Le papier et l’impression coutent toujours aussi cher tandis que le gouvernement fédéral n’achète presque plus de publicité.
En septembre 2015, L’Express d’Orléans à Ottawa abandonnait son édition papier. On se demandait alors si ce n’était pas le début d’une triste tendance. On a eu la réponse 16 mois plus tard. L’Express a quitté internet en janvier 2017.
C’était huit mois après l’annonce de la nouvelle politique fédérale sur les communications avec le public.
La bête noire des médias
Rien ne portait sur l’achat de publicité auprès des médias communautaires. Le fédéral comptait désormais se servir davantage des médias sociaux et du web. La bête noire des médias communautaires allait donc grossir.
Deux commissaires aux langues officielles (à Ottawa et à Toronto) ont fait enquête à ce sujet. Rien n’avait débouché sur un engagement sérieux des gouvernements en faveur de ces médias en difficulté.
Le 28 septembre 2017, la ministre de Patrimoine canadien, Mélanie Joly, présentait sa politique sur le Canada créatif. Le fédéral ne soutiendrait plus de « modèles qui ne sont pas viables pour l’industrie », avait-elle annoncé.
Il est difficile pour un média francophone en situation minoritaire d’être un « modèle viable pour l’industrie ». Il répond néanmoins à un mandat, soit celui de contribuer à l’épanouissement et au développement de sa communauté en plus de servir la démocratie.
Au hasard de mes déplacements, je me suis retrouvé à l’antenne des radios communautaires de Penetanguishene et de Yellowknife. Aussi, j’ai lu Le Franco à Edmonton puis Le Gaboteur à Terre-Neuve.
J’étais en poste à CBKF, la radio de Radio-Canada en Saskatchewan. Des journaux lancés sans trop de manières trainaient sur une table : Globe and Mail, Star Phoenix, Leader Pos ». Les titres s’étalaient en anglais… Et puis tout à coup, je tombe sur un mot français qui dépassait : « vive ». Je sors le journal de l’empilade. Il avait beau être plus modeste que les autres en taille, il était le plus significatif de tous. Je venais de découvrir L’Eau vive.
L’ouvrir, c’était voir les mots de ma culture fleurir dans l’immensité des plus grandes plaines et sous le plus grand ciel qu’il m’avait été donné de voir.
Tout en français, loin du Québec. Du concret.
Un premier pas
Les médias communautaires auront désormais de nouveaux moyens pour assurer cette présence.
L’Association de la presse francophone est heureuse de ce nouveau programme fédéral, comme en témoigne son président, Francis Sonier. « Les médias communautaires doivent regarder vers l’avenir et nous savons que la formation de la relève est un élément clé pour assurer la vitalité de l’information locale dans toutes les régions du pays. »
À l’information s’ajoute un autre enjeu, la présence de la langue française partout au Canada. C’est un rayon de soleil qui jaillit d’un journal, d’une page web ou de la radio, tel un abri contre un ciel gris de novembre, où que l’on soit dans le pays, ses forêts, ses montagnes, ses plaines ou ses océans. Souhaitons que ça dure longtemps.