Au fil de ce documentaire, le public parcourt les quais à la rencontre de six femmes capitaines inspirantes en compagnie de Marilyn Gauvin, une jeune pêcheuse de Lamèque, au nord-est du Nouveau-Brunswick, qui aspire à prendre la barre d’un bateau de pêche.
Avec ses personnages attachants et ses images prenantes, ce film illustre bien qu’il n’est pas nécessaire d’être un homme pour devenir capitaine d’un tel bateau.
J’aime 100 fois mieux faire ma petite pêche que d’être enfermée dans un bureau.

Le départ à la pêche depuis le quai de Petit-Shippagan, au Nouveau-Brunswick.
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Des pionnières à plus d’un égard
Si de plus en plus de femmes sont membres d’équipage, encore très peu choisissent de devenir maitres à bord. Depuis 2003, seulement 18 femmes ont suivi le cours de capitaine à l’École des pêches de Caraquet, au Nouveau-Brunswick.
Le film donne la parole à des capitaines de la Péninsule acadienne, dont l’une des pionnières dans son domaine, la crabière Odile Gauvin-Mallet.
Celle qui a connu des débuts difficiles pour faire sa place dans un monde d’hommes a transmis sa passion à sa fille Jolène Mallet, nouvellement capitaine d’un homardier.
La plupart de ces pêcheuses sont aussi des mères de famille.
Le cinéaste s’est rendu jusqu’à Lunenburg, en Nouvelle-Écosse, afin d’y rencontrer Gail Atkinson qui dirige le seul équipage entièrement féminin au Canada.
«Je voulais absolument filmer sur un bateau où c’était que des femmes pour voir comment l’ambiance est différente, admet Phil Comeau. Et comme on voit dans le film, c’est beaucoup plus relax, plus amusant, plus agréable. Les femmes ont l’air d’avoir beaucoup de plaisir.»
Les femmes capitaines «s’occupent aussi plus de leur équipe d’un point de vue humain», remarque le réalisateur.
Par exemple, Gail Atkinson remet un pourcentage des revenus aux membres de son équipage, ce qui est assez avant-gardiste dans l’industrie, mentionne le réalisateur.
La capitaine de Lunenburg raconte que, lorsqu’elle était jeune, ce métier n’était pas possible pour elle. Aujourd’hui, elle ne veut pas simplement gagner sa vie de la pêche, elle veut être la meilleure.
Genèse du documentaire
Le film nous transporte sur les bateaux de pêche où l’on voit ces femmes à l’œuvre. Elles ont toutes leur propre façon de fonctionner, note le cinéaste, ouvrant ainsi un monde de possibilités.
Phil Comeau raconte que le tournage a été assez laborieux à cause de la pandémie, du report de l’ouverture de la pêche et d’un évènement tragique survenu en cours de production.
Le tournage de 20 jours s’est déroulé en quatre temps au printemps, à l’été et à l’automne de 2021.
L’idée originale du projet est venue du producteur Jean-Claude Bellefeuille. Un premier scénario avait été écrit par Jacques Hamelin.

Marilyn Gauvin pêche avec son père, Ernest Chiasson, dans le documentaire Femmes capitaines de Phil Comeau.
La rencontre de Phil Comeau avec Marilyn Gauvin a été déterminante dans la suite des choses. Il tenait à réaliser ce film avec la jeune femme, qui mène sa propre quête.
«Je pense qu’elle [Marilyn] va inspirer aussi beaucoup d’autres jeunes femmes à vouloir se lancer dans l’industrie de la pêche. Aussi celles qui rêvent de devenir capitaines vont voir que c’est possible», croit le réalisateur.
D’ailleurs, à la suite du tournage, la jeune femme de Lamèque s’est inscrite à l’École des pêches pour suivre son cours de capitaine à l’automne prochain.
Tournage en mer
Phil Comeau a une feuille de route bien garnie. Il a déjà réalisé une centaine d’œuvres pour le cinéma et la télévision. Or, filmer en mer comporte son lot de défis, admet le réalisateur.
Il a déjà tourné plusieurs films en mer. Il a notamment traversé l’Atlantique sur un grand voilier, depuis l’Afrique du Sud jusqu’en Amérique du Nord.
Selon lui, toute l’équipe doit avoir le pied marin.
Ce n’est pas évident parce que, le moindrement que c’est rough, il faut être solide. Il faut que la caméra soit solide. Il faut que Mario Paulin [caméraman] bouge avec les vagues, si on peut dire. C’est du sport
Il ajoute que, «sur les bateaux, il n’y a pas énormément d’espace. Donc il faut vraiment se faire petit pour arriver à trouver des angles intéressants.»
«On expérimente aussi avec des perches. On a évidemment un drone, ce qui nous permettait de voir un peu tout le tour du bateau, pas seulement l’intérieur. On a beaucoup expérimenté en terme technique pour arriver à avoir des prises inusitées», raconte-t-il.
«Les femmes peuvent tout faire»
Phil Comeau espère que ce film encouragera les femmes à devenir capitaines et à essayer de nouvelles choses si elles en ont envie.
«Les femmes peuvent tout faire. Il n’y a plus de carrières d’homme et de carrières de femmes», convient-il.
Le documentaire Femmes capitaines suscite déjà de belles réactions du public. La musique a été composée par Isabelle Cyr et Yves Marchand.