Le Parti libéral du Canada (PLC), qui a sécurisé un quatrième mandat le 28 avril, envoie à Ottawa 168 députés avec Mark Carney comme premier ministre. La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) attend avec impatience son discours du trône, qui énonce les objectifs du gouvernement.

Liane Roy (au centre) se dit sereine face au gouvernement libéral élu. Elle retrouve des alliés de longue date, comme Ginette Petitpas Taylor (à droite), mais regrette certains élus qui ont perdu leurs sièges, comme Niki Ashton (Nouveau Parti démocratique) et Marc Serré (Parti libéral).
«On va surveiller le discours du trône pour confirmer les intentions du gouvernement en matière de francophonie, de langues officielles», explique la présidente de la FCFA, Liane Roy.
Au début de la campagne électorale, Mme Roy avait l’impression que les partis politiques «se servaient» de la francophonie pour distinguer le Canada des États-Unis, mais sans expliquer comment ils comptaient la renforcer.
«Au fur et à mesure que la campagne a évolué, on a vu [les enjeux francophones] dans les plateformes, les différents débats, mais surtout le débat sur les enjeux de la francophonie canadienne», raconte-t-elle. «On a ajouté de la chair.»
«Bouger vite»
«Dans son discours de victoire, Mark Carney a dit qu’il voulait que les choses bougent vite, rappelle Liane Roy. Ça tombe bien, nous aussi on a des choses qu’on veut qui bougent vite.»
En commençant par la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles (LLO) qui, modernisée en 2023, n’a toujours pas de règlements pour préciser sa mise en application. Viennent ensuite la réduction des barrières à la main-d’œuvre bilingue, la nomination du nouveau commissaire aux langues officielles et celle d’un ministre des Langues officielles.
Tant qu’un ministre porte les Langues officielles dans son titre, la FCFA dit qu’elle sera contente. L’Association des communautés francophones de l’Alberta (ACFA) va plus loin dans son communiqué de presse du lendemain d’élection, exigeant la nomination d’un ministre «dont le seul mandat sera celui des langues officielles». Le PLC n’a toujours pas promis qu’un tel ministre serait nommé.
Dans sa plateforme électorale, le parti s’est notamment engagé à fixer la cible d’immigration francophone hors Québec à 12 % pour 2029 et à moderniser et augmenter de 150 millions de dollars le financement CBC/Radio-Canada.
Il a aussi promis de faciliter l’accès aux travailleurs bilingues pour les entrepreneurs des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
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Des attentes dans l’Ouest
L’ACFA a félicité Mark Carney pour sa victoire dans un communiqué de presse le 29 avril et a immédiatement dressé la liste de ses attentes.
«Nous sommes prêts à collaborer avec le gouvernement pour mettre en œuvre des actions concrètes et rapides afin que la Loi sur les langues officielles, modernisée il y a près de deux ans, soit pleinement mise en œuvre», écrit sa présidente, Nathalie Lachance.
L’organisme attend aussi la nomination du prochain commissaire aux langues officielles et espère que ce gouvernement, dont le premier ministre a passé beaucoup de temps en Alberta, «reconnaisse les défis particuliers rencontrés dans l’Ouest canadien».
Du côté des jeunes
En plus de demander un ministre des Langues officielles, la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF) demande la création d’un ministère de la Jeunesse, une possibilité qui n’a pas été évoquée par le PLC pendant la campagne, regrette le président de l’organisme, Simon Thériault.

«Il y a de nombreux alliés dans les gens qui ont été élus de tous les côtés du gouvernement et de l’opposition», dit Simon Thériault.
«On entend souvent que les jeunes ne s’intéressent pas à la politique, mais nous ce qu’on sent, c’est que les partis politiques ne s’intéressent pas à nous, lâche-t-il. Dans les derniers 10 ans, avec le gouvernement libéral, on a travaillé fort pour justement mettre de l’avant les priorités de la jeunesse. On va continuer ça avec ce nouveau gouvernement.»
De nombreux gains ont été effectués cette dernière décennie, estime Simon Thériault, qui cite l’adoption de la Politique jeunesse du Canada et un rapport sur l’état de la jeunesse auquel a participé la FJCF.
Lors de cette campagne électorale, l’organisme a surtout voulu mettre de l’avant les enjeux liés à l’économie, au logement et au postsecondaire francophone en milieu minoritaire, explique son président.
Il demandait notamment la création d’un incitatif économique pour les études postsecondaires en français. Dans sa plateforme, le PLC s’est engagé à créer une bourse pour les étudiants francophones d’établissements postsecondaires francophones hors Québec.
«Il faudrait évidemment qu’on regarde les détails de cette bourse, commente M. Thériault. Une promesse que j’ai remarquée, c’est au niveau des bourses d’études pour les métiers.» Cette subvention prévue n’est pas spécifique aux jeunes francophones, mais Simon Thériault pense qu’elle les aidera tout de même.
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du point de vue de la francophonie canadienne.

Marie-Christine Morin parle d’un «retard historique» dans le financement des arts et de la culture francophones.
Arts et culture
Dans un communiqué postélectoral, la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF) appelle, entre autres, le gouvernement à investir davantage en arts et en culture en français, à travailler sur la découvrabilité du contenu francophone et à mieux protéger les artistes et travailleurs culturels en leur facilitant l’accès au filet social.
Les libéraux ont promis d’augmenter le financement d’agences comme le Conseil des Arts du Canada, Téléfilm, le Fonds des médias du Canada et l’Office national du film.
«On s’attend à des actions musclées du côté de la langue française, de la promotion et de la protection de la langue française», affirmait quelques jours avant le scrutin la directrice générale de la FCCF, Marie-Christine Morin.
Car, pour elle, «une chose est certaine : sur la question de la langue française, il y a définitivement un déclin; il y a définitivement une urgence d’agir».
La question de la souveraineté canadienne soulevée pendant la campagne interpelle non seulement la francophonie, mais aussi le milieu culturel dans son ensemble, poursuit Mme Morin.
Selon elle, le financement fédéral du milieu culturel et artistique franco-canadien reste insuffisant par rapport aux besoins : «Il y a un retard historique.»
Pour justifier l’intérêt purement économique de financer les arts et la culture francophones, elle rappelle que ce secteur a généré environ 5,8 milliards de dollars au PIB de l’économie canadienne en 2022, selon une analyse d’impact effectuée pour la FCCF par la firme de recherche Hill Strategies.
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