le Vendredi 31 mars 2023
le Jeudi 27 décembre 2018 19:00 Actualité

Rencontre avec l’auteure : Michèle Vinet Pour l’amour des mots

Michèle Vinet raconte d’où lui est venue sa passion de l’écriture. Photo : Corinne Viau
Le livre d’enfance de Michèle Vinet relate l’histoire d’une petite tortue nommée Patrovite.  — Photo : Corinne Viau
Michèle Vinet raconte d’où lui est venue sa passion de l’écriture. Photo : Corinne Viau Le livre d’enfance de Michèle Vinet relate l’histoire d’une petite tortue nommée Patrovite.
Photo : Corinne Viau
Francopresse. Assise confortablement dans un fauteuil, Michèle Vinet raconte ce qui l’a amenée à écrire, ce qui l’a tenaillé toute sa vie. L’Enfant-feu était une manière de raconter la quête de la passion qui l’animait.
Rencontre avec l’auteure : Michèle Vinet Pour l’amour des mots
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« Le nationalisme québécois, ça a été le vecteur qui a permis au français d’exister et de persister », déclarait le journaliste et romancière Denise Bombardier, sur le plateau de Tout le monde en parle, en octobre dernier. La réalité est tout autre, selon Michèle Vinet.

L’auteure originaire d’Ottawa a publié, il y a deux ans, un roman qui dépeint son cheminement vers l’écriture et dans lequel elle décrit sa passion des mots et ses racines bien franco-ontariennes.

Assise confortablement dans un fauteuil, dans sa résidence d’Ottawa, Michèle Vinet raconte ce qui l’a amenée à écrire, elle qui a voulu ce faire toute sa vie. L’enfant-feu était un prétexte pour raconter son amour des mots. « Les mots, c’est comme une forêt enchantée, dit-elle. Tu marches là-dedans et tu ne cesses jamais d’être ébloui. »

L’amour d’une vie

L’Enfant-feu a été sa façon d’exprimer ce qui la brûlait depuis l’enfance. À cinq ans déjà, elle savait que le français, c’était quelque chose de beau. À dix ans, tout est devenu plus clair. Michèle Vinet, clouée au lit, avait comme seul passe-temps la lecture. Et l’un de ses livres a été le déclencheur de sa passion. C’était l’histoire d’une petite tortue nommée Patrovite.

« Un jour, en lisant la couverture, je me suis rendue compte que Patrovite, ça voulait simplement dire « pas trop vite », mais qu’on avait écrasé des mots, qu’on avait enlevé des lettres, qu’on les avait changés et ça a été comme une découverte, une sorte de libération. Tout à coup, on pouvait contrôler les mots, leur faire faire des choses, leur faire raconter des choses. » C’était le début d’un amour fou pour les mots, un amour qui l’a poursuivie toute sa vie.

Michèle Vinet a toujours vécu dans un environnement où le français était minoritaire. Si elle s’exprime aisément en anglais, elle a choisi de publier ses trois premiers romans en français, en Ontario.

« En milieu minoritaire, tout ce qu’on avait à l’école, tout ce qu’on recevait, ça venait d’ailleurs. Ça ne venait pas du Canada, ça venait de la France. Ce qu’on lisait, ce n’était pas d’ici et une question me taraudait un petit peu. Comment ça se fait qu’il n’y a pas de livres en français ici? J’avais besoin de m’exprimer dans ma langue, dans mon pays, dans ma province, dans mon patelin, et puis il n’y avait rien. »

Le feu qui anime

Le feu est l’un des thèmes les plus présents dans le roman autobiographique de Michèle Vinet. Il représente sa passion, mais aussi la passion qui anime chaque être humain.

« Je crois que tout ce que l’on fait dans la vie, c’est brûler pour quelque chose. Et ceux qui n’ont pas le feu, je les plains. »

Mme Vinet va plus loin. « Quand on est alimenté d’un feu, d’une fougue quelconque, il faut poursuivre ce rêve-là. On peut la nommer comme on voudra, cette passion, mais il faut s’écouter. »

Son livre a par contre bien failli rester dans un tiroir. Michèle Vinet n’a pas écrit L’Enfant-feu en vue d’une publication. C’est l’un de ses amis qui l’a envoyé à une maison d’édition.

Julien, dans le roman, Joël dans la réalité, a tout de même failli ne pas lire le manuscrit de sa bonne amie. « À un moment donné, il m’a tordu le bras. « Laisse-moi donc lire ça. » Jamais de la vie », avait répondu Michèle Vinet. « Ça reflète un peu ce milieu francophone dont on parlait tout à l’heure. On n’est pas à la hauteur, on est une minorité, on n’a presque pas de place. Alors, laisser lire mon travail à un prof d’université, ah bien non par exemple! »

Son travail cherchait simplement à contenter son enfant intérieur. « Je voulais être fidèle à la petite fille de 10 ans qui avait découvert Patrovite et qui s’était promis, à ce moment-là, de faire quelque chose avec les mots, de les séparer, de les tourner à l’envers, de les remettre ensemble, d’en créer d’autres, d’en inventer. »