le Lundi 5 juin 2023
le Dimanche 18 novembre 2018 19:00 Actualité

Pas de flamme olympique pour Calgary

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Calgary n’accueillera pas les Jeux olympiques d’hiver de 2026.  — Crédit : Calgary 2026
Calgary n’accueillera pas les Jeux olympiques d’hiver de 2026.
Crédit : Calgary 2026
Francopresse. Le choix des Calgariens est tombé : ils ne veulent pas des Jeux olympiques d’hiver en 2026. Choix logique pour certains, occasion manquée pour d’autres. La francophonie locale n’a jamais été consultée pendant le processus.
Pas de flamme olympique pour Calgary
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Le choix des Calgariens est tombé : ils ne veulent pas des Jeux olympiques d’hiver en 2026. Choix logique pour certains, occasion manquée pour d’autres, cette décision aura un impact. Notamment sur la francophonie locale qui n’a jamais été consultée pendant le processus.

Le référendum a eu lieu le 13 novembre à Calgary, en Alberta. La question était simple : « Êtes-vous pour ou êtes-vous contre l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques d’hiver de 2026? » Parmi les quelque 305 000 votants, 56 % ont opté pour le « non ».

Les 171 000 personnes opposées à la tenue des Jeux pointent du doigt leurs coûts faramineux : plus de 5 milliards de dollars auraient été nécessaires. La ville de Calgary aurait contribué à hauteur de 390 millions, la province aurait donné 700 millions et le fédéral 1,45 milliard. La majorité des votants a refusé d’appuyer ce qu’elle considère comme un événement déficitaire, associé à une hausse des taxes. Un luxe que les Calgariens n’étaient pas prêts à s’offrir.

Bâtir sur l’expérience des Jeux de 1988

Ville hôte en 1988 des Jeux d’hiver, Calgary a hérité de nombreuses installations sportives qui auraient bénéficié d’un rajeunissement évalué à 500 millions de dollars. Deux nouveaux sites sportifs, un stade intérieur et une patinoire de 5000 places étaient également prévus.

Pour les partisans du « oui », cette expérience passée constituait un socle favorable pour faire de l’événement une réussite. « Il y a beaucoup de fausses rumeurs sur les Jeux olympiques, commente Christina Smith, championne de bobsleigh ayant participé aux Jeux d’hiver de Salt Lake City en 2002. Calgary en 1988 a été l’une des premières villes hôtes à gagner de l’argent. Nous avons appris à tirer profit de cet événement. » En outre, elle note que la rénovation des installations sportives aurait profité aux personnes à mobilité réduite puisque les Jeux paralympiques faisaient partie du lot.

Une occasion manquée?

L’olympienne, ambassadrice pour la campagne Yes Calgary 2026, est très déçue. « C’était une opportunité incroyable. Le résultat fait mal au cœur. Les gens qui ont voté “non” n’ont pas de vision, ils ne voient pas l’effet que ça aurait eu sur le futur de notre ville », avance-t-elle.

L’ancienne sportive souligne la perte de terrain favorable dont auraient bénéficié les athlètes locaux. « On a l’avantage quand on est dans sa propre région, avec son peuple, ses fans, sa famille, tout son soutien, et même sa température. C’est l’avantage de concourir à domicile et on a perdu cet avantage. »

Christina Smith avait pourtant œuvré pour partager son enthousiasme avec la population de Calgary. « Les Jeux permettent de mobiliser l’énergie d’un peuple, de créer une aura pour la ville. Ça aide aussi à unifier et célébrer les diverses cultures présentes. 

Les francophones pas consultés

En parlant de diversité, si la population a été consultée par voie de référendum, aucune attention n’a été portée envers la communauté franco-albertaine. « La commission de Calgary 2026 ne nous a jamais approchés, note Céline Dumay, directrice générale de la Fédération du sport francophone de l’Alberta. On est tout petits pour eux. »

Avec les Jeux, des athlètes de tous horizons auraient élu domicile à Calgary pour un temps, dont des francophones. « On aurait essayé d’avoir une présence pour parler de la francophonie albertaine et de nos athlètes francophones », confie la responsable.

Suzanne de Courville Nicol, présidente du Bureau de visibilité de Calgary, est plus amère. Si d’après elle les Jeux offraient une belle visibilité à la ville, elle déplore le manque de consultation : « On a consulté les gens d’affaires, les anglophones, les autochtones, mais pas un mot avec les organismes francophones. »

La Calgarienne se souvient comment, en 1988, l’engagement des deux chefs de file de la francophonie albertaine Denis Tardif et Roger Lalonde avait été déterminant dans l’inclusion des francophones. « C’est grâce à eux notamment que l’on a ces pancartes de bienvenue bilingues à l’entrée de la ville », note-t-elle. Un contraste flagrant avec 2018 : « Ça me dépasse qu’il n’y ait personne qui nous ait invités à la table, c’est regrettable. C’est un manque de respect pour les francophones. »

Pour le directeur général de la Cité des Rocheuses, point de repère pour la francophonie de Calgary, le résultat est regrettable, mais compréhensible. « Beaucoup de votants ont réfléchi sur l’intérêt d’investir de telles sommes pour une aura internationale si éphémère », analyse Hervé Stéclebout. D’autant plus que l’impact sur les taxes n’était pas négligeable : « J’ai entendu des analyses donner une fourchette entre 2000 et 11 000 dollars d’augmentation par foyer. On est tous conscients de l’opportunité de faire rayonner Calgary, mais à quel prix? »

En plus de l’absence de consultation, Suzanne de Courville Nicol constate que sa salle de vote n’était pas munie d’un service en français, alors même que des pancartes se targuaient de proposer 6 à 7 langues. « C’est toujours l’éternel problème, rejoint Hervé Stéclebout. On trouve un service en punjabi ou en mandarin, mais pas en français. Je trouve ça indécent. »

La flamme olympique semble bel et bien éteinte pour Calgary. Car la province, cofinanceur important du projet, avait prévenu qu’elle se retirerait en cas de victoire du « non ». Il reste donc deux candidats en lice pour accueillir les Jeux olympiques d’hiver de 2026 : Stockholm en Suède et Milan/Cortina d’Ampezzo en Italie. La ville hôte sera choisie d’ici juin 2019.