Les organismes montent au créneau
Le Système national d’alertes au public (SNAP) est censé prévenir tous les Canadiens, dans les deux langues officielles du pays, en cas d’incendie, catastrophe naturelle, menace biologique, crise civile, ou autre danger imminent. Pourtant, en Saskatchewan par exemple, seul l’en-tête du message était en français et en anglais. Le reste, en anglais.
La situation est intolérable pour l’Assemblée communautaire fransaskoise qui a demandé un correctif. « Certaines régions comptent jusqu’à 40 % de francophones, dont beaucoup d’unilingues, souligne Marc Masson, directeur des communications. Ça pose un problème de sécurité publique ».
L’Assemblée ne compte pas en rester là. Une lettre sera envoyée au ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, et le dossier sera porté en juin devant la députée Nadine Wilson, responsable des Affaires francophones de la Saskatchewan.
De son côté, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) a reçu plusieurs messages de francophones contrariés, et a créé un sondage sur les médias sociaux pour analyser la situation : « Nous avons reçu 146 réponses en une journée. Près de la moitié disaient avoir reçu le message seulement en anglais, surtout à Terre-Neuve-et-Labrador, en Nouvelle-Écosse, dans les quatre provinces de l’Ouest, et à Toronto », informe Serge Quinty, directeur des communications de l’organisme de représentation.
Dans un communiqué officiel, le président de la FCFA, Jean Johnson, parle même de « citoyens de seconde classe » pour désigner les francophones qui n’ont pas été prévenus dans leur langue maternelle. « Avec des urgences comme les feux de forêt qu’on a connus à Fort McMurray il y a deux ans, c’est inacceptable », complète Serge Quinty.
À qui la faute?
De nombreux partenaires sont impliqués dans le système d’alerte. D’abord, il y a les institutions fédérales avec Sécurité publique Canada et le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), ce qui engage des « obligations linguistiques fédérales » selon la FCFA. « Le CRTC a pour rôle d’exiger que les radiodiffuseurs se dotent de la technologie nécessaire pour pouvoir participer au Système et d’assurer une surveillance », avance Serge Quinty.
S’ajoutent les administrations provinciales et territoriales qui doivent désigner les autorités municipales compétentes. Puis, la société Pelmorex, propriétaire de MétéoMédia, est responsable de la transmission des alertes aux opérateurs de cellulaire qui à leur tour entrent en jeu dans la chaîne. « Il y a beaucoup de gens impliqués, ça peut peut-être expliquer les disparités », soupçonne Serge Quinty.
Car outre le problème de la langue, c’est l’accessibilité de manière générale qui fait défaut. « Sur quatre personnes au bureau ici avec le même fournisseur, une seule a reçu le message, constate Serge Quinty. Y a de quoi se gratter la tête ».
Le 14 mai en Ontario, une alerte Amber a elle aussi montré ses limites. « Le message a été reçu en anglais d’abord avec trois premiers mots de la version française sans possibilité de voir la suite. Puis, 30 minutes plus tard, le message en français est arrivé, relativement mal traduit », déplore Serge Quinty.
Alors que la FCFA encourage vivement les francophones qui ont reçu des messages unilingues à déposer une plainte au Commissariat aux langues officielles, 13 plaintes ont déjà été enregistrées depuis le 9 mai, « et elles sont toutes recevables », confirme le Commissariat.