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le Vendredi 14 août 2020 14:49 Société

Les scribes de l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard

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Les scribes de l'Assemblée législative travaillent sous pression. — Brad Neathery - Unsplash
Les scribes de l'Assemblée législative travaillent sous pression.
Brad Neathery - Unsplash
Dans l’ombre des députés, les cinq employés du bureau du Hansard retranscrivent les centaines d’heures de débat de l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard. En pleine session, ils travaillent sans relâche.
Les scribes de l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard
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Au 180, rue Richmond, à Charlottetown, l’horloge tourne. Samantha Lilley, Cynthia MacLeod et Stephen Poirier n’ont que deux heures devant eux pour transcrire l’ensemble des échanges de la période des questions à l’Assemblée législative de l’Île-du-Prince-Édouard.

Le même scénario se répète chaque jour. «On va aussi vite que possible», explique Linda Henry, la gestionnaire du bureau du Hansard, du nom de ce département chargé de tout retranscrire par écrit. Tout doit être relu, édité et disponible en ligne à 16 h 30.

Retranscrire les discours de façon lisible

Le nom, «Hansard», provient du nom d’une famille qui a publié les débats du Parlement britannique de 1812 à 1888. À l’Î.-P.-É., c’est en face de l’Assemblée, dans l’édifice J. Angus MacLean, que se trouvent les employés de l’ombre. Alysha Campbell fait également partie de l’équipe. Présente en Chambre, elle a la responsabilité d’allumer et d’éteindre chaque micro et de noter, en temps réel, les débuts de chaque phrase qui est dite et qui les prononce. Cela aide grandement ses trois collègues qui ne voient rien et peuvent avoir de la difficulté à déterminer qui parle. Y a-t-il des députés plus difficiles que d’autres à comprendre? Certains noms sortent dans la conversation : Stephen Myers et Hannah Belle parlent vite ; d’autres ont des accents.

L’enjeu, c’est «de créer des phrases à partir de ce que dit quelqu’un, poursuit Samantha Lilley. Parfois, c’est dur de coller à ce qu’ils veulent dire». Les employés du Hansard ne peuvent pas modifier les discours, mais doivent les écrire dans une forme lisible et compréhensible. Ils tombent tous d’accord sur la complexité des comités, plus informels, où les députés commencent des phrases sans les finir, s’interrompent, disent autre chose.

Le principal défi, pour ces scribes des temps modernes, ce sont les recherches à effectuer en temps réel. «Pendant les discours de reconnaissance, il faut avoir les bons noms, parfois ça peut être difficile raconte Stephen Poirier. Ça peut être n’importe qui, il faut chercher dans les bonnes circonscriptions». «Il y a beaucoup de recherches aussi pour les comités, surtout les très spécialisés, comme sur la santé, ajoute Cynthia MacLeod.»

Laurent Rigaux

Améliorer la transparence

Le Hansard existe depuis 1996. Avant, seules les vidéos étaient disponibles pour qui voulait se plonger dans les archives législatives de la province. L’informatique est peu à peu venue faciliter le travail des employés. Aujourd’hui, tous les discours sont enregistrés automatiquement dans le système. «C’est pour le dossier public et permanent des débats. Ce sont nos archives, on garde ça pour toujours», explique Joey Jeffrey. Pour le greffier de l’Assemblée, «comme un CEO» sourit-il, l’intérêt est «d’améliorer la transparence.»

Samantha Lilley, Cynthia MacLeod et Stephen Poirier se partagent le travail en traitant chacun un bout de 10 minutes de la séance du jour. Ils peuvent mettre l’enregistrement en pause, revenir en arrière ou avancer à l’aide de pédales, sous leurs bureaux. «Ça me prend environ 25 minutes pour taper un bout de 10 minutes, estime Stephen Poirier. Cela dépend de la complexité et des recherches.»

La vitesse n’est cependant pas la première qualité requise. «On est surtout testés sur la grammaire et sur notre capacité à éditer des documents, à faire des recherches, à corriger des erreurs», complète Cynthia MacLeod. «C’est d’abord l’anglais, après la vitesse», abonde Stephen Poirier.

Depuis les années 1990, plusieurs améliorations sont venues faciliter le travail du Hansard. La dernière en date est le sous-titrage automatique, pour les personnes malentendantes. L’outil est aussi utilisé par les employés du Hansard. «Ce n’est pas très précis, parfois c’est plus facile de tout taper, mais moi, je préfère prendre le sous-titrage et le corriger», raconte Samantha Lilley.

Pas de nouveautés prévues cette année, si ce n’est de permettre le retour en Chambre du public. «On veut revenir à ça», confie Joey Jeffrey, pour qui les modifications dues à la COVID-19 constituent «le plus gros changement» à l’Assemblée cette année.