«L’éducation, ça a toujours été la chose la plus importante pour la francophonie albertaine», affirme Claudette Roy, présidente de la Société historique francophone de l’Alberta (SHFA).
Cette doyenne de la communauté connait le sujet sur le bout des doigts. Sa carrière de professeure d’études sociales, son engagement abouti pour la création et la gestion d’écoles francophones, ou encore sa participation à la création du curriculum scolaire de 2005, «qui intégra pour la première fois les perspectives francophones et autochtones», en font une experte.
Aujourd’hui à la retraite, Claudette est comme replongée dans le passé à la lecture des recommandations pour le futur curriculum scolaire, publié par CBC mercredi 21 octobre.
Ce qui est proposé maintenant est vraiment un recul.
Toutes ces batailles pour rien? Elle s’offusque que les Franco-Albertains ne soient pas mentionnés dans les recommandations du nouveau programme d’études sociales. Enfin oui, ils le sont, mais «comme un groupe folklorique».
«Ce n’est pas élaboré», clame-t-elle, tout en pointant du doigt certaines incohérences : «la fleur de lis, mais pas le drapeau franco-albertain ; Adam Dollard des Ormeaux, mais pas le père Lacombe». L’histoire qu’on veut dépeindre de la francophonie est basée sur le Québec, commente-t-elle, avant de rappeler que les francophones sont installés en Alberta depuis plus de 200 ans.

Majorités d’hier, minorités de demain
Les bâtisseurs francophones, souvent rattachés à l’Église catholique ou la Compagnie du Nord-Ouest, ne sont pas les seuls absents de ces recommandations. Les Premières Nations et Métis n’y sont que très peu mentionnées.
«On a l’impression que la place des autochtones est symbolique, mais pas contemporaine», dit Nathalie Kermoal, professeure à la faculté des études autochtones de l’Université de l’Alberta. En lisant le texte, la spécialiste a remarqué plusieurs paragraphes barrés. «Tous les aspects de l’attachement des cultures autochtones à la terre semblent avoir été rayés».
La professeure pointe également du doigt la pédagogie :
Surtout retenir des dates, comme si retenir des dates, ça permettait le sens de l’accomplissement.
Continuons la lecture avec elle. «On parle de ce qui est vrai, bon et beau, ça m’étonne un peu. Je pense que les jeunes sont capables d’intégrer beaucoup d’informations et de développer un esprit critique».
Enseigner l’histoire des écoles résidentielles, ça ne fait pas non plus partie du nouveau cursus proposé. Les auteurs du document jugent cela «trop triste pour de jeunes enfants». Nathalie Kermoal s’indigne :
Le fait de ne pas parler des réalités des pensionnats parce que c’est trop triste, alors qu’on parle de l’esclavage… On choisit le degré de tristesse, est-ce que c’est ça?
Pour elle, ce futur curriculum ne semble pas aller dans le sens des recommandations de la Commission de vérité et réconciliation.

Orienté
Pourquoi un nouveau curriculum? Ce projet répond à la réforme du curriculum qu’avait entrepris le gouvernement néodémocrate, contesté par le Parti conservateur uni. À son arrivée au pouvoir, le gouvernement de Jason Kenney avait mis sur arrêt le processus de changement de curriculum, avant d’annoncer un nouveau processus.
Carol Léonard, professeur spécialisé en Éducation au Campus Saint-Jean, avait participé à l’élaboration du curriculum qui devait être mis en place sous le précédent mandat. Il regrette qu’il n’ait jamais été appliqué. Il indique que des centaines de personnes, vivant aux quatre coins de la province, avaient travaillé sur ce dernier. Selon lui, le NPD «avait à l’esprit l’idée d’une contribution tous azimuts afin de tirer profit des avis les plus divers».
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