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le Samedi 20 août 2022 7:30 Politique

Première juge autochtone et premier banc bilingue à la Cour suprême

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  Patrick Woodbury
Patrick Woodbury
FRANCOPRESSE — La juge Michelle O’Bonsawin sera la première juge autochtone à la Cour suprême du Canada. Justin Trudeau a annoncé le 19 aout la nomination de cette Franco-Ontarienne, rendant le banc des neuf juges complètement bilingue pour la première fois de l’Histoire. Michel Doucet, avocat acadien et spécialiste des droits linguistiques, se réjouit tout en demeurant vigilant.
Première juge autochtone et premier banc bilingue à la Cour suprême
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La juge Michelle O’Bonsawin, membre abénakise de la Première Nation d’Odanak, remplacera le juge unilingue anglophone Michael J. Moldaver, qui prendra sa retraite en décembre 2022. Elle siège actuellement à la Cour supérieure de justice de l’Ontario à Ottawa depuis 2017.

Sa nomination répond aux attentes des peuples autochtones du Canada, mais aussi à celles de la communauté francophone. Les neuf juges de la Cour suprême, dont quatre femmes, seront désormais tous bilingues.

La décision du premier ministre devra être approuvée par le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes lors d’une audience spéciale le 24 aout.

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Francopresse : Quelle est votre réaction à la nomination de la juge Michelle O’Bonsawin à la Cour suprême du Canada ?

Michel Doucet : Je me réjouis pour la communauté autochtone et pour la communauté francophone. Avec cette nomination, le premier ministre maintient la promesse de juges bilingues à la Cour suprême tout en démontrant la possibilité de trouver une personne autochtone bilingue.

Ce sera la première fois qu’une juge autochtone siègera à la Cour suprême du Canada et la première fois que le banc de juges bilingues sera complet.

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Pourquoi était-ce important de nommer une juge bilingue ?

C’est très important qu’à la Cour suprême du Canada, les juges soient en mesure de comprendre les deux langues officielles pour interpréter les lois du gouvernement fédéral et vérifier les deux versions [en anglais et en français], qui ont la même autorité.

Michel Doucet, avocat acadien au Nouveau-Brunswick.

Courtoisie

Ils doivent aussi être en mesure de comprendre directement les arguments des avocats dans leur langue officielle. À la Cour suprême d’un pays officiellement bilingue comme le Canada, c’est essentiel que les juges respectent la constitutionnalité de ces deux langues.

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Le projet de loi C-13 mentionne le bilinguisme des juges à la Cour suprême, mais vous préconisez de modifier en plus la Loi sur la Cour suprême pour que le bilinguisme des juges devienne une obligation. Pourquoi ?

La nomination de la juge O’Bonsawin ne change rien sur plan juridique. Ça démontre que le premier ministre actuel a respecté sa promesse, mais ça ne lie ni lui ni d’autres premiers ministres dans le futur pour assurer que les juges de la Cour suprême soient bilingues.

Si on établit le bilinguisme de ces juges juste dans la modification de la Loi sur les langues officielles, on ne règle le problème qu’en partie.

Le projet de loi C-13 porté par la ministre Ginette Petitpas Taylor modifie l’article 16 de la Loi sur les langues officielles en exigeant qu’il s’applique à la Cour suprême du Canada.

Cela consacrerait le droit d’être entendu dans la langue officielle de son choix sans service d’interprétation, mais ne constitue pas en soi une obligation pour le gouvernement fédéral de nommer des juges bilingues.

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À la Cour suprême, il y a neuf juges, mais rien n’empêche la Cour de siéger à moins, cinq juges par exemple.

Dans le cas où nous avons cinq juges bilingues et quatre juges unilingues anglophones, si ce sont les cinq juges bilingues, ça respecterait le projet de loi C-13. Mais pas si l’un des juges unilingues fait partie des cinq juges ; ce ne serait pas un traitement égal pour les francophones.

Si on veut s’assurer que les deux communautés soient égales, modifier la Loi sur la Cour suprême exigerait du processus de nomination des juges qu’ils soient bilingues.

Je sais qu’il y a peut-être de la résistance de la part de la ministre [des Langues officielles] Ginette Petitpas Taylor à ce niveau, mais si on peut assurer à l’avenir que tous les juges qui sont nommés à la Cour suprême du Canada respectent l’obligation de connaitre les deux langues, il faudra faire les deux modifications.

Inès Lombardo

Correspondante parlementaire

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